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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
De l'intérêt des bouées.


J'ai attaqué bille en tête The Visitants, grisé par les belles critiques d'Idil@Bookycooky et de Pat@Patsales .
Ce livre me faisait top envie :
Un écrivain australien quasi-inconnu, un livre publié en 1979 mais se situant dans les îles Trobiand en 1959, des voix papoues audibles depuis l'indépendance en 1975, un récit de mythes, de coutumes et de colonisation. C'est tout fait mon truc.
La couverture, magnifique avec son bel oiseau, est la marque de fabrique des éditions Au Vent Des îles (que j'aime beaucoup). La couverture, donc, n'attendait que d'être tournée par mes doigts fébriles mais précautionneux. Je tenais là une pépite, comme on dit aujourd'hui dans les billets-coups de coeur.
J'ai longuement caressé le papier de ces pages, à la texture si agréable.
Je tourne la première et c'est les dithyrambes de huit critiques qui m'accueillent avec « Un roman brillant et ambitieux » ou « un art de la narration à son plus haut niveau » et encore « En le relisant, quarante-trois ans après, The Visitants résonne plus neuf que jamais » etc;
Miam miam !

J'ai relu quatre ou cinq fois l'introduction intitulée « Ils apportent leurs quelques choses » signée par une certaine Drusilla Modjeska.
Disons-le tout net, une fois qu'on a compris ce dont il s'agit, remis un peu les choses en ordre, on s'aperçoit, un brin interloqué, que cette brave dame vient de nous raconter tout le livre, absolument tout le livre, résumé du début à la fin.
L'action ( enfin, façon de parler) se déroule sur une île périphérique de l'archipel des Trobiand, en Papouasie alors australienne où Randolph Stow a séjourné : Kailuana.
La note de la traductrice me laisse perplexe. Je la relis aussi plusieurs fois.
La Papouasie-Nouvelle Guinée est l'état le plus linguistiquement diversifiés au monde avec 851 langues connues.
« Nous avons en règle générale respecté la syntaxe et l'orthographe voulues par Randolph Stow pour rendre les prises de paroles des personnages en langue kiriwina.
Nous avons néanmoins consulté l'écrivain papou Russell Soaba pour vérifications et conseils. Concernant la prononciation du kiriwina, les voyelles se prononcent comme en italien et les consonnes comme en français.
Les groupes vocaliques ai, oi, au sont des diphtongues qui se prononcent aï, oï, aou. L'apostrophe placée entre deux voyelles (ex: a'i) indique qu'il faut les prononcer séparément (a-i) et non pas les fondre comme dans une diphtongue (ai) (ex: Naibusi/Tobeba'i). L'accent tonique tombe presque toujours sur l'avant-dernière syllabe.
Pour une approche de la complexité de la langue kiriwina, tant sur le plan syntaxique que conceptuel, et afin de rendre au mieux en français l'anglais métissé de kiriwina que nous donne à entendre l'auteur, nous avons consulté les ouvrages universitaires suivants: The making of the Kiriwina to English dictionary de Ralph Stanley Lawton (thèse de doctorat, Australian National Uni-versity, 2012) et les dictionnaires ¤££¤30De Ralph Stanley Lawton21¤££¤ et ¤££¤15De Ralph Stanley Lawton10¤££¤ anthropologue Edwin Hutchins . »


Nous voilà armés pour affronter ce roman polyphonique. Après un autre prologue qui dévoile qui sont The Visitants, on nous présente les cinq personnages auxquels on va donner la parole : deux blancs et trois papous. le personnage principal n'est qu'évoqué à la troisième personne. Il s'agit d'Alistair Cawdor, l'officier australien au triste sort. Autre légère singularité, aucun des personnages n'est appelé par son nom mais par des surnoms selon leur nationalité et la langue du locuteur. Cawdor devient par exemple Misa Kodo mais bon, c'est en fait un peu plus compliqué que cela.
Je lis une soixantaine de pages, m'arrête, vais boire un coup et les relis intégralement. Rien compris, je n'ai rien compris.
Il en faut beaucoup plus pour m'arrêter. J'ai lu Joyce et ce norvégien qui ne met aucune ponctuation pendant des milliers de pages (non, je frime , je n'ai pas encore lu Jon Fosse…). Donc je reprends en mode semi-méditatif. le roman n'est pas si long. Je vois que certaines phrases sont à peine traduites genre « Mon chagrin pour toi »…
Miracle, en quelques phrases tout s'éclaircit et nonobstant la difficulté à identifier certains protagonistes, je commence à cheminer à bonne allure.
Je fais le tour de l'île et je fais des tours en bateau. Je crois même, mais ce n'est pas si clair, être allé dans une autre île.

Mais, me direz-vous avec à propos, de quoi et de qui parle-t-on dans ce roman australo-papoue ? Alors en gros :
Un vieux planteur blanc s'est installé dans l'île au début du XXe siècle, il est entouré et servi par quelques locaux dont l'étonnante Salina, qui dégage une forte charge érotique. Il pleut tout le temps.
Des officiers et élèves officiers s'installent pour recenser et déterminer l'impôt.
Comme dans une tragédie shakespearienne hybridée au « Problème à trois corps », le sort de Cawdor est scellé. L'effet syncrétique du culte du Cargo, du christianisme et de l'atterrissage d'un OVNI donne à cette civilisation perdue et figée une formidable occasion sacrificielle.
Je ne sais pas ce qu'est réellement la morale de l'histoire, ni même si cela a de l'importance, ni même si elle existe : retour à la matrice originelle grâce à de grands orgies incestueuses; incommunicabilité entre hommes, familles, clans et peuples; tragédie des colonisations australes malgré de supposées transitions douces; prévalence des mythes sur la modernité…ou l'inverse ?

Je remercie infiniment la traductrice Nadine Gassie qui a du s'arracher quelques cheveux.
C'est grâce à elle que la lumière surgit parfois, lorsque les pluies tropicales s'arrêtent enfin, pour laisser respirer le ciel, ce ciel violet, baroque, couleur de mangue. .
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Mon avis se casse un peu les dents sur celui-là. Je ne peux pas dire que j'ai aimé… pas plus que je n'ai pas aimé. Je me sens déstabilisée. Une fois refermé, c'est le genre de roman dont les multiples messages continuent d'infuser et dont la profondeur se dévoile. Qui sont les « visitants » : les Blancs, les hommes des étoiles, les démons au fond de nous ?

Je ne peux que saluer la construction chorale, le papou qui se mêle à l'écriture pour une immersion très réussie et tout ce que ce livre véhicule de la presque-fin de l'ère coloniale. Six voix principales se renvoient la balle comme de rapides échanges de ping-pong. le propriétaire d'une plantation, sa jeune domestique, un interprète, un prince-héritier papou et deux officiers du gouvernement australien. Il faut s'accrocher pour démêler les sentiments troubles de chacun et voir se construire la fin funeste… L'atmosphère moite, angoissante et légèrement surnaturelle nous colle à la peau. Mais ça vaut le coup d'aller au bout !
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