AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,43

sur 29 notes
5
6 avis
4
3 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis
« Nous n'avons qu'une nuit pour en finir avec la fable » dit une mère à sa fille
Car cette mère va mourir à l'aube et avec une grande douceur et une profonde humanité elle tient à passer le relais à sa fille, lui dire la vérité car elle lui a menti pour lui faire aimer la vie, que cet amour la grandisse et demeure en elle malgré l'adversité.

Mais avant que sa fille puisse devenir « maîtresse de son parfum » il lui faut affronter cette vérité, qu'elle sache que si sa mère a été « marquée de la fleur de la honte », marquée par la colère des hommes », si elle a du affronter « la violence des hommes et celle des éléments, si elle a respiré l'odeur de la haine », elle en a aussi été préservée grâce à la naissance de sa fille, par le parfum qu'elle répandait :

« Tu es née avec une odeur de fruit pur, de rosée franche,
une odeur de route à prendre dans le matin clair.
Et j'ai chassé en moi toute idée de défaite. »

Que peut dire de plus beau une mère à sa fille et quelle plus belle preuve d'amour peut-elle lui donner ?

« N'oublie pas, mon amour.
Le paradoxe du parfum, c'est qu'il libère ce qu'il capture.
Capture la vie et libère-la.
Capture les odeurs de la vie et libère-les.
Qu'elles jaillissent de tes paumes, de tes hanches,
de tes yeux vifs à tout saisir,
mourants lorsque tu t'abandonnes. »

et tâches à ton tour d'offrir et de libérer et « répandre l'odeur du don » que « Pour l'instant nous (l')appellerons le doux parfum des temps à venir. »

Ce texte est à apprendre par coeur pour se le dire et redire.
Il m'a procuré la même émotion que celui du poète espagnol José Agustin Goytisolo mis en musique et chanté par Paco Ibanez : Palabras para Julia (http://terresdefemmes.blogs.com/mon_weblog/2005/10/jos_agustn_goyt.html)
Commenter  J’apprécie          394
Ce sublime chant au delà des cités délabrées raconte l'espoir des femmes..
Parfois il suffit d'un parfum, d'une odeur pour que la vision du monde change, une odeur de route peut-être, "une odeur de route à prendre dans le matin clair". le livre de Lyonel Trouillot raconte l'essentiel, ce que François Cheng appelle la vie, la vie est rayon d'or malgré les ténèbres. le langage déployé dans ce petit livret que Lyonel Trouillot a nommé, le "Doux parfum des temps à venir". Ce parfum est peut-être plus chatoyant et encore plus pur dans le ciel Haïtien que les mots de François Cheng.


La vie pour Lyonel Trouillot est plus charnelle et plus sensuelle que l'or. le rayon d'or de la femme qui parle est un premier souffle, "le premier souffle que la maman a tenu dans ses bras et qu'elle a senti sur sa peau".
La narratrice, femme et mère, parle à sa fille d'une odeur de route à prendre, puis ajoute quand tu es née, j'ai vu "cette promesse, sortie de moi". Tout au long du récit, de ses révélations, coule l'amour d'une mère pour son enfant, lui prodiguant conseils et encouragements car ici commence ta vérité


Il lui faut revenir sur ce qu'une mère parfois embellit. "Je t'ai dit que les rois m'apportèrent de la myrrhe, que les hommes de ma vie étaient des princes, je t'ai menti". "Je t'ai encore menti car ils ont donné ma nudité en spectacle à la foule", je suis une femme marquée par la colère des hommes. Mais maintenant que tu as pris l'habitude d'aimer la vie, je peux te dire la vérité. Viens nous n'avons qu'une nuit pour en finir avec la fable.
"Demain tu mettras mes yeux face à la mer et suivras ton chemin vers ton parfum de femme. Demain tu partiras."


Cette femme raconte toutes ses désillusions et pourquoi cette fleur posée sur sa peau cette fleur de honte est l'odeur de la haine.
La h aine est partout présente, "son odeur je l'ai prise dans les alcôves des rois, à la forge de l'artisan et le taudis du miséreux". Il te faudra vaincre la haine.


L'Aube approche, j'ai fait mon temps. "Tu m'aideras à m'installer face à la mer", tu marcheras seule vers la conquête de ton essence. Il lui faut la mettre en garde, l'instruire car les mères ont cette sagesse là.
"Mon seul legs est que tu adviennes, et chasses où que tu ailles la haine dont tu m'as préservé". L'enfant est le plus beau cadeau du monde, car il porte la vie et jamais la haine. C'est une psalmodie vibrante et bouleversante au coeur de l'essence de la vie, une prière camusienne, puissante.


Viens la promesse imaginé par l'enfant à sa mère, puis tu iras au sommet de la plus haute montagne et tu ouvriras le coffret de parfum qui libère "le paradoxe du parfum c'est qu'il libère ce qu'il capture". "Tu ouvriras le coffret et tu déverseras sur le monde l'odeur de fruit pur et de rosée franche, cette odeur de route à prendre dans le matin clair avec laquelle tu es née. "


Oui semble-elle dire, je vais mourir, mais je vivrai en toi, ne me cherche pas, je suis déjà le parfum qui libère et que tu portes, le "Doux parfum des temps à venir".
Quand ce cadeau m'a été donné je n'imaginais pas toutes ses résonances, ce dialogue formulé et lu par le père. C'est à moi, Lyonel, de te dire ce que ta maman aurait voulu écrire en nous quittant, que toujours malgré les épreuves, la promesse de l'enfant à naître renverserait les montagnes.
Commenter  J’apprécie          312
Le principe de cette collection, c'est l'évocation par les odeurs, les parfums. Une contrainte littéraire que Lyonel Trouillot sublime dans ce texte généreux et engagé d'une cinquantaine de pages où résonne une vibrante voix féminine.

Comment le qualifier, ce texte ? Il s'agit d'un testament et d'une poésie. Quelques chapitres, une narration en strophes. Une balade et un chant. Un chant d'adieu dédié à la vie dans lequel ces parfums racontent les lieux mais aussi les temps et les âges, les émotions et les sentiments.
Commenter  J’apprécie          240
Ce petit recueil porte bien son titre, étant le symbole métaphorique olfactif d'une litanie qui vous envoute, qui vous prend aux tripes, comme un parfum indélébile qui vous suit, traces éphémères d'un récit poétique dont les braises ardentes ne se consument que douloureusement, feu allégorique d'effluve en forme de complainte, de chant d'une mère pour sa fille, cri d'espoir furtif, hurlé dans un contexte à la noirceur exhalée, mais où les vers apportent peu à peu, une lueur d'espoir pour un futur meilleur. Au travers de ce témoignage filial exacerbé, l'auteur esquisse un chemin aux fragrances vertueuses, arrachant les fils inextricables du malheur et de la soumission pour sortir des antres de l'esclavage existentiel et s'extirper du néant pour une ode de bonheur retrouvé. Ce recueil mémoriel élève le devoir de transmission, au Panthéon d'un absolu vital pour que les générations suivantes témoignent et trouve dans un libre-arbitre nécessaire, leur voie pour voler de leurs propres ailes en toute liberté et sérénité.
Commenter  J’apprécie          150
Ce recueil de poèmes paru en 2013 dans la jeune collection Essences d'Actes Sud compose un récit à deux versants, qu'une mère en fin de vie confesse à sa fille, l'enfance idyllique qu'elle lui a racontée, contrée du mensonge, et puis la vérité crue et brutale.

«Ici commence la vérité
Mes yeux morts face à la mer.
Toi maîtresse de tes routes et de ton parfum.»

Les premiers poèmes sont comme une mer étale recouvrant des eaux troubles, qui s'ouvre tout à coup pour laisser voir l'abîme, de la misère, de la violence et de l'infamie. Au bout de son parcours, la voix de cette femme dit enfin l'indicible, puis l'amour de sa fille qui de l'infamie l'a lavée, et l'espoir qu'elle emporte pour sa fille d'une vie aux parfums plus cléments.

«La vérité.
Les guerres.
Les petites.
Celles qu'on dit d'intérieur,
tueuses de corps et d'âme
dans des maisons plus tristes que la mort.
La vérité.
La violence des nuits d'amour qui n'eurent d'amour
que la force sauvage de l'étreinte
avant l'ennui et la routine.
Les enfants endormis sans rêve,
déjà vaincus par le principe de ressemblance au passé qui les engendra.
Si tristes, les enfants.»
Commenter  J’apprécie          132
Une mère parle à sa fille. Ce sont ses derniers mots, leur dernière nuit ensemble, avant qu'elle n'aille rejoindre l'éternité dans les profondeurs de la mer. Elle lui raconte la vérité sur son passé, sa vie d'errance placée sous le sceau de la fleur de la honte, que des hommes envieux ont gravé pour toujours dans sa chair. Il y a de la tristesse dans sa voix lorsqu'elle parle de ces hommes orgueilleux et hypocrites, qui cultivent en eux l'odeur de la haine et ont oublié depuis longtemps celle de l'amour. Il y a de la nostalgie aussi dans le souvenir de cette jeunesse exaltée et insouciante, passée dans des terres arides et désertiques. Mais surtout, il y a de l'amour, beaucoup d'amour dans la voix de cette mère, lorsqu'elle évoque l'arrivée de sa fille, son odeur « de fruit pur, de rosée franche » et la joie de sa présence, de son soutien. Une vie qui s'achève sans regrets, mais avec la volonté de transmettre un héritage plus précieux que toutes les richesses du monde…

Dans ce texte court mais d'une extrême beauté, Lyonel Trouillot nous rapporte les dernières volontés et les derniers conseils d'une mère à sa fille. Construit comme une poésie, par des strophes et un souci du rythme, certaines phrases reviennent et résonnent comme une douce mélopée, pleine de tristesse, de mélancolie, d'amour et d'espoir pour cette fille qui porte en elle l'odeur de la liberté et la force de l'avenir. Cette nouvelle collection chez Actes Sud, baptisée « Essences », remplie à merveille son objectif avec ce texte très évocateur, qui respire le désir de liberté et de partage. On ne peut être que touché par la pureté du style et la mélodie des mots. Lyonel Trouillot m'a profondément émue, jusqu'à me donner la chair de poule, par la puissance de son langage. Une collection à découvrir et à suivre de près…
Commenter  J’apprécie          120
La plume poétique de Lyonel Trouillot ne peut laisser insensible celle ou celui qui le lit à travers son engagement pour l'égalité et sa lutte contre les injustices. A travers cette prose poétique, on découvre l'histoire d'une femme qui transmet un message à sa fille. C'est le message d'une mère qui semble avoir vécu le pire (violences et tortures) et a tout fait, malgré les épreuves, pour ne pas être enchaînée à la haine. La phrase suivante résume toute son histoire et peut-être même toute l'histoire de l'humanité : « J'ai vu la violence des hommes et celle des éléments. Et j'ai respiré l'odeur de la haine (...)»; elle fait reposer l'espoir d'un avenir meilleur en cette fille qui l'aida à se préserver de cette haine galopante, sans doute une délivrance.
Commenter  J’apprécie          60
Une fois n'est pas coutume, c'est une pièce de théâtre qui m'a fait découvrir ce livre magnifique.
J'ai eu la chance d'assister à la sortie de résidence de la dernière pièce de théâtre mise en scène par Christine Matos à la Maison de la poésie d'Avignon, le doux Parfum des temps à venir, de Lyonel Trouillot.
On sait que ces premières représentations sont généralement encore un peu maladroites, brutes de résidence, mais là, j'ai pu ressentir toute la force des mots de l'auteur, la force du jeu des comédiennes et la qualité de mise en scène.
Un texte, fait de poésie, de profondeur et d'intemporalité !
Il nous raconte les dernières volontés et les ultimes conseils d'une mère à sa fille, avant de mourir, qui lui dit : « une femme libre est maîtresse de son essence ». Il y est question de passage, de transmission : que laisse-t-on lorsqu'on s'en va et, quand on naît à soi-même, que prend-on ou pas de ce qu'on nous a laissé ?
L'action n'est ni située dans le temps ni dans l'espace, ce qui renforce la portée universelle des mots. Les lieux évoqués sont la guerre, les haltes, l'errance dans des paysages désertiques, des cités délabrées, l'esclavage.
Cette mère dévoile une réalité très sombre de sa vie, de sa propre histoire cachée afin de préserver l'innocence de sa fille : « Ayant toujours vécu au bord des précipices, nous nous serons peu parlé. Et rarement dans le vrai ». La vérité qu'elle révèle est le témoignage d'une vie marquée par la violence : « J'ai vu la violence des hommes et celle des éléments. Et j'ai respiré l'odeur de la haine ». En colère et révoltée, cette mère dit à sa fille d'aller chercher sa liberté, d'aller à la conquête de soi : « Et tu marcheras seule vers la conquête de ton essence. N'oublie pas, mon amour. le paradoxe du parfum, c'est qu'il libère ce qu'il capture. Capture la vie et libère-la ».
L'évocation d'un coffret dans ses dernières paroles rappelle la boîte de Pandore. Si Pandore répand les maux sur terre et retient prisonnier l'espoir, le coffret que la mère lègue ici à sa fille a une fonction particulière : « Et lorsque tu auras trouvé le doux parfum des temps à venir, tu le cacheras dans le coffret ».

Une mise en scène sobre, imagée où les personnages se confondent avec leur environnement.
Christine Matos, directrice de la compagnie KA-Théâtre, et dont c'est la quatrième pièce que je vois, m'a habitué à être surpris par ses mises en scène ayant pour points communs la simplicité de décor et la multitude d'accessoires, discrets pour les uns, criants pour les autres. Elle mêle souvent des disciplines autres, telles que la musique, les sons ou les marionnettes, élargissant ainsi le spectre de l'imaginaire du spectateur et donnant une plus grande dimension à la scène, parfois exiguë.
Je la cite à propos de son intention : Rendre visibles et sensibles toute la force, la sauvagerie, la poésie qui se dégagent de ce texte est pour moi une priorité. « Je voudrais que ce soit une parole de femme à femme, sans qu'on puisse dire que c'est une parole qui est née dans telle société, pour justement mettre l'accent sur la condition universelle des femmes ». Ce sont les propres paroles de Lyonel Trouillot à propos de son livre le doux parfum des temps à venir.
En plus des nombreuses pièces mises en scène à Cuba, Haïti, El Salvador, et d'autres en France, Christine Matos est aussi l'auteur d'une pièce de théâtre, Un volcan sur les toits de Paris, la vie mouvementée de Consuelo Suncin, seule épouse de Saint-Exupéry, éditée chez Elan Sud, qu'elle a mis en scène en espagnol et en français.
Cette pièce de théâtre que j'ai revu 2 fois m'a poussé à lire le livre… et je n'ai pas été déçu.
Lien : https://dominiquelin.overblo..
Commenter  J’apprécie          20
Livre remplit de douceur .'. Il nous dans les relations humaine et la profondeur des sentiments d une mère pour sa fille
Commenter  J’apprécie          20
Si éblouissant, qu'il me fallait l'écrire : un homme, peut-il emprunter aussi justement la délicatesse d'une voix de femme qui partage auprès de sa fille, la vie d'une mère : ses tréfonds, ses trésors, ses détresses, ses déluges, comme on jetterait une bouteille à la mer, sans savoir si elle est remplie d'espoir ou d'adieux ? Lyonnel Trouillot l'a rendu possible. L'aube, l'aveu, le déferlement des épreuves et des victoires ; rarement un homme n'a autant été femme ; peut-être même, qu'aucune femme ne l'a jamais tant été...

"Ici commence la vérité" dit-il. La vôtre, y sera-t-elle ?
Commenter  J’apprécie          10




Lecteurs (61) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1226 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *}