D'une caresse, l'homme écarte prudemment du pied du cheval la neige ensanglantée. Il y a une longue estafilade rouge juste au-dessus du sabot. C'est le fer luisant et acéré de l'autre pied qui a causé la blessure. Blessure de son propre fer. De l'eau de neige fondue, sale, ruisselle le long du pied et traverse la blessure.
Terriblement douloureux.
Le cheval baisse la tête comme s'il rêvait. Lève le pied. Se penche davantage... Est avec l'homme. Est avec l'homme pour le bien et le mal.
S'est remis à l'homme.
Le coeur est fendu en deux et ne sait ce qu'il veut.
La barque doit aller pour lui - jour ou nuit ne sont qu'un rideau changeant à traverser. Avancer d'un courage farouche. Pas à cause des hommes. A cause d'énigmes embarrassantes. Le coeur est fendu en deux en grand secret.
« Elles sont nées farouches. La tête plus haute que jamais. » (p. 30)
« Forêt aveugle – sans limite – parce que l’horizon aujourd’hui a disparu dans le doux temps de neige mêlé de brouillard. » (p. 10)
L’air était plein de flocons de neige, mais cela ne faisait rien. C’était comme il fallait, c’était une belle soirée.
Il y avait un groupe de maisons, sans que l’on pût appeler cela une ville. Les maisons s’étaient installées peu à peu, sans plan d’ensemble, aussi y avait-il toutes sortes de recoins inattendus et de passages.
Une tempête de neige balayait tout cela. Dans les recoins étroits, les tas de neige douce rencontraient la forte lumière des réverbères. Cela faisait pour ainsi dire une blancheur plus blanche que le blanc.
De la sorte, la neige déferlait constamment dans les recoins. Il n’y avait pas une seule trace de pas sous cet éclairage. Les gens étaient chez eux.
« Il est juste de marcher ici, mais on est tellement en peine de savoir pourquoi on le fait. Est-ce que je rêve cela ? Est-ce que je ne suis pas là, à marcher ? » (p. 23)