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Critiques de GennaRose Nethercott (41)
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La Maison aux pattes de poulet

Le titre m'intriguait, donc j'ai tenté.

Tout ça pour me rendre compte que je ne suis absolument pas réceptive aux contes ( enfin ça je le savais déjà, mais il faut parfois confirmer les choses).



Je n'apprécie pas particulièrement l'écriture que je trouve trop distante.

L'histoire est intéressante lors de certains passages, mais ça manque de régularité. Mon intérêt a plutôt été en dents de scie.



Je ne connais absolument pas le folklore Russe, peut-être est ce également pour cela que je n'ai pas été plus intéressée que cela ?



En tout cas si beaucoup ont apprécié ce conte, je suis complètement passée a côté.
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La Maison aux pattes de poulet

Tout simplement magnifique! Ce roman mérite toute sa hype. Parmi toutes les réécritures modernes de contes et les histoires d’urban fantasy, celle-ci se démarque à la fois par son ambiance, par sa narration, par ses thèmes abordés et par leur traitement, pour un ensemble de très haute qualité.



États-Unis, 2019 : Bellatine et Isaac Yaga, frère et sœur, ne se sont pas vu·es depuis des années. La première a le don de donner vie par ses mains, le second peut « devenir » n’importe qui. L’une refrène son pouvoir qu’elle perçoit comme une malédiction, l’autre l’embrasse au point d’en oublier qui il est sous ses masques. Tout·es deux se retrouveront pour récupérer l’héritage de leur arrière-arrière-grand-mère : une maison intelligente juchée sur des pattes de poulet, et traquée par une étrange créature du nom d’Ombrelongue.



Une des grosses réussites de ce roman, c’est son ambiance. Tradition et modernité se combinent habilement et les folklores anciens et modernes, slaves et américains, se mélangent joyeusement. On retrouve même, par petites touches, quelques éléments classiques de l’horreur sans y basculer (doppelgänger, marionnettes…). Le mélange aurait pu être hasardeux mais l’ensemble fonctionne magnifiquement. J’ai eu l’impression de retrouver un peu de Neil Gaiman (Sandman et American Gods notamment), ce qui, franchement, n’est pas pour me déplaire.



Les thématiques aussi peuvent rappeler Gaiman, avec cette célébration des mythes et des histoires, de la puissance qu’ils revêtent, mais surtout, ici, de la vérité qu’ils portent et de l’importance du devoir de mémoire. Bellatine et Isaac, dont la famille est issue d’un tragique passé historique, se retrouvent coupé·es de leur racines, et en souffrent sans comprendre ce qui cause leur souffrance. Tout l’enjeu consistera non seulement à réparer leur relation abîmée, mais aussi à renouer avec leur passé, à le comprendre et à ne plus le laisser sombrer dans l’oubli.



Une histoire envoûtante par tous ses aspects. Coup de cœur!
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La Maison aux pattes de poulet

Avec sa superbe couverture, son titre faisant référence à la célèbre maison de la sorcière Baba Yaga et ses très bonnes notes sur la toile, je m’étais dit que La Maison aux pattes de poulet allait être une lecture intéressante et originale. Moi qui étais un peu au désespoir après plusieurs lectures très mitigées, je plaçais pas mal d’espoir dans celle-ci… Vu ma note, vous vous en doutez, cela n’a pas du tout fonctionné.



Les deux premiers chapitres m’ont fait un eu peur. Je me rappelle avoir pensé : Mais qu’est-ce que je fais là ? Et puis j’ai poursuivi. Il y a eu du mieux mais j’ai assez vite déchanté au final. Et j’ai fini le roman parce que je n’aime pas abandonner, et surtout je voulais avoir le fin mot de l’histoire. Cela n’a pas été évident, mais au moins, ma curiosité a été satisfaite.



Le problème est que l’histoire n’a pas su me toucher, bien au contraire. Elle instaure une distance avec le lecteur très rapidement à mon goût. On ne s’attache pas, ni aux personnages, ni à ce qu’il se produit. Tout glisse nous laissant spectateur plutôt qu’acteur. Et pourtant la narration se voulait immersive en nous offrant les points de vue de plusieurs des héros, et en tissant son intrigue sur un événement des plus horribles et douloureux. Mais il n’y a eu aucune étincelle, rien n’a su toucher mes cordes sensibles, et pourtant il est assez facile de m’émouvoir habituellement.



Bellatine et Isaac m’ont aussi laissé de marbre. Un frère et une sœur qui ne se comprennent pas, qui ne communiquent pas et qui transforment leur relation en un affrontement. C’est épuisant psychologiquement parlant. Bellatine est en plus… pas antipathique mais la jeune femme ne fait rien pour être appréciée. Elle se braque pour un rien, ne réfléchit pas deux secondes, s’imagine des choses, se noie dans son apitoiement. Elle n’évolue qu’à la toute fin, et c’est beaucoup trop long pour un personnage de cet acabit. Isaac était un petit peu plus sympathique, mais sa fuite en avant, sa nonchalance, son fardeau, le deuil qu’il ne parvient pas à faire… Trop de drames, trop d’oppression, aucune lueur d’espoir, aucune bouffé d’oxygène. L’impression de se noyer avec les deux héros sans issue possible.



Et en partant de là, il était difficile de poursuivre sereinement. Certes l’intrigue est intéressante, surtout quand on commence à comprendre ce qu’il y a en jeu ainsi que l’événement qui a été l’élément déclencheur. Mais attendre presque 300 pages pour que les choses bougent vraiment, c’est long. Trop long.



Sans surprise La Maison aux pattes de poulet n’aura pas du tout su me convaincre. Il y avait pourtant de quoi me charmer, mais la façon dont l’auteur a mené son histoire et a construit ses personnages n’a pas su résonner en moi.

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La Maison aux pattes de poulet

Il était une fois… Eh oui, nous partons pour un conte. Mais pas un récit poussiéreux, digne d’être conservé entre des pages jaunies dans une bibliothèque ensevelie sous des monceaux de vieillerie. Non, une histoire moderne, ancrée aussi bien dans notre présent que dans notre passé, qui plante ses racines aussi bien dans le continent eurasien que dans le continent américain. Êtes-vous prêt à voir le rideau s’ouvrir ? Accessoires est sur le pont, Manœuvre est prêt. Il était une fois…



Isaac Yaga , vagabond magnifique, traîne ses guêtres d’un bout à l’autre du pays. Il lui faut voyager, laisser de la distance, sans cesse, entre lui et les personnes qu’il a rencontrées, qu’il a imitées, qu’il a escroquées. Car Isaac vit aux dépends de ceux qui l’écoutent. Il dérobe, non sans laisser un petit quelque chose en échange. Car la vie a horreur du vide et il vaut mieux le remplir soi-même si l’on ne veut pas qu’elle le fasse de son côté. Il est le Roi caméléon, capable de reproduire la moindre démarche, la moindre gestuelle, le moindre tic. Il sait, en vous observant, repérer votre façon de vous mouvoir, de vivre, d’être. Alors, il endosse votre peau comme celle de dizaines d’autres et s’invente, pour un temps, une vie. Comédien né, il entre littéralement dans la peau de son personnage.



Bellatine Yaga, habile de ses mains, car ses mains la hantent. Obligée de les utiliser afin que ce ne soit pas elles qui l’utilisent. Bellatine aime travailler de ses doigts, créer. Elle est une artisane reconnue pour son talent. Mais elle préfère la compagnie de quelques-uns, dans des endroits éloignés, à la presse, à la foule. Loin du monde.



Ils sont frère et sœur mais ne se voient plus. Jusqu’à… jusqu’à… jusqu’au point de départ de cette aventure si fascinante et si incroyable, si terrible et si envoûtante. Jusqu’à l’arrivée, de façon horriblement triviale, de leur héritage. Dans un de ces containers si banaux qui traversent par dizaines de milliers les mers et les océans. En sort une maison. Déjà, c’est original. Mais quand on voit cette demeure se dresser sur ses deux pattes, le doute n’est plus permis, nous sommes bien dans le monde sombre et cruel de Baba Yaga.



Et, chacun pour une raison différente, Bellatine et Isaac partent sur la route avec leur maison ambulante. Ils vont tenter de gagner leur vie en faisant revivre le théâtre de marionnettes familial. Celui qui a bercé leur enfance. Celui qu’ils ont l’un et l’autre quitté, chacun pour une raison différente. Mais nécessité fait loi et les voilà mettant en commun leurs talents au profit de spectateurs enchantés. Seulement, l’histoire ne pourrait être complète sans une menace, un ennemi, mystérieux de préférence, sans pitié assurément. Cela tombe bien, un homme étrange à l’accent russe prononcé, apparaît dans leur sillage. Et il s’intéresse fortement à une certaine maison qui avance sur deux pattes. Ses intentions ? Mauvaises, sans hésiter. Il suffit de voir comment il traite ceux qu’il rencontre : une gorgée d’un liquide étrange et les voilà terrassés par leurs craintes les plus noires, leurs peurs les plus tenaces. Forcés, par ce liquide et par l’homme, de suivre leurs pulsions violentes, meurtrières et de combattre des ennemis imaginaires ou non. La haine triomphe. Et elle suit les pas des Yaga. Elle se nomme Ombrelongue.



La Maison aux pattes de poulet a ceci de magique qu’elle mêle avec talent et aisance plusieurs croyances, plusieurs folklores, plusieurs traditions. GennaRose Nethercott parvient à nous plonger aussi bien sur les traces des hobos, glorifiés par nombre d’écrivains et de chanteurs, que dans les replis les plus sombres des contes slaves, noirs et sanglants, dans les ornières tragiques d’une histoire cruelle, nécessairement. Le lien entre eux se fait si facilement qu’on ne se pose aucune question. Tout est fluide, coule de source. Oui, il est évident de voir en pleine campagne américaine déambuler une maison perchée sur deux pattes de poulet. Oui, il est normal d’observer un homme capable de mimer à la perfection les gestes des spectateurs, à tel point qu’on ne puisse même imaginer qu’il est quelqu’un d’autre que celui qu’il imite. Oui, il est logique de voir… Non, je m’arrête là et vous laisse découvrir les autres sortilèges mis en places par l’autrice pour notre plus grand bonheur.



Magnifiquement servi par une superbe (encore) couverture d’Anouck Faure, le roman de GennaRose Nethercott a réussi à me séduire d’emblée. Les premières pages sont envoûtantes et la mise en place des personnages très réussie. Et la suite ? Eh bien, elle tient parfaitement ses promesses et offre une histoire qui ne lâche pas ses lecteurices, jusqu’au bout. Alors si vous n’êtes pas sujet au mal de mer, tentez le voyage à bord de cette Maison aux pattes de poulet.
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La Maison aux pattes de poulet

Parcourir le monde des mythes et légendes n’est pas une chose aisée. Surtout lorsque l’on touche à certaines histoires racontées encore et encore et qu’il faut leur trouver quelque chose de neuf pour prolonger leur immortalité. Il faut alors se baisser, étudier patiemment le chemin parcouru et comprendre pourquoi le conte, le mythe, l’histoire existe.

L’américaine GennaRose Nethercott n’a pas choisi Baba Yaga au hasard, elle qui a fondé dans le réel la « Traveling Poetry Emporium », une équipe de poètes à louer. Elle sait à quel point les mots ont une importance et qu’une fois mis bout à bout, ces mots racontent des histoires, des vies, des drames.

C’est ainsi qu’arrive dans nos contrées son roman fantastique La Maison aux pattes de poulet chez Albin Michel Imaginaire, traduit de main de maître par Anne-Sylvie Homassel et sublimement illustrée par Anouck Faure. Une arrivée qui devrait faire bouger les murs, et peut-être même réveiller certains fantômes…



Il était une fois…

Les contes, oui, les contes. Ils nous bercent depuis tout petit, ils nous tiennent par la main dans le noir et, comment peut-on les oublier ?

Isaac et Bellatine sont frère et sœur, eux-mêmes enfants de contes, racontés par leur mère, leur grand-mère, leur arrière-grand-mère…

Chacun à leur façon, dans cette Amérique si loin du Vieux Continent et de leur Ukraine natale, ont quelque chose à fuir ou à cacher.

Pas un conte mais une réalité, qui s’est muée en autre chose.

Tous deux ont des pouvoirs.

Isaac peut imiter à la perfection les gens qu’ils croisent et littéralement devenir eux, un Doppelgänger en puissance le long des rails.

Bellatine a des mains uniques, qui embrasent, qui redonnent la vie et réveillent, mais ces mains lui semblent maudites, ses mains animent ce qui ne devrait plus l’être, même la pierre.

Un jour, alors que tout les sépare, la distance comme l’existence, ils se retrouvent héritiers. Leur grand-mère leur a légué un bien étrange cadeau : une maison avec des pattes de poulet !

Cette maison, dès le premier regard, dès la première porte ouverte, leur semble la leur, un apaisement et un bouleversement en même temps.

Cette maison qui bouge, qui vit, qui obéit, qui court, qui fuit.

Comme eux.

Dans son sillage, elle amène autre chose, un être plus pernicieux, un autre vilain conte qu’il murmure à l’oreille de ceux qu’il rencontre pour les pousser à la violence, à la mort, au massacre.

Ombrelongue est son nom.

Croisant la route d’un groupe de musiciens bien décidé à s’opposer à lui, les deux Yaga vont comprendre, petit à petit, histoire avouée par histoire avouée, qu’ils ne faut jamais oublier.

GennaRose Nethercott reprend un mythe venu de l’Est, celui de la sorcière Baba Yaga et de sa maison affublée de pattes de poulet, pour attraper notre présent et en faire quelque chose d’intemporel.

C’est avec poésie et subtilité, intelligence et perspicacité, que le lecteur rassemble les morceaux du puzzle.



Famille perdue

Au centre se trouve cette fabuleuse maison. Dans un monde où l’on a déjà vu à maintes reprises les habitations prendre vie et se transformer.

On parle d’habitations avec des branchies ou des yeux, des maisons qui respirent et qui voient. Mais celle-ci a quelque chose d’autre en elle, un passé lourd et terrible. Un passé qu’elle vient partager avec Isaac et Bellatine qui fuient chacun à leur façon, le premier sur les routes, la seconde dans la sculpture. Elle est un catalyseur, un révélateur fabuleux qui permet d’ouvrir grand les portes.

Deux personnes nous guident en plus de la maison elle-même, c’est bien évidemment Isaac et Bellatine, deux êtres blessés, qui ont peur de qui ils sont, de ce qu’ils pourraient devenir. La Maison aux pattes de poulet est un roman sur l’identité, sur soi, sur l’acceptation de ses dons, de ses malédictions, de son chagrin, de ses forces, de ses faiblesses, de ses envies, de ses souvenirs. Nous suivons deux personnages rongés par une peur si vieille qu’ils ne savent même plus d’où elle vient en vérité.

C’est cette terreur insidieuse qui les a séparé, qui a mis leur amour de côté et la maison va leur rappeler l’importance d’être ensemble.

Mais entre deux, GennaRose Nethercott intercale les récits propres de la Maison, comme un véritable personnage, narratrice joueuse qui sait les contes et leur utilité, peu importe la duplicité et le mensonge tant qu’on décèle derrière des bouts de vérités.

Décidant à arpenter le pays dans cette maison bien étrange, les deux comparses rejouent une vieille pièce de théâtre avec des marionnettes.

Un Idiot qui se noie, qui raconte des blagues, trop de blagues.

Une série de paraboles, de métaphores, d’histoires, encore et encore.

Pour GennaRose tout est histoire. Le fantastique jusqu’à bout des pattes.



Se souvenir pour exister

Pourtant, comme toute bonne histoire, celle-ci a besoin d’un méchant, d’un adversaire. Ce sera le rôle d’Ombrelongue, insaisissable et insatiable.

À première vue, un Russe venu pour répandre la confusion, la crainte et fausser le réel. Toute ressemblance avec le réel, les réseaux sociaux, les élections, oui, tout cela n’est que fortuit.

Mais Ombrelongue, comme tout le monde, a son rôle à jouer, aussi sinistre soit-il, comme un vilain croquemitaine, un fantôme des Noël passés.

Son pouvoir asservi, corrompt, écrase. Comme tout pouvoir dès que l’on s’y abreuve, dans une fiole qui sent le foin brûlé comme à travers les racontars de dangers fantasmés à votre oreille.

Passionnante dans sa façon d’alterner les points de vue, La Maison aux pattes de poulet séduit également par sa prose pleine de poésie, changeant en intensité selon votre narrateur.

Et qui a-t-il de plus poétique qu’une vieille maison qui vous raconte son histoire encore et encore ?

Peut-être un petit village qui ne veut pas mourir ?

Peut-être un Idiot qui veut raconter une dernière blague pour vous faire sourire avant de se noyer ?

Peut-être un chat noir qui ne vous lâche pas, jamais, pour éponger votre fardeau ?

Tout entier, ce récit repose sur le souvenir. C’est la mémoire que convoque GennaRose Nethercott, celui du peuple juif, qui va déverser ici ses mythes et superstitions pour revivre l’espace d’un récit cruel.

Pogrom. Flammes dansantes.

L’autrice convoque l’atrocité pour ressusciter les victimes, elle offre au lecteur un récit sur la peur pour la vaincre, pour l’affronter.

Elle invente un monde qui n’existe pas pour dépeindre le nôtre, où les maisons ne fuient pas l’horreur mais où elles portent en elle une mémoire silencieuse. La Maison aux pattes de poulet est un livre dur et fort, qui n’hésite pas dans le drame, qui ne donne pas d’avertissement avant de vous jeter à terre, parce que le monde n’en donne jamais en vérité.

Même quand on pense qu’une telle terreur ne pourra jamais advenir.

Au final, c’est la force de l’esprit, celui qui affronte le passé pour éviter au présent de faire des boucles, qui permet de se libérer et d’être qui l’on est.

L’identité comme un fardeau n’est plus, elle est une révélation, une torche brûlante éteinte à pleines mains pour rayonner à travers la chair. Enfin.



Émouvant, dur et particulièrement addictif, le roman de GennaRose Nethercott est un fabuleux conte sur la puissance des contes, le genre d’histoire qui survit longtemps une fois la dernière page tournée. La Maison aux pattes de poulet vous emmène loin, sur les terres de la mémoire, et vous survivrez pour raconter.

Racontez des histoires, oui, continuez.

Toujours.
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La Maison aux pattes de poulet

Voilà une histoire qui semble de prime abord bien farfelue, GennaRose Nethercott va pourtant rapidement vous faire croire à La Maison aux pattes de poulet.



Derrière la magnifique couverture signée Anouck Faure se cache un non moins merveilleux texte qui jongle avec brio avec différents genres de l’Imaginaire, alliant modernité et respect du passé.



520 pages d’une aventure littéraire atypique, qui est autant un voyage dans l’imagination qu’une virée dans l’âme des Hommes.



« Les contes, on ne les oublie pas ; ils se contorsionnent et se pelotonnent autour du cœur jusqu’à y être tranquillement logés. Ils sont fluides, changeant, ils peuvent s’adapter à toutes les circonstances qu’ils traversent. Ils changent dans la bouche des conteurs et se font au contour des oreilles des auditeurs. Les faits peuvent différer (les lieux, la couleur du manteau d’Untel, les espèces qui fleurissent dans un petit jardin circulaire) mais leur noyau reste le même. Ainsi survivent-ils. S’assimilent-ils. Et avec eux le souvenir ».



Voici une citation tirée du livre qui dit beaucoup sur ce texte, sur le socle sur lequel il repose, sur la manière dont il est construit, sur ce qu’il véhicule. C’est en effet un conte qui raconte un conte. Comme souvent, une part de vérité y est bien présente, et sa force marque durablement l’esprit du lecteur.



GennaRose Nethercott a un don pour nous faire croire à l’impensable, pour que vite on se sente comme chez soi auprès de cette maison étrange. Dans un monde proche du nôtre, sauf qu’il a certaines particularités, comme ces objets qui prennent en partie vie, comme ces pouvoirs aux mains de certains.



Le récit navigue entre fantastique et fantasy, un réalisme magique qui trouve ses racines dans une période sombre de l’humanité, entre Ukraine et Russie, pour reprendre vie au fond des États-Unis.



La magie va se répandre au travers des personnages, principalement une sœur et un frère qui se sont perdus de vue et qui se retrouvent. Le passé qui resurgit, une graine qui éclot tout au long de l’histoire.



Isaac vit en marge, dans le monde des laissés-pour-compte américains, ayant fui volontairement sa famille. Il a un don particulier, celui du mimétisme. Un vrai caméléon, capable en quelques secondes de « voler » les tics et attitudes d’une personne, pour se fondre dans son costume virtuel.



Bellatine vit son propre pouvoir comme une malédiction. L’empêchant de toucher les choses, lors de « crises », au risque de les rendre vivantes.



Un frère extraverti, champion de l’esquive (et de la fuite), une sœur responsable mais refermée sur elle-même. De caractères opposés qui vont devoir combiner, se retrouver.



Au milieu, un héritage de leur grand-mère ukrainienne. Aucune somme sonnante et trébuchante, mais une maison sur pieds et qui marche, qui court aussi. Qu’il va falloir apprivoiser, restaurer, sauver. Une demeure qui vit, et dont une étrange entité veut la mort.



GennaRose Nethercott fait preuve d’une imagination débordante, mais cherche toujours à rendre son histoire plausible, même quand elle plonge dans le fantastique pur et dur. C’est emballant, parce que son récit et ses personnages respirent de vie, vibrent d’émotions. C’est ludique au possible, mais également sombre.



Un récit prenant, à plusieurs couches. A éplucher au fil des pages, parce que derrière la fantaisie se cache un propos fort, dur, la persécution des juifs. Un sujet caché dans le folklore et enrobé dans la modernité, que l’autrice va peu à peu faire surgir.



Car le roman, de manière imagée, est une affaire d’héritage et de ce qu’on en fait, de devoir de mémoire. Avec un message final qui porte, qui frappe, à travers un chapitre bien précis d’une puissance rare.



Par la grâce d’une écriture virevoltante, l’écrivaine nous emporte dans cette intrigue pleine de péripétie. Malgré quelques petites longueurs à mon sens, c’est souvent irrésistible.



La plume y est pour beaucoup, à la fois accessible et joliment poétique. A avoir envie de noter et surligner nombre de phrases. L’ambiance gothique joue également, formidablement composée, pour parfaire ce spectacle dans sa forme comme dans le fond.



Venez à la rencontre de La Maison aux pattes de poulet, une fois apprivoisée elle vous ouvrira grand ses portes. GennaRose Nethercott est un peu magicienne, ses mots vont vous emprisonner dans son univers pour vous toucher au cœur.
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La Maison aux pattes de poulet

Comment résister à un roman avec ce titre et cette couverture ?



États-Unis, de nos jours. Bellatine et son frère Isaac reçoivent un étrange héritage : une maison aux pattes de poulet, léguée par une aïeule d'Ukraine.



La maison réagit à son environnement, marche, prend peur et court… de quoi a-t-elle peur ?



Pas loin de là, Ombrelongue, mystérieux personnage venant de Russie, pourchasse la maison que le frère et la soeur ont surnommée Pied-de-Chardon. Pendant son périple, Ombrelongue sympathise avec des inconnus au hasard des rencontres, leur propose de partager un verre du flacon qu'il garde sur lui… alcool qui est un poison. Les malheureux, pendant quelques heures, sont sous l'emprise d'une fumée maléfique et cherchent à éliminer ceux dont ils ont peur ou qu'ils envient. La peur, encore une fois.



L'univers qu'a imaginé l'auteure (qui est aussi une poétesse, et le texte le démontre souvent) est à la fois l'Amérique si familière qu'on connaît, et un monde accueillant le merveilleux. Les maisons peuvent « vivre » pour survivre (après l'ouragan Katrina, celles de la Nouvelle-Orléans ont développé des branchies). Donc Pied-de-Chardon ne détonne pas dans ce paysage.



Revenons à Bellatine et Isaac. Héritiers d'une famille de marionnettistes, ils se sont tous deux éloignés de leurs parents. Isaac est un homme pas fiable, roublard, enjôleur, et qui arrive à imiter à la perfection ceux qu'il rencontre, à devenir eux. Il en profite pour dérober leur portefeuille, avant de partir à nouveau sur les routes. Bellatine, elle, est la jeune soeur plus posée et plus stable. Elle a un don avec ses mains. Devenue menuisière, elle aime créer avec ces mains-là. Mais son don vient de plus loin, et provoque l'Embrasement… Elle peut animer des objets. Bella rejette son pouvoir, qu'elle vit comme une malédiction, et le lecteur comprendra rapidement pourquoi.



Et maintenant, d'où vient la maison Pied-de-Chardon, mi-maison mi-animal, si sensible ? Pendant quelques courts chapitres parsemés dans le roman, la maison s'adresse aux lecteurs. Elle nous raconte son histoire, choisit les versions qui lui plaisent, et nous parle de sa première propriétaire, l'ancêtre de Bellatine et Isaac : Baba Yaga et ses deux filles. Nous voilà projetés dans les contes slaves, avec la sorcière Baba Yaga et sa maison aux pattes de poulet. Une des idées de génie de l'auteure est d'avoir fait de Baba Yaga une femme vivant en Ukraine dans une communauté juive entourée de goys, après la Première Guerre mondiale. La vie y est encore paysanne, les contes sont la réalité pour la maison qui nous relate ses souvenirs, et peu à peu on comprend que la tragédie de l'histoire va frapper ce shtetl (village juif).



Bellatine — très attachée à la maison — et Isaac vont vivre une course poursuite à travers les États-Unis, dans une ambiance mi-féérique mi-polar, fuyant Ombrelongue, ce démon du passé. Un autre point fort est les personnages : j'ai beaucoup aimé Isaac, qui pourtant n'a que des défauts ; Bellatine est son miroir ; Ombrelongue est un bon modèle de monstre terrifiant ; et Winnie (que je vous laisse découvrir) est l'équivalent du robot s'éveillant à la conscience et à l'humanité. Sans oublier la maison, bien sûr. Quelques autres thèmes typiques de l'imaginaire sont habillement repris, comme l'importance des noms dont il faut se souvenir, ou les héritages de pouvoirs qu'on accepte ou qu'on rejette.



La tension monte crescendo, et il y aurait beaucoup à dire sur la suite du roman, mais je ne veux pas vous gâcher le plaisir de la découverte. Sachez seulement que j'ai plongé dans l'histoire, et j'ai été parfois très touchée.



Ce livre qui possède une puissance inattendue, puisant dans le folklore traditionnel pour le renouveler. L'auteure n'a pas oublié que les contes servent aussi, et surtout, à transmettre une morale.



Plus que le devoir de mémoire, c'est ici à un besoin de mémoire que nous sommes invités, mais une mémoire à dépasser pour trouver sa voie. Une histoire poétique, où le merveilleux s'oppose au tragique, et où le passé dont on hérite donne les clefs pour affronter le présent.



Un excellent roman pour ce début d'année : original, poétique, puissant, marquant.


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La Maison aux pattes de poulet

Moi qui adore le folklore Russe, je ne pouvais qu’être attirée par cette fameuse maison aux pattes de poulet qui est celle de Baba Yaga.



Alors oui, on parle bien de la maison de Baba Yaga, mais le conte est revisité, transposé dans notre monde, celui des nouvelles technologies et l’histoire se déroulera aux États-Unis.



Il était une fois, un dépoussiérage de conte, une histoire toute nouvelle, réinventée, et ce, de manière intelligente et addictive, portée par des personnages que l’on se prend à apprécier, à connaître et une maison qui ne m’a pas laissée indifférente.



Le fantastique est omniprésent, notamment avec Isaac Yaga, un vagabond du rail, un véritable roi caméléon, capable de prendre l’apparence qu’il veut, la copiant de personnes qu’il croise. Sa sœur, Bellatine, dite Belette, a, quant à elle, un pouvoir dans ses mains, pouvoir qu’elle déteste et dont elle aimerait se défaire.



Comment dépoussiérer un conte, comment le transposer au pays de l’Oncle Sam, comment le rendre attractif, comment faire en sorte que ça fonctionne et que rien ne vienne gripper la machine (ou les pattes de poulet) ?



Eh bien, ce devait être tout simple, puisque l’autrice y est parvenue avec brio (avec qui ?). Non, le travail n’était pas simple, il fallait que la sauce prenne et surtout, trouver la recette de la sauce pour que le plat ne soit pas indigeste, mal équilibré ou tout simplement fadasse !



Je n’ai rien à redire sur sa manière de nous présenter son récit, car c’était brillant, amusant, intéressant, intriguant, avec des tensions, des moments plus calmes, des mystères, un Méchant bien trouvé et des retours dans le passé, avec un narrateur mystérieux, lors de certains chapitres, dont nous comprendrons vite qui iel est.



Ah, j’allais oublier des personnages bien troussés, avec des failles et des qualités, et une partie du contexte historique de la Russie en 1919. Guère brillant, le comportement des êtres humains et je n’oserais pas dire que ça n’arrivera plus jamais.



Le petit truc en plus, l’ancrage du conte dans nos sociétés, c’est au sujet du Méchant, qui, telles certaines personnes mal intentionnées, avides de pouvoir, de récupération, jouent sur les peurs des gens pour les pousser à commettre l’impensable, à faire naître une meute, dont le moteur est la haine, la recherche d’un bouc émissaire, bref, comme l’Homme a toujours fait et fait toujours.



Alors oui, c’est un roman de fantastique réussi, avec de la profondeur dans son scénario et ses personnages. L’autrice n’a pas écrit un récit rempli d’adrénaline, mais un récit qu’on lit sans s’en rendre compte, transporté ailleurs, dans une maison qui se meut toute seule et dans un univers fantasmagorique des plus intéressants.

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La Maison aux pattes de poulet

Bellatine et Isaac, bien que frère et sœur, ne se parlent plus depuis longtemps.

La fratrie est pourtant amenée à se réunir lorsque surgit dans leur vie un héritage inattendu, en provenance d’Ukraine et de leur ancêtre : Baba Yaga.

D’abord déconcertés par cette maison emballée dans un container et qui se déplie sous leurs yeux, révélant deux énormes pattes de poulet, Bellatine et Isaac voient très vite l’intérêt que peut leur procurer une maison qui se déplace toute seule. Les voilà prêts à relancer le spectacle itinérant de marionnettes que feu leurs parents avaient monté et qu’eux-mêmes avaient déjà mis en scène.

Un étrange et sinistre personnage entre alors en scène. Ombrelongue semble lui aussi fasciné par la maison et le besoin de la posséder et tandis qu’il se lance à la poursuite de la famille Yaga, il sème derrière lui un cortège de cadavres.



Une bien étrange lecture.

Le récit commence comme un conte, avec un paysage urbain, certes ancré dans notre modernité, mais avec un léger côté décalé. Ainsi, dans le roman, il n’est pas rare de voir des habitations prendre vie aux Etats-Unis, d’ailleurs tout le monde se souvient encore de cette maison devenue amphibie après qu’une inondation ait noyé toute une famille.

La maison Yaga ne détonne donc pas plus que ça, bien qu’elle revête un intérêt certain pour les passants qui semblent plus amusés qu’effrayés.

Le réalisme magique s’invite tout le long de l’histoire, d’abord avec la maison mais aussi avec les étranges facultés dont disposent les enfants Yaga.

Isaac a la possibilité de prendre l’apparence de n’importe quelle personne qu’il croise et Bellatine peut donner vie aux objets inertes même si ce don l’effraye tant qu’elle préfère ne pas l’utiliser mais le dissimuler. Ils représentent à eux deux des mythes bien connus du folklore germanique et juif. Le Doppelgänger ou le double d’une personne vivante, et le golem, un être façonné de glaise auquel le nom de Dieu inscrit sur le front peut donner vie.

C’est surtout le nom de Yaga qui donne un côté mystique au récit. La légendaire sorcière porte une figure négative en Ukraine.

Dans le roman, l’autrice va peu à peu nous dévoiler cette légende.

Au fur et à mesure des retrouvailles, Isaac et Bellatine vont ré-apprendre à se connaître et à maîtriser leur don et cette maison qui semble parfois n’en faire qu’à sa tête.

J’ai trouvé la première moitié du roman un peu ennuyeuse par moment. J’avoue un profond désintérêt initial pour l’histoire des jeunes Yaga.

Mais soudain, l’écrite s’emballe et le merveilleux se transforme en fantastique horrifique, puisant dans la réalité des persécutions juives et des pogroms.



Au-delà d’un joli conte où les maisons et les objets s’animent, où la poésie s’exprime dans les retrouvailles entre un frère et une sœur, GennaRose Nethercott puise dans le réalisme magique et un style imagé pour parler du sujet de la haine des hommes envers d’autres hommes et des conséquences terribles qui en découlent.

La Maison aux Pattes de Poulet apparaît ainsi comme un plaidoyer poétique pour la lutte contre la haine sous toutes ses formes.
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La Maison aux pattes de poulet

La Maison aux pattes de poulet !



Voici un titre de livre qui m’a interpellé. GennaRose Nethercott pour son premier roman c’est inspiré du mythe de Baba Yaga, personnage présent dans le folklore des contes slaves.



Le récit commence avec la présentation de nos deux personnages principaux Bellantine et Isaac Yaga. Ils sont frère et sœur, ont chacun un don et ils sont les descendants de Baba Yaga. Ils héritent d’une étrange maison mais également de son passé…



J’ai apprécié comment l’auteure a construit son roman. Elle entremêle différentes histoires avec habilité en passant du passé au présent. Au-delà du conte fantastique, il y ait aussi question de la persécution des juifs de l’empire soviétique pendant l’entre-deux-guerres.



Si je devais faire une analogie, je dirais que le style ressemble à un mélange de Tim Burton pour l’imaginaire et de Anthony Doerr pour l’écriture.



J’ai vraiment beaucoup aimé cette histoire, un coup de cœur. Pour un premier roman, c’est une réussite et je lirai avec un immense plaisir les prochains livres de GennaRose Nethercott.
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La Maison aux pattes de poulet

🛖Chronique🛖



« Dans notre famille, on nait avec des chardons dans les pieds. Quand on s’arrête trop longtemps, les chardons se mettent à piquer. »



Je ne sais pas qui écrit les histoires qui résistent au temps. Qui sait pourquoi, elles-mêmes, se comportent comme les chardons de Russie, à fuir, tête la première, vers d’autres contrées. Mais la fascinante histoire de Pieds-de-Chardon devrait vous en laisser quelques indices. Cette maison n’est pas ordinaire. Ce n’est pas seulement La maison aux pattes de poulet, qui est déjà une étrangeté en soi, mais c’est l’héritage de la famille Yaga. Et si, vous avez la finesse d’esprit de reconnaître ce nom, c’est parce qu’il en appelle au mythe de la Baba Yaga, une histoire, encore ,qui n’a pas fini de nous parler, de nous enchanter, de nous faire peur et de traverser les siècles…Baba Yaga est la figure féminine la plus marquante du conte slave. Elle est tour à tour, sorcière, ogresse, gardienne. Et sa cabane zoomorphe a inspiré GennaRose Nethercott, pour mon plus grand bonheur et le vôtre, sans nul doute. Je sais maintenant, en revanche, que cette histoire résistera au temps, car elle en appelle à la mémoire…



« Éteignez les lampions…

-Que le spectre se lève! »



C’est comme une formule magique pour la famille Yaga. Bellatine et Isaac la prononce, l’invoque, la fait sortir des profondeurs de leurs enfances, l’adopte avec leur nouveau train de vie. Frère et sœur se retrouve, dans cette maisonnette mobile, à courir la chance, le succès, l’enchantement. Avec leur spectacle de marionnettes, ils espèrent conquérir les cœurs. Or, quand on éteint les lumières, l’ombre profite pour avancer, et emmener dans son sillage, les spectres. Alors ce n’est plus de formule magique dont il est question, mais de malediction à laquelle, ils vont devoir échapper! Les objets s’animent, les fantômes aussi. La peur prend l’espace comme cette étrange brume, et c’est l’atmosphère entière qui change…Ce qui est incroyable avec cette histoire, c’est que le merveilleux vienne danser avec l’horreur. Le réalisme magique dont est pourvu ces pages, est si puissant, que j’ai été comme pétrifiée et épatée, au seuil de cet imaginaire chargé. Ces pattes de poulet ne se contentent pas de porter une habitation, mais supportent tout le poids de la transmission et des souvenirs familiaux…



« Parfois l’histoire n’est pas celle que l’on veut. »



Dans l’Histoire, il y a des histoires qui n’auraient pas dû avoir lieu. Des événements qui n’auraient jamais dû exister. Des monstres qui n’auraient pas dû prendre forme. L’Histoire est remplie de drames, d’idiots, d’incendies. Ce n’est jamais drôle, ces histoires. Et pourtant, il faudra bien que quelqu’un les raconte, les écrive, les fasse voyager. Il faudra du talent, de l’énergie, de la magie pure, pour les métamorphoser. Il faut à tout prix, que ces tragédies ne se répètent pas. Il faudra donc, des bardes, des voyageurs du temps, des poètes pour contrer ce Mal. Il faudra des mots, des contes, et des vagues d’amour pour éviter la réitération des massacres. GennaRose Nethercott, avec La maison aux pattes de poulet, réussit l’exploit de nous émerveiller tout en sensibilisant sur les ravages de l’antisémitisme. Époustouflant!

J’ai tout aimé de ces pages! Du folklore à l’ambiance gothique, du fantastique aux réminiscences passées, du frisson à l’empathie, j’ai trouvé que la maîtrise de ce texte était impressionnante! Et si jamais vous voyez un cœur qui court sur pattes, ce n’est que le mien, qui veut pouvoir vous toucher et sentir que son message arrive jusqu’à vous! Il veut avoir accès aux vôtres, pour y faire un Embrasement!



« Je veux cette maison. Je la veux de tout mon cœur. »
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La Maison aux pattes de poulet

Chaleureusement accueilli par la critique, « La maison aux pattes de poulet » est le premier roman traduit de l’autrice GennaRose Nethercott dans lequel elle se réapproprie l’une des figures les plus emblématiques du folklore slave, la sorcière Baba Yaga. L’ouvrage met en scène un duo composé d’un frère et d’une sœur qui, après avoir été séparés de longues années, vont être réunis grâce à un héritage. Arrivé tout droit d’Ukraine, ce dernier appartenait à leur arrière-grand mère et se révèle pour le moins surprenant puisqu’il ne s’agit ni d’argent ni d’un carton de vieux souvenirs mais d’une maison. Une maison qui leur est donc livrée par conteneur jusqu’en Amérique (où leur famille a émigré il y a longtemps) et qui possède deux particularités : celle d’être consciente, d’abord, mais surtout celle d’être capable de se déplacer seule, puisque la chaumière en question est affublée de deux solides pattes de poulet. Pour étonnant qu’il soit le phénomène n’a cependant pas l’air d’être totalement inédit dans l’univers mis en scène par l’autrice puisqu’il y existe plusieurs cas de bâtiments ayant développés des caractéristiques physiques inhabituelles pour mieux s’adapter à un nouvel environnement (comme des branchies après une inondation, par exemple). Le cadeau n’est tout de même pas banal, ce qui n’empêche pas Bellatine (la sœur) de tomber immédiatement sous son charme. Issac (le frère) en profite pour proposer un marché à cette dernière, lui proposant de lui laisser ses parts de la maison en échange de sa participation à une tournée d’un an afin de présenter leur spectacle de marionnettes dans toute l’Amérique (là encore un héritage familial). Deux problèmes vont toutefois rapidement émerger. Le premier concerne Bellatine qui, depuis toute petite, possède des mains dotées du pouvoir d’animer les objets, pouvoir qui la terrifie et auquel elle tente désespérément de ne pas lâcher la bride. Or, la proximité avec les marionnettes risque fort de la faire replonger dans ses travers. Le deuxième réside dans la traque impitoyable lancée contre la maison aux pattes de poulet par une étrange entité venue tout droit de Russie, Ombrelongue, et dont les pouvoirs et la violence semblent inarrêtables.



Le moins que l’on puisse dire concernant le roman de GennaRose Nethercott, c’est qu’il est original ! Qu’il s’agisse du savant mélange entre folklore russe et américain, de la mise en scène de cet étonnant personnage de maison sur patte, ou encore du focus opéré sur le théâtre de marionnettes, tous ces aspects participent à créer une ambiance qui sort de l’ordinaire. Enfin, plutôt deux ambiances. Le roman est en effet composé de deux histoires qui se déploient parallèlement, certains chapitres relatant à la troisième personne la course poursuite entre le duo Yaga et Ombrelongue dans l’Amérique moderne, tandis que d’autres donnent directement la parole à la maison elle-même. Plus brefs, ces passages nous plongent dans l’Europe de l’Est du début du XXe siècle et visent à expliquer l’origine de cette curieuse chaumière dotée de pattes. Seulement la narratrice, légèrement taquine, ne cesse d’inventer milles et une version de sa naissance et de réécrire sans arrêt l’histoire de ses principales occupantes, une certaine Baba Yaga et ses deux filles. On comprend vite cela dit que cela a à voir avec les troubles qui agitèrent la Russie dans les années 1910, et que la véritable histoire sur laquelle la maison refuse de s’appesantir n’a rien de très gai. Cette construction imbriquée se révèle être une vraie réussie, le lecteur passant avec plaisir d’une époque et d’un pays à l’autre, avec toujours cette même envie d’en apprendre davantage sur les nombreux mystères qui entourent la famille Yaga (l’origine de la maison, certes, mais aussi la nature des pouvoirs de Bellatine et, dans une moindre mesure, de ceux d’Isaac). Bien que plutôt épais, le roman ne souffre ainsi que de peu de temps mort, les aller-retours temporels couplés aux multiples rebondissements inhérents à tout récit de course poursuite fonctionnant à merveille.



J’avoue malgré tout avoir eu une préférence assez marquée pour les chapitres consacrées à l’origine de la maison et à Baba Yaga plutôt qu’à ceux mettant en scène Isaac et Bellatine. Les raisons sont multiples mais tiennent surtout à l’aura de mystère et de peur qui imprègne ces passages et qui fait naître un sentiment assez paradoxal cher le lecteur, à la fois avide de connaître le fin mot de l’histoire mais aussi presque terrifié par l’inéluctabilité de la violence et du drame à venir. Bien que présente, la tension est tout de même moindre dans les chapitres au présent qui, de plus, prennent des tours parfois tellement inattendus qu’on en vient presque à sortir du roman. Enfin, si j’ai tout de suite accrochée au personnage de Bellatine pour laquelle on éprouve rapidement une solide d’empathie, j’ai été assez rebutée par celui d’Isaac qui n’est jamais parvenu à m’émouvoir et dont les réactions et le comportement m’ont tout du long parus exaspérants (sentiment partagé par sa sœur, ce qui a de toute évidence facilité l’identification avec cette dernière). Les autres personnages sont plus en retrait mais les seconds couteaux font du bon travail, ajoutant tour à tour un peu de peps, de douceur ou d’humour au duo Yaga. En dépit de mes réserves concernant certains pans de l’intrigue, je dois en revanche reconnaître que la conclusion offerte par l’autrice m’a totalement conquise. D’abord parce qu’elle se révèle bouleversante d’un point de vue émotionnelle. Ensuite parce qu’elle nous livre enfin toutes les réponses que l’on attendait, et que ces dernières sont bien plus subtiles et élégantes que ce que j’avais pu imaginer.



« La maison aux pattes de poulet » est un roman atypique dans lequel GennaRose Nethercott se réapproprie la figure mythique de Baba Yaga, nous offrant ainsi une plongée pleine de surprises dans le folklore slave mais aussi dans une Amérique des marges qu’on a d’ordinaire peu l’habitude d’arpenter. Bien que certains personnages et quelques aspects de l’intrigue ne m’aient pas totalement convaincus, je n’en ressorts pas moins conquise de ma lecture, l’autrice étant parvenue à construire un récit solide reposant sur une idée originale et proposant une réflexion importante sur la violence mais aussi l’acceptation de soi, la mémoire ou encore la dimension cathartique de l’art.
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La Maison aux pattes de poulet

Nous sommes ici dans un roman "monde" au genre fantastique avec des allures de conte pour adultes, atypique, empli de magie, de personnages hauts en couleurs et d’une intrigue haletante qui monte crescendo.

Nous suivons les arrières petits enfants de la légendaire Baba Yaga, Isaac et Bellatine Yaga, deux personnages intriguants ayant des dons particuliers. Ils héritent de leur mère un seul bien, une maison, la maison aux pattes de poulet, la maison de Baba Yaga, et les problèmes qui vont avec les poursuivront tout au long de ce récit.

Les personnages secondaires sont intéressants, surtout Winnie, ils sont bien étudiés par l’autrice et donne un ensemble cohérent à l’ensemble.

Magie, souvenirs, poursuite, problèmes divers avec les populations, voilà ce qui attend nos protagonistes jusqu'à se perdre eux même mentalement.

En parallèle on nous conte l’histoire de Baba Yaga, en Russie, dans son village subissant les pogroms juifs, une partie du récit mais aussi de l’Histoire avec un grand H cruelle et ultra violente.

GennaRose Nethercott est dotée d’une plume particulièrement envoûtante, faisant passer le lecteur de l’émerveillement à l’horreur en quelques pages, jouant avec nos nerfs tel une marionnettiste des mots, je ne suis d’ailleurs pas étonné q’elle soit poétesse et folkloriste.

Je vous invite à découvrir La maison aux pattes de poulet au plus vite, c’est une petite merveille qui restera longtemps gravée dans mon esprit et je l’espère dans le vôtre.
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La Maison aux pattes de poulet

Pieds de chardon

[Thistlefoot en anglais dans le texte]



Imaginez, nous sommes ce jour, notre présent à nous, et Baba Yaga n'est plus depuis 70 ans. Pile l'année où dans son testament elle lègue sa maison aux pattes de poulet à ses descendants les plus jeunes : Bellatine et Isaac frangins issus d'une famille d'artistes saltimbanques, qui ne s'étaient pas revus depuis leur montée en adultitude.



L'imaginaire bercé par la trilogie Winternight de Katherine Arden et par les contes que me lisait, enfant, ma maman russophone, j'attendais énormément de ce roman. Sans doute aussi parce que les critiques céans sont élogieuses. De quoi débuter magnifiquement ce mois de Mars toujours doux-amer ai-je pensé.

Cela dit, malgré deux premiers chapitres que j'ai adoré, j'ai très vite calé. C'était peut-être juste pas le bon moment de lire ce roman pour moi mais je n'ai ressenti aucune magie. Aucun air piquant de neige dans l'air ou de magie ancienne prête à me sauter sur les épaules, aussi belle qu'inquietante. Rien. Aucun intérêt non plus pour le grand méchant de l'histoire au nom pourtant magnifique (Ombrelongue) mais caricatural dans sa méchantitude. Je me suis très vite ennuyée. Dès la rencontre avec Bellatine j'ai forcé autant que j'ai pu mes yeux à ne pas sauter de lignes et mes mains de feuilleter les pages suivantes. La maison n'a rien évoqué non plus pour moi. Pourtant l'entreprise des frangins est une chouette idée mais à la lire, tout me paraissait fastidieux.

Oh. Diable. Quel. Ennui.

Alors j'ai refermé le livre bien vite. Trop vite sans doute. Mais là je ressens une certaine urgence à lire d'autres récits qui me charmeront d'avantage. A retenter plus tard peut-être. Peut être pas.



[1300eme critique. C'est beau tout de même]
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La Maison aux pattes de poulet

“Éteignez les lampions !

- Que le spectre se lève!”



Comment résister à la couverture illustrée par Anouck Faure ? Une hutte lugubre ornée de deux fenêtres qui éclairent le bois sombre, promettant aux promeneurs égarés chaleur puis réconfort. Elle a la particularité d'être debout sur des pattes de poulet, entourée de vieux troncs d’arbres noirs, de corbeaux et de lions qui regardent, s’interrogent sur ce qui se trame derrière eux.

L'illustration m'a immédiatement remémoré Baba Yaga, les frissons provoqués par les contes folkloriques russes, cet état d'excitation de la peur dans les mots, l'inflexion de la voix de la conteuse, ces climats dans ces histoires aux personnages monstrueux.



Ici, les histoires d’une Baba Yaga juive dans le shtetl de Gedenkrouska ne correspondent pas tout à fait aux histoires traditionnelles slaves que vous avez pu lire ou entendre car elle ne brûle pas d’enfant.



L'autrice en a créé de très pertinentes et glaçantes "ce qui est la nature des contes populaires, ils se modifient avec le temps selon le conteur et la personne qui l’écoute."



Genna Rose Nethercott nous charme, nous rappelle, nous prend à bras le corps. Tout est en action, virevoltent les émotions, nous emmène dans plusieurs directions, nous questionne, sème le doute

“Une réponse c'est une crevaison sur une route de campagne. Une impasse. Dès qu'on l'obtient, il n'y a plus d'errance. Plus d'émerveillement. Plus de miracles, plus de sacré. Aucun endroit où on puisse aller. Le sacré, Isaac ne savait pas vraiment où le trouver, mais ce dont il était certain, c'était qu'il ne se trouvait pas dans les réponses."



Son style puissant qui laisse supposer, est imprégné d’une atmosphère poétique, gothique, et fait penser à ces fleurs sur les marbres des tombes, il est vif sur l'ancien.



Il ramène à l’enfance, à la vie et aux morts, à la nouveauté, il est facétieux et elle nous conte son roman à l’oreille, elle nous tient, nous emmène, en rythme.



L’écriture et la traduction sont subtiles et GRN a une imagination débordante. Cela m'a fait penser à L’océan au bout du chemin de Neil Gaiman, bien qu’elle ait son propre style, son propre monde, bien distinct, unique, singulier, parfait.





Revenons à l'histoire...

Etats-Unis, XXIe siècle.



Bellatine et Isaac Yaga sont frère et sœur et ont passé leur enfance avec la troupe de marionnettistes familiale mais ils ne se sont plus vus depuis six ans.



Ils se retrouvent à la suite de l’appel d’un avocat spécialisé en succession, qui vient d’ouvrir le testament de Baba Yaga, leur arrière-arrière grand-mère, document qui ne pouvait être divulgué que 70 ans après son décès.



Baba Yaga était une sorcière impitoyable du folklore slave et attirait les enfants dans sa hutte maudite pour les dévorer.



Isaac et Bellatine vont recevoir en héritage "La maison aux pattes de poulet" qui leur a été envoyée de Kiev et à laquelle Bellatine va immédiatement s'attacher. Dans cette bâtisse elle sent profondément qu’elle peut enfin devenir pleinement elle-même, car ce qu’elle contient, retient, va enfin pouvoir éclore maladroitement sans doute, puis de mieux en mieux… peut-être.



Elle la veut de tout son cœur, demandera à Isaac de racheter sa part, et acceptera son marché qui implique une année à vivre ensemble et à jouer la pièce de marionnettes L’idiot qui se noie en itinerance.



Ce duo bien imprévisible à du mal à se conformer aux règles de l'autre, Bellatine suit les siennes et Isaac n'en respecte aucune…



Cela va changer beaucoup de choses dans leurs aspirations.



Ce sont des personnages denses et complexes, l’autrice navigue entre leurs côtés sombres cachés ; mais aussi leur apparence, leur héritage, leurs aspirations à devenir.



Ce sont des personnages qui grandissent et qui vous touchent.



La jeune Bellatine, ébéniste de formation, cherche à vivre une vie paisible et douce, sans surprises, elle craint ses épanchements, ses abominations comme les appellaient sa mère “Sa mère lui offrait des objets sans visages ni esprit car elle considérait son don comme une abomination.”

Est-ce que GennaRose lui apprendra à s’apprivoiser elle-même et ne plus craindre son talent, son don, sa prédilection, son ombre ?



Isaac considère la vie comme un troc, comme un jeu, il ne la prend pas au sérieux, il paraît léger, fuit tout attachement, mais il y a des raisons derrière ce comportement. Il devient autre, il est le maître de l’illusion, de l’imitation, il a des personnalités multiples, ne manque pas de charme et beaucoup de rumeurs courent sur lui, il fuit les autres, se fuit lui-même en permanence, ne veut pas laisser de traces.



Ils vont, accompagner d’Enjoliveuse le chat d’isaac, rencontrer des personnages sombres et modernes que je vous laisse le soin de découvrir.



GRN mêle avec génie les passages de littérature folklorique traditionnelle racontés au présent et la modernité, puisque certaines scènes paraissent sortir tout droit de séries Netflix. Ce roman qui nous parle d’héritage, de mutation, de passé, de présent et d’avenir qui s'emmêlent, se démêlent, se croisent, s’oublient, s’agrippent.



Certains passages m’ont captivés, et ce sont finalement les passages les plus sombres et jouissifs, qui amènent beaucoup de densité de tension au récit, de profondeur aussi et qui se marient avec perfection, on fait des liens, elle pose des choses, des faits, un regard, une voix, une attitude ... qui provient, des ancêtres ?



"On abandonne pas ses fantômes, les chromosomes transforment les corps, c’est l'héritage spectral. L’autoroute qui ramène le passé au présent."



Il y a toute cette histoire à tiroirs, ces histoires dans l’histoire, la représentation des femmes en tant que sorcières, le tout lié à une seule : la persécution des juifs russes et de quelle manière certains ont été arrachés au monde, il y a des passages terribles. La maison aux pattes de poulet n’est pas un livre léger, il est rattaché à ce peuple, à son histoire, ce qui en fait un texte vraiment à part, original. 



J’ai eu un coup de cœur pour ce roman, qui mélange le folklore, la magie, la modernité, les contes de fées, la dureté, l’exclusion, l’héritage. C'est de loin le meilleur livre dans la catégorie SF fantasy fantastique que j’ai lu ces derniers temps, ne passez pas à côté. Sa sortie est prévue dans les librairies le 31 janvier.

L l’hiver est la période idéale pour s’y immerger selon moi.



J'espère lire prochainement un second livre traduit de cette autrice en français, même si cette américaine, poète et connue pour ses œuvres publiées dans plusieurs revues littéraires, est déjà très occupée.





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La Maison aux pattes de poulet

Bellatine et Isaac sont frère et sœur et les derniers de leur lignée. Ils viennent d'hériter d'un étrange leg qu'ils doivent récupérer au port de New York, tout droit envoyé de Kyiv. Il s'agit d'une maison, mais pas n'importe laquelle puisqu'elle est perchée sur des pattes de poulet et a appartenu à leur aïeule Baba Yaga. Alors que Bellatine se voit déjà y vivre et réfléchit à redonner la part à son frère, Isaac, lui, a la folle idée de la transformer en scène de théâtre de marionnettes afin de partir en tournée avec sa sœur comme au bon vieux temps de leur enfance. Bellatine n'a pas d'autre choix que d'accepter le temps de gagner suffisamment d'argent du moins. Seulement, elle ignore qu'un grand danger les guette car Ombrelongue est déjà sur leurs traces et compte bien les exterminer.



Dans La Maison aux Pattes de Poulet, GennaRose Nethercott s'est réappropriée la figure marquante du folklore slave, Baba Yaga. Tantôt décrite comme ravisseuse d'enfants pour les faire rôtir, tantôt comme donneuse d'objets et/ou de conseils au héros afin qu'il triomphe de sa quête, cette sorcière hante les contes russes. Or, l'intrigue de ce roman s'articule autour de sa célèbre isba nichée sur des pattes de poulet la rendant ainsi mobile. Sanctuaire et refuge à la fois, elle est le bien le plus précieux de Bellatine et d'Isaac. Son existence est une énigme, elle semble douée de vie, à l'écoute de ce qui se dit. Elle demeure un lieu apaisant pour quiconque pénètre ses murs, le feu permanent brûlant dans son poêle y joue sans doute un rôle. Sa présence symbolise donc la figure de Baba Yaga dont l'ombre plane au-dessus d'elle car elle est un réceptacle à ses souvenirs et à sa destinée.



Le merveilleux s'empare donc de ce texte en s'exprimant aussi à travers les pouvoirs que détiennent les deux personnages principaux. Don ou malédiction, la magie est bien là, elle fleurit dans les mains de Bellatine qui donne vie aux objets inanimés ou dans le corps d'Isaac qui est capable de s'approprier les traits de son visu.



Mais l'onirisme de la plume de GennaRose Nethercott flirte beaucoup avec l'horrifique, notamment à travers l'inquiétant Ombrelongue qui donne vie aux peurs, empoisonnant ainsi les âmes et tuant les esprits. Entité maléfique et malveillante, sa présence donne la chair de poule car il est le croquemitaine de l'Histoire, chargé d'une bien funeste mission.



Dans La Maison aux Pattes de Poulet, l'autrice s'est penchée sur les différentes facettes du monstre. Ombrelongue en est, d'ailleurs, clairement l'essence. Agglomérat du pire de l'humain, il est la personnification des heures sombres de l'humanité dans ses basses œuvres par peur et lâcheté. Or, GennaRose Nethercott différencie cette monstruosité qui se croit légitime dans ses actes de celle dont certains ou certaines se croient à tort doter. C'est le cas de Bellatine qui se voit comme une abomination à cause de ses aptitudes surnaturelles et de ses désirs refoulées. La vérité est que le diable se cache souvent sous une couche de mensonges aux accents de légitimité.



La Maison aux Pattes de Poulet est un conte sombre et tragique, pense-bête du passé pour ne pas le voir se reproduire dans l'avenir.



Lire La Maison aux Pattes de Poulet, c'est faire la rencontre d'une plume délicate qui nous plonge dans un univers baigné d'ombre et de lumière, agrémenté d'émotions fortes... suite sur Fantasy à la Carte








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La Maison aux pattes de poulet



Bellatine Yaga et son frère Isaac sont séparés depuis l'enfance par la distance géographique et le ressentiment. Pour toucher leur héritage, ils acceptent de se revoir. Ils reçoivent une maison intelligente juchée sur des pattes de poulet. Elle leur a été envoyée de Kiev, d'où est originaire la famille Yaga. L'Ombrelongue, entité maléfique, est à sa recherche pour la détruire.

Nous voilà projeté en plein conte, pas comme ceux de Disney, oh non, mais comme ceux de Grimm, Andersen et autres Perrault. J ’ai même pensé à Stephen King pour certains passages. Le rire, l’horreur, la peur tout est présent comme dans une bonne histoire de sorcière. Et comme tout bon conte, la morale est intemporelle. Pour « La maison aux pattes de poulet » ce serait : ce n’est pas en lui prenant la vie qu’on tue un Peuple, c’est en lui volant son Histoire. « Tuez l’Histoire et vous tuerez la Culture. Mais si l’Histoire survit ? Alors le massacreur aura perdu !»

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La Maison aux pattes de poulet

Bellatine et Isaac sont frère et sœur. Elle est menuisière, habile de ses mains; il va de ville en ville, à la manière d’un hobo, jouant dans la rue, détroussant les passants au passage. Lorsqu’ils héritent tous les deux d’une drôle de maison ukrainienne, Isaac et Bellatine sont forcés de cohabiter ensemble et de reprendre la route.



« La maison aux pattes de poulet » est un excellent roman auquel je trouve peu de défauts. L’autrice s’inspire donc du folklore russe et ukrainien pour nous présenter cette drôle de maison aux pattes de poulet, demeure de Baba Yaga dans le conte originel. La maison prend parfois la parole pour nous raconter sa naissance. J’ai adoré remonter aux origines du conte, peu connu finalement. J’ai tout de suite apprécié les personnages du roman qui sont pour moi le point fort du livre. Un peu foutraques sur les bords, ce sont des anti-héros avant tout. Isaac possède le don de devenir un caméléon, d’imiter qui il souhaite. Trompeur, charmeur, voleur, on ne peut, malgré tout, que l’apprécier. Quant à Bellatine, elle craint plus que tout de toucher les marionnettes laissés par ses parents. Ses mains seraient-elles maudites?



Les deux personnages, forcés de vivre ensemble quelques temps, vont vivre dans leur isba rebaptisée « Pieds-de-Chardons ». Avec leur spectacle « L’idiot qui se noie », ils se rendent de ville en ville pour se produire. Mais bientôt, ils sont poursuivis par Ombrelongue, un méchant venu du froid, de l’autre côté de l’Amérique.



Au-delà de l’aspect fantastique du roman, l’autrice nous ramène aux heures les plus sombres de l’Empire russe. L’ombre du pogrom plane sur cette isba étrange. C’est la nécessité de se souvenir qui est au cœur de ce roman. Isaac et Bellatine ont tout oublié de leur histoire familiale. Peu importe, la maison est là pour leur rappeler la douleur du passé. Et c’est dans la violence la plus totale qu’ils vont redécouvrir d’où ils viennent.



Avec cette Maison, l’autrice nous offre un roman atypique, poétique et sombre sur les traces du folklore mais surtout de ce qui fait l’Histoire.
Lien : https://carolivre.wordpress...
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La Maison aux pattes de poulet

Je remercie chaleureusement Gilles Dumay et les Éditions Albin Michel Imaginaire de m'avoir envoyé La maison aux pattes de poulet en service presse ! Ce roman a été largement demandé, je m'estime donc chanceuse. Dès que j'ai vu la sublime couverture, signée par Anouck Faure, et le titre, tous deux évocateurs de Baba Yaga, j'ai été séduite, puis conquise par sa présentation : un conte moderne sombre. C'est un coup de cœur pour moi !

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Mon retour :

Baba Yaga, c’est le nom d’une femme. D’une sorcière. D’une ogresse mangeuse de chair humaine. Habitant une maison juchée sur deux pattes de poulet. Un conte de fées slave. Toutefois, les contes comme les mythes aussi protéiformes soient-ils naissent de faits, de vérités, un terreau bien sombre souvent imbibé de sang et de violence. Baba Yaga, c’est la rudesse et la cruauté d’une contrée reculée survivant à l’hiver. C’est la différence pointée du doigt. C’est le deuil et la rage éclatant en incendie dont les flammes se transmettront, tout comme de la boue, terre détrempée par les larmes et le sang, surgira un golem avec le goût de la fuite ancré au plus profond.



Baba Yaga, c’est le cœur battant d’un pogrom, la hantise d’une créature affamée, le tout enrobé par l’héritage transgénérationnel. La maison aux pattes de poulet s'inscrit indéniablement une histoire de fantômes. Attention toutefois car, comme dans La fille qui se noie (également paru aux Éditions Albin Michel Imaginaire), les fantômes ne sont pas ceux que l’on croit. Ici, ils sont plus que des souvenirs, ils sont un conte. Alors ouvrez grand vos yeux et vos oreilles, car voici le récit de Baba Yaga, qui remonte aux sources à travers ses descendants.



Voici un conte moderne, lorsque à New-York arrive d’Ukraine un étrange héritage. Une maison juchée sur deux pattes de poulet. Un frère et une sœur qui ne pensaient pas se revoir vont devoir remonter leur don/malédiction pour comprendre et sauver leur héritage. Car l’étrange isba est en danger, une créature, Ombrelongue, veut la détruire, souillure qu’elle représente à ses yeux. Voici le récit de Bellatine et d’Isaac Yaga, d’une ébéniste maudite par l’Embrasement et d’un roi caméléon en fuite.



Pieds-de-chardon, l’étrange isba sur ses pattes de poulets, court le pays, faisant étape au gré des représentations de ses deux propriétaires. Car Bellatine a accepté le marché d’Isaac : en échange de sa part de la maison, son frère a souhaité qu’elle l’accompagne un an en tournée pour remettre sur le devant de la scène le spectacle de marionnettes de L’idiot qui se noie. Leurs parents leur envoient le coffret contenant les marionnettes, ravivant avec horreur le feu des mains de Bellatine, la cadette. Quant à Isaac, contraint de jouer son propre rôle uniquement, il a toutes les peines du monde à tenir en place. Alors quand il est sauvé in extremis du poison d’Ombrelongue par une bande de musiciens pré-apocalyptiques, c’est comme si son désir prégnant de fuite s’expliquait, trouvait son origine.



Mais qui ou que sont les véritables monstres dans cette histoire ? Isaac et sa panoplie d’identités ? Bellatine et ses mains qui ressuscitent le bois, la pierre et les cadavres ? Ombrelongue, une créature qui entraîne dans son sillage folie et mort au nom de la purification ? Pieds-de-chardon, maison intelligente en fuite qui s’apparente à quelques légendes urbaines similaires ?



Les pages se tournent toutes seules alors que défilent les kilomètres sous les pattes de Pieds-de-chardon, que les souvenirs hantent Isaac, que Bellatine tente de refouler l’Embrasement – qu’elle perçoit comme une malédiction, une monstruosité –, que l’autrice nous plonge dans des histoires dans les histoires : Pieds-de-chardon elle-même contant différentes versions de sa naissance, de l’histoire de Baba Yaga, mais également via la représentation des enfants Yaga de L’idiot qui se noie.



GennaRose Nethercot nous livre un fabuleux exercice d’écriture : un style moderne et fluide, non dénoué de poésie, un enchantement. Oubliez les réécritures de conte de fées, savourez celui-ci, qui remonte à l’origine de la légende de Baba Yaga, qui s’imprègne des mœurs de guerre, un siècle en arrière, alors que les juifs en fuite cohabitaient avec les paysans Ukrainiens. Imaginez donc qu’une femme juive élevant seule ses deux filles était perçue comme une sorcière. C’est la cruauté qui cristallise son histoire, celle de la rudesse de l’hiver, celle de la folie des hommes face à la différence et aux pensées limitantes. C’est sa rage et sa profonde détresse qui font naître de la boue un golem, une entité intelligente personnifiant l’héritage transgénérationnel. L’héritage comme une hantise : un fantôme familier que l’on perçoit de loin, sans tout à fait le comprendre alors que l’on sent son influence, venue d’un autre âge.



La maison aux pattes de poulet, ce sont les fils de plusieurs récits qui cousent la même marionnette, qui font tenir sur ses pattes Pieds-de-chardon, qui relient les membres d’une même famille, qu’importe la distance et les générations d’écart. Ces fils sont parcourus par l’électricité des fantômes, du surnaturel ou plutôt du réalisme magique marqués par les phénomènes de légendes urbaines ; cette énergie coule dans les veines des personnages, révélant la lumière de ces êtres d’apparence perdue, égarée. Des entités fabuleuses, des monstres fascinants, terriblement humains, avec sur leur trace, Ombrelongue, cette créature se définissant comme un « quand », qui possède un lien psychique avec Pieds-de-chardon.



La maison juchée sur ses pattes de poulet, la figure de Baba Yaga, le golem, la résurrectionniste, l’acteur aux milles identités, tout ce folklore se mêle à la magie de la Nouvelles Orléans, à celle des représentations de marionnettes, à la vie de vagabond le long des rails, au mythe de Pygmalion donnant vie à Galatée, statue, tout comme à des clins d’œil à des œuvres de fantastique comme aux série Supernatural et The Haunting of Bly Manor, ou encore à une nouvelle de Clive Barker. Et tout ce patchwork se marie à la perfection, comme les points d’une même étoffe, les carrés d'un patchwork.

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En bref :

J’ai été captivée par ce premier roman de GennaRose Nethercott ! Doté d’une grande maîtrise, son style poétique demeure suffisamment concis pour revêtir une forme fluide, mais riche d’évocation et de profondeur. Cette réécriture de conte fascinante mélange bien des éléments magiques : don/malédiction, héritage transgénérationnel, maison intelligente, fantômes, héritage, transformation ; le tout sans édulcorer la cruauté des hommes, pour nourrir la mémoire, ne pas oublier les horreurs du passé. L’autrice allie ce mélange à la modernité et l’inclusivité, de quoi combler toutes mes attentes.



Vous l’aurez compris, je ne peux que vous le recommander !
Lien : http://maude-elyther.over-bl..
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La Maison aux pattes de poulet

Extrait de ma chronique :



"De façon similaire, quand GennaRose Nethercott choisit, dans son premier roman, La Maison aux pattes de poulet (ouvrage lu en service de presse), de s'immerger à la fois dans la culture juive (dibbouk ou shofar, mais aussi shtetl, sous influence notamment d'Isaac Bashevis Singer) et le folklore slave (Baba Yaga), elle vise certes à exorciser un pan de son histoire familiale (comme elle le signale dans cet entretien ou dans cet autre) ; mais en diffractant par le prisme du conte ce qui s'est réellement passé à Rotmistrovka (rebaptisé Gedenkrovska dans le roman), elle livre tout autant une parabole universelle, dont l'actualité peut malheureusement se charger de démontrer la pertinence (Gromovar l'a bien vu).





Bien avant d'écrire La Maison aux pattes de poulet, GennaRose Nethercott expliquait déjà dans un entretien (elle l'a redit depuis, notamment dans cet entretien ou dans cet autre) que le folklore était pour elle une "fenêtre" ouverte sur les peurs les plus profondes d'une communauté – ce qui implique de disposer à la fois, structurellement parlant, d'une communauté soudée et d'une menace extérieure, afin de pouvoir confronter les deux."
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