Sa poésie, avec une immédiateté audacieuse, même terrifiante, a pourfendu la façade d’exaltation affectée pour la nature ; il n’existe rien qu’on puisse comparer à son œuvre Jahnn a ici atteint des strates qui n’avaient jamais auparavant trouvé leur expression imaginée, verbale, dans la littérature allemande. Et il faut remonter aux anciens Égyptiens et Grecs pour trouver une telle conception mythique de la nature
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J'ai lu un paquet de romans en dix ans.
Comme la plupart des gens qui ont beaucoup exploré telle ou telle branche de l'art, en isoler un représentant pour le désigner comme le "meilleur qu'on ait jamais vu" est une question délicate. Celui ou celle qui en sait long sait aussi que rien n'est parfait, et là où une oeuvre s'en approche, une autre y parvient aussi, chacune ayant une lacune qui lui est propre, et même plusieurs lacunes. (Ce n'est d'ailleurs pas sans raison qu'aucune production artistique ne pourra jamais prétendre à la perfection absolue, puisque ce qui est une lacune aux yeux d'une personne n'en est pas forcément une selon une autre...)
Mais voilà. Malgré toute l'admiration que j'ai pour Cervantes, Dostoïevski, Joseph Conrad, Goethe, Hermann Hesse, et autres pointures, et malgré les lumières qu'ils ont répandues sur mes pensées d'adulte, un auteur, et un bouquin, rayonnent par-dessus tout dans mon firmament.
Das Holzschiff
"Le Navire de bois", de Hans Henny Jahnn
1949
250 pages en format poche
On embarque pour un voyage en mer, de nuit, vers une destination inconnue. Sur un bateau de conception étrange - labyrinthique - portant au fond de ses entrailles une cargaison dont on ne sait rien, si ce n'est justement qu'il est interdit d'en rien savoir...
Pas de happy ending, pas de résolution, pas de lecteur pris par la main par un narrateur aux petits soins. Il ne s'agit pas d'une histoire "satisfaisante", comme un polar ou un drame, avec une fin bouclée, un grand gagnant, une morale, une réponse. Non plus un scénario à twist final. En fait, les éditeurs ont dû insister pour que l'auteur écrive une suite pour lever les mystères qui restaient, en dépit du fait que Jahnn estimait l'oeuvre se suffisant à elle-même. Cette suite a atteint les 1400 pages. C'est dire le concentré de mystère de ce Navire de bois. Mais les Voies du Seigneur n'ont-elles pas le charme d'être impénétrables ?
Typiquement un roman adulte, qui ne prend pas de gants, sinon ceux d'une prose évocatrice.
Le style est fluide et les intentions sont claires, les péripéties entendues. Seulement le but est moins de mettre des images dans notre tête que de planter les germes qui nous feront voir nos propres représentations. Ainsi, presque aucune description des protagonistes, et pourtant leurs personnalités nous les font voir très nettement.
C'est l'univers entier qui est contenu dans ces 250 pages.
Le mythe et le concret, dont on ne sait lequel prédomine.
La nature brute, la jalousie, l'amour (version pas nian nian).
Les illusions juvéniles autant que les séniles.
Les pulsions, le règne des probabilités.
La diplomatie, la fascination du cosmos.
Les mystères et les attraits : de la vie, de la mort.
Les influences, secrètes ou avouées, infligées, ou subies.
Le danger de l'ignorance, et celui des certitudes.
...
Ah si ! Il manque un truc !
L'humour.
Si jamais vous lisez Das Holzschiff, pensez à rigoler entre deux chapitres :)
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Un livre fleuve, interminable, ancien (1929) où l'on est plongé dans différents univers, solitudes norvégiennes, cités diverses, conflits personnels, utopies.
C'est extrêmement long et par moments indigeste. On en vient quand même à bout.
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Médée, le chef-d'oeuvre dramatique de Hans Henny Jahnn, a été écrit pendant une période de crise profonde : c’est à la fois l’aboutissement de la période de jeunesse et la première œuvre dont la forme est pleinement maîtrisée, ouvrant la voie aux grands romans de la maturité.
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Peut-être, Jahnn est-il le cas le plus typique d’un auteur dévoré par ses démons : tiraillé par une double vocation d’artisan et d’intellectuel, par une double identité d’homme et d’enfant, par une double perception de la vie, expressionniste et mystique ; un individu capable de tout, nihiliste et plein de vitalité, puéril et mythique...
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Je lis ce livre terrifiant, je ne connais personne qui conduise son lecteur de telle façon à travers l’horreur des cerveaux, ni en allemand, ni en anglais. Aucun pays n’a de tel livre, jusqu’à présent.
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C’est un livre traversé par le désir de changer la vie. Oui, un livre qui semble issu de la paternité lointaine de Rimbaud.
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