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Critique de Lamifranz


Avec « Un Capitaine de quinze ans » (1878), c'est le Jules Verne « classique » que nous retrouvons : de l'aventure, un jeune héros confronté à des ennemis féroces et promu défenseur de la veuve et de l'orphelin, des aventures en mer, des aventures en terre, c'est « L'Ile au Trésor », le trésor en moins. Et la comparaison n'est pas tout-à-fait innocente, le méchant de l'histoire, c'est le cuisinier du bateau !
C'est un roman avec changements de trajectoires : ça part comme un roman d'aventures maritimes puis après un drame en mer, on échoue sur une côte, et là au lieu d'une robinsonnade dont l'ami Jules a le secret, on s'enfonce à l'intérieur des terres jusqu'au dénouement sur les rives du Zaïre.
Dick Sand, quinze ans, est mousse sur le Pilgrim, un brick goélette américain commandé par le capitaine Hull ? Parti de Nouvelle-Zélande, il ramène en Amérique Mrs Weldon, la femme de l'armateur, son fils Jack, et son cousin Benedict. En chemin on recueille une chaloupe contenant cinq noirs naufragés, dont le gigantesque Hercule, et un chien, Dingo. Une chasse à la baleine s'avère désastreuse et tout l'équipage, capitaine y compris, meurt dans les flots. Sur le navire ne reste plus que la famille Weldon, les cinq noirs et le chien, et bien sûr Dick Sand. Plus le maître-coq, Negoro, le seul qui ne semble pas attristé par la tragédie. Dick Sand, promu capitaine par Mrs Weldon, décide de diriger le bateau vers l'Amérique, mais Negoro, ayant trafiqué la boussole, le Pilgrim échoue sur la côte africaine.
D'autres aventures attendent nos héros : Negoro est un négrier, trafiquant d'esclaves. Dick et ses amis sont faits prisonniers mais délivrés par Hercule. Ils découvrent les restes d'un explorateur qui se révèle être le maître de Dingo, tué par Negoro (on comprend mieux l'animosité du chien pour le maître-coq). Dingo venge son maître en égorgeant Negoro et tout est bien qui finit bien.
De ce passionnant roman d'aventures, deux thèmes émergent particulièrement : le voyage initiatique de Dick Sand : comment on passe de l'enfance à l'âge adulte. C'est ici qu'on pense à Stevenson (et on a fichtrement tort car l'Ile au Trésor ne paraîtra qu'en 1882, soit quatre ans plus tard). L'autre grand thème est l'esclavage. Jules Verne, esprit éclairé, s'est à maintes reprises déclaré contre l'esclavage (notamment dans ses romans « africains » comme « Cinq semaines en ballon », « Aventures de trois russes et de trois Anglais », mais aussi dans « Nord et Sud »), sans doute par conviction personnelle, mais peut-être aussi que le Nantais qu'il était avait à coeur de restaurer un peu le blason de sa ville natale, tristement célèbre pour son rôle dans la traite des Noirs entre l'Europe et les Antilles (c'est mon idée, elle est je crois plausible, mais j'ignore si Jules Verne s'en est exprimé dans ses écrits). Pour être totalement objectif il faut souligner que Jules Verne pouvait être également raciste et antisémite, comme on l'était généralement à son époque (ce qui, Dieu merci, n'est plus le cas aujourd'hui, mais peut-être me trompe-je). Mais pas, en tous cas, dans ce livre-ci.
De ce fait ce très beau roman d'aventures se double d'un roman engagé, très réaliste (scènes de violence et même de cannibalisme), et finalement poignant et émouvant. Jules Verne reste un enchanteur, dont le récit nous emmène loin de chez nous, nous fait rêver et nous fait réfléchir.
De 7 à 77 ans et même après (j'imagine)


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