Lily Morton

Ce sourire reste sur mon visage alors que j'achète le livre, mais me quitte brusquement lorsqu'il me traîne en dehors de la librairie jusqu'à une...

- Oh non, je ne monte pas là-dessus, refusé-je en plissant les yeux face à la moto garée au bord du trottoir.

Ses lèvres se retroussent.

- C'est une Norton Commando.

- Ça pourrait être la queue de Daniel Craig faite en or que je ne monterais quand même pas dessus.

Pendant une seconde bien trop longue, je me tiens sur le balcon, fermement serré contre le torse de Patrick qui a l'air se s'être fait pousser autant de mains qu'une pieuvre depuis notre rupture. Je suis figé par la surprise un moment, puis la réalité me frappe et je lève les mains pour le repousser de force.

— Le cercueil était installé dans le salon et Peter a essayé de s’en approcher, mais son grand frère était ivre et l’a empêché de passer, en disant que les pédés n’avaient pas le droit d’entrer chez lui.
Zeb grimace, mais m’indique de poursuivre.
— Et puis, il a posé ses mains sur Peter, l’a poussé, mais Peter a répliqué, expliqué-je en souriant. J’avoue que ça m’a surpris. J’en étais presque fier.
Je hausse les épaules et continue :
— Mais ensuite, c’est devenu une foire d’empoigne et la bagarre a éclaté. Il y a eu pas mal de bousculades et beaucoup de membres de la famille semblaient avoir des sentiments très intenses concernant l’homosexualité. Et je ne parle pas des sentiments agréables et forts que vous pouvez ressentir chez Vibe à minuit.
Il fronce les sourcils.
— Et donc ? Comment y avez-vous mis fin ?
Je remue sur ma chaise.
— J’ai frappé le grand frère, c’était mérité, avoué-je rapidement. Ce crétin d’homophobe avait donné une claque à Peter.
— Et ensuite ?
Je lui jette un regard et il soupire.
— Il y a plus, dit-il en secouant la tête, résigné. Je sais qu’il y a plus, c’est toujours le cas.
Je tente de feindre l’indignation, mais je n’y arrive pas parce que c’est la vérité.
— Je l’ai frappé, et je dois avoir plus de force que je croyais parce qu’il a volé dans les airs et a atterri sur le cercueil.
— Jésus Christ, marmonne Zeb en se frottant les yeux.
— Vous savez qu’en espagnol, ça se dit Jesu Christo ? questionné-je en hochant la tête. Je le sais parce que ces deux mots ont été beaucoup criés après mon intervention.
— Pourquoi ?
Le moment où sa voix se charge de détresse arrive. Je me mords la lèvre.
— Parce que la vieille dame est en quelque sorte… sortie de son cercueil.

[...]

— Bon, alors, le corps de la défunte est en quelque sorte sorti de son cercueil et le frère lui est tombé dessus.
Impuissant, je hausse les épaules.
— Ça a mis un terme à la fête de façon assez abrupte.
— J’imagine, oui, concède-t-il d’un ton traînant. C’est comme ça que vous avez eu votre œil au beurre noir ?
— J’aimerais vous dire que oui, mais la terrible vérité, c’est que dans l’action, une chaussure de la vieille dame a volé et a terminé sa course dans mon œil.
Il y a un long silence durant lequel son visage devient rouge. Inquiet, je me demande si je dois appeler les pompiers, mais à ce moment-là, il commence à rire. Rire, à n’en plus finir.

Il secoue la tête et jette sa serviette avant de pousser un petit sifflement. Quelques secondes plus tard, un golden retriever hirsute entre dans la pièce en sautillant. Il a l’air assez jeune et se pavane, dansant presque sur ses pattes.

— Il est adorable, noté-je en lui tendant la main. Comment s’appelle-t-il ?

— Boris Johnson.

Je cligne des yeux.

— Pardon ?

Il sourit.

— Il est blond, stupide et il prend des décisions très discutables.

Je rejette la tête en arrière et je ris bruyamment.

Tu n'as pas eu de partenaires. Tu as eu des aventures, contredit-il sévèrement. Un partenaire, c'est quelqu'un en qui tu as confiance et qui te le rend. Quelqu'un qui te fait rire et qui peut te rendre si furieux que tu as envie de partir, mais en même temps si heureux que tu sais que tu ne partiras jamais. Un partenaire, c'est quelqu'un qui est là pour toi dans les bons et les mauvais moments, et tout ce qu'il y a entre les deux.

— Est-ce que tu as…

Il s’arrête et se racle la gorge.

— As-tu bien dormi ?

— Qu’est-ce qui se passe là ? demandé-je faiblement, et Niall rit bruyamment.

— C’est Silas qui fait sa cour. C’est comme regarder un film de Jane Austen. Tellement lent.

Il fait semblant de s’éponger les yeux.

— Mon garçon a grandi.

- Des promesses, des promesses.
- Une bonne déclaration en or massif, dit-il brusquement avant de me pousser à l'intérieur.

— La ferme, souffle-t-il. Oh mon Dieu. Parfait. Je n’arrive pas à y croire. Je viens de lire ça. Tu es là et hmm. Parfait.

— Voyelles, dis-je lentement. Les verbes et les liaisons. Ils aident les phrases à s’assembler. Comme un bal pour les mots.

- Salut, mon pote. Ça, c’est un gros câlin. Tu as eu une bonne journée à l’école ?

– Oui. Devine quoi ? J’ai une petite copine.

– Ooh, comment s’appelle-t-elle ?

– Amanda, mais Charlie était triste parce qu’il n’avait pas de petite copine, alors on en a parlé et on va partager la mienne.

Et il y a une petite pause.

– Waouh, Billy. Je crois que c’est ce que les footballers de première division font.

“Je croise les bras et regarde Zeb. Il porte un jean blanc avec une chemise en jean délavé et des chaussures bateau en cuir, mais j’aime particulièrement la façon dont il a accessoirisé son look avec un sévère cas de bougeotte.
— Ça rend bien, commente-t-il enfin d’une voix plus aiguë que la normale.
— C’est certainement le cas, confirmé-je sans émotion, même si ce n’est pas tout à fait son cadre d’exposition habituel.
Pendant une seconde, nous nous fixons, puis il craque :
— Je suis désolé, murmure-t-il en passant ses mains dans ses cheveux. C’est juste que tu l’aimais tellement dans la galerie, je voulais que tu l’aies.
— J’aime aussi Ryan Reynolds. Il arrive quand ?
— Pas dans l’immédiat. Nous avons rencontré un problème avec les douanes.
Je ris et il secoue la tête.
— Il ne pourrait pas te supporter de toute façon, ajoute-t-il sèchement. Il se ferait interner en même pas vingt-quatre heures.”