Bienvenue au théâtre du réel ! Venez assister à son spectacle à nul autre pareil ! Venez contempler l’avenir ! Votre avenir ! Oui, vous avez bien lu ! Ah, il n’est pas bien reluisant, c’est sûr. Voire plutôt minable en fait. Mmh, oui, on pourrait vous arranger ça.
Que diriez-vous d’intégrer notre petite troupe de saltimbanques ? Une éternelle félicité, aucune responsabilité, aucun souci, nous nous chargeons de tout. En échange ? Oh, presque rien. Juste votre … comment votre âme ? Non, diantre non, c’est d’un vulgaire ! Rien de tout cela, je vous assure. Nous nous contenterons de vos … potentialités, de ce que vous auriez pu être.
Quel besoin en auriez-vous au sein de notre équipage puisque nous nous occuperons de tout pour vous ?
Quand on a 13 ans, que l’on est la risée constante du reste de l’école, que cette minable vie dans ce minable bled ne vous offre aucune perspective que de devenir aussi minable que vos parents, voilà le genre de proposition qui pourrait donner à réfléchir. Sauf que les autres membres de la troupe menée par cet étrange bateleur ont l’air légèrement défraîchi pour ne pas dire en état de composition plus ou moins avancé.
En 1994, Neil Gaiman est contacté par le staff d’Alice Cooper qui se trouve être un fan de Sandman. Celui-ci voudrait avoir Gaiman à ses côtés pour écrire un concept-album.
Gaiman accepte et embarque même Dave McKean dans l’aventure.
Un certain nombre d’idées n’ayant pas été retenues pour l’album The Last Temptation, Gaiman s’associa avec le trop rare Michael Zulli pour créer ce livre compagnon de l’album.
Autant le dire immédiatement, ce n’est pas le travail le plus abouti de Gaiman.
C’est un travail de commande et dans l’introduction de la version française, l’auteur reconnaît qu’il n’a pas pu y injecter tout ce qu’il aurait voulu. Le thème non plus n’est pas foncièrement original (en même temps, difficile de faire original dans le genre depuis Faust) mais on y retrouve la patte de Gaiman et l’apparition de thèmes récurrents dans son œuvre comme le passage de l’autre côté du miroir ou l’importance de la dimension onirique.
The Last Temptation ne pourrait être qu’une curiosité pour fan invétéré de Gaiman et/ou d’Alice Cooper mais ce n’est pas le cas. Le plus grand mérite en revient aux superbes planches de Michael Zulli.
Dans un style proche de Barry Windsor Smith, son classieux noir et blanc instille au récit une ambiance oppressante et empreinte de désespoir. La palme revenant évidemment au bateleur incarné par Alice Cooper, délicieux mélange d’humoriste grotesque, de tentateur originel et de meneur de troupe fantômatique.
Laissez-vous tenter.
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