Un livre du 19ème à qui l’on doit la redécouverte à André Gide (encore lui !). Il ne s’est heureusement pas emparé de sa traduction, se contentant d’une irritante préface, de celles qui devraient définitivement s’appeler « postface », voir « supplément au… », tant elle est bavarde sur les ressorts de l’intrigue, au lieu de simplement nous donner les clefs de compréhension du contexte… ce que, dans sa critique, notre traductrice babéliote franco-roumaine Gabrielle Danoux, alias Tandarica, fait beaucoup mieux que le grand écrivain, qui en fait toujours un peu trop…
Et la traductrice de ce livre, Dominique Aury, pilier de Gallimard, nous signe là une de ces quatrièmes de couverture qui en ont fait la légende, enjoignant le lecteur confiant à ne surtout pas les lire s’il désire un peu de surprise !
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Ne boudons pas pour autant notre plaisir, et remercions-les d’avoir facilité la diffusion de cet étonnant roman dans sa forme, pouvant trouver sa place dans une des listes « Contemporanéité » du babéliote steka, dont je vous recommande une fouille en profondeur.
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Brocardant ainsi ces textes qui en disent trop, j’aurais tort de ne pas en profiter afin d’en dire le moins possible sur ce vénéneux roman des détestations.
On en profitera simplement pour épaissir sa vision du christianisme réformé, dont une certaine forme de modernité, encore, ne peut qu’interpeler le chercheur en laïcité.
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Un classique, d’une certaine parenté gothique, d’un auteur qui, dans d’autres temps et d’autres lieux, aurait été qualifié de « poète-paysan », lui qu’on surnomme le berger d’Ettrick, nous menant assurément par cette plongée dans l’âme écossaise.
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Un grand, voire énorme, classique de la littérature écossaise, qui possède, s'il est nécessaire de le rappeler, une identité bien particulière. On peut en résumer la problématique en ces termes: les Puritains croient à la prédestination, c'est-à-dire qu'on naît destiné à aller au Paradis ou pas. Des signes indiquent cette prédestination (par exemple la réussite, la richesse) et, s'il n'y en a pas, veuillez cultiver la vertu pour qu'ils arrivent.
James Hogg renverse le raisonnement : s'il y a prédestination, de toute façon, tout est décidé dès la naissance. Donc, on peut passer toute sa vie dans le péché, puisque tout est déjà joué dans un sens ou dans l'autre. D'où le terme de "pécheur justifié".
De là, on peut théoriser à volonté, comme le fait par exemple Christian Civardi, sur la schizophrénie écossaise: on a à la fois la vertu extrême et le péché le plus profond, dans la même civilisation. Ce penchant se retrouve chez Robert Louis Stevenson dans Dr Jekyll et Mr. Hyde, voire dans l'antipsychiatrie de Ronald David Laing. Plus récemment, j'en chercherais bien les traces chez Alasdair Gray ou Hugh MacDiarmid, si j'avais le temps.
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Cette singulière confession du pêcheur justifié relève du mystique. du roman gothico-fantastique et du récit d'analyse psychologique.
Le personnage principal, Robert Gowan, a été élevé par son directeur de conscience, et très probablement son père biologique, selon la doctrine de Johannes Agricola, contemporain de Martin Luther, qui fut à l'origine d'une secte protestante, les Antinomiens. Ces derniers rejetaient la loi comme inutile face à l'Évangile, prêchaient que les bonnes œuvres ne mènent pas au salut ni les mauvaises à la perdition selon que vous êtes enfant de la Grâce ou non, que le salut est acquis de toute éternité aux élus, indépendamment de leurs actes devant la communauté des hommes. Sur la base de ces principes extraordinaires le jeune homme devient un puritain d'une intransigeance rare, contempteur de son époque, intolérant envers son prochain, vouant son père putatif et son frère aîné à la damnation éternelle. Une personne de qualité qui lui semble être un des princes de ce monde vient prendre la relève de l'austère père selon la foi, exerçant une influence déterminante et une emprise totale sur lui, l'incitant à ne point se contenter de la doctrine et à se faire le glaive vengeur du Très Haut contre les impies qui bravent les décrets divins.
Le roman divisé en trois parties, s'ouvre sur le récit d'un chroniqueur objectif qui a étudié les documents et collationner les témoignages qui ont trait aux événements qui constituent la trame horrifique de l'histoire. Viennent ensuite les mémoires intimes et confession du pêcheur justifié rédigé par lui-même, témoignage subjectif et biaisé de Robert Gowan, plongée abyssale dans la psyché d'un fanatique religieux. Enfin l'épilogue met en lumière l'aboutissement logique et fatal d'une vie où le rigorisme est poussé à l'extrême au mépris des valeurs humanistes les plus élémentaires. On ne peut que souscrire aux propos d'André Gide qui s'étonnait dans la préface de cette œuvre de l'anonymat dans lequel elle subsistait, inconnue de ses contemporains lettrés et guère plus célébré par les compatriotes de l'auteur. Au vu de l'achevé d'imprimer (août 1987) de l'exemplaire acheté neuf récemment, il est fort à parier que rien n'a changé pour ce roman fort singulier, qui bien que datant de 1828 gagne à être connu dans l'exposition qu'il est fait des motivations idéologiques et des ressorts psychologiques qui pousse certains fous de Dieu à commettre les pires atrocités.
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Le livre est intéressant en soi, mais sa structure est assez dérangeante.
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