La
Petite joueuse racontée par
Céline Straniero dans son premier roman, c'est Brune. Brune a une vingtaine d'années, elle vit à Paris, fait des études, du baby-sitting avec une gamine de 10 ans dont elle est la copine, quand elle devrait être autoritaire. Brune est le type même de la fille qui se laisse porter, et avec avec Alice, elle est servie. Alice est arrogante, sûre d'elle, aime ridiculiser les gens qui l'entourent, surtout les filles. Pourtant, elle est amie avec Brune, peut-être parce qu'elle la sait fascinée, douce, un peu effacée. Alice a aussi un petit ami Marc, qui aime observer leur amitié de filles. Alice a une passion, voler comme une pie dans les grands magasins. Et elle décide d'entrainer Brune, dans une idée dingue, faire le casse du siècle en recrutant une troisième complice, Celia.
Petite joueuse a du charme. Joli sujet, jolie écriture, jolis personnages. Pourtant, il y a quelque chose de bancal dans ce court roman qui tient avant tout à l'écriture. On a comme l'impression que
Céline Straniero a écrit une grosse partie de son livre en écriture automatique, qu'elle aime à se précipiter et surtout ne rien approfondir ; elle compose des tableaux, de charmantes images, mais une intrigue, des personnages ? C'est plus incertain. A peine a-t-elle effleuré une idée qu'elle passe à une autre, elle n'approfondit rien, passe du coq à l'âne.
Céline Straniero écrit aussi des chansons ce qui explique peut-être sa façon de chercher plus que tout le rythme, la musicalité et ce côté-là c'est réussi. Mais tenir sur ce rythme pendant 140 pages est parfois pénible. Les personnages sont souvent réduits à des silhouettes - Marc par exemple est inodore, incolore et impalpable - même la narratrice qui n'existe que par son attachement à Alice cette fille qu'elle aime et “dont le mal coule de source“. L'intrusion de Celia - notez les initiales des prénoms des filles du roman qui sonnent comme une équation - n'arrive même pas à se mettre entre Brune et Alice, tout au plus, elle exacerbe leurs dissemblances. Mais lesquelles finalement? Car à force de ne rien approfondir, difficile de percevoir qui sont ces deux filles ; le lecteur a la sensation de se trouver dans un rêve dont les contours sont flous, les visages incertains et les paysages jamais identifiés. On a beau savoir que ça se passe à Paris, on a beau lire le nom de certains grands magasins et avenues, on est paumé. Un premier roman est souvent un galop d'essai. Ici cela a été semble-il le seul puisque quinze ans plus tard,
Céline Straniero n'a publié aucun autre livre.