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Citations de Gabriel Garcia Marquez (1326)


Le drame de Florentino Ariza tant qu'il fut commis aux écritures de la Compagnie fluviale des Caraïbes était qu'il ne pouvait se défaire de son lyrisme car il ne cessait de penser à Fermina Daza, et qu'il n'avait jamais appris à écrire sans penser à elle. Plus tard, lorsqu'on le promut à d'autres fonctions, il débordait d'amour au point de ne savoir qu'en faire, et il l'offrait aux amoureux sans plume, en écrivant à leur place des lettres d'amour gratuites devant la porte des Écritures. C'est là qu'il se rendait après son travail. Il ôtait sa redingote avec des gestes parcimonieux, l'accrochait au dossier de sa chaise, enfilait des manchettes de lustrine, déboutonnait son gilet pour mieux penser, et quelquefois jusqu'à une heure tardive de la nuit redonnait espoir aux infortunés grâce à des lettres ensorcelantes. (...)
Le souvenir le plus agréable qu'il garda de cette époque fut celui d'une jeune fille très timide, presque une enfant, qui lui demanda en tremblant d'écrire une réponse à une lettre qu'elle venait de recevoir et que Florentino reconnut pour l'avoir écrite la veille. Il y répondit dans un style différent, selon l'émotion et l'âge de la jeune fille, et avec une écriture qui ressemblait à la sienne car il savait en utiliser une différente pour chaque cas. Il l'écrivit en imaginant ce que Fermina Daza eût répondu si elle l'avait aimé comme cette créature désemparée aimait son prétendant. Deux jours plus tard, il dut, bien-sûr, écrire la réponse du fiancé avec la calligraphie, le style et la forme qu'il lui avait attribués dans la première lettre et il finit ainsi par engager une correspondance fébrile avec lui-même. Au bout d'un mois à peine, ils vinrent chacun de leur côté le remercier de ce que lui-même avait proposé dans la lettre du fiancé et accepté avec dévotion dans celle de la jeune fille : ils allaient se marier.
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J'ai mal non de mourir mais de ne pas mourir d'amour.
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Nul ne le définissait mieux que lui-même lorsque quelqu'un l'accusait d'être riche.
"Riche, non, disait-il. Je suis un pauvre avec de l'argent, ce qui n'est pas la même chose."
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Rien ne lui plaisait plus que de chanter aux enterrements. Il avait une voix de galérien, dépourvue de toute rigueur mais capable de registres impressionnants. Quelqu'un lui avait raconté qu'Enrico Caruso pouvait briser un vase en mille morceaux grâce au seul pouvoir de sa voix, et pendant des années il avait tenté de l'imiter, même avec les vitres des fenêtres. De leurs voyages autour du monde ses amis lui rapportaient les vases les plus fins, et organisaient des fêtes pour qu'il pût enfin réaliser son rêve. Il n'y parvint jamais. Toutefois, au fond de ce tonnerre, il y avait une petite lueur de tendresse qui fendait le cœur de son auditoire comme le grand Caruso les amphores de cristal, et c'est pourquoi aux enterrements on le vénérait tant.
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Rien ne ressemble plus à quelqu'un que sa façon de mourir,et nulle ne ressemblait moins que celle-ci à l'homme qu'il imaginait.
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(...) Juvenal et Fermina emportaient le souvenir partagé d'un après-midi de neige, lorsque les avait intrigués un groupe de personnes qui défiait la tourmente devant une petite librairie du boulevard des Capucines. À l'intérieur se trouvait Oscar Wilde. Lorsqu'il sortit enfin, fort élégant il est vrai, mais sans doute trop conscient de l'être, le groupe l'entoura pour lui demander de signer ses livres. Le docteur Urbino s'était arrêté dans le seul but de le voir, mais son impulsive épouse voulut traverser le boulevard pour qu'il signât la seule chose qui lui sembla appropriée faute de livre : son beau gant de gazelle, long, lisse, doux et de la même couleur que sa peau de jeune mariée. Elle était sûre qu'un homme aussi raffiné apprécierait un tel geste. Mais son mari s'y opposa avec fermeté, et alors qu'elle insistait en dépit de ses arguments, il ne se sentit pas capable de survivre à la honte.
*Si tu traverses la rue, lui dit-il, en revenant tu me trouveras mort."
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Un jour que Juvenal Urbino passait par hasard devant le jardin du Luxembourg, il le vit sortir du Sénat au bras d'une jeune femme. Il lui parut très vieux, se déplaçant à grand-peine, la barbe et les cheveux moins radieux que sur ses portraits, portant un pardessus qui semblait appartenir à quelqu'un de plus corpulent que lui. Il ne voulut pas gâcher son souvenir par un salut impertinent : cette vision presque irréelle lui suffit et devait lui suffire toute sa vie. Lorsqu'il retourna à Paris, marié et en condition de lui rendre une visite plus formelle, Victor Hugo était mort.
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Cependant, il avait en sa faveur deux avantages. L'un, son coup d'oeil sans pareil pour reconnaître d'emblée la femme qui l'attendait, fût-ce au milieu de la foule où même là il faisait sa cour avec prudence car il sentait que rien ne suscitait plus de honte ni n'était plus humiliant qu'une rebuffade. L'autre était qu'elles l'identifiaient tout de suite comme un solitaire assoiffé d'amour, un nécessiteux des rues dont l'humilité de chien battu les faisait capituler sans conditions, sans rien demander, sans rien attendre de lui, à part la tranquillité d'avoir, en leur âme et conscience, accompli une bonne action. C'était ses seules armes et il livra avec elles, bien que dans le secret absolu, des batailles historiques qu'il consigna avec une rigueur de notaire dans un carnet codé, reconnaissable entre tous, dont le titre voulait tout dire : Elles.
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Tout avait son parfum.
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Ce qui frappait le plus Hildebranda était la solitude de sa cousine. Elle avait l'air, lui disait-elle, d'une vieille fille de vingt ans. Habituée à une famille nombreuse et dispersée, à des maisons où personne ne savait avec exactitude combien y vivaient ni s'asseyaient chaque jour à table, Hildebranda ne pouvait imaginer une jeune fille de son âge réduite à la claustration de la vie privée. C'était pourtant vrai : entre le moment où elle se levait, à six heures du matin, et celui où elle éteignait la lumière de sa chambre, Fermina Daza consacrait son temps à le perdre. La vie s'imposait à elle au dehors.
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- La musique est importante pour la santé ", dit-il.
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Il était encore trop jeune pour savoir que la mémoire du cœur efface les mauvais souvenirs et embellit les bons, et que c'est grâce à cet artifice que l'on parvient à accepter le passé.
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(...) mais elle faisait face au malheur avec le sourire invincible qu'elle avait appris de son époux pour n'accorder aucune faveur à l'adversité.
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Le docteur Urbino attrapa le perroquet par le cou avec un soupir de triomphe : ça y est. Mais il le lâcha aussitôt car l'échelle se déroba sous ses pieds. Il resta un instant suspendu dans l'air et parvint à se rendre compte que sans même avoir communié, sans avoir eu le temps de se repentir de rien ni de dire adieu à personne, il était mort à quatre heures et sept minutes de l'après-midi du dimanche de la Pentecôte.
Fermina Daza était dans la cuisine en train de goûter sa soupe du dîner quand elle entendit le cri d'horreur de Digna Pardo et l'affolement des domestiques suivi de celui des voisins. Elle jeta la cuillère et tenta de courir comme elle put, malgré le poids invincible de son âge, en hurlant comme une folle sans même savoir ce qui se passait sous les frondaisons du manguier, et son cœur vola en éclats lorsqu'elle vit son homme étendu sur le dos dans la boue, déjà à demi mort, résistant encore une ultime minute au soubresaut final de la mort afin qu'elle eût le temps d'arriver. Il parvint à la reconnaître au milieu du tumulte et, à travers les larmes de sa douleur irrémédiable de mourir sans elle, la regarda une dernière fois, pour toujours et à jamais, avec les yeux les plus lumineux, les plus tristes et les plus reconnaissants qu'elle lui eût vus en un demi-siècle de vie commune, et il réussit à lui dire dans un dernier souffle :
"Dieu seul sait combien je t'ai aimée."
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Mais s'ils avaient ensemble appris une chose, c'était que la sagesse vient à nous lorsqu'elle ne sert plus à rien.
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Le docteur Urbino se refusait à admettre qu'il détestait les animaux et le dissimulait par toutes sortes de fables scientifiques et prétextes philosophiques qui étaient convaincants pour beaucoup mais pas pour sa femme. Il disait que ceux qui les aimaient avec excès étaient capables des pires cruautés envers les êtres humains. Il disait que les chiens ne sont pas fidèles mais serviles, que les chats sont opportunistes et traîtres, que les paons portent sur leur queue le blason de la mort, que les cacatoès ne sont que de fâcheux ornements, que les lapins fomentent la cupidité, que les singes transmettent la fièvre de la luxure et que les coqs sont maudits parce qu'ils se sont prêtés à ce que le Christ fût trois fois renié.
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De sorte qu'il palpa ses organes internes avec plus d'intention que d'attention, et tandis qu'il oubliait sa propre sagesse et découvrait abasourdi que cette créature merveilleuse était aussi belle dedans que dehors, il s'abandonna aux délices du toucher, non au titre de médecin le plus qualifié du littoral caraïbe mais comme une pauvre créature de Dieu que tourmentait le désordre de ses instincts.
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" Tirez, dit-il, la main sur le cœur. Il n'est plus grande gloire que de mourir d'amour."
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«  N’arrête jamais de sourire ,même si tu es triste, car tu ne sais pas qui pourrait tomber amoureux de ton sourire » …
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La vie entière n’aurait pas suffi à Billy Sánchez pour déchiffrer les énigmes de ce monde fondé sur le génie de la radinerie. Il ne comprit jamais le mystère de la lumière de l’escalier qui s’éteignait avant que l’on arrive à l’étage, pas plus qu’il ne découvrit comment la rallumer. Il lui fallu presque toute une matinée pour apprendre que sur chaque palier il y avait une petite pièce avec des cabinets, et il s’était résigné à les utiliser dans les ténèbres lorsqu’il découvrit qu’on pouvait allumer en poussant le verrou de l’intérieur afin que personne n’oublie d’éteindre en sortant. La douche, qui se trouvait à l’autre extrémité du couloir et qu’il s’entêtait à utiliser deux fois par jour comme dans son pays, se payait à part et comptant, et l’eau chaude, contrôlée par la direction, était coupée toutes les trois minutes.


La trace de ton sang dans la neige.
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