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Critique de himba60


Maxime Nemo 1888-1975 un passeur des Lettres par Patrick Chevrel
https://www.librinova.com/librairie/patrick-chevrel/maxime-nemo
Un compagnon de route et ami indéfectible de Charles Vildrac.VILDRAC fut le contemporain et l'ami fidèle de Maxime NEMO. Ils ont traversé les siècles et partagé leur même passion pour la poésie, la littérature et la peinture. On regrette de ne pas avoir pu reconstituer leurs échanges épistolaires foisonnants et surtout autour de l'Association JJ Rousseau. Peu ou pas de clichés de leurs vacances à Saint Tropez. Restent des dédicaces empreintes de chaleureuse communion et d'encouragements réciproques. Je cherche toujours à dater le moment de leur rencontre à Troyes ou à Paris entre la rue de Seine et la rue de Grenelle. Il me reste quelques exemplaires de " la Colonie" d'Amadou le Bouquillon et de" l'Ile rose" qui venaient saluer mes anniversaires.

CHARLES VILDRAC est, à cause de sa vraie simplicité, un des rares à qui l'on ose demander tout à trac : « Qui êtes-vous ? • Et lui, aussitôt, de me dérouter :

Je m'appelle Charles Messager. Quand j'étais jeune, ma soeur aînée vivant en Angleterre, je lui envoyais tous les jours un journal familial « le Messager ». J'y signais des articles « Roger Vildrac », par admiration pour Wildrake, le héros de Walter Scott. Vers dix-neuf ans, je publiai des vers dans ces minces revues qui pullulaient à l'époque, notamment dans l'Idée synthétique de Jean de la Hire. Au retour du service militaire, je voulus reprendre mon nom...

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Trop tard !

C'est ce que me dirent mes camarades. Ma mère aussi, qui n'avait pas envie que je divulgue mon nom... « pour des bêtises », sourit gentiment Charles Vildrac derrière ses lunettes.

Ce Parisien depuis trois générations, né rue Berthollet, n'en a pas moins de solides attaches provinciales, champenoises par son arrière-grand-père, meunier à Troyes, et bourguignonnes par sa mère. Mais il habita toujours Paris (où son père, un temps, s'occupa d'éditions) soit au quartier Latin, soit au faubourg Saint-Antoine, où sa mère dirigeait une école.

J'ai joué toute mon enfance dans les ateliers d'ébénisterie des vieux passages parisiens, chez des encadreurs, des tourneurs, des doreurs...

Ses études secondaires, il les fit au lycée Voltaire, après être passé par l'école Arago, « trop scientifique pour moi », avoue-t-il encore aujourd'hui. Son ambition d'enfant était charmante : il voulait être à la fois colon et poète, n'importe où sous des palmiers tropicaux ! le programme d'études de l'École coloniale l'en découragea sans tarder... Mais quoi ! L'essentiel de cette vocation demeure sans plantations ni palmes, Charles Vildrac est un vrai poète.

Ce poète est aussi auteur dramatique. Et ses pièces. qui sont parmi les plus attachantes, les plus simplement émouvantes, ont une résonance qui n'appartient qu'à lui.

Tout jeune cependant. je ne comprenais rien au théâtre. Tous les samedis, Antoine montait des spectacles pour la jeunesse. Duhamel lui: donna une pièce, la Lumière. de mon côté, j'avais

Ecrit un poème. la Visite, puis une pièce, « l'indigent » qu'Antoine refusa. D'ailleurs il devait déclarer plus tard, après l'avoir vu jouer par les Pitoëff : »J'ai lu cette pièce il y a longtemps : je me suis trompé.

Dès sa petite enfance, Charles Vildrac se montre grand amateur de « sociétés ». A douze ans, il fonda une « société secrète » , qui comprenait cinq adhérents, basée sur une commune admiration pour un de leurs maîtres. Un mot de ce dernier, où il était écrit : « Les sentiments de mon petit élève Untel m'ont fait bien plaisir », leur tenait lieu de carte de sociétaire. Aux réunions, on s'interrogeait gravement : « Rien de nouveau ? Rien de nouveau ! » Et tout était dit jusqu'à la fois suivante !

Quelques années plus tard, occupé à classer la bibliothèque d'un avocat parisien, il rencontre Georges Duhamel, la lavallière au vent, les cheveux flottant sur les épaules. Et voilà fondée la Société de la Jeunesse artistique et littéraire !

C'est à cette époque que nous nous sommes retirés à l'Abbaye, une propriété de Créteil au bord de la Marne, pendant près de deux ans. Notre but ? La libération de l'artiste. Notre tâche ? L'imprimerie. Très vite. nous apprîmes notre métier. Mais nous publiions des livres à compte d'auteur ! le plus souvent c'étaient des vers ! Cela ne pouvait durer.

Avant ce que Charles Vildrac appelle encore « la catastrophe », il avait publié « Images et Mirages », livre de « poésie immédiate », comme dit Jules Romains, qui témoigne à la fois de l'influence de Verlaine et de celle de Verhaeren.

C'est pendant la guerre 1914-1918 qu'il écrit. dans une section de camouflage du front d'Italie, le premier acte du Paquebot Tenacity »:

Je n'imaginais même pas que cela pût être jamais joué ! Je voulais seulement mettre l'accent sur ces virages du destin, provoqués souvent par le plus banal et le plus insignifiant incident de route. Une fois rentré chez moi, j'achevais « Paquebot Tenacity s très rapidement ; et Arkos le publia aux Editions du Sablier, qu"il venait de fonder à Genève.
Jacques Copeau créa la pièce au Vieux-Colombier, après l'avoir montée en huit jours. Ses interprètes étaient Gina Barbieri, Bouquet, Vitray, Legoff.

— vous souvenez-vous, Charles Vildrac. de l'impression que vous a produite ce spectacle

se rappelle-t-il. J'avais l'impression de m'exhiber tout nu !

Dieu merci ! on se fait à tout. Et parmi une production dramatique qu'il nous est donné d'applaudir, trop rarement d'ailleurs : le Pèlerin, Madame Béliard, la brouille (1930) nous valent à la Comédie française d'enrichissantes soirées.

Croquis de Charles Vildrac, exécuté par Berthold Mahé.

Charles Vildrac est sans doute plus joué à l'étranger qu'en France, en Italie et en Allemagne notamment.

Tous les ans il part un mois, tout seul, à Saint-Tropez, où il faisait, il y a quelques années encore, un voyage de huit jours à pied, sac au dos, « pour faire connaissance, m'explique-t-il, avec mes personnages ». Mais cette retraite de courtes semaines ne l'empêche pas d'estimer à son prix une vie de famille qu'il me décrit en quelques mots :

Vous savez que j'ai épousé Rose Duhamel, la soeur de Georges ? J'ai un beau-fils, une fille grand-mère déjà, ma petite-fille, mariée à dix-sept ans et demi, ayant elle-même trois enfants. C'est ma femme, aidée de mes enfants, qui s'occupa de la galerie que j'ai dirigée après l'expérience de l'Abbaye. L'endroit même en a disparu, au 11, rue de Seine, pour céder la place au petit square qui niche derrière l'Institut. Je me suis toujours occupé de critique d'art et je viens de publier récemment un Camoin:.

Et la poésie ?

Je n'en écris plus guère, hélas ! soupire-t-il. Vous savez que la poésie demande une constance, une fidélité exclusives.
A vrai dire, ce qui l'attire le plus, c'est écrire pour les enfants.

Dans le vaste salon Empire qu'il habite au deuxième étage d'une des-plus ravissantes maisons de la rue de Grenelle, et qu'ornent aux murs des dessins et des toiles de Berthold Mahn, de son gendre Gerbaud, mort prématurément, de Marquet et de Matisse, Charles Vildrac m'ouvre les rayons de sa bibliothèque où il a rassemblé ses livres pour enfants.

Ingénus, colorés, frémissants, poétiques, les titres prennent leur essor, « la Famille Moineau » la Colonie, les Lunettes du lion, Bridinette, le Castor Grogh, l'lle Rose...

Si je m'écoutais, me confie Charles Vildrac, je n'écrirais plus que ça !

CLAUDE CÉZAN.

Ecole Libératrice n°15 – 1959 p.29 et pp.37 quelques vers de Vildrac.

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