Citations de Gonzague Masquelier (129)
Les problèmes psychopathologiques sont aussi lourds en entreprise que dans le champ de la psychothérapie !
La supervision contre-transférentielle
Le thérapeute essaie alors de mettre en lumière ses projections envers son client, c'est-à-dire les échos personnels - souvent inconscients - réveillés en lui, et tout ce qui se joue dans le trait d'union de la relation Je-Tu. Le superviseur utilise alors les mêmes stratégies d'intervention que dans la thérapie, à savoir par exemple, la métaphore, l'amplification, le monodrame, etc. Pour trouver une réponse à la question ; "Qu'échangeons-nous à nos frontières contacts?"
Un bon superviseur n'est pas forcément quelqu'un de beaucoup plus compétent, sinon qui organiserait la supervision des superviseurs et le contrôle des super-superviseurs ?! Il peut être un pair, choisir pour sa compétence et sa clarté didactique.
En plus de la recherche de qualité de la relation, la supervision a une autre utilité, que je nomme familièrement l'"effet poubelle". L'expérience nous montre à tous que l'on ne peut s'approcher en permanence de la souffrance psychique des autres, sans de donner soi-même les moyens de lâcher-prise par moment, de vider son coeur et son corps d'un trop-plein d'affects. La supervision est donc également un lieu de ressourcement, un temps durant lequel peuvent s'exprimer la lassitude, l'anxiété générée par un client qui ne va pas bien, l'énervement face à celui qui piétine, bref un moment où le thérapeute soigne sa propre santé psychique.
La Gestalt-thérapie a plus de cinquante années d'existence. Elle est née dans un contexte d'après-guerre, de baby boom, de relance économique. Elle a développé un paradigme de croissance illimitée : l'organisme trouve ce qui est bon pour lui dans l'environnement grâce à ses facultés d'ajustement créateur et l'achèvement des Gestalts est une source de croissance. L'objectif de la thérapie est fluidifier le déroulement des cycles et de remettre en mouvement les Gestalts inachevées.
... Perls et Goodman, dans une perspective rousseauiste affirmant que le monde est bon, présupposent que tout besoin peut être satisfait et qu'il est source de croissance. C'est l'expansion ou la mort ! Tous deux luttent contre les introjections pour libérer les oppressions de l'éducation.
"Remâcher les introjections" pour s'en libérer a été remplacé par "développer l'ajustement créateur" pour survivre. Les Gestaltistes ont donc mis eux-mêmes en application ce qu'ils prônent pour leurs clients, à savoir changer, évoluer, chercher des réponses dans l'environnement social, bref ne pas rester dans une "tour d'ivoire". Ils sont acteurs de leur existence et peuvent, je 'espère, se retrouver dans le titre de cet ouvrage.
C'est probablement à tous ces possibles que Perls pensait en disant ; "La Gestalt est trop bonne pour n'être réservée qu'à des malades !"
... une tendance curieuse s'est dégagée depuis quelques années : s'il est de bon ton d'affirmer que Fritz Perls n'est vraiment pas un père fondateur valorisant, les deux courants se rapprochent de Paul Goodman, les premiers pour sa contribution à la théorie du self, les secondes pour avoir introduit cette théorie dans le champ social et politique.
Mais quelles que soient les références que chacun se donne, les Gestaltistes, se méfiant des introjectons et recherchant l'ajustement créateur, n'ont guère tendance rester dans l'imitation des deux pères fondateurs.
Quant à la Gestalt, elle est à mes yeux l'une des approches psychothérapeutiques les plus adaptées pour un travail social. En effet, en n'instaurant pas le rétablissement des fonctions de contact comme axe de travail, le Gestaltiste peut être un vecteur de changement dans notre monde en mutation permanente.
Pour moi, les bienfaits de la Gestalt-thérapie doivent dépasser le cadre restreint de la cure traditionnelle. Toutes les psychothérapies ont un rôle social à jouer, de par leur capacité à mettre du sens sur les phénomènes psychiques, à l'intérieur de chacun et entre les groupes. Ce n'est pas par hasard si tous les pouvoirs dictatoriaux commencent par museler la presse et interdire la psychothérapie. Attendre la demande explicite du client est un leurre car l'information manque dans ce domaine. Beaucoup n'ont aucune idée de ce que le développement personnel pourrait leur apporter et pensent que la thérapie est "réservée aux fous" !
Fidèle à son positionnement gestaltiste, le coach ne donne pas de conseils, n'interprète pas, mais propose des expérimentations pour que le client découvre sa solution.
Le travail du consultant est donc souvent centré sur le cycle du contact et les résistances. Que se passe-t-il entre l'entreprise et ses clients, entre ses différents services, entre les niveaux hiérarchiques ? Nous parlons alors d'une socio-Gestalt, c'est-à-dire de l'étude des interactions entre une organisation et son environnement. Le client est l'institution, regarde comme un organisme, dans un champ donné.
La difficulté est de permettre à une institution, ou le plus souvent à son équipe de direction, de se remettre dans un processus de changement, d'ajustement créateur, sans perdre la face. Car souvent la demande inconsciente de l'équipe est celle de la Castafiore : "Consultant-miroir, dis-moi que je suis belle."
Il est frappant d'observer que certaines organisations ont tendance à dysfonctionner selon le symptôme qu'elles sont censées soigner? Un exemple : bien des hôpitaux souffrent d'un déficit de communication, alors que les travaux sur les aspects psychosomatiques de la maladie montrent l'importance de la relation dans les soins [...].
Dans une de ces compagnies, nos interventions ont été retenues avec le commentaire suivant de la directrice du personnel : "Je choisis votre cabinet, car vous êtes des thérapeutes ; donc vous connaissez les limites de l'implication en entreprise et n'y ferez pas de la thérapie sauvage !" Ce qui, pour moi, est un beau compliment.
La thérapie est une relation duelle (même dans le cadre d'un groupe); alors que la formation est triangulaire : la demande est formulée par un tiers, qui est généralement celui qui finance la formation.
La thérapie est une relation duelle (même dans le cadre d'un groupe); alors que la formation est triangulaire : la demande est formulée par un tiers, qui est généralement celui qui finance la formation.
… comme Gestaltiste, je suis centré sur les perturbations actuelles du contact ; je suis un élément du champ. Dans une attitude de sympathie, je m'appuie sur mon propre vécu, actuel et passé, pour chercher à mettre en lumière toutes les impasses de contact. Le travail en groupe met en exergue la répétition de ces perturbations avec des interlocuteurs différents.
Certains professionnels font une différence entre :
- la Gestalt en groupe, où chaque individu poursuit sa propre évolution devant le groupe qui est utilisé comme terrain d'expérimentation, de feed-back et de support affectif. C'est la formule que je pratique habituellement.
- La Gestalt de groupe, dans laquelle le développement de la personne est obtenu comme résultat du développement du groupe. Le thérapeute considère alors le groupe dans son ensemble comme étant le client.
Dans un groupe de thérapie, trois dynamiques interfèrent : intrapsychique (pour chacun), interpersonnelle (entre les individus) et groupale (en considérant le groupe comme un organisme). Ceux qui développe une pratique en groupe se centrent principalement sur les deux premières dynamiques, ceux qui ont une pratique de groupe, sur les deux dernières. Perls et Goodman ont tous les deux beaucoup pratiqué la Gestalt en groupe, mais ont décrit le self à la frontière-contact d'un seul organisme avec son environnement. Peut-on, au moins comme une métaphore, parler de self—groupal ?
… je partage avec Jean et bien d'autres, le sentiment que la thérapie de groupe est l'innovation thérapeutique la plus pertinente de ce demi-siècle.