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3.75/5 (sur 38 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1946
Biographie :

A ne pas confondre avec l'homonyme Jean Robin (II).
Jean Robin est un écrivain et essayiste français.

Il est plus particulièrement intéressé par les sujets ésotériques et occultistes, les sociétés secrètes et leur influence au cours de l’histoire.

Il commence sa carrière d'écrivain par la publication d'une étude sur René Guénon (1886-1951) intitulée "René Guénon témoin de la Tradition" (1978).

Par la suite, il s'intéresse à la mission du Comte de Saint-Germain, aux divinités et lieux de spiritualité égyptiens, à Nostradamus, au mysticisme nazi et à H.P. Lovecraft.

Plus largement ses écrits portent sur l'occultisme et l'ésotérisme, les mystères de Rennes-le-Château et l'influence des sociétés secrètes. Plusieurs de ses livres ont été édités chez Guy Trédaniel.

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Source : tredaniel
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Presentation des Editions Tatamis .
Rencontre avec Jean Robin, éditeur aux éditions Tatamis, lors du salon des éditeurs indépendants 2009, qui nous présente sa maison d'édition...


Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Une allégorie tirée d’une sagesse oubliée nous enseigne que les dieux – représentant par évhémérisme les guides cosmiques des humanités antérieures – recherchent en l’homme, sous la forme de la pensée, ce qu’ils ont possédé dans une autre dimension avant de sombrer dans ce sommeil qui emprisonne Cthulhu, lui qui, dans notre dimension terrestre, attend en rêvant à sa délivrance dans les profondeurs de R’lyeh.

(p.57)
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Tout le monde connaît la vision de Daniel, dans la Bible : sur la dernière bête qui monte de la nier — et dont les 10 cornes symbolisent les principaux royaumes nés de la dissolution de l’empire romain — pousse une petite corne nouvelle, qui croît subitement. Daniel est frappé d’étonnement quand il voit apparaître dans cette petite corne non point un homme d’abord, mais des yeux, un regard qui vient de traverser la nuit des temps. Le prophète considère attentivement ce regard glacial, « comme les eaux du lac de Königssee », qui hypnotisa littéralement le si catholique Alphonse de Chateaubriant. Il veut évoquer l’homme. Alors apparaît non pas encore un visage mais une » bouche grandiloquente », Il ne s’agit pas de celle d’Antiochus Épiphane, le persécuteur des Juifs qui n’en est que la préfiguration, car la vision de Daniel « se rapporte à un temps lointain », quand s’élèvera « un Chef au dur visage, prospecteur des choses occultes ».

Son apparition dans l’Histoire est entourée de signes et facilitée par des mages. Les astrologues hantent le château où il s’isole, sur la montagne, dans une enceinte d’arbres noirs. Ces sortes d’accès qui portent cet antéchrist-là à se retirer soudain du monde ne sont pas prophétisés mais ils appartiennent à la tradition, comme le rappelle opportunément Marcel Hamon (les Prophéties de la Fin des Temps. La Nouvelle Édition, 1945) ; sans doute parce qu’ils correspondent en mode inversé et parodique aux fuites de Jésus qui s’éloignait subitement des foules pour se recueillir et prier à l’écart même des apôtres. Quant à l’utilisation de la magie, elle se déduit indiscutablement de tout ce qu’annoncent Jésus et ses disciples au sujet des prodiges et des faux miracles. En fait, on a vu comment des foules immenses pouvaient être soumises, à leur insu, à des forces non pas certes spirituelles, mais psychiques, magnétiques. Tel était le pouvoir d’Adolf Hitler. Et pas seulement sur les foules réunies, bien sûr, mais sur les individus même les plus cyniques. Écoutons Goebbels, relatant sur le mode mystique sa visite à Hitler, à Berchtesgaden, en juillet 1926 : « Ces journées m’ont indiqué la voie ! Une étoile luit, qui me conduit hors de l’abîme ! Je suis à lui jusqu’à la mort. Mes derniers doutes se sont évanouis. L’Allemagne vivra. Heil Hitler ! » C’est à dessein que nous avons utilisé le mot « mystique », Tous les théologiens savent en effet qu’il existe une « mystique diabolique » s’opposant à la « mystique divine » — les apparences extérieures pouvant être les mêmes dans les deux cas.

Mais surtout, comme le préfigurait, donc, Antiochus Épiphane, Hitler se distingue par sa haine du sang de l’Incarnation. Toute son action tend à l’extermination du Juif. Il ne peut en être autrement. La Parodie doit produire ce signe horriblement concret puisque la Bête dont il est le serviteur transpose tout sur le plan matériel. Et son opposition fondamentale (quoique masquée) au Verbe incarné doit nécessairement déterminer la persécution du sang humain que le Christ reçut de sa mère.

Mais, ainsi que l’écrit Raoul Auclair (le Jour de Yahvé, éd. Téqui), « (...) une fois de plus. Satan fut vaincu par sa victoire. Satan hait les Juifs qu’il sait fort bien, lui, être demeurés le peuple de Yahvé. Inspirant à ses féaux de les exterminer, ce fut l’excès du carnage qui permit aux Juifs de «remonter» à Jérusalem. » (chap. VII)
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Si l’Église catholique dans son ensemble n’était guère mieux disposée que la Maçonnerie à recevoir le message de la Tradition, que dire du monde « intellectuel » ! On trouvera dans l’intéressant ouvrage de Jean Biès - Littérature française et Pensée hindoue des origines à 1950 - une consternante anthologie de l’incompréhen­sion occidentale, dont nous extrairons ces quelques perles du plus bel... orient : « Dès 1919, Valéry, qui a le mérite de discerner la plu­ralité des civilisations et de les découvrir mortelles, n’en célèbre pas moins l’Europe, ce « petit cap du continent asiatique », comme bien supérieure au continent entier. L’Europe est « la partie précieuse de l’univers terrestre », le « cerveau d’un vaste corps » ; le reste de l’hu­manité étant constitué par « les nègres variables et les fakirs indéfinis ». Écho lointain de Gobineau, Valéry explique le miracle européen par la « qualité de sa population ». Que l’on mette dans le plateau d’une balance l’empire des Indes, dans l’autre plateau, le Royaume-Uni, c’est celui-là qui penchera ! L’Europe est synonyme d’activité, curiosité intellectuelle, imagination et logique équilibrées, scepticisme non pessimiste, mysticisme non résigné. Héritière de la Grèce, de Rome et du Christianisme, elle est ce lieu privilégié de la culture, de la science, du progrès et des « réalisations ». »

L’incommensurable naïveté des « penseurs » de l’Occident, infa­tués d’une bien illusoire supériorité, s’aggrave, lorsqu’ils sont chré­tiens, d’un étonnant manque de « charité »... On croit rêver en entendant Claudel refuser « la nuit abominable » des « brahmes, bonzes, philosophes », ou comparer « le trois fois infâme Bouddha tout blanc sous la terre », à un « Ver immonde », ou déclarer, enfin, que : « Rien mieux que (la pensée hindoue) ne saurait nous aider à réaliser les conditions constitutives (de l’enfer) ». Et Jean Biès de s’interroger : « Claudel n’aime pas l’Inde, il n’aime pas l’hindouisme, il n’aime pas son frère hindou. A voir tant de mépris et une telle sûreté de soi, l’on se pose la question : l’un de nos plus grands poètes chrétiens, et peut-être le plus grand, était-il vraiment chrétien ? Claudel écrase ce qu’il ignore, il le fait avec fanatisme. Cette partie de son œuvre n’est assurément pas la meilleure, elle n’augmente pas sa gloire, ni ne sert l’Église qu’il prétend servir.

De l’Inde, « noire damnée » de Claudel, aux caricatures d’hommes que sont pour Teilhard de Chardin les yogin, ces « esprits infer­naux », c’est le même mépris qui se manifeste, et c’est encore l’Esprit qui est outragé, par l’agitation ratiocinante d’un Occident qui se complaît irrémédiablement dans la rassurante illusion de ses jeux vains. Moins haineux toutefois que Claudel, Teilhard de Chardin in­tègre ses « impressions de voyage » à son hasardeuse cosmogonie, et imagine la « synthèse en le Christ cosmique des deux formes d’adoration qui se partagent l’humanité : christianisme d’une part, et, de l’autre, ce qui est récupérable dans les « panthéismes humanitaires » ». On pourra s’étonner que ces « panthéismes humanitaires » (et à condition bien sûr que la sempiternelle et absurde accusation de panthéisme eût encore un sens quelconque pour ceux qui en faisaient un épouvantail) fussent contredits par le reproche adressé à l’« âme asiatique », d’avoir séparé l’Un et le Mul­tiple, de les avoir même opposés en considérant que « l’Unité s’obtient en niant et détruisant le Multiple », tant il est vrai que la pensée schématique de l’Occident, irréductiblement dualiste, ne s’exprime qu’en termes d’opposition et de destruction, là où il n’y a en fait que synthèse et intégration. (pp. 166-167)
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ON A ASSEZ STIGMATISÉ, DANS CERTAINS MILIEUX, « l’intellectualisme glacé » de Guénon, on a assez déploré son « manque de charité », sa « méconnaissance de l’Amour » (qui sont, comme chacun sait, des vertus typiquement occidenta­les...) pour que nous ne croyions pas déplacé de restituer à l’homme sa véritable dimension. En fait, il devrait suffire, pour montrer l’ina­nité de ces reproches, de rappeler à tous ces défenseurs des valeurs de l’Occident - soit dit cette fois sans sombre ironie - que Guénon a consacré sa vie à exprimer, à l’intention de ses semblables, les véri­tés les plus hautes ; et cela en dépit de toutes les incompréhensions, souvent haineuses, en dépit de tous les « assauts », toujours redouta­bles. Nous voudrions savoir comment un tel homme pouvait man­quer de charité, entendue dans sa plus complète acception, lui qui, de surcroît, eût pu faire sienne la devise des Templiers : Non nobis, Domine, non nobis, sed nomini tuo da gloriam [« Ce n’est pas nous, Seigneur, ce n’est pas nous mais Ton Nom qu’il faut couvrir de gloire. »]

Il est vrai que les vertus, entendues même simplement dans leur sens exotérique, ont été vidées progressivement de toute significa­tion, pour se réduire à un plat moralisme, à un vague sentimentalisme. Nous serons donc contraint de nous départir quelques ins­tants de la perspective purement intellectuelle qui a été la nôtre, jusqu’ici, pour illustrer de façon un peu anecdotique la « charité » de René Guénon. Nous ne reprendrons pas les souvenirs, tous concordants, de ceux qui ont eu le privilège de le rencontrer, mais nous livrerons seulement le témoignage inédit d’un de ses amis, rela­tant en ces termes sa première rencontre avec lui : « Je me rendis donc rue Saint-Louis-en-l’Ile un soir de juin 1928, à neuf heures, et j’en sortis à une heure du matin. Vous rapporter ce qui fut dit ce jour-là est impossible : je n’en ai conservé qu’une impression glo­bale; et celle-ci, comment la traduire ?

« Après m’avoir interrogé sur moi-même [...] Guénon se mit à raconter des anecdotes sur les occultistes qu’il avait connus et dont j’avais lu les ouvrages, de sorte qu’au bout d’une heure nous riions ensemble comme de vieux camarades. Ensuite seulement, lorsque je fus bien détendu, on aborda des sujets plus sérieux.

« Ce qui émanait de Guénon, c’est un double rayonnement de bienveillance et de certitude. Ses propos et son attitude suggéraient ceci : « Vous et moi, nous nous sommes reconnus pour être de même race ; j’ai une certaine avance sur vous, du fait que j’ai vingt ans de plus, mais je suis sûr que nous sommes d’accord. Ainsi, sur telle question, il faut penser ceci et cela. Cela ne se discute même pas, et vous ne seriez pas ce que vous êtes si vous songiez un seul instant à le faire. » Et, de fait, sa tranquille certitude était communicative.

« J’ai connu quelques hommes remarquables et il m’est arrivé d’adhérer à tel ou tel de leurs points de vue, mais toujours après examen et réflexion plus ou moins prolongée. Mais auprès de Gué­non, et de Guénon seul [...], l’adhésion était immédiate, l’examen et la réflexion ultérieurs n’ayant que valeur confirmative dans les « li­mites du mental ». » (pp. 285-288)
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Cette affinité entre le nazisme et un certain Islam messianique — dont témoigne entre autres l’exemplaire du Coran qui ne quittait pas le bureau de Himmler — revêt un caractère (« doctrinal » cette fois) des plus troublants si l’on sait que pour Ibn Arabî (1165-1240), le « maître » du soufisme, « le «chemin» qui conduit du Principe à l’ultime frontière de la création [« le plus bas de l’abîme » (...)] reconduit de cette limite extrême au lieu originel (...) dont les âmes ont la nostalgie. (...) En raison de l’infinitude divine, qui exclut toute répétition, le retour ne peut être une simple inversion du processus d’éloignement : les créatures ne reviennent pas sur leurs propres pas. C’est la courbure de l’espace spirituel où elles se meuvent qui les ramène à leur point de départ. » (Michel Chodkiewicz, le Sceau des saints. Prophétie et sainteté dans la doctrine d’Ibn Arabî, éd. Gallimard, 1986.)

Ce n’est donc qu’après avoir atteint le point le plus bas que la remontée « spirituelle » est possible. Cette théorie ne pouvait que séduire Hitler et il est en tout cas frappant de la mettre en parallèle avec cette profession de foi d’Harold Beckett — maître de Trebitsch-Lincoln qui sera, comme nous le verrons, un autre véritable inspirateur du Führer (cf. Werner Gerson, le Nazisme, société secrète. N.O.E., 1969)

« L’Humanité évolue selon une loi cyclique. Elle décrit une spirale successivement descendante puis ascendante. Pendant la descente, tous les maux, toutes les erreurs, tous les crimes s’accumulent. Quand la descente aura atteint le Très Bas, le Cosmos remontera et nos descendants remonteront (sic) et baigneront dans la Vérité, (...) En accélérant la descente, on contribue à précipiter la remontée qui suivra immanquablement. (...) A notre époque, la seule façon de préparer le Bien futur, c’est de porter à son comble le Mal présent. Règle d’or pour le destin collectif comme pour chaque destin individuel. » N’est-ce pas là, répétons-le, la « clef » métaphysique du penchant d’Hitler pour un certain Islam ?

En tout cas, comme le remarque judicieusement Jean Amsler (Hitler, éd. du Seuil, 1960), les meilleurs passages de Mein Kampf « se prêtent fort bien à une typographie en versets ; passés par le «gueuloir», ils ressemblent curieusement, par leur harmonie sourde et leur rythme contraignant, aux sourates du Coran psalmodiées dans les règles. »

Hitler ne revêt-il pas lui-même certains caractères du Prophète destiné à prêcher une foi nouvelle ? Comme Mahomet, il est la proie, au début de sa « mission », de terribles doutes. Il confie en 1937 à un groupe de propagandistes, qu’après des combats intérieurs difficiles, il s’était enfin libéré des conceptions religieuses de son enfance, « Je me sens maintenant, déclare-t-il, aussi joyeux qu’un poulain folâtrant dans la prairie. » (Il y avait une marge entre ces confessions et ses déclarations publiques.) (VI)
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Guénon dut d’abord rappeler que la civilisation occidentale n’était qu’une des civilisations du monde, qui ne se caractérisait d’ailleurs que par son absence de fondement traditionnel. Et il évoqua même à son sujet le symbolisme de sa situation géographique, relativement à l’Asie : « [...] la situation vraie de l’Occident par rapport à l’Orient n’est au fond que celle d’un rameau détaché du tronc [...] » Et c’est cette image, en effet, qu’appelle le schéma guénonien de l’évolution de l’Occident - excroissance monstrueuse s’éloignant toujours plus de l’Orient immuablement établi dans ses certitudes.

La civilisation moderne était perpétuellement en quête d’un équili­bre qui la fuyait d’autant plus irrémédiablement qu’elle le cherchait dans l’analyse indéfinie du monde physique, ayant abandonné aux seuls philosophes le soin de trouver une impossible synthèse. Cette divergence n’avait d’ailleurs pas été en croissant de façon continue depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. Deux époques, particulière­ ment, marquèrent un temps d’arrêt dans cet éloignement progressif, durant lesquelles l’Occident reçut de nouveau cet apport intellectuel de l’Orient qui l’avait nourri dans le passé. (Les philosophes grecs proclamaient bien haut ce qu’ils devaient à l’Égypte, à la Phénicie, à la Chaldée, à la Perse et même à l’Inde.) Il s’agit de la période alexandrine(1) et du Moyen Age, où la contribution des Arabes fut décisive, soit qu’ils aient permis à l’Occident de retrouver ses pro­pres racines, en lui léguant la philosophie aristotélicienne qui devait vivifier la scolastique, soit qu’ils lui aient fait don de leurs lumières spécifiques, soit encore qu’ils aient servi d’intermédiaire à l’Inde.

C’est avec la Renaissance que la divergence reprit, lorsque se produisit cette rupture irrémédiable due au retour à une pseudo-Antiquité classique, dont seul subsistait en fait l’aspect prométhéen. Il convient d’ailleurs de redire que les Grecs ont presque tout emprunté à l’Orient, au moins dans le domaine intellectuel, bien que le « préjugé classique », c’est-à-dire « le parti pris d’attribuer aux Grecs et aux Romains l’origine de toute civilisation », eût longtemps conforté les Occidentaux dans la rassurante certitude de leur supé­riorité, incapables qu’ils étaient, intellectuellement, de franchir la Méditerranée. Il n’est, pour se convaincre de la réalité de ces emprunts, que de relire Platon, par exemple, qui souligna lui-même tout ce qu’il devait à l’Orient.

(1) Cf. Introduction générale à l’étude des Doctrines hindoues, lre partie, chap. IV : « Ce n’est que chez les néo-platoniciens qu’on verra reparaître des influences orien­tales, et c’est même là qu’on rencontrera pour la première fois chez les Grecs certai­nes idées métaphysiques, comme celle de l’Infini. Jusque-là, en effet, les Grecs n’avaient eu que la notion de l’indéfini, et, trait éminemment caractéristique de leur mentalité, fini et parfait étaient pour eux des termes synonymes ; pour les Orientaux, tout au contraire, c’est l’Infini qui est identique à la Perfection. Telle est la diffé­rence profonde qui existe entre une pensée philosophique, au sens européen du mot, et une pensée métaphysique [...] » (pp. 75-76)
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Hitler, de surcroît, était obsédé par l’idée d’un tournant de l’Histoire, et ce n’est pas par hasard que l’expression suprême de l’Opéra était à ses yeux le final du Crépuscule des Dieux. « Lorsque sur la scène de Bayreuth, le château des Dieux s’effondrait au milieu du tumulte de la musique, il saisissait toujours dans l’obscurité de la loge la main de Winifred [Wagner] assise à côté de lui pour y déposer un baiser ému. » (Joachim Fest, le Führer, t. II, éd. Gallimard, 1973.)

De fait, selon Rauschning, il prophétisait un bouleversement de la planète « que nous autres, non-initiés, ne pouvions comprendre dans son ampleur. Acquérir la « vision magique » lui apparaissait comme le but de l’évolution humaine, (...) Une espèce nouvelle s’annonçait, qui allait refouler l’ancienne humanité. De même que, suivant l’immortelle sagesse des vieux peuples nordiques, le monde devait continuellement se rajeunir par l’écroulement des âges périmés et le crépuscule des dieux, de même que les solstices représentaient, dans les vieilles mythologies, le symbole du rythme vital, non pas en ligne droite et continue, mais en ligne spirale, de même l’humanité progressait par une série de bonds et de retours. (Hermann Rauschning, op. cit.)

S’opposant directement à l’eschatologie judéo-chrétienne, qui postule une « assomption » de l’Histoire, il s’inscrivait ainsi de plein droit dans une perspective antéchristique. Que si l’on préférait accorder désormais au seul marxisme ce statut infamant, au double titre de sa persistance hic et nunc et de son athéisme militant, nous rétorquerions que le nazisme lui aussi, dans ses structures d’action vivantes et agissantes, continue d’étendre son ombre sur le monde — nous l’allons montrer contre les sceptiques — et que pour être antéchristique, une doctrine (ou plutôt, en l’occurrence, un courant mental) se doit précisément de n’être point matérialiste, mais pseudo-spiritualiste. Ce que n’est pas le marxisme (au moins officiellement...), mais ce qu’est le nazisme.

Car comme l’écrivait René Guénon dans le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (éd. Gallimard), les représentants du « Satellite sombre », ou si l’on préfère les serviteurs de l’Antéchrist, « ne peuvent jamais être des mécanistes ni des matérialistes ». En effet, après avoir enfermé l’homme dans une sorte de coquille étanche qui lui procurait une relative impression de sécurité, lui interdisant toute communication avec des domaines supérieurs mais le protégeant d’une certaine façon des influences dissolvantes du psychisme inférieur et de ses courants mentaux, le matérialisme passe le relais au néo-spiritualisme, dont le rôle est de percer par le bas la coquille, permettant ainsi aux puissances de dissolution assimilées symboliquement aux hordes de Gog et de Magog, de pénétrer dans notre monde. Cette seconde phase est d’autant plus dangereuse qu’elle donne à certains l’illusion de s’opposer au matérialisme (voir la croisade antibolchevique d’Hitler) et de réintroduire la spiritualité, alors qu’il s’agit d’une spiritualité à rebours qui ne peut aboutir qu’à une communication avec les états inférieurs de l’être. (I)
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Toujours à la lumière des « mythes primitifs », il est particulièrement intéressant de retrouver ici nos fameux « hommes-singes ». Non pas, bien sûr, les imposteurs démasqués plus haut, mais les authentiques humanoïdes dont on admet désormais qu’ils ont cohabité avec l’Homo Sapiens… Loin d’être des hommes en devenir, certains d’entre eux ne seraient-ils pas des… hommes déchus ?

L’hypothèse par l’involution, de la régression vers l’animalité, a été envisagée par d’incontestables scientifiques comme Marcellin Boule, qui voyait par exemple dans la race de Neandertal une « espèce dégénérée ». Et certains biologistes considèrent en effet ses caractéristiques comme des « tares acromégaliques dégénératives » ayant entraîné sa disparition. Quant au grand géologue Pierre Termier, il écrit ceci, après avoir cité des exemples de régression dans la série animale :

« Entre l’homme et l’animal, il n’y a pas que des différences anatomiques ; il y a une différence autrement essentielle, qui est l’existence chez l’homme, d’une âme raisonnable. Dès lors, si cette âme, au lieu de monter comme elle y est appelée, se met à descendre… jusqu’où n’ira pas la dégénérescence ? Et pourquoi la dégénérescence n’irait-elle pas jusqu’à retentir non seulement sur la physiologie – ce qui est évident et incontesté – mais même sur l’anatomie ? »

N’est-ce pas précisément à de semblables cas de régression que font allusion ces versets du Coran :

II, 65 : « Vous connaissez ceux des vôtres qui ont transgressé le Sabbat ? Nous leur avons dit : ‘’Soyez des singes abjects’’. »

V, 60 : « Dieu a transformé en singes et en porcs ceux qu’il a maudits ; ceux contre lesquels il est courroucé et ceux qui ont adoré les Taghout. »

VII, 166 : « Nous leur avons dit, quand ils se rebellèrent contre nos interdictions : ‘’Soyez d’ignobles singes !’’ »

De même, le Talmud (Sanhedrin, 109a) nous apprend que le tiers des hommes qui bâtissaient la Tour de Babel furent changés en singes. Ce mythe apparemment universel se retrouve en Amérique précolombienne puisque le Popol Vuh évoque une humanité originelle déchue, dont la postérité serait « ces singes qui vivent actuellement dans les forêts ». (pp. 215-216)
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Cette incompréhension propre à certains milieux catholiques est d’ailleurs résumée par le père Henri de Lubac qui, le 31 décembre 1962, écrivait à Noële Maurice-Denis Boulet, après la parution de son étude dans la Pensée Catholique, qu’il y avait chez Guénon « une hostilité réelle à ce qui fait la moëlle de l’Évangile, à l’esprit de Notre-Seigneur Jésus-Christ [...] »

Pourtant, après son mariage, nous l’avons dit, Guénon orienta son activité vers les milieux catholiques, où il rencontra parfois un accueil favorable, encore qu’il se fût heurté dès le début au principal représentant du mouvement néo-thomiste, Jacques Maritain, dont l’hostilité vigilante ne se démentit jamais, et qui alla jusqu’à profiter de sa situation d’ambassadeur de France auprès du Saint-Siège, après la dernière guerre, pour demander sa mise à l’index. Mais sa requête ne trouva aucun écho auprès de Pie XII, dont nous avons quelques raisons de penser que son attitude vis-à-vis de Guénon devait être assez différente de celle du paysan de la Garonne... (pp. 161-162)
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C’est à Paul Chacornac que nous emprunterons le récit de l’« incident de 1908 », qui nous permet d’affirmer que dès le début de cette année, au plus tard, Guénon avait répudié l’occultisme, si tant est qu’il lui eût jamais donné son adhésion : « Lors du Congrès Spiritualiste et Maçonnique de 1908 (nous avions été chargé de toute la partie administrative avec le Voile d’Isis comme organe officiel) qui eut lieu du 7 au 10 juin, dans la grande salle des Sociétés Savan­tes, René Guénon était présent comme secrétaire du bureau. Il se tint sur l’estrade d’honneur, revêtu de son cordon. Ce fut là sa seule participation au Congrès. Il s’en retira, choqué par une phrase, dite par Papus, dans son discours d’ouverture : « Les sociétés futures seront transformées par la certitude de deux vérités fondamentales du spiritualisme : la survivance et la réincarnation. »

Or, personne, en Occident, et surtout pas les occultistes, à quel­ que mouvement qu’ils appartinssent, n’aurait pu démontrer à un néophyte l’erreur métaphysique de la réincarnation, qui était à l’époque, et qui est toujours, dans nombre de cercles néo-spiritualistes, une notion de base, une croyance tout à fait établie, dont l’ori­gine orientale ne saurait d’ailleurs faire de doute pour quiconque. Pour que Guénon affiche une telle position vis-à-vis de ce dogme, il fallait nécessairement qu’il eût été informé de son inexistence en Orient... par de véritables Orientaux, ou que ceux-ci l’aient mis dans le cas de découvrir par lui-même l’absurdité de la théorie réincarnationniste.

Mais si cette croyance ne dépassa effectivement jamais, en Orient, le stade de la superstition populaire - de même qu’en Occident beau­coup de fidèles ne vont pas au-delà du littéralisme le plus étroit, et adorent des images peintes ou des représentations mentales - il convient de reconnaître que certaines formulations, de la part d’Orientaux qualifiés, pourraient suggérer qu’ils adoptent cette hypo­thèse. Il s’agit, en fait, ou bien d’expressions purement symboliques évoquant la transmigration de l’être à travers les états d’existence supra-humains, ou bien d’allusions à ce que les Pythagoriciens dési­gnaient sous le nom de métempsycose, et qui n’a rien de commun avec la réincarnation. Celle-ci est d’ailleurs propre à l’Occident moderne. A ce point que le spiritisme, auquel on l’associe communé­ment, ne l’avait pas même adoptée dans ses débuts, et que des médiums anglo-saxons de la « première génération », tel le célèbre Dunglas Home, la nièrent catégoriquement. En France même, cer­tains spirites réfutèrent la position d’Allan Kardec, qui en fit, quant à lui, un véritable article de foi. C’est d’ailleurs à partir du spiritisme français que ce dogme se propagea au théosophisme et à l’occul­tisme papusien. (pp. 46-47)
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