Lorsqu’on était connu pour être le petit-fils d’un rabbin de Strasbourg, on a beau être le fils d’un héros de la Grande Guerre et le neveu d’un juge respecté, avoir abandonné la carpe farcie au profit de la choucroute, apprécié Proust davantage que Martin Buber, chanté que mourir pour la patrie est le sort le plus beau, il n’en reste pas moins que chaque minute apporte son lot de dangers.
Les filles étaient sélectionnées autant pour leurs bonnes manières et leur discrétion que pour l’imagination dont elles devaient faire preuve.
C’était quand même raide, cette histoire. On est peu de chose, tout de même. Ça le conforta dans son idée qu’il valait mieux se trouver près du pot de fer que du pot de terre.
L’amour. Comment osait-elle prononcer ce mot qui, s’il était entendu, la mettrait aussitôt au ban de cette société qu’elle haïssait parce que, tels les empereurs romains, elle pouvait décider d’un simple geste de la vie ou de la mort. Peut-être pas la vraie mort, mais la mort sociale, qui peut vous laisser plus seul et démuni que le pire indigent.
On évoqua la politique, dont en réalité on dit peu de chose, ne sachant pas qui était devant soi, et habitué depuis toujours à cacher pour qui l’on votait. Et de toute façon, ça intéresse qui ?
Walter écoutait sans entendre. Il ne s’éveilla que lorsque le médecin l’interrogea sur l’opportunité de placer son argent dans la pierre, les biens mobiliers, ou toute autre affaire.
Nous disions que la jeunesse est un état précaire auquel il ne faut pas s’habituer. Excepté bien sûr pour les jolies femmes.
Ses six années d’analyse lui avaient seulement fait comprendre que si on ne peut accepter l’inadmissible, il faut néanmoins vivre avec.
Il la trouvait belle, avec sa fresque murale aux teintes passées, où l’on voyait un couple élégant contempler d’une pergola un paysage méditerranéen. La femme surtout lui plaisait. Longue, mince, avec une robe blanche et légère qui tournait autour d’elle.