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Citations de Bogdan Teodorescu (24)


Le président de séance demanda le silence et le député reprit :
– Je sais que vous ne nous aimez pas. Pour vous, nous sommes des Tziganes, un point c’est tout. Je vois ça dans vos regards, tous les jours. Peu importe que j’aie fait des études, que je sois docteur ès sciences, que je sois marié et que j’aie trois enfants, que j’aie fait mon service militaire, que je paie mes impôts à l’État. Je reste un Tzigane. Et pour vous, c’est une tare. Je subis ces regards depuis mon enfance, j’avale des humiliations que vous ne soupçonnez même pas. Mon père, Dieu ait son âme, avait fait lui aussi des études universitaires, il avait des doctorats et un prestige international, et il a dû subir tout ça lui aussi. Depuis que je suis au Parlement, je ne cesse de dire que les Roms, que les Tziganes doivent s’intégrer à la société, qu’ils doivent accepter et dépasser leur statut de minorité… Mais ne l’oubliez pas, nous sommes une minorité très sage. Nous ne demandons pas de pancartes bilingues, nous ne demandons pas d’université ni de droits spéciaux, nous n’allons pas nous plaindre auprès de diverses instances européennes. Selon la loi de l’administration locale que nous votons ces jours-ci, il faudrait installer des pancartes bilingues roumain-tzigane en plein Bucarest. Mais nous considérons que c’est aller trop loin. Six Roms ont été assassinés uniquement parce qu’ils étaient roms, je le répète, seulement parce qu’ils étaient Roms ! Et aucun de ceux qui devraient faire la lumière et trouver l’assassin ne lève le petit doigt. J’ai des informations selon lesquelles le ministre de l’Intérieur aurait donné des instructions pour que personne ne soit affecté spécialement à ce dossier. Et je me demande pourquoi… Si c’étaient six Hongrois, six Magyars de Roumanie, qu’on avait retrouvés la gorge tranchée, tout le monde s’en occuperait. Pour des Tziganes, il n’y a pas urgence. Dépêchez-vous, messieurs, vous ne savez pas ce que c’est qu’un Tzigane furieux ! Ou qui a peur de mourir…
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Beau garçon, très beau même, de bonne famille, le Premier ministre portait un nom à résonance culturelle ; il avait réussi ses études en entretenant les soupirs d'amour d'une professeure nettement plus âgée et plus épaisse que lui, était entré en politique sous les jupons d'une dame moins jeune aussi, mais fortement désireuse de s'assurer la vigueur de jeunes et puissants rejetons ; il avait joué le rôle de conseiller d'un homme politique rongé par une longue maladie, qu'il avait vendu au moment opportun ; il avait posé au jeune premier bardé de valeurs culturelles, s'était construit une relation avec une vedette de cinéma dont il avait discrètement distillé les détails dans la presse, avait publié plusieurs livres écrits par d'autres – par des étudiants en histoire pauvres –, et c'est ainsi que, passant d'un bord à l'autre, flattant dès qu'il fallait flatter et où il le fallait, dénonçant tout ce qui pouvait l'être, tout à tout digne, européen et cultivé, il s'était retrouvé Premier ministre. Salué par la presse intellectuelle comme une belle victoire de la classe politique autochtone.
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Victor fit une nouvelle une avec la malédiction de la vieille, publia une photo plus grande des lieux du crime avec la mare de sang et le cadavre recouvert d’une toile noire, et il insinua dans son texte l’histoire de la dette et du prêteur sur gages qui aurait pu avoir des raisons de faire égorger la Mouche. Il lança l’impression du journal et se mit ensuite en quête d’Avakian qu’il rencontra tard dans la nuit devant le Vox, en face du palais du Parlement. Avakian ne voulut pas confirmer que la Mouche avait des dettes à son égard, mais ne le nia pas non plus. En revanche, il expliqua en quoi l’hypothèse d’un assassinat punitif était de toute façon absurde : ses méthodes de récupération de l’argent se fondaient sur l’élément clé de la survie du débiteur. On pouvait lui faire peur, on pouvait lui envoyer quatre armoires à glace moldaves, s’il ne voulait rien savoir on lui coupait un doigt avec des ciseaux mais pourquoi le tuer ? Qu’est-ce qu’on y gagnait ?
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Quand on se cache derrière les livres, derrière les mots, derrière les concepts lancés par les autres, on ne vit pas soi-même. On est trop occupé à apprendre, à lire, à étudier les idées d'autrui, à remplir le vide de son esprit avec l'enseignement des maîtres. Ce vide ne se remplira jamais, jamais on ne pourra assimiler entièrement l'enseignement des autres. Mais ce qu'on aurait pu vivre et accomplir soi-même est perdu. Tout ça pour avoir eu peur, dans sa jeunesse, de choisir sa voie ; on devient un homme de culture, on suit le chemin ouvert par ceux qui nous ont précédé. Ce genre d'hommes ne doit pas durer. Ils sont utiles pour leur propre génération, pour leur propre vie et ils doivent finir avec elle.
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Les gens sont petits, monsieur le Président. Ils ont une petite vie, de petits désirs, de petits moyens, de petits problèmes qu'ils passent toute une vie à tenter de dépasser en se débattant. Les gens sont petits et ils n'ont que rarement, très rarement, de grandes idées. C'est tout. Ne vous faites pas d'illusions : votre appareil à promener nos souverains dans le temps n'est pas une grande idée. Les grandes idées rendent la vie des petites gens plus facile à manipuler.
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La Mouche ramassa sa petite table, envoya promener sèchement la vieille qui faisait une dernière tentative pour récupérer son argent et prit le chemin de chez lui. Il aurait bien bu une bière mais entre lui et la terrasse se tenait la vieille qui râlait, pleurnichait et ne semblait pas avoir la moindre intention de partir.
Dans le passage longeant le magasin, il y avait de l’ombre et, malgré les mauvaises odeurs, il s’y arrêta pour souffler un peu. Au moment où il s’apprêtait à en sortir, il vit un individu habillé d’une longue cape gris-blanc qui se dirigeait vers lui. Quand il fut à deux mètres de distance, le type écarta d’un geste ample le pan de sa cape et sortit un poignard qu’il fit tourner prestement avant de le planter dans la gorge de la Mouche.
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Ils auraient sûrement préféré ne pas se retrouver avec cette affaire sur les bras et ne pas être du jour au lendemain confrontés à des politiciens, des milliardaires, des journalistes et à l'hostilité générale. Ni l'un ni l'autre ne souhaitait devenir l'ennemi des gens importants de la République. Ce qui les faisait sortir de chez eux, le matin, ce n'était ni la conscience professionnelle ni le besoin irrésistible d'arrêter des délinquants, mais seulement leur salaire mensuel et des dessous de table périodiques. Ils n'étaient que deux pauvres types bien ordinaire égarés dans le marasme de la transition roumaine.
(pages 123–124)
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- Je ne vous aime pas beaucoup, monsieur le commissaire en chef. Je ne vous aime pas parce que vous me compliquez l'existence. Dans notre métier, et le pays en général pense de même, les policiers sont brutaux, ventripotents, stupides et corrompus. Les hommes politiques insatiables et menteurs, les femmes politiques des putes ou des harpies, les entrepreneurs des voleurs sans scrupules, le peuple est pur, travailleur, bon chrétien et nous, journalistes nous sommes les gardiens du temple.
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Comment leur expliquer la peur de la mort, pas celle qui est générée par le phénomène biologique, mais par le phénomène social ? La peur de penser que tout ce qu’il sait, tout ce qu’il a pu représenter, tout ce qu’il a construit peut disparaître avec ce vieux corps presque impuissant.
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Une précédente initiative similaire concernant alors exclusivement les problèmes des homosexuels, avait déclenché un véritable scandale en Europe, scandale dont le paroxysme avait été le boycott par les organisations homosexuelles de Grande-Bretagne des vins importés de Roumanie.
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-Alors comme ça, pauvres types que vous êtes, vous croyez que j'ai pris le pouvoir pour que vous vous foutiez de ma gueule ? Vous croyez que c'est pour ça que je vous ai accordé vos fonctions ? Pour que vous me fassiez du mal ? Pour que je perde des points ? Pour que l'autre clown de Cotrocéni se paye ma tête ? Mes petits amis, si je me casse la gueule vous en ferez autant...
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- Puisque nous sommes au pouvoir, je ne comprends pas pourquoi tout ça ne peut pas se résoudre, pourquoi surgissent des carnets d'adresse sans que nous soyons au courant, pourquoi des policiers désagréables viennent me voir dans mon bureau, pourquoi on ne trouve pas un coupable? Si c'est de l'argent qu'il faut, vous savez bien que je donne ce qu'il faut, tout ce qu'il faut, mais je ne veux pas vivre ce genre d'expériences.
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Il m'a raconté des histoires creuses et sans queue ni tête sur la Sécuritaté, il s'était même mêlé de l'affaire Ioana Arséné, à laquelle il n'avait manifestement rien compris, en disant que le Président y était impliqué et qu'il ne pouvait pas le sentir. Bref un vieillard gâteux et rasoir.
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Et quand vous l’aurez fait venir, vous en ferez quoi ?
Comment ça ?
Je veux dire… Vous le mettrez où ? Que fera Michel le brave au XXIème Siècle ? Il surfera sur Internet ? Il regardera la télé ? Il ira au cinéma ou au stade ?
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La plus douce des dictatures est la démocratie. C’est la dictature de la loi. Et la plus difficile… Il faut bien comprendre, à tout instant, que si l’on peut faire tout ce que l’on veut, si le système accepte dans le principe même tous vos excès, en réalité, vous ne pouvez pas faire grand-chose. Or la tentation de l’excès est énorme. Quoi de plus agréable que de grimper sur les dos courbés devant vous ?
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Tous les médias sans exception ont largement développé l'information selon laquelle Ioana Arséné, si elle n'a pas subi de violence à caractère sexuel, a été retrouvé entièrement nue et dans une position indécente, dégradante. C'est la dessus que se fonde la théorie de l'assassinat : il y aurait là une forme de vengeance à l'encontre de la journaliste.
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Nous connaissons un certain nombre de cas où des crimes en série ont été commis par plusieurs personnes. Mais ce qui est intéressant, ce n’est pas forcément de savoir combien il y a d’assassins ; je pense qu’à l’heure actuelle, les médecins légistes ont pu déterminer s’il s’agit d’un solitaire ou d’un groupe. Ce qui compte c’est de comprendre pourquoi le criminel en série tue. La littérature spécialisée répartit en trois catégories les meurtriers en série : les visionnaires, les justiciers et les hédonistes.
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Dès qu’ils parviennent au pouvoir, ces hommes politiques cherchent désespérément à faire émerger des journaux qui chantent leurs louanges. Je ne tiens pas spécialement à attaquer un pouvoir quel qu’il soit, mais le rôle de la presse est de tirer des sonettes d’alarme. Il n’y a pas besoin de journaux pour passer la brosse à reluire à des hommes politiques. Les hommes politiques sont payés pour faire des choses. Et nous, journalistes honnêtes, nous devons les pénaliser lorsqu’ils font des erreurs, pas vanter leurs mérites lorsqu’ils ne font que leur métier.
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Je me suis toujours demandé pourquoi les hommes politiques, une fois parvenus à une fonction importante, commençaient à avoir peur de la presse. Tant qu’ils sont dans l’opposition ou qu’ils n’ont aucune fonction, sagement assis sur leur banc du parlement, ils courtisent les journalistes, sont disponibles pour eux, leur téléphonent, leur demandent des conseils. Et ils n’oublient jamais de leur dire que s’ils parviennent un jour au pouvoir, ils ne referont pas les erreurs des gouvernants d’avant. Dès qu’ils sont au pouvoir, ils deviennent brusquement injoignables au téléphone, la presse devient leur ennemi numéro un, et les journalistes qui les critiquent, des ennemis personnels qu’il faut éliminer.
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J’incline à penser que les hommes politiques roumains ont vu trop de mauvais films américains. Ils commencent à croire que les nations se gouvernent depuis les avions qui les trimballent d’un coin à l’autre de la Terre, et que les malheurs du pays se résolvent du simple fait de leur existence et des phrases importantes qu’ils prononcent sur le tarmac de l’aéroport d’Otopéni.


Il y a des criminels dans le monde entier. Mais dans les autres pays, les criminels sont arrêtés, y compris dans les mauvais films américains. Et dans ces films, lorsque les hommes politiques ne sont pas capables de faire leur devoir, ils démissionnent.
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