An de grâce 1317. Dans un misérable village plongé dans la blanche neige, Florie vit une existence peu facile, seule avec sa soeur Bérengère, méprisée par la populace pour sa rousseur éclatante. de plus, elle a des pouvoirs magiques, ce qui n'arrange pas des masses. le sort s'acharne davantage sur elle quand Bérengère est enlevée par le baron Thibaud pour jouir du droit de cuissage le jour de ses noces Mais Florie ne compte pas laisser sa soeur subir d'immondes sévices et part avec son amant Garin le bûcheron à ses trousses pour la délivrer, aidée par sa redoutable sorcellerie, affrontant de multiples épreuves dans leur quête...
J'avoue avoir été alléchée par la couverture, le titre frappant, l'image de cette rousse déployant ses dons surnaturels sous fond de couleurs sombres... et en lisant la 4eme de couverture, je me suis dit pourquoi pas si c'était bien raconté. Sauf que ça ne l'est pas.
Dès la première page j'ai du mal : depuis quand c'est une femme seule qui part chasser dans les bois en plein hiver ? Dans l'époque médiévale, c'est certainement pas son job et quand bien même elle le pouvait, certainement pas une maigrichonne sans rien pour se défendre et se couvrir ! On saisit vite qu'on aura droit aux énièmes clichés du Moyen-Age obscur, crasseux et sordide et effectivement c'est le cas, avec notamment cette histoire de droit de cuissage qui dans la réalité n' a jamais eu lieu (du moins en France) et viendrait d'une déformation de la coutume dit du cullage qui est loin d'être porté sur la fesse en se renseignant, plutôt un impôt que récolte le seigneur pour l'autorisation de se marier au paysan qui le demande et qu'on a même droit à l'Inquisition brûlant des sorcières alors qu'il faut attendre la fin du XVeme siècle pour que cette sinistre pratique s'y développe. Autant dire que niveau pertinence historique, c'est vite jeté aux oubliettes mais on est là dans un récit mâtiné de fantasy. Mais cette caricature va de pair avec les personnages qui ne sont pas franchement fouillés, souvent classiques et pathétiques, notamment Garin qui ne m'a pas plus marquée que ça. Quant à l'héroine, si elle peut convaincre par sa détermination inébranlable et son courage, elle peut aussi vite lasser par son coté sévère et surtout qu'elle soit souvent cible des agressions sexuelles qu'elle subit à longueur de route avec son corps très disproportionné tout droit sortie des fantasmes de films érotiques.
Effectivement la bd balance de la violence à tout bout de champ, de la brutalité gratuite avec des passages gores rappelant des moments du cinéma horrifique. Et surtout du sexe à foison, avec des allusions constantes et des scènes d'outrages bien détaillés à tel point que ça en devient désagréable. Bien sûr que le viol et les attaques sexuels peuvent être des moteurs dans un récit mais quand c'en est trop, la coupe est pleine.
Et que de lourdeur dans l'histoire ! Entre les scènes d'actions désordonnés et les dialogues déplorables, avec des commentaires souvent inutiles de Florie, on frôle l'indigestion. Lourdeur aussi de la grossiéreté récurrente qu'emploie une bonne partie des hommes dans l'intrigue souvent réduits à des brutes ne pensant qu'à trousser les dames.
Quant aux dessins, ils ne sont pas mauvais je dois dire, ils ne sont certes pas exceptionnels du tout avec souvent des traits parfois brouillons mais les couleurs sont vives , alternant joliment entre le froid et le chaud, et le style est foisonnant, gorgé de détails. Mais ce ne sont pas non plus des images du maître
Olivier Ledroit (Requiem Chevalier Vampire, Wika et Chroniques de la Lune Noire), de
Philippe Delaby (Murena) ou encore Timothée
Montaigne (Le Prince de la nuit). D'autres parts, si je dénigre les dialogues, ils respectent quand même le vocabulaire médiéval qui n'est pas utilisé juste pour faire moyennageux, dommage que le récit peu construit et les clichés qui vont alentours les désservent.
Donc j'ai très moyennement apprécié ce premier tome, ce tape à l'oeil sanguinolent et érotique sous fond d'une époque caricaturée me rend perplexe, mais je serais intéréssée à la limite de voir si la suite cela s'améliore, bien que je ne pense pas aller au delà du tome 2 voire 3. A voir donc, même si Mortepierre n'est clairement pas une BD que je conseillerais à lire ni que je retiendrais dans ma mémoire.