C'est grâce au petit documentaire "Résistance: 40 figures contre le nazisme" de l'excellente collection Bam! que j'ai découvert Vercors.
Dans "
Le silence de la mer", les deux protagonistes mettent en place une résistance passive face à l'Allemand logeant chez eux ("Nous avons décidé de ne rien changer à notre vie, comme si l'officier n'existait pas"), gardant le silence soir après soir malgré la volonté de celui-ci de faire la conversation. Ce silence, symbole de la dignité française, est une réaction noble à une situation ignoble. le silence est de plus en plus difficile à maintenir car l'officier est un homme cultivé et respectable, de bonne compagnie, qui a, qui plus est, une haute idée de la France, pays à la culture riche et variée. A aucun moment il ne se formalisera de ce silence, au contraire, il semble approuver l'attitude des Français ("cette expression d'approbation à la fois souriante et grave"), conscient que si "nous avons l'occasion de détruire la France, elle le sera". Vercors met ainsi en garde contre la fin du rayonnement culturel français si l'occupation allemande venait à perdurer.
"Ce jour-là" est un instant de vie tout en émotions entre un petit garçon et son père, où la beauté de la balade en pleine nature vient contraster avec la dureté de l'événement vécu (l'arrestation de la mère).
"
Le Songe" est une sorte de rêve fantasmagorique dans lequel l'auteur fait une longue description de corps décharnés (alias les morts-vivants des camps de concentration), cherchant à éveiller à "la conscience universelle et flottante" de la souffrance des autres, à travers le monde.
A travers le personnage de Renaud Houlade dans "L'Impuissance", Vercors encourage à se révolter au lieu de se réfugier dans son petit monde, de se retrancher derrière ses petites habitudes. Comment peut-on "converser avec monsieur
Stendhal pendant qu'on rôtit des femmes et des gosses dans une église?" (référence à Oradour). On ne peut "ignorer lâchement ces actes horribles".
Petite touche d'humour dans "Le Cheval et la Mort": la visite de Hitler à Paris semble aussi incongrue que celle d'un cheval dans une maison bourgeoise!
J'ai beaucoup aimé "L'imprimerie de Verdun" qui évoque bien le tiraillement que l'on devait ressentir entre les directives du gouvernement et les penchants de son coeur. Vendresse, qui a combattu pendant la Grande Guerre, est entièrement dévoué à Pétain qui s'y est distingué. Mais son commis et ami est juif... Si dans un premier temps, "il s'en laisse facilement conter", il finira par changer d'idéologie en voyant le sort réservé à Dacosta et sa famille.
On voit bien avec ces six nouvelles l'enchaînement des idées et des arguments en faveur de la Résistance que prône l'auteur. Chaque fois le propos est subtil et le message véhiculé dans des histoires variées qui se complètent bien. de ce fait il faut bien connaître le contexte de l'époque, afin d'en savourer pleinement la teneur.
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