Il se passait ce qui se passe partout où un Etat disposant d'une grande force militaire entre en relation avec de petits peuples primitifs vivant de leur vie particulière. Il se produisait ceci que, soit sous le pretexte de défendre les siens, alors que toute attaque est provoquée par les offenses du puissant voisin, soit sous pretexte d'introduire la civilisation dans les moeurs d'un peuple sauvage, alors que ce peuple sauvage vit d'une vie infiniment plus pacifique et vertueuse que ses civilisateurs ou encore sous tout autre pretxte, les serviteurs des grandes puissances militaires infligent toutes sortes de mauvais traitements aux petits peuples en affirmant qu'il est impossible de les traitrer autrement.
Après avoir reçu les hommages de sa cour, il se rendit à l'église.Tout comme les gens du monde, Dieu, par l'intermédiaire de ses ministres, saluait et louait Nicolas, qui acceptait ces hommages comme une chose due, même si elle était ennuyeuse.Il devait en être ainsi, puisque de lui dépendaient le bonheur et la prospérité du monde entier, et, malgré la fatigue qui lui en coûtait, Nicolas ne refusait pas au monde son assistance.
Mérite la peine de mort.Mais grâce à Dieu elle n'existe plus chez nous, et ce n'est pas moi qui le remettrai en usage.A faire passer douze fois entre mille hommes.Nicolas.
Les rossignols, qui s'étaient tus pendant la fusillade, se remirent à chanter, d'abord un seul, tout près, puis les autres, dans le lointain.
Leurs regards se rencontrèrent et exprimèrent tout autre chose que les paroles qu'ils venaient d'échanger. Leurs yeux se disaient toute la vérité. Ceux de Vorontzoff révélaient qu'il ne croyait pas un traître mot du discours de Hadji Mourad, car il le savait ennemi de tout ce qui est russe ; il le demeurerait toujours et il ne se soumettait aujourd'hui que parce qu'il y était forcé. Hadji Mourad devinait tout cela, et cependant l'assurait de son dévouement.
" Tous, dans les montagnes, savent comment Hadji Mourad a tué ces cochons de Russes !
- Allons, allons fit Hadji Mourad. La corde est bonne quand elle est longue, et le discours quand il est bref !
- Eh bien, je me tairai, dit Bata.
- Et maintenant que devons-nous écrire à Mikhaïl Semionovitch?
- De s'en tenir ferme à mon système: dévaster les villages, anéantir les ressources en Tchétchénie et harceler l'ennemi par des coups de main.
sa mort héroïque en fait un symbole de la vie même dans ce qu'elle a de plus irréductible.
Personne ne parlait de sa haine envers les Russes. Le sentiment qu'eprouvaient tous les Tchetchenz, des petits aux grands, était plus fort que la haine. Ce n'était pas de la haine. Il était Impossible aux Tchetchenz de considérer ces chiens de Russes comme des êtres humains. C'était un sentiment infini de dégoût et d'horreur (...)
L'aoul détruit par l'incursion était ce même village où Hadji Mourad avait passé la nuit avant de se rallier aux Russes. Sado, son hôte, s'apprêtait à partir avec sa famille dans la montagne au moment où les Russes s'approchaient. Quand il retourna dans son aoul, il trouva sa cabane détruite : le toit enfoncé, la porte et les poteaux de la galerie brûlés et tout l'intérieur souillé. Et son fils, ce beau garçon aux yeux brillants qui regardait avec enthousiasme Hadji Mourad, venait d'être transporté, sans vie, à la mosquée, sur un cheval bai : il avait été transpercé d'un coup de baïonnette dans le dos. La femme à la mine accorte qui avait servi le repas lors de la visite de Hadji Mourad était maintenant vêtue d'une chemise déchirée sur la poitrine, qui découvrait ses seins vieillis et pendants. Les cheveux défaits, penchée sur le cadavre de son fils, se déchirant jusqu'au sang le visage, elle ne cessait de hurler sa douleur. Sado prit une pelle et une pioche pour aller avec ses parents creuser la tombe de son fils. Le vieux grand-père, assis près du mur de la cabane démolie, taillait une petite baguette en regardant stupidement devant lui.