Un livre comme on rate un bateau, comme on manque l'heure d'embarquement... Reçu grâce à Babelio et aux éditions Buchet-Chastel, de terre et de mer est un rendez-vous manqué. À l'instar du héros, j'ai déambulé jusqu'à l'île de B. Lui, par la mer, venant vainement retrouver l'amour de la belle Youna, moi, par les mots, cherchant la douceur et la poésie suggérées par la toile en couverture.
« Cette sensation de réussir à faire exister à l'extérieur de soi, sur du papier, ce qui est si mouvant, insaisissable, retranché dans mes pensées, me donne la plus grande joie. Pour autant, cela ne me fait pas renoncer à toi. »
Cherchant l'indépendance et la liberté, Youna est venue s'installer sur l'île de B. Elle y a commencé une nouvelle vie loin des moments passés auprès d'Henri. Jeune peintre tourmenté, Henri vit mal ce silence et décide d'entreprendre, le temps d'une journée, un voyage sur les traces de celle qu'il croit aimer. Débarqué, ses mille questions pour seul bagage, le jeune homme ne manque pas d'attirer les on-dit. Qui est-il ? Que cherche-t-il ? Que veut-il à l'énigmatique Youna ? L'atmosphère pesante du début du XXème siècle entoure ce couple étrange marchant sur la lande. de point de vue en point de vue, on explore tour à tour les quelques âmes qui peuplent cette terre. le restaurateur, la vieille dame, le chasseur, le coureur, le pêcheur, font appel à leurs souvenirs, à leur quotidien et lancent quelques pistes au lecteur intrigué.
« Depuis la nuit des temps, je sens le moindre hoquet de ton sommeil, je sens la nervosité de ta queue qui racle et abîme la roche lorsque tu rêves. Je sens que tu gis sur le flanc, mais que ton coeur bat sourdement. Ta colère, ton poison coulent dans le sang noir et visqueux dont tes veines figées sont emplies, ta rage et ton râle, rauques, sourdent de la roche, ébranlent l'eau stagnante du marais, je les sens, oui, je les sens sous mes pieds qui s'agitent et annoncent ton tellurique éveil, aerouant. »
Mais si l'écriture de Sophie van der Linden aura pu être belle et sensible, elle fut surtout, pour moi, déconcertante. Il m'a semblé que l'histoire de cette île ne rendait pas vraiment hommage à la poésie de ses phrases. La jolie musique perd de son rythme, pour mieux revenir, parfois, mais pas assez pour me faire apprécier ce moment. Enfin, le récit reste trop court, les personnages seulement esquissés furent, pour moi à regret, fades et antipathiques.
De terre et de mer aurait pu être, mais ne fut pas, cette fois.
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Petite déception pour ma part pour ce roman de Sophie van der Linden, qui nous immerge en Bretagne, probablement à l'île de Batz.
En ayant eu de bons retours, je m'attendais à autre chose, je me suis un peu ennuyée, bien que l'écriture soit belle, les personnages bien pensés.
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L'écriture est assez élégante, juste, un peu à la manière du Jean Rouault des Champs d'honneur (mais avec moins d'humour ). Je vais faire un truc bizarre : imaginer si l'histoire avait été écrite en son temps par un vieux Pierre Loti (mort en 1923) ou un jeune Roger Vercel (né en 1894), à cause des lieux (Île de Batz devant Roscoff) et de l'époque. Ils l'auraient écrite bien sûr bien différemment, avec probablement davantage d'émotions fortes et de descriptions plus précises (mais l'auteur se défend d'avoir voulu décrire précisément l'île), car l'écriture de S. van der Linden se concentre sans pesanteur sur des scénettes, des détails visuels, olfactifs ou sonores. J'imagine si un Giono breton s'était emparé de ce sujet.. (mais c'est assez idiot d'imaginer cela..).
Les rencontres faites sur l'île sont assez improbables, voire peu plausibles.
Bref, j'ai trouvé dans l'écriture de cette longue nouvelle comme une modernité (par rapport à l'époque où cela se passe) plaquée un peu artificiellement et comme d'autres lecteurs j'ai trouvé que les personnages étaient trop esquissés pour être compréhensibles et qu'on ait de l'empathie et qu'on vibre à leur unisson. Bref un "petit" livre (dans les 2 sens du terme) néanmoins respectable, ne serait-ce que pour cette phrase : " Partout autour de lui, le ciel étoilé imposait sa présence magistrale dans cette parure veloutée immensément arrondie qui ramassait le vaste écorché terrestre assoupi." Juste là, on n'est pas loin de Giono.
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