Citations de Gonzague Masquelier (129)
[...] rien n’est jamais joué et que nous ne sommes ni prédestinés, ni conditionnés, ni marqués à tout jamais par notre passé. La vie nous est offerte voir imposée, mais notre existence est à créer chaque jour.
Les perturbations de la fonction-moi sont la conséquence des deux premières : si l'individu se trompe sur ses sensations et sur qui il est, il n'a aucune chance de poser les bons choix, de s'engager dans une action satisfaisante.
… la théorie du self. Celle-ci occupe une place très curieuse dans la conception de la Gestalt-thérapie. Elle en détient la place centrale, fondatrice, et en même temps elle est impossible à définir, à saisir , du mins en termes simples. « Pour comprendre la Gestalt, il faut lire ce livre, mais pour comprendre ce livre, il faut connaître la Gestalt », précisent Perls et Goodman dans l'introduction de Gestalt thérapie.
La frontière-contact n'est donc pas une frontière « entre », qui sépare, mais une zone d'échange qui à la fois contient l'organisme et en même temps touche l'environnement : elle relie et différencie ; je ne peux toucher sans être touché. Cette notion du champ organisme-environnement est fondamentale en Gestalt.
Bluma Zeigarnik a montré en 1927, dans une expérience désormais classique, qu'une tâche inachevée laisse dans le souvenir une trace plus importante.
Elle demandait à des enfants d'accomplir une vingtaine de travaux manuels sur une journée : certains pouvaient être achevés et d'autres non. Une semaine plus tard, les travaux inachevés étaient remémorés deux fois plus souvent que les autres. Cet "effet Zeigarnik" est souvent utilisé, dans les
médias par exemple lorsque la "pause publicité" intervient au moment clé du feuilleton !
Perls valorise la "saine agressivité". Pour nous nourrir, nous devons détruire les aliments afin de les assimiler. L'instinct de faim (de nourriture mais également d'affection, de connaissances, etc.) est indispensable à notre croissance.
Les problèmes psychopathologiques sont aussi lourds en entreprise que dans le champ de la psychothérapie !
La supervision contre-transférentielle
Le thérapeute essaie alors de mettre en lumière ses projections envers son client, c'est-à-dire les échos personnels - souvent inconscients - réveillés en lui, et tout ce qui se joue dans le trait d'union de la relation Je-Tu. Le superviseur utilise alors les mêmes stratégies d'intervention que dans la thérapie, à savoir par exemple, la métaphore, l'amplification, le monodrame, etc. Pour trouver une réponse à la question ; "Qu'échangeons-nous à nos frontières contacts?"
Un bon superviseur n'est pas forcément quelqu'un de beaucoup plus compétent, sinon qui organiserait la supervision des superviseurs et le contrôle des super-superviseurs ?! Il peut être un pair, choisir pour sa compétence et sa clarté didactique.
En plus de la recherche de qualité de la relation, la supervision a une autre utilité, que je nomme familièrement l'"effet poubelle". L'expérience nous montre à tous que l'on ne peut s'approcher en permanence de la souffrance psychique des autres, sans de donner soi-même les moyens de lâcher-prise par moment, de vider son coeur et son corps d'un trop-plein d'affects. La supervision est donc également un lieu de ressourcement, un temps durant lequel peuvent s'exprimer la lassitude, l'anxiété générée par un client qui ne va pas bien, l'énervement face à celui qui piétine, bref un moment où le thérapeute soigne sa propre santé psychique.
La Gestalt-thérapie a plus de cinquante années d'existence. Elle est née dans un contexte d'après-guerre, de baby boom, de relance économique. Elle a développé un paradigme de croissance illimitée : l'organisme trouve ce qui est bon pour lui dans l'environnement grâce à ses facultés d'ajustement créateur et l'achèvement des Gestalts est une source de croissance. L'objectif de la thérapie est fluidifier le déroulement des cycles et de remettre en mouvement les Gestalts inachevées.
... Perls et Goodman, dans une perspective rousseauiste affirmant que le monde est bon, présupposent que tout besoin peut être satisfait et qu'il est source de croissance. C'est l'expansion ou la mort ! Tous deux luttent contre les introjections pour libérer les oppressions de l'éducation.
"Remâcher les introjections" pour s'en libérer a été remplacé par "développer l'ajustement créateur" pour survivre. Les Gestaltistes ont donc mis eux-mêmes en application ce qu'ils prônent pour leurs clients, à savoir changer, évoluer, chercher des réponses dans l'environnement social, bref ne pas rester dans une "tour d'ivoire". Ils sont acteurs de leur existence et peuvent, je 'espère, se retrouver dans le titre de cet ouvrage.
C'est probablement à tous ces possibles que Perls pensait en disant ; "La Gestalt est trop bonne pour n'être réservée qu'à des malades !"
... une tendance curieuse s'est dégagée depuis quelques années : s'il est de bon ton d'affirmer que Fritz Perls n'est vraiment pas un père fondateur valorisant, les deux courants se rapprochent de Paul Goodman, les premiers pour sa contribution à la théorie du self, les secondes pour avoir introduit cette théorie dans le champ social et politique.
Mais quelles que soient les références que chacun se donne, les Gestaltistes, se méfiant des introjectons et recherchant l'ajustement créateur, n'ont guère tendance rester dans l'imitation des deux pères fondateurs.
Quant à la Gestalt, elle est à mes yeux l'une des approches psychothérapeutiques les plus adaptées pour un travail social. En effet, en n'instaurant pas le rétablissement des fonctions de contact comme axe de travail, le Gestaltiste peut être un vecteur de changement dans notre monde en mutation permanente.
Pour moi, les bienfaits de la Gestalt-thérapie doivent dépasser le cadre restreint de la cure traditionnelle. Toutes les psychothérapies ont un rôle social à jouer, de par leur capacité à mettre du sens sur les phénomènes psychiques, à l'intérieur de chacun et entre les groupes. Ce n'est pas par hasard si tous les pouvoirs dictatoriaux commencent par museler la presse et interdire la psychothérapie. Attendre la demande explicite du client est un leurre car l'information manque dans ce domaine. Beaucoup n'ont aucune idée de ce que le développement personnel pourrait leur apporter et pensent que la thérapie est "réservée aux fous" !
Fidèle à son positionnement gestaltiste, le coach ne donne pas de conseils, n'interprète pas, mais propose des expérimentations pour que le client découvre sa solution.
Le travail du consultant est donc souvent centré sur le cycle du contact et les résistances. Que se passe-t-il entre l'entreprise et ses clients, entre ses différents services, entre les niveaux hiérarchiques ? Nous parlons alors d'une socio-Gestalt, c'est-à-dire de l'étude des interactions entre une organisation et son environnement. Le client est l'institution, regarde comme un organisme, dans un champ donné.
La difficulté est de permettre à une institution, ou le plus souvent à son équipe de direction, de se remettre dans un processus de changement, d'ajustement créateur, sans perdre la face. Car souvent la demande inconsciente de l'équipe est celle de la Castafiore : "Consultant-miroir, dis-moi que je suis belle."
Il est frappant d'observer que certaines organisations ont tendance à dysfonctionner selon le symptôme qu'elles sont censées soigner? Un exemple : bien des hôpitaux souffrent d'un déficit de communication, alors que les travaux sur les aspects psychosomatiques de la maladie montrent l'importance de la relation dans les soins [...].