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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Troisième titre de Olga Tokarczuk, « Récits Ultimes » traduit par Grazyna Erhard (2007, Noir sur Blanc, 254 p.) et trois récits successifs de trois femmes. Ida qui vient d'avoir un accident de voiture, Paraskewia, dite Parka, sa mère, Ukrainienne exilée en Pologne, et Maya la petite fille, qui est en Malaise avec son fils de onze ans. Donc trois chapitres « Blanche contrée », « Paraskewia. La Parque » et « L'illusionniste ». le second titre du second chapitre indique bien qu'il s'agit d'une reprise des Parques. Ces trois-là sont évidemment Clotho, Lachésis et Atropos, celle qui file, celle qui tire au sort, et celle qui coupe.
« Blanche contrée » c'est la description d'une campagne et d'une route enneigées, avec des virages. L'un d'entre eux est fatal à la petite auto de Ida, « une petite Honda métallisée ». La route est celle de Klodzko, et elle vient de dépasser un carrefour qui indique les villages de Bardo et Bozkow. On peut donc situer sur une carte l'endroit réel de l'accident. On retrouve la ville de Klodzko dans « Sur les ossements des morts » (2012, Noir sur Blanc, 302 p.), près de la frontière tchèque, à 100 km au sud de Wroclaw. Par chance, elle n'est pas loin d'un village où elle se fait recueillir par un couple de personnes âgées, et deux chiens. Elle va y rester quelques jours, peu à même de récupérer de son accident, bien qu'elle n'ait pas eu de lésion sérieuse. Ida, 54 ans, guide pour les touristes de Varsovie. Les souvenirs reviennent, « elle se voit telle qu'elle était à l'âge de treize ans, dans sa robe de cretonne avec des coquelicots, robe qui, une fois usée jusqu'à la corde, a servi à sa mère à faire des chiffons ». On le voit le souvenir, à priori heureux, devient très vite matière à nostalgie et tristesse. Puis vient le souvenir du mari, Nikolin, « de son mariage avec Nikolin, chaotique du début jusqu'à la fin ». Nikolin, c'est son nom de famille. « Autrefois, cela sonnait –sympa, familier. Autrefois, c'est-à-dire à l'époque où ils étaient jeunes ». Encore un quasi raté. « Cela faisait vingt ans déjà qu'il aurait dû écrire sa thèse de doctorat. Au bout du compte, il s'est retrouvé petit prof d'histoire dans un lycée ». Puis « la même année, elle a perdu ses deux parents ». Et il y a eu cependant sa fille Maya, que l'on verra dans « L'illusionniste »
La vie qui passe, et dont on déroule l'histoire au fur et à mesure. C'est bien le rôle de Clotho de filer le cours de la vie. Retour sur soi, retour sur les lieux de l'accident, où Ida retrouve sa voiture dans le fossé, « qui grimpe toujours à l'assaut de l'arbre ». Clap de fin pour Ida. Entre temps le vieux chien de Olga et Stéphane est mort.

« Paraskewia, La Parque » qui tout d'abord « déménage le lit sur la véranda ». Cela lui prendra deux jours. Là encore, il neige ou il va neiger. « Nous sommes bloqués par la neige presque tous les ans ». Elle dit nous, mais en fait elle est toute seule. Son mari, Petro, vient de mourir. « J'ai toujours su qu'il partirait le premier ». le lecteur, lui, sait déjà, par la première nouvelle, que les deux parents sont morts la même année. « On est mardi, et c'est déjà la troisième fois que j'allume le cierge béni sous la véranda ». Les chapitres donnent le rythme. Ils sont d'ailleurs indiqués par une lettre en capitale. A lire rapidement, on découvre « PETRO EST MORT ». Cela donne le ton à la nouvelle. C'est la Parque (Parka) qui choisit ses proies.
Elle est Ukrainienne, Petro était Polonais. La guerre passe, modifiant les hommes et les pays. «La frontière a changé de place, elle s'est retrouvée complètement ailleurs. Il s'est alors révélé que nous n'étions pas du bon côté». Avec son Petro, ou Pyotr, selon le pays ou la langue, ou la religion catholique ou orthodoxe, elle commence une vie presque différente. « Sept mois plus tard, Léokadia –ma chère petite Lalka- est née ». Elle mourra plus tard, « dans le train, au cours de cet interminable périple en plein hiver […] il a fallu l'enterrer dans ce foutu patelin de Kluczbork». Puis il y a eu la guerre. Occupation des russes d'abord, puis des ukrainiens, et enfin des allemands. Retour au village, et au cimetière, avec ses quatorze saints qui le protègent. Eustache, Christophe, Gilles et sa biche apprivoisée, Cyr, patron de ophtalmologistes et Marguerite d'Antioche, Barbe et Catherine, Blaise et Pantaléon pour les personnes atteintes de maladies pulmonaires, Denis et Erasme « qui porte ses intestins enroulés autour d'un treuil », et enfin Georges et Sébastien. Mais Petro est bien mort, même si il s'en est moqué : « La mort a environ soixante centimètres de large et elle est faite en contreplaqué » ou encore « La mort se tricote au point jersey double ». Et pour finir « c'est comme ça que Petro a construit la véranda où il repose maintenant ». Long monologue de Paraskewia qui déroule ainsi le fil de sa vie.

« L'illusionniste », le chapitre de la fille, Maya, et de son fils d'une dizaine d'années. Ils sont en Malaisie, attendant « un groupe de plongeurs venus de Singapour ». Maya, femme « transparente » ou secrète, écrit des guides de voyage « Dans les endroits comme cet îlot, les voyageurs finissent à la longue par se ressembler. Les globe-trotters invétérés, les bourlingueurs et les paumés de tous bords se démarquent des autres pour n'avoir jamais dit oui à aucun endroit de la planète, pour ne s'être jamais laissé piéger ». Des touristes, de passage. Rien d'autre. « Ces gens-là sont juste des voyageurs occasionnels qui se déplacent en ligne droite d'un point à l'autre. Ils se cramponnent à la terre ferme, et le temps d'une escale, ils s'approprient une parcelle de territoire qu'ils s'empressent d'aménager, même si cela se limite le plus souvent à fourguer leurs effets dans le placard de l'hôtel et à disposer les brosses à dents sur la tablette du lavabo. Leur voyage n'est qu'un semblant de voyage, puisque le but est fixé à l'avance : soit ils sont attirés par les choses, soit ils recherchent la compagnie des autres. Ils visitent ou ils rendent visite ». le fils n'est que peu intéressé par les touristes et la plongée.
Par contre il est fasciné par un homme déjà âgé, Kisz, qui doit lui enseigner des tours de magie. « Tu sais, le monsieur m'a promis de me montrer un tour de magie ». La fascination du fils est plus que trouble. Mais « voici la contrée pure, innocente, un lieu où les pensées, les hommes, les souvenirs n'existent pas. Un pays régi par des lois toutes simples, évidentes, qu'on n'a pas besoin de comprendre. Ici le temps est une vague ; il flue et reflue. Et les habitant de cette contrée vivent à l'abri de tout danger ». A la fin, c'est Kisz qui meurt.
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