Journaliste : un mot, un titre neutre, ni masculin ni féminin ! Mais c'est aussi révélateur : pas une seule fois, sur le terrain, dans des moments exaltants, stressants, voire tragiques, j'ai l'impression que mon regard diffère de celui d'un homme. Ce qui change, en revanche, c'est la manière dont les femmes reporters sont vues.
C'est une force, un atout, pour pénétrer certains milieux - quand il s'agit, par exemple, de recueillir la parole d'une femme voilée ou d'une esclave sexuelle : malgré leurs peurs, malgré leurs réticences à parler, elles le feront plus facilement face à nous. Autrement dit, être une femme nous permet de passer de l'autre côté du miroir, dans des univers cachés, secrets, et même, paradoxalement, d'approcher les milieux qui leur sont les plus hostiles. Je pense bien sûr aux islamistes radicaux, ceux rencontrés au Pakistan ou ailleurs.
Car même eux n'arrivent jamais à se persuader qu'une femme pourrait leur faire du mal... C'est une faille, et une faille où j'ai toujours su me glisser sans trop de difficultés.
Cela paraîtra anodin peut-être, mais prendre soin de soi et se renvoyer une image aussi peu négligée que possible ramènent à quelque chose de rassurant, de réconfortant, voire de civilisé. Ce n’est jamais sans effet sur une certaine disponibilité physique et morale.