AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Ilya Prigogine (17)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées
Le monde s'est-il créé tout seul ?

6 auteurs prestigieux pour tenter d'apporter des bribes de réponses à l'une des questions que l'homme s'est sans doute le plus posé.

Et bien entendu, pas de réponses certaines, unique, car les recherches avancent, s'opposent et ouvrent de nouvelles questions.

Mais quel débat, chacun apporte des éléments riches et pertinents et d'autres sème le doute et le trouble.

Il n'en fallait pas moins pour oser aborder ce sujet avec la modestie et la hauteur de vue requises.

Très didactique, intéressant, parfois étonnant, ces condensés de savoir pour une question hors sol, sont un peu des états de nos savoir, des temps où l'on lève la tête pour en revenir aux questions fondamentales.
Commenter  J’apprécie          121
La fin des certitudes

« Nous vivons un moment privilégié de l'histoire des sciences », nous dit Prigogine à la fin de ce livre. Bon.

Sur Babelio, il y a beaucoup de littéraires que la seule vue du mot science fait sans doute fuir à grands clics de souris, car les souvenirs scolaires qu'ils en ont leurs évoquent plutôt des scènes de torture mentale. Pourtant, je voudrais qu'ils lisent ma critique jusqu'au bout (même en jurant que c'est la dernière fois qu'ils liront un texte ayant un quelconque rapport avec la science !), car, d'une part, je pense qu'il faut se libérer des barrières mentales que nous mettons entre lettres et sciences, et puis, parce que la pensée scientifique a profondément changé, même si le grand public, inondé d'informations techniques, l'ignore souvent.

Et pour ma part, c'est ce que je trouve le plus intéressant en sciences : non seulement elles font progresser nos connaissances, mais elles éclairent aussi notre conception du monde. Car la révolution conceptuelle en sciences est en train de révolutionner aussi la philosophie tirée des sciences.

Ilya Prigogine, qui travaille souvent avec la philosophe Isabelle Stengers, fait partie des scientifiques dont l'évolution des idées en science « pousse » jusqu'à la philosophie, comme le faisait le paléontologue Stephen Jay Gould.

Ilya Prigogine est un physicien, prix Nobel de chimie, qui s'est consacré à l'étude théorique des phénomènes thermodynamiques, notamment des phénomènes irréversibles. Il a été à l'origine d'une véritable révolution dans cette discipline. Ce qu'il exprime dans ce livre, c'est que cette révolution, qui a eu des conséquences en chimie, en biologie moléculaire, et donc en biologie, est une révolution conceptuelle, qui a aussi des conséquences philosophiques sur la manière dont on conçoit la nature, la vie, et l'être humain.

La théorie du chaos avait remis en cause bon nombre de certitudes. Celle du chaos déterministe (dynamiques obéissant à des lois malgré une apparence de développement semblable au hasard) avait elle-même remis en cause ces nouvelles certitudes. Avec la théorie des systèmes dissipatifs, Ilya Prigogine montre qu'il n'y a pas un seul domaine scientifique qui échappe à cette révolution conceptuelle. En effet, en thermodynamique, le « second principe » faisait parti des certitudes les plus ancrées. On considérait jusqu'alors que les états « hors équilibre » pouvaient être négligés, par approximation. Pourtant, Prigogine a montré que les états « hors équilibre », n'obéissent plus à cette loi : l'entropie augmente, mais la perte de qualité de l'ordre, qu'on croyait inévitable, n'est plus réalisée que globalement. Un ordre peut être fondé sur le désordre.

Il n'est pas possible de rentrer dans les détails, mais là encore, on découvre que le monde est plus complexe qu'on ne l'avait imaginé.

Avec ses collaborateurs, Prigogine a appliqué sa théorie à la discussion de quelques problèmes importants de biologie, en particulier l’énergétique du développement de l'embryon.

Les systèmes dissipatifs fournissent une explication simple à l’accroissement de complexité, qu’il s’agisse de l’inanimé, du biologique ou du social. La notion d’instabilité, de chaos, d’amplification, est ainsi aujourd’hui au centre des préoccupations d’un nombre croissant de chercheurs dans des domaines allant des mathématiques... à l’économie. (Par exemple, lors de la crise boursière du 6 mai 2010, les désordres financiers qui se sont produits ce jour-là illustrent bien, en termes économiques, des notions comme celles de chaos, de fluctuation ou d’amplification, auxquels la presse a, à cette occasion, ouvert un chemin vers le grand public).

La science actuelle n'est plus fondée sur des objets fixes, mais sur l'organisation spontanée du désordre d'un grand nombre d'éléments interagissant. La nouvelle philosophie scientifique, dépassant les anciennes dichotomies, reconnaît l'interpénétration entre déterminisme et contingence, entre lois et désordre, entre matière et vide, entre inerte et vivant (le cas du prion est à ce titre intéressant), etc...

Cela signifie peut-être, entre autres, qu'il faut changer la conception selon laquelle le désordre produit du désordre et l'ordre produit de l'ordre...
Commenter  J’apprécie          112
La fin des certitudes

La fin des certitudes c'est ici la fin du déterminisme. Les insuffisances de ma culture mathématique ne me permettent pas de goûter les arguments de ce livre de physique mathématique. Prigogine y soutient que l'indéterminisme de la physique quantique est généralisable à la physique macroscopique.

En héritier des travaux de Henri Poincaré sur le problème des trois corps, Ilya Prigogine généralise le statut de la rupture de symétrie temporelle propre à la thermodynamique ( la fameuse flèche du temps). En introduisant les mathématiques de Poincaré (les Grands Systèmes de Poincaré) dans la physique quantique et de la relativité il introduit un temps orienté dans celles-ci; c'est-à-dire un temps pour lequel passé et avenir ne sont plus équivalents.

Ainsi, l'idéal scientifique dont la figure emblématique est représentée par "Le démon de Laplace" laisse la place à une description de la nature comme processus de création; il faudrait renoncer à cette fiction du démon de Laplace capable de reconstruire le passé de l'univers et de prévoir son avenir rien que par la connaissance totale de la position et du moment de chacune des particules qui le composent.

Cette description mathématique ne montre plus un univers tournant comme une horloge dont la mécanique pourrait se remonter à l'identique vers le passé ou l'avenir à la façon d'un film qu'on rembobine, les lois restant mathématiquement semblables selon le sens par lequel on fait défiler le temps (ce modèle de temps). L'univers redevient un processus créateur dans un temps orienté.

Cette analyse mathématique des concepts de la physique (thermodynamique, quantique, Newtonienne et relativiste) rapproche Prigogine - mais par une toute autre voie - d'une vision de l'univers qui ressemble celle du Bergson de l'évolution créatrice.
Commenter  J’apprécie          90
Le monde s'est-il créé tout seul ?

Une série d'entretiens avec des d'éminents scientifiques. La vision de la création de l'univers set surtout de "l'avant", est très différente selon les sensibilités de chacun. Certitudes pour les uns, comme Jacquard par exemple, où interrogations et doutes pour d'autres, Thuan , Pelt. Partant du principe anthropique fort Thuan lance le débat...Le monde s'est il crée tout seul, où une main invisible lui a-t-il rendue la tâche plus facile? Que l'on soit convaincu d'une théorie ou d'une autre, la question ne manquera pas d'agiter les consciences e de pousser les réflexions et recherches pendant encore de très nombreuses années... Passionnant !!!
Commenter  J’apprécie          80
Le monde s'est-il créé tout seul ?

L'univers est né du Big Bang qui a permis l'arrivée de l'espèce humaine.

En 1974, l'astrophysicien Brandon Carter développe le « principe anthropique ». Ce principe est opposé à l'auto-organisation du monde.

« Le monde s'est-il créé tout seul ? » est la question point de départ posée par Patrice Van Eersel dans les entretiens qu'il a eus avec d'éminents scientifiques.

Hormis Trinh Xuan Thuan (astrophysicien) et Jean-Marie Pelt (botaniste), les autres spécialistes : Ilya Prigogine (physicien et chimiste prix Nobel), Albert Jacquard (biologiste), Joël de Rosnay (cybernéticien) et Henri Atlan (médecin et philosophe) n'adhèrent pas à ce principe anthropique fort.

J'ai été interpellée par le discours d'Albert Jacquard, la notion de temps. « La sensation proportionnelle au logarithme de l'excitation » explique cette sensation du temps passant de plus en plus vite, sensation bien réelle et explicable. Il développe l'idée de notre propre « big-bang » qui amène à réfléchir sur le principe et l'origine de notre existence.

Je retiendrai aussi de ces entretiens un immense respect de l'homme : son humanité et son inhumanité si nous n'y prenons garde, de la nature, des progrès et surtout du doute qui n'arrête pas de le faire grandir (seules les certitudes sont sclérosantes).

Dieu, la science, Dieu et la science, principe créateur conscient ou pas, des visions s'offrent à nous et à nous d'y réfléchir.

Certains entretiens demandent à être lus et relus, le crayon en main, des recherches à faire... tant les notions scientifiques pour qui ne les possèdent que superficiellement rendent la compréhension difficile.

Cependant même si certaines notions nous échappent, d'autres nous éclairent.



Commenter  J’apprécie          81
Le monde s'est-il créé tout seul ?

Dans ce livre, la question fondamentale (et conceptuellement excitante) « le monde s'est-il créé tout seul ? » n'est pas considérée sur un plan religieux. Elle a été posée à plusieurs scientifiques de très haut niveau. Ils y ont répondu en fonction de leurs compétences et accessoirement de leurs convictions. Dans leurs réponses (argumentées), ils indiquent leur position personnelle vis-à-vis du principe anthropique "fort". Rappelons que, selon ce dernier, la vie biologique et la conscience humaine auraient été présentes, en puissance, dès le début de l'Univers. Si on admet cette formulation, une force créatrice (que l'on peut nommer Dieu) doit avoir présidé à la formation du cosmos.



En fait, seul un des scientifiques interrogés considère clairement le principe anthropique "fort" comme valide: l'astrophysicien Trinh Xuan Than. Pour justifier sa position, celui-ci développe notamment des considérations qui ne sont pas nouvelles mais qui restent troublantes. Les constantes fondamentales de la Nature et les conditions initiales de l'Univers semblent avoir été très exactement "ajustées" pour satisfaire toutes les conditions nécessaires à l'apparition de la vie telle que nous la connaissons; la probabilité pour que ces conditions soient réunies est moins qu'infime, donc ce n'est pas un hasard.

S'exprimant à sa suite, I. Prigogine prend le contrepied de l'astrophysicien en considérant les "structures dissipatives". Dans ces systèmes, loin de l'équilibre thermodynamique, la dissipation de l'énergie et de la matière peut devenir spontanément une source d'ordre. Ces phénomènes sont rares en physique, mais I. Prigogine cite un exemple trivial: les "courants de Bénard", apparaissant dans l'eau d'une casserole (chauffée par-dessous et refroidie par-dessus) correspondant à une convection macroscopique a priori hautement improbable. Les "structures dissipatives" sont beaucoup plus fréquentes dans les systèmes vivants (hors équilibre). La création est pour lui un phénomène fluctuant, probabiliste, irréversible, présentant des bifurcations; le principe anthropique "fort" n'est donc pas pertinent, selon lui.

J.-M. Pelt est un scientifique qui a la particularité d'être chrétien; mais il distingue très bien les domaines de la science et de la spiritualité. Ainsi, il se déclare hostile au principe anthropique "fort" et aux divers courants créationnistes. J. de Rosnay, lui, rejoint grosso modo les positions de Prigogine, en insistant sur la notion d'auto-organisation. H. Atlan, autre contempteur du principe anthropique "fort", explique qu'aucune différence fondamentale n'existe entre l'inanimé et l'animé (celui-ci présente seulement un degré d'organisation supérieur). A. Jacquart, pour sa part, nie qu'on puisse raisonner sur l'instant zéro (il est situé hors du temps, car il n'y a pas de... "avant"); cet instant est d'ailleurs rejeté à moins l'infini si l'on utilise une échelle logarithmique.



Ainsi, ces scientifiques ont des positions assez différentes sur la question posée initialement. Justifiant leurs réponses dans le cadre de leurs études personnelles,les personnes interviewées s'éloignent parfois du coeur du sujet soulevé. Malgré tout, le livre m'a semblé vraiment intéressant. Force est de reconnaitre que les avancées assez récentes sur des "structures dissipatives" et sur l'auto-organisation mettent en difficulté les tenants du principe anthropique "fort".

Commenter  J’apprécie          70
Chine : Ciel et terre

L'exposition Chine ciel et terre - 5000 ans d'inventions et de découvertes s'est tenue au Musées Royaux d'Art et d'Histoire du 16 septembre 1988 au 16 janvier 1989. Cette exposition tenait à mettre en avant non pas des réalisations artistiques, mais bien les inventions techniques qui ont jalonné la longue histoire de la Chine. Les inventions sont dans de multiples domaines : astronomie, écriture et imprimerie, métallurgie, ...
Commenter  J’apprécie          60
Le monde s'est-il créé tout seul ?

Un sujet passionnant, qui est bien brièvement abordé par les six intervenants de ce livre.

Ces entretiens sont cependant fort intéressants, et l'occasion de s'orienter pour qui désire poursuivre avec des ouvrages plus complexes.
Commenter  J’apprécie          40
La nouvelle alliance

Ce livre devrait figurer dans toute bonne bibliothèque. Car il est tout d'abord le résultat d'une collaboration pas si fréquente, entre une philosophe (Stengers) et un prix nobel de physique (Prigogine). Les (très) anciens seraient étonnés de lire cette dernière phrase car, au départ, toutes les sciences - que l'on range aujourd'hui en deux catégories le plus souvent perçues comme antagonistes : sciences exactes et sciences humaines - procédaient de la philosophie. A cet égard la thèse centrale de l'ouvrage prend la forme d'un rafraîchissant retour aux sources car il s'agit de montrer que les sciences dites "exactes" et la culture sont en étroite interaction. A vrai dire le bon sens et un observation élémentaire nous l'enseignent tous les jours : combien de découvertes faites par hasard ou en cherchant autre chose ? Et internet et l'informatique n'existeraient peut-être pas sans les efforts du lobby militaire étasunien. La recherche "pure", c'est-à-dire pour elle-même et sans but précis, n'existe pas ou, si elle a existé, elle existe de moins en moins car elle est aujourd'hui étroitement soumise à la contrainte utilitariste. A ce propos il serait bon de disposer de l'équivalent de ce bouquin à l'adresse des économistes, plus spécialement ceux issus de la mouvance néo-classique hyper dominante de nos jours. Car désormais ce sont eux qui se croient les détenteurs d'un propos scientifique "exact", confondant une contrainte utilitariste imposée avec une "réalité", en réalité un construit qui est le fruit d'évolutions politico-économiques, que certains d'entre eux n'hésitent pas à présenter comme la "fin de l'histoire". Si vous avez des titres à suggérer, je suis preneuse...
Commenter  J’apprécie          30
La nouvelle alliance

Ce livre - difficile et dense - apporte comme une sorte de complément ou de suite à celui de Jacques Monod, Le hasard et la nécessité. Prigogine cite Monod à de nombreuses, lui rend un hommage appuyé et semble poursuivre son raisonnement comme le ferait un Tome II. A titre d'exemple, il reprend, pour les exploiter plus avant, certaines interrogations qui sont celles de Monod qui se demande pourquoi "de grands esprits (Einstein) se sont souvent émerveillés, à bon droit, du fait que les êtres mathématiques créés par l'homme puissent représenter aussi fidèlement la nature, alors qu'ils ne doivent rien à l'expérience." Prigogine tente de construire une réponse convaincante à celle soulevée par Monod. Et y parvient !

La réponse de Prigogine tient en cette assertion : l'homme et sa pensée, capables des abstractions les plus audacieuses et les plus admirables, sont irrémédiablement dans l'univers. Cette inclusion irrémédiable fournit l'articulation que cherchait Einstein : les mathématiques ne sont pas coupées du monde ou hors du monde. Il n'est donc pas illogique, conclut-il, qu'un lien inconscient relie mathématiques abstraites et physique du monde réel.



Prigogine rappelle l'histoire du raisonnement scientifique et philosophique en le faisant remonter à l'Antiquité ; c'est le fondement de la pensée grecque - celle d'Héraclite notamment - et l'avènement de la physique dit newtonienne (dite dynamique) qui nous ont amenés à imaginer que nous pouvions faire un pas de côté, nous retirer de la nature, pour l'observer de l'extérieur et lui trouver des lois universelles indépendantes de notre observation et de notre psyché (au sens grec). Las, les physique de la thermodynamique de Fourier, Boltzman et Maxwell, la physique quantique (de Planck, Bohr, Heisenberg...) et la relativité générale (d'Einstein bien sûr) ont amené les chercheurs à s'affranchir des spéculations grecque, dynamique et classique et à les juger certes historiquement nécessaires mais suffisamment incomplètes pour être législativement fausses. "La nature, objet de science, est aussi ce qui a produit les hommes capables de science [...]", écrit-il.



Ce livre rejoint celui de Monod dans ses conclusions : la science a brisé toutes les anciennes alliances animistes et a refondé un nouveau rapport au réel, à la vérité. Dans ce rapport, affirme Prigogine, il faut admettre qu'il existe non pas une vérité, mais des vérités. Non pas une physique mais des physiques. Il confirme qu'Héraclite a eu définitivement raison de Parménide.



Nous le répétons, ce livre est difficile et parfois aride, mais de très très haute volée. Inutile de dire que le lecteur est en bonne compagnie !

Commenter  J’apprécie          20
La fin des certitudes

Prigogine nous livre une conception de l'univers à la fois proche du sens commun (à l'inverse de celle d'Einstein) et profondément ancrée dans sa propre recherche scientifique. Il refuse le déterminisme classique, mais relève l'existence de déterminismes dans la nature physique, qui alternent avec des "points de bifurcation". Dans le premier cas, les systèmes sont stables, dans le second, ils peuvent évoluer dans plusieurs directions. L'enjeu, pourrait être, selon Prigogine lui même, d'applique ce modèle à l'histoire humaine, qui comporte des points de bifurcation comme la Révolution française ou la chute du mur de Berlin...
Commenter  J’apprécie          20
Le monde s'est-il créé tout seul ?

Le Monde s’est-il créé tout seul ?/Trinh Xuan Thuan/Ilya Prigogine/Albert Jacquard/Joël de Rosnay/Jean-Marie Pelt/Henri Athlan/(2008)

La grande question : l’univers a-t-il existé de toute éternité ou a-t-il démarré au Big Bang ?

La tendance actuelle est de pencher pour la seconde hypothèse et les savants pourraient même donner un âge à notre univers : il y a 13,7 milliards d’années que l’espace, le temps, la matière et l’énergie auraient fait leur apparition.

C’est Hubble en 1929 qui le premier a émis cette hypothèse, reprise par Gamow et Alpher en 1948 : pour eux, l’univers serait né à partir d’une singularité.

La question suivante est alors : la science peut elle étudier un phénomène qui ne peut se répéter ? À débattre …

En 1974, Brandon Carter fonde toute sa réflexion sur le principe anthropique à savoir que le Big Bang contenait la possibilité de notre apparition. C’est le principe anthropique faible.

Certains sont allés jusqu’à dire que tout était à l’état de potentialité dans la soupe primordiale. Ce sont les défenseurs du principe anthropique fort.

D’autres scientifiques font place à l’idée d’auto-organisation qui explique qu’à partir de quelques données de base au sein d’un certain chaos, un système peut évoluer vers des myriades de formes nouvelles.

Une question revient souvent : quel est la place du hasard dans l’évolution ?

Trinh Xuan Thuan, célèbre astrophysicien, en une cinquantaine de pages d’une grande clarté expose son point de vue qui fait référence à la théorie anthropique forte avec un principe créateur qui affirme que la vie et la conscience seraient des états inévitables que l’univers se trouvait dans l’obligation de laisser émerger. L’univers s’est trouvé avoir très exactement les propriétés requises pour engendrer un être capable de conscience et d’intelligence, dès les premiers instants du Big Bang.

Ce qui m’a apparu moins clair dans le discours de TXT c’est le fait qu’il semble s’être rapproché de la philosophie et spiritualité bouddhistes, qui affirment la permanence de tout temps de l’univers ; il n’y a pas eu de commencement et il n’y aura pas de fin, juste des changements, des cycles en quelques sorte.

Il semble y avoir contradiction.

Ilya Prigogine, prix Nobel de chimie 1977, n’est pas du tout d’accord avec la vision téléologique de TXT. Pour lui l’émergence de la conscience humaine est d’une imprévisibilité absolue, sans qu’elle soit pour autant incongrue et étrangère au cosmos dont nous sommes les enfants et aussi désormais les cocréateurs. Prigogine est ainsi le père des théories de l’auto-organisation. Pour lui le monde est un système de création auto-organisée suivant son propre programme qui se construit lui-même : la nature improvise et agit suivant les données qu’elle a.

Albert Jacquard est un spécialiste en génétique mathématique. Pour lui il n’y a pas de principe créateur à l’origine de l’univers. Il fait la démonstration qu’il n’y a jamais eu de Big Bang, que ce n’est pas un événement sinon il faudrait qu’une seconde avant il n’ait pas encore eu lieu, or le temps n’existait pas. Donc le point T/0 n’existe pas non plus. Et donc il n’y a pas eu de création et il n’existe pas de créateur.

Dans ce chapitre, Jacquard évoque la relativité du temps qui passe et qui n’existe que s’il se passe quelque chose. La formule est la suivante : la sensation (que ce soit du temps ou du poids donnés comme exemples), est proportionnelle au logarithme de l’excitation. Il aborde aussi le paradoxe de Russell qui dit que l’ensemble de tous les ensembles n’existe pas et il en fait la preuve. Ce qui infère que l’univers reste indéfinissable. Ce paradoxe a abouti d’ailleurs au théorème d’incomplétude de Gödel qui a remis en cause toute la logique mathématique en 1932. De même pour la conjecture de Goldbach (1742) : existera-t-il toujours un nombre pair égal à la somme de deux nombres premiers ? Personne n’a jamais démontré qu’elle était indémontrable, d’où l’incomplétude ici arithmétique.

Joël de Rosnay est non seulement docteur ès sciences, biologiste spécialiste des origines du vivant, mais encore spécialiste des nouvelles technologies, notamment en informatique. Pour lui, nous sommes le résultat de beaucoup de hasards, de chaos, d’amplifications, de bifurcations et de structures dissipatives successives. C’est la logique même des lois de la complexité qui fait émerger la variété des formes du monde : c’est ce qu’on appelle l’auto-organisation en relation avec la théorie du chaos.

Jean Marie Pelt est botaniste. Il est adepte du Big Bang, et se tourne vers la spiritualité pour exprimer une volonté créatrice. Profondément croyant, il pense qu’il faut lire la Bible comme une fable de La Fontaine. C’est la foi et non la science qui doit répondre aux questions ultimes, aux causes premières et aux fins dernières. Pour Pelt, l’auto-organisation est à l’œuvre à tous les niveaux. Mais il reste une zone de mystère qui enveloppe tout à laquelle nous n’aurons jamais accès.

Henri Atlan, médecin et biologiste, professeur de biophysique, philosophe et épistémologue pense qu’il n’y a pas de réponse scientifique à la question de la création de l’univers. C’est une question métaphysique de l’ordre du mythe. Puis pour le reste, la suite, l’auto-organisation règne : les structures organisées, fonctionnelles, se fabriquent elles-mêmes. C’est pourquoi, Atlan pense que le monde a très bien pu se créer tout seul. Cela dit, selon lui, nous n’avons pas besoin d’une hypothèse créatrice.

En résumé un livre de 200 pages très intéressant encore en 2016 quoique publié en 2008 et donc un peu en retrait dans le domaine par exemple des avancées en biologie moléculaire. Dans les laboratoires on s’est depuis beaucoup activé, peut-être en raison de la pression dont parle J. M. Pelt. Les chercheurs ont aussi leur philosophie et leur intégrité scientifique qui les poussent et les incitent à chercher du nouveau. La biologie moléculaire a beaucoup avancé notamment dans le domaine de l’édition du génome qui va révolutionner nos vies. Il n’est que de se référer aux travaux en cours sur l’endonucléase Cas 9 (CRISPR associated protein 9), enzyme spécialisée pour couper l’ADN avec deux zones de coupe actives, une pour chaque brin de la double hélice. Avec pour conséquence la possibilité de modifier facilement et rapidement le génome des cellules animales et végétales. Des perspectives inouïes s’offrent alors aux chercheurs avec une foule d’applications.

Il paraît osé par ailleurs de mêler la physique quantique comme le fait J.M. Pelt avec la biologie. Les bioinformaticiens ont déjà fort à faire pour traiter les données des chercheurs en biologie moléculaire. N’apparaît pas tous les jours un Claude Bernard !

Et puis, autre reproche, c’est que bien souvent la question posée, celle du titre du livre, est succinctement abordée, même parfois éludée pour nous mener dans des considérations hors sujet quoique intéressantes. Beaucoup de digressions de la part des intervenants comme si la question initiale les perturbait.

Commenter  J’apprécie          10
La nouvelle alliance





Belle introduction aux structures dissipatives.



Une entrée dans le vieux problème de la "flèche du temps"

Commenter  J’apprécie          10
La nouvelle alliance

merci
Commenter  J’apprécie          10
Les lois du chaos

Un ouvrage intéressant qui traite entre autres de la question du temps à travers le point de vue de la physique quantique.

Mais je dois avouer que je n'ai pas tout compris, ayant beaucoup de lacunes en sciences, notamment en calcul et ces pages sont truffées de calcul. D'où ma déception, car j'espérais que cet ouvrage fût un peu plus vulgarisateur, pour rendre accessibles certaines notions. J'ai cet immense regret, car les quelques pages que j'ai comprises étaient passionnantes.
Commenter  J’apprécie          00
Les lois du chaos

Pas assez vulgarisé pour un lambda quelconque comme moi qui voulait essayer de comprendre avec les mains ce que c'etait rellement l'entropie ...
Commenter  J’apprécie          00
La fin des certitudes

merci
Commenter  J’apprécie          00


Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Ilya Prigogine (224)Voir plus


{* *}