Se souvenir, comme écrire, est un processus transformateur. Écrire est un processus transformateur.
J’écris des phrases qui se suivent, elles fuient vers l’avant, elles oublient ce qui les précède à mesure. Elles ne seront jamais un roman, elles ne seront jamais des poèmes, je ne les relirai jamais. Elles me servent à ne pas mourir ici.
(Le Quartanier, p.350)
Et je n’ai plus compris
comment ils faisaient
pour ne pas penser
à la mort comment
ils arrivaient à jamais
faire autre chose
que de penser à la mort
c’était la nuit et
je pensais à la mort.
(Le Quartanier, p.141)
J'ai très peur des autres. Les autres me sont étrangers. Je ne sais pas comment me faire des amis. Je ne fais jamais le premier pas. Je ne me souviens pas d'une époque où faire le premier pas était en mon pouvoir. Toujours les autres ont dû venir me chercher.
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C'était une mauvaise année, c'était une mauvaise année en générale, la quatrième secondaire. C'était l'année de Raté, l'année de Burn, l'année où j'ai abandonné le cours de théâtre, le projet de voyage à New-York, et abandonné mon journal intime. Je me traînais où que j'aille, je me sentais toujours triste, c'était devenu une seconde nature. Je passais mon temps à me demander comment il était possible de se sentir aussi triste, continuellement, comme tombant, tombant dans la tristesse, et à me demander si ça finirait un jour.
Ça cesse comme ça a commencé. Je supporte un autre jour avec toi, mais je n'y arriverai plus très longtemps, on ne peut rester si près d'une telle magie sans se laisser contaminer, ça fait trop peur et je ne veux pas mourir.
Chaque battement de mon coeur fait vibrer les feuilles, et moi je suis immobile, j'ai envie de vivre mais je ne sais plus me lever, inspirer fort et avoir faim.
[...] le futur est arrivé et il durera toute la vie.
Peu à peu, j'apprenais qu'à défaut de posséder l'assurance à l'intérieur de soi, on peut la projeter à l'extérieur. Personne ne verra la différence.
je me retourne pour surprendre
un de tes gestes
tu ne bouges pas
je n'aurais qu'à disparaître
pour que tu disparaisses