Je suis très mitigée par rapport à ce livre, auquel je suis venue, d'une part, pour répondre à l'exigence de la lettre Y du challenge, d'autre part, parce que le sujet m'intéressait beaucoup. L'auteur raconte un fait réel de sa province natale, le Henan, survenu dans les années 90, alors que le Gouvernement appelait les petites gens à vendre leur sang. Forcément, l'intérêt était plus en faveur de certains que des villageois, et on comprend vite que ceux qui sont censées y gagner ont finalement été les victimes.
La "fièvre" s'installe, les villages semblent maudits. Des pustules apparaissent, de plus en plus de gens succombent. le Sida, que personne ne connait encore dans ces petites régions du monde (on le découvrait en France et je me souviens encore de cette fameuse émission où je ne sais plus qui avait embrassé sur la bouche un malade du Sida pour expliquer où résidaient les risques), terrasse. Il est intéressant de constater à quel point ces populations chinoises étaient démunies (breuvages à coup de Ginseng, isolement dans la petite école de village...). Il est édifiant de remarquer les vicissitudes de l'âme humaine, exacerbées alors même qu'
elle se trouve aux portes de la mort. Ce roman est clairement, pour moi, une étude de l'âme humaine : comment chacun se comporte alors qu'il va mourir, alors qu'il est coupable de l'épidémie, alors qu'il est témoin du profit égoïste de son enfant...
Tout cela est positif et j'ai aimé, dans l'épilogue, lire les confidences de l'auteur, comprendre à quel point l'écriture de ce roman avait été éprouvante pour lui (cela me rappelle les confidences d'Eric
Emmanuel Schmidt à la fin de « La Part de l'Autre », pour des raisons différentes cependant). Il faut savoir que le roman est interdit en Chine et que
Lianke YAN n'est pas en odeur de sainteté pour le gouvernement ; on ne peut donc que saluer l'engagement de l'auteur pour ouvrir les yeux du monde.
La langue est belle, c'est très poétique, le choix du narrateur, très particulier, est intéressant. le roman est donc indéniablement réussi et L. Yan ne peut que se rassurer là-dessus (il évoque un doute dans son épilogue). Néanmoins, ce livre n'est pas un coup de coeur pour moi. Je me suis sentie à distance tout le long, je n'ai pas accroché avec les personnages, je me suis presque ennuyée sur la fin avec un rythme qui ralentit trop. J'ai ressenti une sorte de froideur, mais peut-être était-ce nécessaire lorsqu'on comprend à quel point l'auteur a été affecté…