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Critiques de Iris Brey (65)
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Iris Brey déconstruit les codes et schémas cinématographiques en replaçant la femme au centre du film et du montage. C'est un essai à réserver au connaisseur, au cinéphile qui a déjà une bonne culture cinématographique des années 60 à nos jours. En effet, l'autrice prend des exemples post Nouvelle Vague et décortique leur façon de penser la femme comme personnage, mais aussi et surtout leur façon de filmer le féminin.



Il est effarant de constater les spécificités et différences des hommes et femmes réalisateur/trices, jusque dans le montage et la perception du corps et de l'esprit féminin à travers une histoire et des personnages. Mais il est surtout horripilant de comprendre que les mécanismes patriarcales ont cours jusque dans le milieu artistique, un monde où paradoxalement l'art serait plus important que tout !



Le nombre de réalisateurs primés et visibles est plus important, le travail des femmes dans ce système est invalidé. Cela construit donc des intrigues où le masculin prime, où les femmes sont vus sous le prisme de clichés et de fantasmes. Il est plus que temps de changer cela. Redonnons une voix aux femmes, elles savent conter des histoires et surtout elles savent servir des exemples pour les filles et femmes auxquelles se raccrocher. Le cinéma est un art multigenre, il n'est pas, ou plutôt plus, l'apanage d'un seul. Il est temps que les productions et les équipes techniques intègrent plus de femmes et une parité au sein de leur travail, il est temps que les films portés par des réalisatrices aient enfin la visibilité qu'ils leur revient de droit.
Lien : https://topobiblioteca.fr/
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Le female gaze et le male gaze, qu'est ce donc? Regards masculins et regards féminins, oui mais ?

Iris Brey nous apporte des précisions. Il s'agit de la manière de filmer les femmes, de les mettre en scène à l'écran. Le male gaze filmera la femme comme un objet, une convoitise, il placera le spectateur en tant que voyeur de la scène, scène sexuelle notamment. Le female gaze, ne fonctionne pas de cette façon, la femme n'est plus un objet, une personne à part entière, on ne regarde plus les scènes en tant que voyeur: on participe, on ressent les émotions. Le viol par exemple n'est pas érotisé, on le vit comme ce qu'il est: une agression, on en voit les conséquences dramatiques.

Ce livre est très intéressant, bien qu'au début assez complexe à comprendre. Finalement, il est très utile et nous permet de voir films et séries sous un autre angle, de s'interroger sur ce que l'on voit. Très rapidement, on se questionne sur tout! Un exemple très récent: la finale de Pekin Express. Les deux copines parisiennes, tout comme le père et sa fille, doivent glisser sur une longue bâche, au moment de s'enduire d'huile et de savon, gros plan sur le corps des amies et musiques langoureuse. Alors non, il ne s'agit pas de voir le mal partout, mais de reconnaître quand le male gaze est présent.

Le male gaze est pour moi le parfait exemple de la société patriarcale dans laquelle nous évoluons, dans laquelle les femmes sont perçues uniquement comme des objets de désirs. Leurs désirs d'ailleurs ne valent rien comparé à ceux des hommes!

Je trouve un peu dommage que l'autrice ne s'attarde pas davantage sur la société patriarcale et le rôle du male gaze, à savoir de faire perdurer les clichés sur les femmes, et ancrer en nous le patriarcat. Elle rappelle d'ailleurs qu'il ne suffit pas d'être une femme réalisatrice pour faire du female gaze et échapper au regard masculin! Tant d'images male gaze nous ont abreuvé depuis des décennies, qu'il est difficile de nous en défaire. Réaliser un film avec un regard féminin en devient un acte politique.
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Un super bouquin qui donne envie de regarder des films et des séries qui sortent des canons esthétiques attendus.



J’ai toute une liste à regarder et rechercher, et je sens que ça va me réconcilier avec le cinéma. Et me donner des pistes pour élargir mon imaginaire !
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

J'avais emprunté Le regard féminin dans le cadre de mon cours de littérature générale et comparée, où nous travaillions sur les adaptations cinématographiques. Puisque j'avais choisi une scène de violence sexuelle à analyser dans mon dossier, avec pour thématique la violence à l'image, je me suis dit qu'il serait intéressant de lire Iris Brey.



En effet, la critique Iris Brey est spécialiste des représentations du genre au cinéma et dans les séries télés. Elle a donc publié cet essai qui traite du regard féminin et du regard masculin (qu'on appelle aussi female gaze et male gaze). Il s'agit de la manière de filmer les femmes et de les mettre en scène.



Si je m'étais au départ surtout intéressée au chapitre intitulé "Le viol" (dans le cadre de mon dossier pour l'université), j'ai rapidement eu envie de tout lire, tant le propos était intéressant. Grâce à Iris Brey, j'ai appris de nombreuses choses sur la façon qu'on les réalisateur•rices de filmer les personnages féminins, avec un regard féminin ou un regard masculin. L'autrice site de nombreuses références, ce qui donne envie de creuser et d'aller regarder différents films.



Ainsi, le traitement opéré par le female gaze est une "révolution du regard" (comme l'indique le titre de cet essai), une autre manière de filmer les femmes, d'un point de vue féministe et non patriarcal. Cela m'a amenée à réfléchir à ce que je regardais et au regard que je pouvais porter, et il est clair que cet essai fourni et très intéressant me fera réfléchir quand je visionnerais des films ou des séries !
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Si vous avez déjà ressenti un certain malaise devant un film ou une série sans pouvoir mettre des mots dessus, si vous vous demandez parfois pourquoi vous avez des représentations qui vous dérangent, alors ce livre est fait pour vous !



Iris Brey nous offre des outils pour réapprendre à voir, pour déconstruire des scènes de cinéma qui nous montrent les actrices comme des objets à désirer et les acteurs comme des sujets tout puissants.

Comment les corps sont-ils mis en avant ? Sont-ils morcelés, entiers, filmés de loin, de près ? Partageons-nous l'expérience des actrices ou ne faisons-nous que les épier ? Le travail d'Iris Brey nous donne des éléments de compréhension pour analyser ce qui se joue devant nos yeux.

Le problème est qu'à force de ne raconter des histoires que d'une seule manière, nous avons du mal à penser qu'on pourrait les raconter autrement. Et surtout nous ne nous rendons plus compte que ces œuvres culturelles influent sur nos constructions psychiques et sociales.



Heureusement, il existe des exceptions. A nous de les identifier, de les défendre, voire de les créer...
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Je n'arrive jamais à résumer les essais que je lis – et est-ce d'ailleurs intéressant ? Pour ça, on peut lire la 4ème de couverture. Elle est courte, mais elle résume pourtant à la perfection ce livre.



Je vais plutôt parler de mes ressentis. Iris Brey soulève une question qui revient de plus en plus dans les débats, mais que peu de gens définissent : le female gaze. Qu'est-ce que c'est ? Ce que je retiens, c'est que c'est surtout un outil d'analyse qui me permet enfin de comprendre. De comprendre comment la façon dont les films sont filmés définit la façon dont nous les percevons. Le regard de la caméra détermine le nôtre.



Le regard féminin me permet de mettre des mots sur le coup de cœur intersidéral qu'a été Portrait de la jeune fille en feu. Qui me permet de comprendre pourquoi I may destroy you est la meilleure série jamais tournée. Et qui me fait réfléchir, beaucoup : à la façon dont je visionne films et séries, mais aussi – et peut-être que je m'emballe (mais peut-être pas) ? – à la façon dont à l'écrit aussi male gaze et female gaze sont importants. Comme au cinéma, on pourrait analyser les figures de style, les processus de narration, pour changer de regard, de perspective, sur les personnages. Bref, j'ai pas fini de réfléchir à ce livre.
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

J'ai découvert le travail d'Iris Brey via cet essai Le regard féminin, appelé ainsi en opposition au fameux "male gaze" qui place le spectateur en position de voyeur, et objectifie les corps (bien souvent féminins). Toutefois le female gaze n'est pas l'inverse de male gaze, il révolutionne intégralement la manière de filmer les corps, afin d'être au plus près des sensations et de la sensibilité des personnages, afin de ressentir les émotions et sens du personnage et de le traduire par le cinéma, par la manière de filmer, de suggérer, . L'autrice explique tout cela avec maintes exemples de films, de scènes dans les films, du travail de nombreuses réalisatrices telles que Céline Sciamma, Agnès Varda, Barbara Loden, Jane Camption, Chantal Akerman, etc, ce qui donne envie de les (re)découvrir. Sa pensée critique se déroule tout au long de l'essai avec fluidité, ce qui rend la lecture accessible. Cette lecture est hyper riche, et elle permet d'éduquer son regard, de l'ouvrir et d'être davantage attentif aux choix filmiques des réalisateurs. Un ouvrage nécessaire, qui interroge le lecteur sur les représentations de la sexualité, du désir et des conditions de la femme à l'écran.
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Le livre d'Iris Brey Le Regard féminin – Une révolution à l'écran, récemment paru aux éditions de l'Olivier, a beaucoup fait parler de lui dans le milieu de la cinéphilie.



Qu'on se range totalement du coté de l'auteur ou qu'on éprouve quelques réserves sur la radicalité du propos, force est de constater que ce livre est un ouvrage passionnant, dans le sens où il prend le risque de poser un regard assez inédit sur plus d'un siècle de productions cinématographique en déplaçant le regard, qui était essentiellement masculin car régie par une industrie très patriarcale ( le fameux "male gaze", dont le cinéma de Kechiche serait pour Iris Brey le point culminant) et nous propose de regarder des chefs d'oeuvre du cinéma d'un point de vue féminin.



Iris Brey, exemples à l'appui, nous explique pendant les 200 pages de son ouvrage qu'il existe bel et bien un regard féminin, ou female gaze, un regard qui nous fait ressentir l’expérience d’un corps féminin à l’écran.



Le female gaze n’est pas forcément un regard créé par des artistes femmes, mais c’est un regard qui adopte le point de vue d’un personnage féminin pour épouser son expérience



D’Alice Guy, qui utilise pour la première fois un personnage de femme en moteur de l'histoire dans "Madame a des envies " dès 1906, à Céline Sciamma avec son très récent "portrait d'une jeune fille en feu "qu'Iris Brey adore particulièrement, le regard féminin existe depuis plus d'un un siècle .

Et pour Iris Brey, si le female gaze existe depuis donc très longtemps, il n'en reste pas moins totalement marginalisé et réduit à une culture underground tant le cinéma hollywoodien s'est construit sur l'objetisation de la femme, pour les rendre désirables aux yeux des spectateurs de sexe masculin.



Une grille de lecture de la critique cinématographique qu'on a rarement l'occasion d'entendre et qui envoie valdinguer pas mal de nos idées reçues, voilà qui peut dérouter- surtout quand on sait que la critique cinéma " institutionnelle" est très majoritairement masculine, blanche et plus de 50 ans- mais qui mérite assurément d'être salué !




Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Avant de lire ce livre, je pensais naïvement que le "female gaze" désignait toute œuvre créée par une femme. Il s'agit en fait d'une manière de regarder les personnes s'identifiant comme femmes, de les mettre en scène, de les esthétiser, de faire part de leur expérience, et ce regard peut aussi émaner d'un homme, tout comme le male gaze peut émaner d'une femme.



Pour la première fois en français, Iris Brey théorise le female gaze d'une manière très pédagogue et éclairée par de nombreux exemples. Ayant une culture cinématographique proche du néant, la prolifération d'exemples est en fait la seule chose qui m'a parfois fait perdre le fil de ma lecture, car il est frustrant de se faire décrire des images, aussi limpides soient les descriptions. Je n'avais qu'une envie, voir ces œuvres. C'est pourquoi j'aimerais relire "Le regard féminin" après avoir visionné toute la filmographie/sériegraphie proposée à la fin du livre. Ainsi, je pourrai encore mieux comprendre cette nouvelle manière de regarder les œuvres culturelles qui révolutionne mon féminisme.
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Encore un hasard de l'actualité ! Terminer [ 𝘓𝘦 𝘳𝘦𝘨𝘢𝘳𝘥 𝘧é𝘮𝘪𝘯𝘪𝘯. 𝘐𝘳𝘪𝘴 𝘉𝘳𝘦𝘺 ] le soir où la direction de l'Académie des César a démissionné. Iris Brey doit être satisfaite...

Quant à son essai, si je l'ai ouvert avec des idées préconçues et une envie plutôt moyenne de m'y plonger, j'en ressorts assez agréablement surprise.

Surprise d'avoir apprécié cette lecture . Un texte plutôt facile à lire, pas trop de chiffres, de statistiques ni de pourcentages. Quelques termes techniques : vous apprendrez ce que " Freud nomme la scopophilie,[ ce ] regard voyeuriste qui vole l'image de l'autre."

Vous découvrirez comment le " regard masculin" filme les femmes, sa manière de les rendre désirables aux yeux des spectateurs hommes, comment ce même " regard masculin ", ce " mâle gaze" montre des scènes d'agressions faites au femmes, telle que le viol. Et ce depuis des décennies, car déjà utilisé par Renoir en 1946 !

Quelques cinéastes ont un autre regard, " un female gaze". Le film Wonder Woman avec son héroïne sortant d'une tranchée ( et non filmée en morceaux ) et avec des gros plans non sur ses attributs physiques ( seins, fesses,...) mais sur ses accessoires ( bouclier, lasso,...) en fait partie. Moi qui ne suis pas très cinéphile, je pense que je vais avoir un autre Regard désormais.



Mais je continue à rester une fan de James, même si ses Girls sont filmées selon un "mâle gaze
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

L’art , la place que l’on donne à ses œuvres, sa mémoire, son histoire nous permettent de comprendre les cultures que nous traversons, celles que nous défendons, celles que nous rejetons, celles que nous sommes prêt.e.s à voir rayonner. Culture plurielle, multiple, queer, mouvante. Un regard. Un geste. Un mouvement. Une révolution. Un autre éclairage, un hors cadre, hors champ. Une égalité, un partage. L’essai d’Iris Brey s’adresse à celleux qui veulent comprendre ce qui se produit depuis des dizaines d’années, ce qui a été effacé, ce qui a changé à tout jamais notre regard. Alice Guy, Agnès Varda, Chantal Akerman ...Céline Sciamma, Barabara Hammer, Barbara Loden...tant et tant d’autres, qui ne cessent de porter leur regard à notre hauteur.

Regard féminin et non cinéma de femmes.

L’objet n’est plus, le sujet renaît.

Iris Brey, à l’appui d’une culture cinématographique, littéraire et philosophique, riche et pertinente, éclaire avec intelligence l’histoire, la phénoménologie, et l’avenir de ce cinéma que nous aimons, défendons, et qui nous exhortent , depuis ses origines, à «  redresser nos regards ».

Essai incontournable, précieux.

Astrid Shriqui Garain
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Lecture qui m'a très agréablement surpris. N'y connaissant rien en cinéma, je m'attendais à être un peu perdu dans le propos. Cependant, grâce à une écriture fluide, l'autrice nous happe dans l'histoire du cinéma au féminin. Iris Brey démontre aisément à quel point il s'agit d'un médium tenu par les hommes pour les hommes; tout en présentant nombre d'œuvres qui révolutionne cet art en mettant la perception féminine au centre.
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Iris Brey reprend dans cet essai le concept de « male gaze » développé par la théoricienne du cinéma Laura Mulvey dans les années 1970. Une majorité de films seraient mis en scène de manière à présenter au spectateur un point de vue masculin sur les femmes, qui s'en trouveraient réduites au statut d'objets du regard. le spectateur est invité à prendre du plaisir en observant les corps des femmes (le « gaze » c'est le regard qui fixe), à travers des plans qui les sexualisent. La thèse d'Iris Brey, c'est qu'il a existé, et ce dès les débuts du cinéma, un autre cinéma, qui invite les spectateurices à ressentir l'expérience des personnages féminins, jusqu'à entrer dans un partage d'expérience actif avec elles. C'est ce principe filmique qu'elle appelle le « female gaze ». Brey se sort bien de la critique de la binarité de genre sous-jacente à sa démarche théorique (pourquoi revendiquer un female gaze face au male gaze à une époque queer et fluide?), en disant simplement que l'expérience spécifique des femmes (de toutes les femmes, trans et cis, avec ou sans enfants etc.) n'est pas encore sortie de sa place marginale, pas plus qu'elle n'a fini de déranger. le livre revient alors sur l'histoire du cinéma en traversant un corpus de films qui mettent en oeuvre un female gaze. Ce parcours passe par des noms attendus, comme ceux d'Agnès Varda, Chantal Ackermann, Jane Campion ou Céline Sciamma (ce qui ne veut pas dire que leurs films aient été beaucoup vus), mais il explore surtout les marges du cinéma, en présentant les films (entre autres) de Maya Deren, Dorothy Arzner, Barbara Hammer, Barbara Loden ou encore de Marie-Claude Treilhou. le female gaze peut être mis en oeuvre par des hommes, et le livre contient une analyse passionnante du film Elle de Paul Verhoeven allant dans ce sens. le livre explore aussi un corpus sériel.

Cette mise en valeur de films souvent peu connus est à mes yeux l'un des aspects les plus stimulants de ce livre, qui sait nous inviter à aller vers ces oeuvres et à nous plonger dans des expériences de cinéma inédites, à partager un moment de la vie d'héroïnes qu'on aurait aimé rencontrer plus tôt. En tant que cinéphile et en tant que femme, je partage le point de vue défendu par le livre. Je pense en effet qu'une grande partie des films tournés aux XXe et au XXIe siècles représente très pauvrement la vie et le point de vue des femmes, donne une fausse impression de leurs désirs et de leurs expériences, voire les réduit au statut de potiches. J'ai toutefois une réserve concernant la forme du livre, dont j'assume qu'elle soit liée à ma formation académique. Je suppose qu'Iris Brey a voulu écrire un essai accessible à toustes, court et écrit dans un style compréhensible. Cette démarche est évidemment louable, mais je trouve que le propos gagnerait beaucoup de force en entrant dans une discussion plus approfondie avec le matériel théorique sur lequel il repose (l'approche phénoménologique des films, l'écriture féminine etc.), et en affinant les analyses de films. Dans la conclusion, Iris Brey montre que l'équipe rédactionnelle des Cahiers du cinéma à l'époque de Stéphane Delorme ne comprend pas les enjeux qui entourent le genre du point de vue au cinéma, et reste bloquée dans une perspective critique sexiste. Or, à mes yeux, les Cahiers de Delorme (du moins ce que j'en ai lu), représentent un idéal de ce qu'on peut faire en terme de profondeur critique. J'en conclu que j'aimerais lire (et écrire) des textes qui marient une écriture sensible, subtile, qui va explorer les complexités des oeuvres et du monde, à un point de vue qui ne soit pas mutilé par son incapacité à comprendre la richesse du féminisme.
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Des images à la James Bond girls sortant de l’eau en bikini, avec les mouvements de caméra qu’on pourrait prédire à dix kilomètres, accompagnant un regard qui s’intéresse moins (notatall) à la psyché du personnage qu’à sa charmante enveloppe, on en a toutes et tous des tas en tête. Le cinéma a longtemps été (et est toujours, ne nous voilons pas la face) dominé par le fameux « male gaze » et c’est bien son alternative, ancienne et pourtant tout juste frémissante, qu’Iris Brey théorise dans cet essai qui a captivé la petite personne qui vous parle, le female gaze ou regard féminin.



Contrairement à ce qu’on pourrait penser, le regard féminin n’a rien à voir avec le sexe ou le genre de la personne qui filme. Tout ce qui compte, ce sont les choix qui sont faits. Une réalisatrice ou un réalisateur pratique le female gaze à partir du moment les spectateur.ices ont accès, grâce aux choix de caméra, de montage, de réalisation, à la subjectivité du personnage. On s’attache particulièrement à la représentation des femmes à l’écran qui ne sont plus objectifiées, ramenées exclusivement à leur corps et déshumanisées mais bien présentées comme des personnages vivant une véritable expérience, expérience qui peut être partagée avec les spectateur.ices.



Iris Brey rétablit dans cet essai l’importance du regard qui peut absolument tout changer dans le traitement des émotions, des corps, des sujets à l’écran. Pourquoi est-ce que le viol semble à la fois omniprésent, ultra problématique et en même temps jamais traité frontalement dans ses véritables implications, hors des impasses voyeuristes ? MALE GAZE. Pourquoi est-ce que le désir féminin est aussi mal représenté dans la culture mainstream, contribuant malheureusement à relayer des clichés dévastateurs ? MALE GAZE. Pourquoi est-ce que les personnages féminins ont aussi rarement accès à la complexité réservée aux personnages masculins ? MALE GAZE EUGAINE.







Ce que j’ai aimé, c’est que l’autrice ne fait jamais dans la théorie abstraite, chacune de ses idées s’appuie sur des exemples (et contre-exemples) bien concrets, tirés de la culture pop ou du cinéma d’auteur. Je m’étais déjà largement interrogée sur des scènes bien cringe de Game of Thrones par exemple et l’autrice les dissèque allègrement, tout comme à l’inverse, elle s’enchante et nous enchante sur la représentation du désir féminin dans Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma. Et ce qui m’a le plus emballée, c’est quand elle s’attaque à des oeuvres controversées ou qu’on n’aurait pas attendues là, du blockbuster Wonder Woman au sombre Elle de Paul Verhoeven. Je me souviens d’ailleurs du passage de l’autrice à Quotidien et de la façon dont elle avait parlé de Titanic, plus maintream tu meurs, plus dirigé par un homme cis tu meurs, et pourtant full female gaze, prônant une égalité incroyablement sexy dans la relation qui lie Rose à Jack.



N’étant pas cinéphile moi-même, certaines références un peu pointues m’ont laissée au bord de la route (j’ai un bac-12 en Agnès Varda), mais Iris Brey ne nous abandonne jamais et tout est toujours hyper contextualisé. J’ai d’ailleurs vraiment apprécié la liste de films à voir spéciale « female gaze » en fin d’ouvrage, l’occasion aussi de rétablir les noms de grandes réalisatrices oubliées de l’histoire.
Lien : https://prettyrosemary.wordp..
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Le regard féminin, ou female gaze, qu'est-ce que c'est ? Est-ce simplement et mécaniquement l'opposé du male gaze ? Iris Brey explique qu'il s'agit de filmer les femmes sans en faire des objets sexuels destinés à exciter le seul désir des hommes spectateurs. Voilà pour la première étape. Mais le regard féminin, c'est bien plus que cela. « Ce n'est pas un regard créé par des artistes femmes, c'est un regard qui adopte le point de vue d'un personnage féminin pour épouser son expérience. » (p. 9) Cette façon de filmer s'attache à montrer les différences et à proposer une nouvelle forme d'écriture cinématographique ou, plus simplement, une autre façon de raconter des histoires. Évidemment, c'est une opposition au male gaze qui a ancré dans nos imaginaires une certaine représentation de la femme et de son désir et qui refuse/moque/invisibilise toute autre façon de faire. « La manière dont le corps des femmes est filmé n'est pas questionnée, et le fait de prendre du plaisir en objectifiant les corps jamais remise en question. » (p. 33) À plus large échelle, au-delà du seul corps féminin, c'est tous les corps et toutes les représentations que le female gaze veut interroger, en remettant les personnages féminins ou masculins en situation d'agir, sans subir le regard ou l'action. Il s'agit avant tout de s'affranchir du regard dominant de l'homme blanc hétérosexuel. « Le male gaze est mortifère. Le regard féminin, lui, est un regard vivant qui produit des images inédites, nos images manquantes. » (p. 235)



« Un film avec une héroïne est une condition nécessaire, mais non suffisante pour qu'un regard féminin puisse advenir. » (p. 83) De même, un réalisateur peut porter un female gaze sur ses actrices et ses personnages féminins : il suffit qu'il le souhaite et qu'il réfléchisse en ce sens pour créer son œuvre cinématographique. Le regard féminin n'est pas et n'a pas à être l'apanage des seules réalisatrices. C'est un procédé filmique au même titre que le travelling ou la contre-plongée : c'est une façon de montrer et de filmer. « Il faut toujours partir de la mise en scène pour déterminer si une œuvre recourt ou non au female gaze. » (p. 79) Et comme tout est signifiant au cinéma, de la musique à la lumière, le regard que la caméra force le spectateur à adopter est lourd de sens. Iris Brey rappelle qu'au-delà des corps féminins qu'il faut montrer sans les sexualiser, le cinéma doit s'emparer de sujets féminins qui sont cachés ou jugés peu digne d'intérêt, voire tabous. Le grand et le petit écran doivent montrer le désir et le plaisir des femmes, mais aussi les fluides féminins, des menstrues à la cyprine, ou encore l'accouchement ou le viol, sans jamais érotiser ce dernier. « Le female gaze permet de ne plus faire d'un viol un spectacle et de le donner à voir comme une expérience qui laisse des traces dans notre chair. » (p. 137)



Comme dans Sex and the Series, Iris Brey ne se gêne pas pour reprocher à une certaine critique ses œillères et sa complaisante envers la culture du viol et le patriarcat en général. « Le regard féminin propose une autre manière de désirer, qui ne se base plus sur une asymétrie dans les rapports de pouvoir, mais plus sur l'idée d'égalité et de partage. » (p. 19) Ses textes sont salutaires et empouvoirants. Ils rendent hommage à des réalisatrices au talent immense, au premier rang desquelles je place Jane Campion dont je ne cesse d'apprécier et revoir le travail. « Le regard féminin n'est pas le fruit du hasard, c'est une manière de penser. » (p. 20)



Cet essai passionnant, aux démonstrations parfaitement menées, prend évidemment place sur mon étagère de lectures féministes ! « Le female gaze est inclusif, il n'exclut personne. » (p. 39)
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Iris Brey théorise avec de nombreux exemples une grille de lecture féministe de la critique cinématographique, celle d'un regard féminin, dénué de scopophilie (plaisir du voyeur) et ancré dans l'expérience de ses héroïnes. Une véritable révolution !
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Le regard féminin : Une révolution à l'écran

Il suffit de regarder des affiches de films pour y voir des femmes réduites à leur physique ou transformées en objets. Quand le visage des hommes est très souvent visible, les femmes, elles sont régulièrement représentées par une bouche, une paire de jambes ou de seins. Quelques réalisateurs et réalisatrices échappent à cet écueil, en adoptant une manière de filmer différente. Celle-ci a un nom : le female gaze. Iris Brey avance une définition de ce concept dans Le regard féminin, une révolution à l’écran. A l’aide d’analyses de films et de séries de toutes les époques, elle rend compte de la manière de filmer de plusieurs cinéastes (souvent des femmes) et de ce que cela dit sur eux/elles. Parce que oui, choisir de filmer une femme autrement qu’en la sexualisant est l’affirmation d’une manière de penser. Choisir de mettre à l’écran des expériences féminines (règles, avortement...) est assez rare pour être souligné. Ce texte est une bouffée d’air qui donne envie de croire à une nouvelle façon de penser le cinéma. Cependant, je n’avais pas le bagage pour en saisir toutes les subtilités et j’étais parfois en désaccord avec des analyses initiales qui ont servi de base à l’autrice pour y développer certaines théories.
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Sex and the Series

Construit autour de quatre chapitres, la parole et le sexe, le plaisir, les violences et queer, ce livre parle de la représentation des sexualités féminines dans les séries télévisées. Le champ étant vaste, cette étude se cantonne aux séries américaines. Septante-deux séries passées à la loupe et qui montrent au fil des ans une évolution, voire un début de révolution. De séries où les images de sexe sont juste filmées pour appâter le mâle blanc hétérosexuel, ce “male gaze” où toutes les représentations de la femme et du monde en général sont du point de vue de ces hommes… à des épisodes où le point de vue de la femme existe, où on décrypte le consentement, où femmes, hommes, queer sont à pied d’égalité. Une belle analyse et une envie de voir plein de séries.
Lien : https://redheadwithabrain.ch..
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Sex and the Series

Big Little Lies

Sex and The City

Desperate Housewives

Girls

Masters of Sex

Orange is the New Black

I Love Dick

The Handmaid's Tale

Ally McBeal

Grey's Anatomy

Crazy Ex-Girlfriend

The End of the Fucking World

Transparent

Buffy contre les vampires

Fleabag

Mad Men

The L Word

Game of Thrones

Twin Peaks

Jessica Jones



Toutes ces séries comptent des personnages féminins, souvent centraux, dont l'identité passe notamment par leur sexualité. Mais alors, comment les séries télévisées représentent-elles les sexualités féminines ? Sexualités au pluriel, car il n'existe pas une seule forme d'activité sexuelle. « C'est en cela que les séries occupent une fonction révolutionnaire : elles sont majoritairement accessibles à tous et à toutes et peuvent être dévorées dans l'intimité de sa chambre. » (p. 16) En détaillant des épisodes et des protagonistes, Iris Brey dénonce le male gaze, ou comment la représentation des femmes et de leurs sexualités a longtemps été pensée pour le seul plaisir des hommes. Désormais, une nouvelle génération de réalisatrices impose un autre regard, décomplexé et revendicatif. « Les séries constituent une alternative nécessaire à l'heure où la sexualité est incarnée par un puritanisme excessif au cinéma, soit par la pornographie réductrice des sites Internet. Entre ces deux extrêmes, les séries proposent une vision subversive des sexualités féminines en articulant un discours libérateur. Elles nous aident à repenser la sexualité linguistiquement et visuellement tout en mettant en scène les transformations profondes de notre société. Elles nous font jouir de nouvelles idées et de nouvelles images. Elles assurent une relève féministe et instaurent une véritable révolution (télé)visuelle. » (p. 18)



Il s'agit de mettre la sexualité féminine et queer au même niveau de représentation et d'acceptation que la sexualité masculine hétérosexuelle, d'interroger le consentement et de combattre les comportements inacceptables, même dans la fiction. Et surtout dans la fiction. « Il est donc essentiel que les personnages féminins dans les séries télé prouvent leur agency, les comédiennes deviennent le temps d'une série des actrices sociales. Leurs personnages, en ne reproduisant pas des comportements stéréotypés et en démontrant une puissance d'agir, permettent ainsi de fluidifier les normes. » (p. 86) Finalement, ce qu'Iris Brey propose, c'est la reprise en main d'une sexualité somme toute normale puisqu'elle concerne la moitié de la population mondiale. « Clitoris et vagin ne décrivent pas seulement des réalités physiques : ce sont des mots politiques, et c'est la raison pour laquelle ils sont rarement entendus. » (p. 29)



Quelle énergie m'a donné cette lecture ! Premier essai lu en 2021, clairement argumenté et illustré, il m'a donné l'envie de découvrir toutes les séries citées par l'autrice. Et de poursuivre mon éducation féministe et mon empouvoirement !
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Sex and the Series

Quelques années avant le puissant succès de son essai Le regard féminin – Une révolution à l'écran qui théorise le male-gaze au cinéma, ce point de vue masculin systématiquement adopté pour décrire une femme, Iris Brey s'était intéressée à la sexualité féminine dans les séries TV.



Ainsi elle analyse comment les séries TV abordent le sexe au féminin, de la façon dont les personnages en parlent jusqu'à sa représentation à l'écran, Iris Brey pointe les façons dont les scénaristes évoquent le sujet le plus tabou qui soit ! Elle traverse les années 90-2000 avec des séries comme Sex and the city, The L Word ou Buffy contre les vampires et Dawson qui voient l'avènement d'héroïnes et avec elles des personnages lesbiens, des baisers passionnés et du sexe à l'écran. Comment montrer la jouissance féminine, comment ne serait-ce que l'aborder ? Souvent occultées, les scènes de sexes deviennent pourtant le point centrales et cruciales de revendications sociétales.



C'est avec la représentation que les spectateurs.ices peuvent s'identifier, il est plus qu'impératif que la sexualité féminine soit mise en avant. Les relations hétérosexuelles à l'écran, ne montrent bien souvent qu'une facette de la sexualité, celle du plaisir masculin. Ainsi des générations de femmes pensent que le sexe n'est que cela, surtout lorsque l'on rappelle que les manuels scolaires ne montrent le clitoris que depuis 2017 ! Encore aujourd'hui nous manquons d'images de femmes au lit, de femmes prenant du plaisir et de femmes lesbiennes. La série Grey's Anatomy menée par la célèbre Shonda Rhimes, est une des séries qui a le plus évoluée dans le temps, entre l'impossibilité de prononcer le mot ''clitoris'' à l'écran jusqu'à ces personnages et intrigues que l'on connaît aujourd'hui. Il est aberrant de voir que le terme ''pénis'' ne pose, lui, aucun soucis, alors que le corps de la femme est, encore trop souvent, nié !



Avec cet essai c'est tout un pan de la culture pop qui est passé au crible, jusqu'à aujourd'hui et ces personnages de femmes puissantes comme dans The Handmaid's Tale, Sense 8 ou encore Sex Education qui réinventent les partitions amoureuses et sexuelles à l'orée d'une société qui évolue. Le premier chemin pour s'accepter est la représentation, le pouvoir des images est si fort qu'il faut créer de nouveaux schémas pour pouvoir faire bouger les lignes de nos vies...
Lien : https://topobiblioteca.fr/
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