La superstition est l'apanage des véritables gens de théâtre.
Au fil des générations, on oublie. Seul le corps se souvient. Le corps, et les fantômes. Flammes dansantes.
Une citation à découvrir sur Babelio : La Maison aux pattes de poulet de GennaRose Nethercott
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Je vous avais prévenus. L'histoire, telle qu'elle est, ce n'est pas toujours l'histoire telle qu'on voudrait qu'elle soit. Mais ce n'est pas une histoire, c'est notre monde. Un enfant mort. c'est un enfant mort. Un massacre, c'est un massacre. Les souvenirs, on doit les raconter. Les mains engendrent des mains. Les mères engendrent des enfants, qui à leur tour engendrent des filles. Les générations passent et, soudain, nous oublions. Nos descendants naissent en proie à des désirs qu'ils ne comprennent pas, car ils ont oublié. Leurs mains sont pleines de feu. Leurs jambes brûlent de fuir. Le corps se souvient. L'air aigri se souvient. Nous ne pouvons pas oublier. Je ne peux pas oublier. Et s'il faut que je me rappelle, vous aussi, j'en fais le serment.
Isaac ne manquait jamais de charmer son auditoire. Son élocution était aussi précise, aussi agile qu'un trapéziste ; sa langue dansait, rarement interrompue, sur la corde raide. Quand il parlait, on l'écoutait.
Les contes, on ne les oublie pas ; ils se contorsionnent et se pelotonnent autour du cœur jusqu'à y être tranquillement logés. Ils sont fluides, changeant, ils peuvent s'adapter à toutes les circonstances qu'ils traversent. Ils changent dans la bouche des conteurs et se font au contour des oreilles des auditeurs. Les faits peuvent différer (les lieux, la couleur du manteau d'Untel, les espèces qui fleurissent dans un petit jardin circulaire) mais leur noyau reste le même. Ainsi survivent-ils. S'assimilent-ils. Et avec eux - le souvenir.
Il y a le temps du chagrin et il y a le temps de la colère. Les deux sont nés du deuil. Le chagrin dure plus longtemps.
Il peut, si vous le laissez faire, devenir un compagnon, un chat errant qui ne vous quitte plus. Le temps du chagrin viendra : comme le chat, il a plusieurs vies. La colère, elle ne dure pas. Elle détruit le corps, comme un feu dans la maison, puissante, avide.
Et maintenant, son temps est venu.
Les hommes les plus dangereux, les plus violents, sont ceux qui croient n'avoir aucune peur au monde.
Une meute n'a pas d'oreilles auxquelles on puisse parler, juste une bouche qui hurle.
C'est un peu comme des fantômes, non, les histoires qu'on répète sans cesse et qui ne se taisent pas ?
Quelle sorte de bête transforme des citoyens ordinaires en meute enragée, en éveillant leurs peurs ? Dans le monde réel, ce ne sont pas des monstres. Ce sont des hommes en quête de pouvoir.