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Critiques de Chenjerai Hove (6)
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Ancêtres

Sous le soleil brûlant d'Afrique australe du milieu du XXe siècle, des villageois de Gotomi mènent leur vie comme ils le font depuis plusieurs générations. À travers eux, c'est l'histoire de tout un peuple, d'un pays, qui est visitée. La vie en autarcie, à exploiter son petit lot de terre et à élever ses animaux, à se reposer dans sa case, à se raconter des contes millénaires, à espérer le bonheur, à arranger les mariages (ou à les fuir), etc. Et partout cette terre rouge et noire, belle, prometteuse, riche. Mais voilà que les temps changent…



Les Blancs, colons et autres exploitants, ils construisent des routes à coups de bulldozers (déplaçant maisons et paturages, saccageant les sanctuaires), poussent les villageois à modifier leurs pratiques agricole, prêchent… Les villageois écoutent, parfois tiennent compte, mais retournent souvent à leurs vieilles traditions. Même après avoir utilisé de nouveaux outils, il est important de procéder aux rituels, de s'attirer la protection des ancêtres pour que les récoltes arrivent à maturité. Ce fut une incursion fascinante dans un autre monde.



Mais comment y arrive-t-on quand une des ancêtres était née sourde et muette ? Peut-elle entendre les prières ? Quand les récoltes n'arrivent pas à maturité, que la misère se pointe. Et que les Blancs continuent à faire intrusion partout, détruisant leur mémoire collective et s'attaquant à leur identité ? Chacun crache la colère et la haine qui s'accumulait de génération en génération, depuis le commencement des temps.



Chenjerai Hove réussit très bien à dépeindre le quotidien, les espoirs et le ressentiment des petites gens, autant les hommes, leurs épouses, leurs enfants, des aînés et bien d'autres. Leur respect devant la supériorité technologique des Blancs, remettant leur destin entre les mains des ancêtres, de puissances invisibles. Puis, un jour, assez est assez. Ils veulent s'affranchir, les guérillos combattent l'homme blanc pour libérer le pays mais, quand la guerre est partout, la situation dégénère et tout le monde finit par en souffrir. Ceci dit, il ne faut pas y voir que du négatif, les épisodes les plus durs sont balancés par des évocations poétiques des gens, de leurs traditions et de l'endroit.



Parfois, j'étais un peu mélangé à travers toutes ces voix qui se partagent la narration de ce roman, Ancêtres, mais, au bout du compte, j'en suis venu à la conclusion que ce n'était pas si important de les départager. Tous, ils partagent des rêves et des souffrances au point de ne former qu'un tout. Je me suis laissé porter par la chronique de ce bout de terre ensorcelant qui me donne envie de lire davantage d'oeuvres portant sur cet endroit et d'autres d'Afrique.
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Ossuaire

Marita cherche son fils unique, qui s’est enfui, qui a voulu probablement rejoindre la grande ville et peut-être œuvré à l’indépendance de son pays, le Zimbabwe. Et elle est prête à tout pour le retrouver, même se rendre jusque dans cette fameuse cité dont elle entend parler. Mais avant, elle doit recueillir quelques témoignanges et les fonds nécessaires à son entreprise. C’est le point de départ de la trame narrative du roman Ossuaire. Mais cette trame se mêle et s’entremêle, un peu dans le désordre (j’ai perdu le fil un instant et je ne savais plus où j’en étais dans cette histoire) au gré des différents points de vue, des différents narrateurs, de leur interprétation des événements, etc. Ce n’est pas une mauvaise chose en soi, c’est seulement que ça peut devenir déboussolant au début alors il faut rester vigilent.



C’est que le lecteur a rarement le témoignage direct de Marita, plus souvent qu’autrement les pensées des autres personnages qui croisent sa route, et leurs propres préoccupations. Par exemple, la jeune Janifa à qui son fils a adressé une lettre avant de partir, le cuisinier Chisaga qui pourrait lui procurer l’argent nécessaire à son voyage (à un certain prix !), etc. Et ces personnages interagissent avec d’autres, comme le patron de la plantation où ils travaillent tous, Manyepo. Ce que j’aime de ces gens-là, c’est leurs préoccupations très terre-à-terre. Pas la dernière émission de téléréalité qui fait fureur, pas l’achat du dernier modèle de téléphone mobile, pas les frivolités ni les mélodrames insignifiants. Ces gens-là travaillent avec acharnement pour une misérable pitance, ils n’ont pas de temps à perdre avec des problèmes somme toute peu important. Ils n’ont peut-être pas une vie enviable selon nos standards occidentaux mais j’envie leur simplicité (ne serait-ce qu’un seul instant). Ceci dit, je ne souhaite pas enjoliver cette situation. Tous ces personnages, en particulier Marita, survivent. Ils mènent une vie de misère et de souffrance dans ce Zimbabwe à peine sorti de la colonisation.



Cette simplicité sur laquelle j’écrivais plus tôt, elle se traduit dans l’écriture. J’écris cela sans mesquinerie ni condescendance. L’auteur Chenjerai Hove utilise une plume économe mais ô combien riche et poétique. Souvent, les sages Africains manient la langue orale comme peu savent le faire et cela se transpose à l’écrit. Ça me rappelle Ahmadou Kouroumé, Mariama Bâ et plusieurs autres. Bon, peut-être que je me goure, surtout que la Côte d’Ivoire et le Sénégal ne sont pas le Zimbabwe, d’une extrême à l’autre de cet immense continent. Mais ce qui unit ces écritures, c’est cette sagesse ancestrale, qui permet toujours à n’importe quel homme ou femme de lancer un proverbe, des paroles sensées mais sans prétention, qu’on peut appliquer à toute situation. Philosophie de la vie et style littéraire se mélangent pour former un roman unique.
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Ancêtres

Des vies influencées par des problématiques locales, et bientôt chamboulées par la pénétration coloniale. Il est question de traditions, de transmissions et, de pratiques religieuses désormais remises en cause. L'auteur insiste sur ce nouvel ordre "confessionnel" où le culte des ancêtres est débattu : soit parce qu'il n'est plus efficace face aux aléas du quotidien ; soit parce qu'il est confronté au christianisme.

Dès lors, à qui adresser ses prières ? Comment faire face à cette déculturation et recouvrer sa dignité ?



L'auteur multiplie les narrateurs dans un style parfois poétique ou philosophique pour étayer son propos. Un choix qui ralentit la compréhension même si l'ensemble demeure instructif.

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Ossuaire

Au centre du récit, Marita, pauvre ouvrière agricole. Petit à petit nous découvrons sa misérable vie, dans un récit fait à plusieurs voix, et surtout par Janifa, un flirt du fils de Marita, que cette dernière a en quelque sorte choisie comme fille adoptive. La vie de Marita fut très dure, elle n’a pu longtemps avoir d’enfant et fut pour cette raison maltraitée par son mari et tout le village. Le couple s’est retrouvé travailler sur une exploitation agricole dans des conditions très dures, et leur fils unique s’est enfui un jour pour se battre pour l’indépendance du pays. Et un jour, Marita décide de partir à la recherche de ce fils chéri, un voyage dont elle ne reviendra pas.



Un livre plein de souffrances et de douleurs, avant tout celles des femmes, infiniment victimes, en tant que Noires, en tant que femmes victimes des hommes, en tant que pauvresses soumises aux gens détenteurs du pouvoir. Le langage de Chenjerai Hove est toujours très poétique, et sa façon de tisser les différents chants qui composent son récit en maintient l’intérêt durant tout le roman. Un chant funèbre à la mémoire de toutes les souffrances endurées, de toutes les vies qui n’ont pas pu aller à leur terme et à leur épanouissement à cause de différentes violences subies. Poignant.

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Ombres

L'univers de Chendrjerai Hove est toujours le même, celui de son pays avant, pendant et un peu après la décolonisation. Il dit les souffrances de son peuple, à différentes époques, le lien au passé, aux Ancêtres, les histoires individuelles qui sont tributaires de l'Histoire.



Le tout dans un style très poétique, dans un récit polyphonique, dans lequel les voix et les récits des différents personnages se mélangent, se répondent et se complètent.



Une famille qui a quitté la région natale pour aller au pays de Gotami, dans l'espoir d'une meilleure vie, en devenant propriétaire de sa propre ferme. Mais les choses ne se passent pas comme prévu, et il y a la guerre civile et ses souffrances. Dans lesquelles s'imbriquent les souffrances individuelles, l'amour malheureux de Johanna pour un homme qui la rejette, et sa tentative de construire sa vie avec Marko, qui pauvre et plus jeune qu'elle est rejeté par son père, ce qui provoque un double drame.



Un beau livre, c'est certain, grâce à l'écriture de l'auteur, mais qui m'a moins marqué que les deux précédents livres que j'ai pu lire. Peut être parce que cela se ressemble beaucoup, ou qu'il est un peu moins réussi, moins polyphonique, le passé et le présent se mêlent dans celui-ci d'une façon moins organique et inévitable, et il y au final moins de personnages, et plus de répétitions.

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Ancêtres

Récit polyphonique, de vois distantes dans le temps, qui racontent la vie de quelques Africains, liés d’une façon ou d’une autre à la contrée semi-mythique de Gotami, d’où les Blancs ont chassé les natifs, laissant les os des Ancêtres, privant les vivants de leur identité profonde, de leur essence vitale.



Ces voix que nous entendons sont distantes dans le temps de plus d’un siècle, la plus ancienne et la plus persistante est celle de Miriro, sourde et muette, enfant puis jeune fille vouée à la solitude et à la souffrance dont découvrons petit à petit le destin cruel. Mais à cette voix d’autres se mêlent et s’accordent, voix d’hommes, d’écoliers, et de femmes. L’Afrique est là avec ses beautés et ses souffrances, ses joies et ses drames. Comme partout, ce sont les femmes qui souffrent le plus, entre travail, mariages forcés, enfantements, deuils, répudiations.



Toutes la magie et toutes les légendes de l’Afrique se révèlent insuffisantes pour résister à l’homme blanc, mais l’auteur nous les fait découvrir dans un style poétique, lyrique et flamboyant. Un chant d’une grande beauté, et d’une intense sensibilité auquel il est difficile de rester insensible.

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