Ségolène Le Men

La thématique du cirque hante l'oeuvre de Chéret affichiste, non seulement dans les affiches de cirque et de café-concert, mais également dans d'autres affiches culturelles où le clown apparaît comme une figure métaphorique de l'artiste qui se tourne lui-même en dérision, par exemple dans l'une des deux affiches pour l'exposition des Arts incohérents dont la maquette est conservée.

Né en mai 1836, Jules Chéret est le fils d'un ouvrier typographe. A l'âge de 13 ans, il fait l'apprentissage du métier de lithographe et débute comme dessinateur en lettres. Comme les jeunes artistes de sa génération, il miltiplie les visites au Louvre où il découvre Rubens, Watteau, Fragonard, dont l'art inspirera son oeuvre tout à la fois néo-baroque et néo-rococo.

Car Félicien Rops s'en prend vertement à la bourgeoisie, cette classe sociale qu'il exècre et qu'il défiera toute sa vie avec ironie. Douze ans avant sa mort, encore plein de verve et de ferveur, il confie dans une lettre à Joséphin Péladan : "Je suis en Belgique et j'y assiste au spectacle, toujours réjouissant pour mes sentiments, de l'effarement d'une bourgeoisie repue, grasse, satisfaite, qui vient d'entendre gronder à ses oreilles, qui ne voulaient point entendre !, les grondements des prochains orages et des tempêtes populaires. Dans vingt ans il ne restera rien de cette morgue, de ces vices, de cette matérialité triomphante. Et cela m'est une joie d'y songer."

Balzac et Daumier se ressemblent ainsi par leur façon de donner vie aux personnages de leur création : c'est ce qu'exprime le mythe de Pygmalion, qui apparait dans Le chef-d’œuvre inconnu du premier, avant d'être introduit sur un mode caricatural par le second dans sa série Histoire ancienne. Tandis que l'illustrateur fait apparaître sous le regard du lecteur les héros de Balzac, celui-ci glisse dans ses romans des vignettes qui entrent en résonance avec celles composées pour les livres illustrés de la "littérature panoramique" ou les lithographies pour Le Charivari par Daumier.