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Citations de Limousheels (33)


— Putain de bordel de merde ! jura Pierre.
Le choc sur son bras. Le café brûlant sur sa veste, sa chemise, le haut de son pantalon et surtout sa peau.
La sensation de chaud fut immédiate, comme la colère. Mais elle retomba aussi vite qu'elle était montée et Pierre ne constata pas les dégâts. Son regard était parti ailleurs.
— Toutes mes excuses ! entendit-il.
La responsable de cet attentat vestimentaire s'éloignait, la main gauche levée en un vague geste d'excuse. Délicat et gracieux, insolent et sublime.
Son sang bouillonna. Cette voix rieuse, ce parfum enivrant, cette démarche féline, cette chevelure flamboyante, ce port de tête fier, cette main élégante, ces doigts graciles, ces épaules droites, cette taille fine, ces hanches voluptueuses, ces fesses fermes, ces jambes interminables, ce tailleur volcanique, ces bas raffinés, ces escarpins foudroyants.
Et cette montre...
C'était elle. La femme incroyable dont le souvenir hantait parfois ses nuits et ses rêves érotiques. La femme qu'il fantasmait. La femme qu'il voulait baiser encore et encore. La femme dont il voulait connaître le passé.
— Canon, hein ? Mais elle vous a pourri votre costume !
Le serveur venait de rompre l'enchantement. L'enchanteuse disparut à l'angle d'une allée, sans un regard.
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— La rampe est ouverte et on est prêt à larguer, annonça le major depuis l’arrière.
— Qu’est-ce qu’il y a en dessous de ton côté ? demanda le lieutenant à Sylvie. Le vent va tout envoyer à droite.
— Des arbres, de la neige… Et encore des arbres et de la neige, répondit Sylvie après avoir regardé dehors.
 
Mathias réalisa que la rampe du Transall était ouverte et qu’un mécanicien lui faisait signe. Il lui répondit de la main et d’un battement d’ailes.
 
— Début du largage, annonça le major.
Sylvie ressentit les mouvements verticaux de l’avion chaque fois qu’une palette le quittait. Elle se pencha au maximum vers l’arrière et aperçut des grappes de parachutes qui semblaient partir plus vers la droite du Transall que vers le bas.
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Sylvie fouilla dans son sac et lui tendit l’objet argenté du général de Jorsac. L’officier en face d’elle sourit :
— J’ai admiré votre adresse. Je me demandais si vous alliez le ramener. Pardon, je me demandais quand vous alliez me le ramener. Je vous ai dit que je croyais en votre honnêteté et je ne suis pas déçu.
— Oui, je suis désolée. Je l’ai attrapé par réflexe et je l’ai oublié avec… ce qu’il s’est passé. Je ne m’en suis souvenu qu’hier soir quand trois hommes m’ont abordée en exigeant que je leur rende un objet leur appartenant.
— Et donc vous ne le leur avez pas donné ?
— Euhhhh… Non…
— Évidemment, ils n’étaient que trois, c’est un peu juste pour vous.
— Euhhhh… Sans le faire exprès, j’ai gardé autre chose de la Bosnie…
Tout en grimaçant, Sylvie sortit à moitié le pistolet de son sac. Le général Dranleu éclata de rire.
— Vous êtes incroyable ! Si la sécurité savait cela ! Quoique, l’arme la plus dangereuse est sûrement votre robe. Il faut donc que je m’attende à devoir expliquer trois nouveaux cadavres ?
— Non, mon général. J’ai juste tiré en l’air.
— Bien. Si vous n’avez pas abattu d’avion, ce sont des soucis en moins. Alors cet objet ?
— C’est un enregistreur, précisa Sylvie en rangeant le pistolet.
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— Une demoiselle avec du caractère, sourit l'ambassadeur en se penchant vers Ina et son index. Ta maman doit être fière de toi.
— Telle mère, telle fille, murmura une nouvelle fois Luiz. Peur de rien ni de personne.
— Oui, mes trois mamans sont fières de moi, annonça Ina, le doigt toujours levé vers le visage du diplomate.
— Euhhhh…
Lèvres pincées et sourcils froncés pour certains, sourires attendris pour d’autres. Ina leva davantage son index, comme une élève en classe, prête à réciter sa leçon, presque sur le nez de l’ambassadeur :
— Oui, mes trois mamans ! Ma première maman, qui est morte et qui est une ange qui veille sur moi. Mama Sy qui est ma deuxième maman. Et ma troisième maman qui est la maman de ma deuxième maman qui est donc aussi ma sœur !
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— Qu’est-ce que tu fais encore ? demanda Erwan.
Sylvie soupesait les deux types de cartouches, l’autre fusil sur les genoux. Elle leva les yeux :
— J’anticipe !
Elle tapota le crâne d’Erwan avec son index :
— Si nounours vient te chatouiller les orteils, tu seras bien content d’avoir une arme déjà prête !
Une capacité de cinq cartouches. Sylvie se décida :
— Deux rouges pour faire peur, une noire pour se défendre, une rouge pour refaire peur, une noire en dernier recours.
Elle fixa Erwan :
— Je le garde, hein ? Des fois qu’un nounours breton ait une petite fringale de grosse vache limousine en plein milieu de la nuit !
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Il soupira, enlisé dans ses mauvaises explications :
— J’ai fait une énorme connerie, je le sais. Je ne peux pas la changer. Pourtant je rêve de revenir en arrière pour tout effacer. Je ne peux que te demander à genoux de me pardonner. Je suis…
— Con à être balancé par-dessus bord et à être empalé sur un iceberg pendant l’éternité ! grinça Sylvie.
— Oui…
Erwan esquissa un début de sourire :
— Surtout que je vole très mal.
— Voler, même très mal, n’est pas le principal problème…
Il fronça les sourcils, hésita, puis comprit et soupira encore une fois :
— J’atterris très mal…
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Fabien se réveilla en sursaut. En urgence. Plus proche de la panique que de la conscience. Sans réfléchir, il rejeta son duvet, fouilla dans son sac, ouvrit précipitamment la tente, enfila ses chaussures sans prendre et perdre le temps de les lacer. Et fuit au hasard devant lui.
Le froid ne le surprit pas. D’autres sensations étaient trop urgentes, trop violentes, trop saisissantes. Un gros rocher lui sembla parfait. De toute manière, il n’avait plus le temps. Il se rua derrière. Le tsunami approchait.
Fabien baissa son caleçon long, s’accroupit et se vida. Une vidange interminable et bruyante. Mélange de honte et de soulagement. Il grimaça. Gastro, tourista, diarrhée, courante, chiasse, foirade, cavalante, tourmente, drouillasse. Des mots différents pour un même résultat.
Quand le flot se tarit, Fabien se sentit mieux. Pas longtemps, car des sensations autres que le fer rouge qui lui fouillait les tripes l’assaillirent. Migraine, fatigue, vertige, faiblesse.
Une seconde vague traîtresse surgit sans prévenir et faillit le surprendre à se rhabiller, à moitié relevé, la main sur son caleçon. Le sol caillouteux reçut sans broncher cette deuxième couche.
Ses jambes finirent par protester d’être pliées, Fabien se redressa enfin. Il n’avait aucune idée du temps passé derrière son rocher, l’esprit aussi vide que ses intestins. La sueur sur son front commençait à geler. Le ciel était bleu, le soleil brillait, mais aucun oiseau ne chantait.
Il s’essuya et remonta son caleçon. Il déposa délicatement une large pierre plate sur la mare marron qu’il laissait. Par miracle, il ne s’en était pas mis partout. L’expérience de la vie en pleine nature.
Ses pas pesaient lourd, marqués par autant de frissons.
— Merde ! Toi aussi ?
La voix rauque le fit sursauter. Trois silhouettes hors des tentes, trois visages pâles, trois rouleaux de papier toilette.
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— Je le vois ! lança Sylvie, l’index pointé vers l’avant. Pile devant nous, au ras de l’eau !
Ina plissa les yeux. Sylvie se corrigea :
— Ah non, pardon, je les vois ! Ils sont trois…
— Le point noir ? demanda Ina.
— Oui !
— C’est le Transall de Dodo ?
— Non !
Et puis, d’un seul coup, il fut là, ils furent là. Dans un terrible rugissement, un gigantesque quadrimoteur frôla le voilier, plus bas que le haut de ses mâts. Ina se boucha les oreilles. Sylvie ressentit autant qu’elle entendit le hurlement grave des énormes moteurs. Dans ses tripes, dans sa cage thoracique, dans sa tête. Par tous ses sens. L’odeur du kérosène brûlé remplaça l’iode. Un avion trop gros et trop près pour être vu dans son ensemble par un œil humain.
Deux copies conformes passèrent de part et d’autre de l’Aufrédy. Sylvie leva sa main libre et, le temps d’un infime instant, son regard croisa celui du pilote.
— Rhoooo ! Le pied qu’ils doivent prendre à voler aussi bas ! feula-t-elle de plaisir. Ça doit être génial !
Unique sourire sur le voilier.
— Mais merde ! s’écria Soaz. Ce con m’a foutu les j’tons !
Les trois appareils avaient déjà disparu. Leur son s’étiolait. Seules restaient une vague odeur de brûlé et la sensation de puissance de l’être humain.
— Ils s’amusent bien, ces enfoirés de Canadiens ! grogna Loïck.
— Euhhhh…
Sylvie grimaça. Tous les regards se tournèrent vers elle.
— Ce ne sont pas des Canadiens… Des Russes…
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Samedi 20 juillet 1996, 05h00, Cayenne, Guyane
— Je vais te raconter une histoire…
À l’arrière de l’antique camionnette, Sua, la vieille Guyanaise au large sourire où quelques dents manquaient, attira la petite Ina sur ses genoux maigres. À six décennies et quelques jours près, elles avaient le même âge.
À l’avant de l’antique camionnette, Sylvie Lachan se retourna, attendrie. Autant par la petite fille que par le couple d’agriculteurs qui les accueillaient depuis quelque temps. Le gîte et le couvert contre de l’aide et des travaux. Réciprocité de la charité humaine et de l’assistance matérielle. À sa gauche, Lis, le mari de Sua, conduisait les yeux presque fermés sur la route nationale menant au marché de la capitale de ce département d’outre-mer. Capitale, préfecture, chef-lieu, Sylvie ne savait pas vraiment.
Les fenêtres ouvertes répandaient un air presque frais dans l’habitacle aux multiples odeurs, à moitié organiques, à moitié minérales, entre fruits et légumes, terre et poussière. Avec, peut-être, un soupçon de vieux cuir.
À l’arrière, la voix de Sua déversait un flot lent de paroles que Sylvie n’arrivait pas à saisir. Plus une mélopée qu’un discours. Plus une mélodie qu’une histoire. Ina buvait ses mots, la bouche entrouverte, les yeux comme des billes rondes et brillantes malgré l’obscurité. Fascinée par ce qu’elle voyait et entendait, elle céda à la curiosité et son petit doigt parcourut la peau striée, creusée, sillonnée, tannée de la Guyanaise qui n’en fut ni surprise ni blessée, et qui n’interrompit pas son récit aussi coloré que sa robe.
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Un crépitement et des étincelles troublèrent la mer et la nuit. Sylvie et Erwan bondirent en même temps vers les haubans.
Une détonation assourdie claqua dans l’air, des pas battirent le bois. Un trait lumineux s’étira comme une flèche enflammée.
Sylvie jeta un regard vers le bas. L’ombre s’engouffra dans le rouf. Puis vers le haut. Un rond vert piquetait le zénith et le voilier d’une teinte monochrome.
Erwan sauta sur le pont et se précipita à la poursuite de l’individu. Sylvie atterrit à son tour et hésita un bref instant. Elle ne les suivit pas, mais courut vers le mât de misaine, le contourna, entra sous le gaillard d’avant, glissa et manqua de tomber. Elle se rattrapa de justesse, se pencha dans l’escalier et aperçut l’ombre qui fuyait tout en bas. Erwan arriva du couloir des cabines passagers et dévala les marches menant à l’étage inférieur.
Sylvie se bloqua. Son cerveau hurlait, un détail clochait. Elle trouva. L’odeur écœurante et la viscosité du liquide sous ses semelles.
— Ohhhh merde !
Elle baissa sa lampe. Une flaque rouge sombre. Elle s’accroupit. Ce n’était pas un reste de la soirée alcoolisée.
— Du sang ?
L’hémoglobine collait au bas de la cloison. Sylvie leva la tête et sa lampe. Ce n’était pas une cloison, mais la porte des toilettes. Le sang s’écoulait lentement, comme s’il peinait à se faufiler par la mince fente malgré la gravité et l’inclinaison du voilier.
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Un cri aigu les interrompit. Ils se retournèrent. La riche Roxane, sur le point de défaillir, appuyée sur l’épaule du commandant, des larmes ruisselant sous ses grosses lunettes de soleil. Titubante, elle redescendit les marches qu’elle venait de gravir, soutenue par l’officier, plus embarrassé et impatient que compatissant.
— Eh bien… dit Myriam, surprise. Il semblerait qu’elle ait un cœur finalement.
— Ou un cul… grommela Coumbala.
Passagers et membres d’équipage se rassemblèrent par petits groupes, échangeant hypothèses et certitudes les plus farfelues. Une ambiance lourde de regards fuyants et de messes basses.
— Sympa la croisière, gronda le retraité parisien. Alors qu’il en avait peut-être juste marre et il a voulu aller aux putes aux Canaries !
— C’est quoi aux putes ? demanda Ina.
— Euhhhh… au but ! répondit Sylvie. Avec un b comme bisou. Tu sais, au foot, il faut marquer des buts. Il a peut-être voulu aller jouer au foot… et marquer des buts…
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Ses pieds touchaient à peine le sol. Pâle, le nez en sang, les poignets menottés dans le dos.
— Une chute malencontreuse… s’excusa le gendarme.
Son sourire sarcastique démentait sa repentance.
— La maladresse est un véritable fléau, plaisanta Sylvie.
— Je veux mon avocat, gémit le blessé.
— Pour défendre l’adjudant-chef que vous avez agressé d’un coup de nez dans son poing ? demanda Sylvie.
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— Monsieur le maire, vous aviez raison, dit Sylvie. Il y avait bien un visiteur nocturne.
— Ahhhh ! Merci madame la préfète ! Les gendarmes l’ont attrapé ?
— Non, il a réussi à s’enfuir.
— Je vais demander du renfort à la brigade d’Uzerche, chuchota Luiz.
Sylvie répéta l’information et rassura l’élu. Quand elle raccrocha, elle comprit que son ami se contenait :
— Bon… Écoute, tu fais comme tu le sens. Si tu ne veux pas réveiller ton chef parce que tu n’as pas le même avis que moi et que tu juges que c’est sans intérêt, c’est ton problème. Juste pour ton information, madame la préfète est à côté de moi et prend l’affaire très au sérieux. Bonne nuit !
Et il raccrocha en grognant.
— Ohhhh, mais que c’est moche ! se moqua Sylvie. Serais-je l’argument l’ultime quand môssieur est à court d’idées !
— Je cherchais le mot, soupira Luiz. Mais oui, c’est ça, l’argument ultime ! Ces planqués m’épuisent et je n’avais pas envie d’y passer la nuit.
— Mais que fait-on alors ? demanda Amandine. On ne va quand même pas laisser ce type revenir creuser !
— La cavalerie d’Uzerche va arriver, ricana Luiz.
— T’es sûr ?
— Sûr et certain ! L’argument ultime marche à tous les coups. En ce moment, ça doit galoper dans la brigade d’Uzerche !
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Elle soupira et expliqua :
— Non, c’est pas compliqué. 1471, c’est presque mille cinq cents, à deux pour cent près. 1,949, c’est presque deux, à deux pour cent près. Environ. Et mille cinq cents fois deux fois neuf, ça fait trois mille fois neuf, donc vingt-sept mille. Mètres. Auxquels il faut enlever les bouts de pour cent. Deux fois deux pour cent. Et quatre pour cent de vingt-sept, ça fait presque un. Donc vingt-six kilomètres…
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La piste approchait. À cause du vent, Mathias maintenait un fort angle de dérive, le nez pointé franchement sur la droite alors que la trajectoire de l’avion par rapport au sol était à peu près dans l’axe d’atterrissage, aux rafales près.
Encore une dizaine de mètres de combat avant l’impact que le Français espérait le moins violent possible.
— Un troupeau de caribous traverse la piste…
Mathias comprit la nouvelle invention de son instructeur et poussa l’unique manette vers l’avant. Cette action dissymétrique modifia l’aérodynamisme du Twin Otter, obligeant le pilote à s’agiter, autant avec le volant qu’avec les pieds et le compensateur.
— Les caribous sont partis, mais une tempête tropicale nous rattrape.
— Tropicale ? sourit Mathias malgré lui.
— Oui, c’est le changement climatique. Le contrôleur nous informe que tu n’as plus que trente secondes avant qu’elle n’arrive.
Mathias réduisit lentement les gaz tout en orientant les commandes de vol à l’inverse de ce qu’il venait de faire. La piste était au-dessous, toute proche, mais elle oscillait dangereusement devant ses yeux. Il fit descendre le Twin Otter, balança un bon coup de pied à gauche et inclina les ailes vers la droite pour le garder dans l’axe de la piste tout en contrant l’effet du vent.
La roue droite impacta le sol. Durement. L’avion rebondit.
— Comme d’hab… soupira Mathias au fond de son cerveau désespéré.
Il remit un peu de gaz. La roue droite toucha à nouveau. Moins durement. Le Twin Otter rebondit encore une fois.
— Putain, je progresse…
La roue droite embrassa définitivement l’asphalte, suivie peu après par la gauche.
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Sylvie suivit avec Pierre. Elle se pencha vers lui :
— J’ai raté quelque chose ou il ne m’a pas balancé la moindre méchanceté ?
— J’en suis également fort surpris… répondit Pierre. Une opération séduction ?
— Il a du boulot…
— Je l’ai croisé dans la semaine et il semblait sincèrement inquiet au sujet de votre santé…
Sylvie le dévisagea avec de grands yeux :
— C’est louche… Il y a anguille sous roche…
— Vous voyez le mal partout, madame. Peut-être est-il humain, tout simplement ?
— Lui, humain ? Pffff… Bon… Vous avez raison, il n’y a pas anguille sous roche.
Elle se pencha vers lui, la main sur son bras :
— Mais baleine sous gravillon !
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Elles plongèrent vers la Vézère et la ville d’Uzerche. La rivière franchie, elles tournèrent à gauche sur l’avenue du Général de Gaulle.
— C’est vraiment très beau, admira Amandine.
— La perle du Limousin ! s’exclama Sylvie.
— Je croyais que c’était toi, la perle du Limousin.
— Aussi ! Mais en moins âgée ! Tiens, est-ce que tu connais la différence entre une femme et une perle ?
— Euhhhh… Non…
— Je te laisse le découvrir par toi-même ! pouffa Sylvie.
Amandine se jeta sur son téléphone.
— T’es méganulle !
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L’Aufrédy était complètement silencieux. Personne dans les couloirs, personne dans la salle à manger. Sylvie et Ina prirent de quoi grignoter et montèrent sur le gaillard d’arrière. L’air était doux. Dans le ciel bleu foncé glissaient quelques nuages, légers et fluides. La tempête était derrière eux, de grosses masses obscures, loin au sud-est, s’illuminant aux premiers rayons du soleil. Sur l’océan à peine agité, il n’y avait plus d’écume au sommet des vagues.
Une forme sombre était avachie à côté de la barre. Joachim. Il sursauta quand elles arrivèrent près de lui.
— Bonjour ! s’exclama Ina en se mettant sur la pointe des pieds pour l’embrasser.
Le marin couvert de tatouages se laissa faire, par réflexe, se frotta les yeux et s’étira.
— Comment ça va ? demanda Sylvie.
— Ça va. Un peu dur, mais ça va. Sale nuit…
— Oui, c’est peu de le dire.
Elle lui tendit un gâteau qu’il s’empressa de dévorer.
— Tu es resté tout seul ?
La bouche pleine, il désigna la timonerie. Ina ouvrit la porte et Erwan apparut. Un albatros échoué, trempé et dégoulinant, vautré à moitié par terre, dans un coin, les cheveux encore mouillés, les bras et les jambes en vrac, le bec grand ouvert. Sylvie éclata de rire :
— La grande classe !
Joachim et Ina rirent à leur tour, ce qui le réveilla :
— Hein ? Quoi ?
— Les fins de soirée ne sont pas très glorieuses dans la marine, se moqua Sylvie.
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— Tu as vu mama Sy, je sais nager ! s’écria Ina.
— Oui, j’ai vu. Bravo ! Je suis fière de toi. N'oublie pas de remercier Julien.
Trempée, Ina bondit dans les bras de son maître-nageur, sec au-dessus de la ceinture, et se serra contre lui. Il regarda Sylvie en soupirant et leva le pouce de dépit.
— Ohhhh le pauvre, grimaça Myriam. Mais t'es vraiment terrible !
— Désolée, c’était trop tentant et trop facile…
— Mama Sy, c’était bien comme câlin pour dire merci ?
— C’était parfait, s’esclaffa Sylvie. Tu es adorable !
Devant eux, légèrement sur tribord, le soleil rejoignait l’horizon. Ils sortirent de l’eau pour admirer sa noyade. La lumière rassurante allait sombrer dans les angoisses de la nuit.
— C’est beau, dit Sylvie.
— C’est effrayant, dit Myriam.
— C’est l’heure de l’apéro, dit Coumbala.
Tous les onze restèrent ainsi, à contempler la disparition du cercle orange dans les flots bleus, cet instant coloré et unique de la journée, propice à tant d’émotions, lent et rapide à la fois, bascule entre deux mondes.
L'obscurité tomba, comme un rideau au théâtre. Un remue-ménage remplaça le silence admiratif. L’équipage préparait une nouvelle manœuvre.
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Lucie donna le mégaphone au plus gradé de ses gendarmes et se tourna vers les autres :
— Bon… Tous les trois, vous allez vous mettre chacun au volant d’une des voitures qu’on vient de pousser. À mon signal, et seulement à mon signal, vous allumerez les phares. Ce signal sera trois flashs avec ma lampe. Compris ?
Seul le silence lui répondit.
— Compris ? grogna-t-elle.
— Euhhhh… oui, souffla une voix timide.
Lucie eut un doute :
— Répétez-moi ce que vous devez faire !
— Euhhhh… on va s’asseoir dans les voitures.
— Et ?
— On allume les phares, répondit une autre voix.
— Quand ?
— Quand quoi ?
— Putain… Quand est-ce que vous allumez les phares ?
— Euhhhh… quand vous faites signe avec votre lampe.
— Combien de fois ?
— Combien de fois on allume les phares ?
— Bordel, non ! Combien de flashs avec ma lampe pour que vous allumiez vos phares ?!
— Euhhhh… trois fois.
— Putain… C’est pas gagné, soupira-t-elle.
Elle inspira longuement et se calma.
— Tous les trois, allez-y, leur ordonna-t-elle. Chacun dans une voiture et ne claquez pas les portières.
Les trois gendarmes filèrent. Lucie se tourna vers le dernier de ses hommes, celui avec le mégaphone. Un bruit métallique l’interrompit. L’une de ses trois lumières en uniforme avait dû se cogner dans une voiture.
— Putain le con… Bon alors, quand je te le dirai…
Une portière claqua sèchement dans le silence de la nuit.
— Mais merde, c’est pas vrai ! grogna-t-elle. T’as intérêt à être moins tocard toi ! Donc, à mon ordre, tu leur diras de sortir de la maison. OK ?
— OK.
— Allez, viens !
Masquant l’extrémité de sa lampe pour ne laisser filtrer qu’un filet de lumière, Lucie s’avança, suivie de son subordonné portant le mégaphone, à droite des voitures, derrière un tas de bois de chauffage.
— Lieutenant ? chuchota son collègue.
— Quoi ?
— Mais… qu’est-ce que je dois dire exactement ?
— Putain, Luiz avait raison, une vraie bande d’intellos… pensa-t-elle. Vraiment raison…
Lucie éteignit sa lampe et s’approcha de lui :
— Et bien tu leur dis, gendarmerie nationale, vous êtes encerclés, veuillez sortir de la maison les mains en l’air.
— OK.
— Répète.
— Euhhhh… Vous êtes encerclés. Sortez.
— Et merde…
Un message illumina l’écran de son téléphone. Keziah.
On est en place. Vas-y. Lumière et sommation.
— À toi de jouer ! murmura Lucie.
— Euhhhh…
— Gendarmerie nationale, souffla-t-elle.
— Gendarmerie nationale, répéta l’homme.
Lucie soupira :
— Putain ! Il faut l’allumer ! Le mégaphone ! Et ton cerveau!
Elle dut l’aider à trouver le bouton.
— Répète ce que je te dis, OK ?
— OK !
— Mais non bordel, pas le OK ! Pffff… Allez répète. Gendarmerie nationale.
— Gendarmerie nationale !
— Vous êtes encerclés, veuillez sortir de la maison les mains en l’air.
— Vous êtes encerclés ! Veuillez sortir…
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