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Citations de Jean Rousselot (55)


On a beau élever des lombrics, pulvériser du kérozène sur le brasero des étoiles, majorer les allocations familiales des ouvriers de la onzième heure, multiplier les idées-éprouvettes, bourrer de sentiments les prothèses, distribuer des jetons de présence aux bourgeons, le quorum n’est jamais atteint. Aucune décision valable ne saurait donc être prise.
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Il faudrait être encore plus simple,
Si simple que l'on puisse entrer
Dans la simplicité du vent,
Du soleil poussiéreux
Du linge qui pantelle sur la corde sans se plaindre.
Il n'y a pas de désespoir dans le monde,
Ni d'espoir.
Il n'y a que la simplicité du vent,
Du soleil,
Du linge,
De la corde;
Il n'y a que la simplicité de l'eau,
Ses vergetures d'accouchée;
Il n'y a que l'eau,
Le caillou,
La simple nécessité de brûler et de mourir.
Il faudrait pouvoir entrer sans frémir
Dans les choses.
Pourquoi cette révulsion de notre coeur?
Pourquoi cet éternel énervement de nos nervures?
La pensée ne construit rien. Le sentiment nous épuise.
Nous serrons les dents et saignons
Sans accoucher.
Nous pianotons sur les choses
Comme une pluie dont chaque goutte
Aurait peur de se faire du mal.
Nous sommes les petits électrisés du monde.
Nous n'entrons pas.
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D'une forêt



Quand les Sarrazins arrivèrent en vue de Poitiers, ils
avaient eu le temps d'apprendre le castillan, le navar-
rais, les poésies de Francis Jammes, le limozin, le
javanais de la rivière Creuse et le louchébem des
lamas, qu'on appelle aussi cagouilles.

— Attends-my-là, dirent-ils à leurs femmes (la place
où elles campèrent se nomme toujours ainsi) avant
de marcher sus au rempart de la Chrétienté, planté
de tessons de bouteilles dont chacun était un soldat
de Charles Martel.

Beaucoup périrent. Les survivants s'égaillèrent, se
firent (et sont toujours) O.S., balayeurs ou terrassiers.
N'en pouvant plus d'attendre, leurs mujers et leurs
moujingues se changèrent en arbres. De chez mon ami
Fombeure, on entend gémir leurs frondaisons. Forêt
de Moulières, dit la pancarte.
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8

Ombre qui écrit
Comme l’eau son bruit

Sans nul repentir
Ou deleatur

L’illisible texte
De nos faits et gestes

Sur la main courante
D’un poste oublié

Qui sent la braguette
Et l'éternité.
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Je reviens sur mes dires


Telle une algue au gré de la Sorgue
Tel un nuage au gré du vent
Je reviens sur mes dires
D'humble ludion de la souffrance

Mourir est donc tout à fait
Nécessaire
Sinon il faudrait abolir
L'altérité
Dont nous séduisent les offenses
Ou que nous offensons d'amour
Et dissiper le vague fumet d'espoir
Qui circule dans les rues carbonisées

La poésie elle aussi doit disparaître
Ce n'est qu'une vipère déclarée légale
Par celui qu'elle mord.
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Les sons existaient avant les mots.
(F. Chopin, exergue)
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Batellerie des toits sur une mer où glissent
Des voiles de fumée, des oiseaux, des souris. L’arche est en marche sur la terre douce et rude, Malgré nos reniements, nos lâchetés, nos cris.
Je m'abandonne à vous, 6 pilotes du cœur ;
Je n'ai jamais revu les rives en dérive.
Embarqué parmi les moutons humains, j’ai peur De la mer aux fenêtres, de ses rides de givre.
Des crapauds doux et tristes enfermés par la nuit Qui chantent pour les astres, aux herbes élastiques Emmélent leur sommeil et troublent de leurs cris La pureté de ces nuits chaudes et bibliques.
J'ai peur: sur mes malheurs, cette femme pâmée, Morte, la tête morte et les yeux grand ouverts ; Terre, j'ai peur de toi, de ton ventre de mère
Où mes ancêtres poussent parmi les arbres verts.
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A force de raffiner la prosodie, les poètes du XVIIIe siècle en font une langue morte et l'on peut à bon droit parler de "désert poétique français" jusqu'à l'apparition d'André Chénier (1762-1794).
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Jean Rousselot
Miracle…

Miracle d’être en vie
Et d’avoir saigné
D’être un homme sans parents
Pourvu de mots pour le dire

Miracle d’avoir des mains de chair
Et que tout continue
Au niveau du drap rêche et du cheveu perdu :
Mes remords plantés en moi
Comme les feux d’un navire
Et mes muscles qui conspirent
Dans les puits rouges de ma voix

Douceur d’apprendre que ma mort
N’est qu’on oiseau perché sur mes éclats de rire
Qu’elle me doit son grain
Qu’elle est encore ma vie.

(Le Poète restitué, Le Pain blanc éd., 1941)
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La ligne unique…



La ligne unique qu’il suffit
De tracer chaque jour
Pour rester digne du peu de langage
Que l’on est capable d’être
Protègera-t-elle ou non
En ce si tardif aujourd’hui
La bonté l’amour et autres
Passagers clandestins qu’il te faut bien nourrir
Tandis qu’au couteau tu tailles
Le bout de ta route en toi
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À la fin, j’ai le droit…



Extrait 2

Mais non, dis-tu, ce ne sont que mes pleurs.
Je suis l’inachevée, l’inerte, la recluse
Ah, retiens-moi, j’ai peur
De mes sables mouvants, de ma neige confuse.

Ou bien
Entre deux scansions de mon sang dans le tien,
Tu ris d’avoir voulu mourir
Pour immobiliser l’éclair et pour souffrir
Toute une éternité le haut-mal du plaisir.

Et nous ne pouvons plus qu’attendre l’ouragan
Qui mettra hors de nuire
À la neige à la vague à l’enfance rouverte,
La vitesse et le poids la parole et le temps.

Il faut brûler, il faut gémir.
Tu n’es seule que si tu penses,
Si tu te regardes gésir
Et si tu refermes ton ventre.

Sur quels rochers as-tu crispé tes ongles
Pour qu’ils soient rouges à ce point ?
Sur tes épaules, me dis-tu,
Je n’avais qu’elles pour légende :
Dix pétales de sang dans le mitan du lit
Pour te rappeler que je suis.
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Jean Rousselot
Il n’y avait que le silence…


Il n’y avait que le silence
Derrière chaque mot volé
La route expirait dans les pierres
Entre les murs écroulés

Et pourtant le dernier poète
Tendait l’oreille vers la mer
Et cherchait encore à saisir
L’insaisissable oiseau de la parole.
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POUR LA POESIE

(à Roland Nadaus)


La poésie vous paie avec des chèque en bois, mais si généreusement qu'on se sent son obligé.


La poésie est inutile comme l'herbe et l'azur.


Si la poésie me quittait, je n'oserais plus me regarder en face.


La poésie est un langage à la fois irraisonnable, sensible et nourricier.


La poésie est le recours suprême contre la prose de la vie.

...

(p.22)
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Ton cœur est frais comme tes bras,
Ta bouche est fraîche comme l’ombre,
Ton ombre est fraîche comme une eau
Qui s’écoulerait de ton cœur.

Beau corps, violoncelle d’amour,
Les cheveux sont les harpes.
Au ruisseau d'ombre et d'herbes longues
Étincelle le saut des carpes.

Celle que j'aime est un ruisseau
Qui me caresse de sa course.
Celle que j'aime est un berceau
Où je m’endors au bruit des sources.

Celle que j'aime est un rosier
Dont je voudrais cueillir la rose.
Celle que j'aime est un brasier
Qui me purifie toute chose.

Celle que j'aime est un roseau
Qui me courbe sous ses bras frêles.
Celle que j'aime est un oiseau
Sa voix c’est du soleil qui grêle.

Celle que j'aime est une aurore
Qui me sépare de la mort.
Mais la mort qu’elle porte en elle
Est un mystère de lumière.
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La poésie est devenue trop difficile. Il est temps de la débarrasser de ses pièges et de ses fausses trappes qui ont déjà servi, bien inutilement et bien longtemps, à détacher d’elle la plupart des lecteurs moyens dont la foi n’est pas très sûre.
Je pressens un renouvellement, un rafraîchissement de la poésie. Pourquoi ne pas faire-là ce qu’un Ramuz ou un Pourrat ont fait dans la prose. Nous avons pour nous servir un vieux Jonds toujours jeune de complaintes et de chansons populaires.
Je crois que le salut est là, en ÿ mettant de la mesure toutefois. Il y avait dans Apollinaire des accents de la complainte. Il y en a d’admirables dans les poèmes de Morven le Caëlique, qui n’est autre que Max Jacob et qui, sentant le vent, s’est aventuré hardiment sur ces terres fraîches et neuves. Il faudrait donner à la poésie une nouvelle virginité. Aujourd’hui, elle a mal de tête. Avec les surréalistes, c’est devenu une névralgie aiguë et continuelle.
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Au parfum



extrait 2

En vain l'écriture est-elle
Partie la première
Elle est toujours en retard d'une main sur la vie
Et ne sait toujours pas si l'avenir
Appartient au requin
Qu'elle a pendu la tête en bas pour l'exemple
Ou au fameux crucifié
Dont elle n'a si fort étiré les bras
Que pour qu'il puisse mieux s'envoler

L'isospin l'étrangeté le charme
Seul est au parfum
Le quark.
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À la fin, j’ai le droit…



Extrait 1

À la fin j’ai le droit d’être le cavalier,
À la fin j’ai le droit d’être l’amant, le maître.
À la fin j’ai le droit d’oser me reconnaître
Dans ce fracas de chair qui s’est rué vers toi.

Quand j’ai pris comme un nid ton sexe dans ma paume,
J’ai recouvré d’un coup l’usage de la terre.
Tout m’est redevenu propice, fraternel :
Ma mémoire, ma force et ma véracité.

Et quand j’ai ramené l’étoile de ton corps
Dans le chalut de mes veines, j’ai vu
Tous les oiseaux du monde y pendre en gouttelettes
Et tout le frai de l’homme et mille autos grouillantes.
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POUR LES SEIZE ANS D’ANNE-MARIE



Extrait 2

Souviens-t-en, souviens-t-en quand tu iras dans les autres mondes
En week-end
Et que je serai mort depuis longtemps.
Ces étoiles, là-haut, ressemblent aux mitrailles
Qui crevaient les plafonds le jour de ta naissance ;
Retiens-les de pleuvoir sur l’homme des labours et des garages ;
Des usines et des fumées,
Toujours le même, mon enfant,
Dans le chef-d’œuvre si vulnérable de sa peau,
Dans le miracle de sa pensée à chaque instant sauvée des eaux.
Sois tout amour, Marie, toi qui naquis pendant
L’abominable guerre
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Jean Rousselot
Sept petites plaintes



3

Au plus que puis-je ?
Violoner en trébuchant
Jusqu’à l’estuaire du verbe Vivre
Les trois syllabes de ton nom


/revue Sud, n° 17, décembre 1975
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Jean Rousselot
Ensemble


Il y aura une fois
Une ou deux fois
Toutes les fois

Du bonheur pour tous
Rien que du bonheur
Sur toute la terre

Si nous le voulons
Si nous le faisons

Si nous nous y mettons
Tous aujourd’hui
Ensemble.
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