-Merci de m'avoir montré le chemin, dis-je après avoir achevé mon inspection. J'espère ne pas vous avoir trop dérangé. M. Royce sera bientôt là ?
L'homme se mit à rire doucement, referma la porte derrière lui et alla s'asseoir sur le divan voisin du mien, Il me surprit de nouveau en croisant ses pieds chaussés de rangers sur la table basse devant lui.
-Il est déjà là, me répondit-il. Que vouliez-vous le demander, mademoiselle Waynest ?
Oh, putain ! Merde-merde-merde-merde-merde... Seule avec un vampire dans son bureau. Et dire que j'ai maté son cul !
Constatant que j'en restais sans voix, Royce sourit, m'offrant un aperçu saisissant mais superflu d'une paire de canines nacrées et parfaitement pointues. Elles n'étaient pas plus longues que celles d'un humain, puisque pour l'heure il ne les avait pas déployées pour se nourrie, mais leurs pointes acérées n'étaient pas trop évidentes, du moins à mes yeux.
-Surprise, hein..., constata-t-il. Vous n'avez pas à vous inquiéter. Je sais que vous êtes ici pour affaires et non pour le plaisir. Je suppose que vous ne vous attendiez pas à me rencontrer de cette façon.
-C'est pour ça que vous vous débattez ? Vous croyez que j'envisage de vous violer ? De me repaître de vous ? De faire de vous mon esclave ? Grands dieux, mais quelle petite idiote vous faites !
Ce ne fut qu'après leur départ, tandis que je m'efforçais de me relever, que je me rendis compte que j'avais mal au bras et que je saignais.
Je fus prise de panique. Je me cramponnai à deux mains à la chaise la plus proche, luttant pour rester debout alors que je sentais une boule grossir dans ma gorge, m'empêchant d'inspirer suffisamment d'air pour m'emplir les poumons. Du sang. Mon sang. Ni celui de Nick, ni celui de Dillon. Le mien. Dillon m'avait entaillée. Avec ses griffes. Oh, mon Dieu.
Je me dirigeai vers l'évier d'un pas chancelant, la bile me brûlant la gorge. Je tournai le robinet et passai mon bras sous le filet d'eau, frottant mes coupures superficielles qui commençaient malgré tout à me brûler horriblement. Haletante de terreur, je m'emparai du petit flacon de savon antibactérien et en
versai la quasi-intégralité du contenu sur mes plaies, frottant de toutes mes forces, comme si cela pouvait y changer quelque chose.
Oh, mon Dieu.
J'espérais que Chaz n'allait plus tarder. Je m'ennuyais à mourir, et il fallait vraiment que j'aille pisser.
Le fait d’être liée par le sang a un vampire, de m'abandonner a lui, puis de me voir arracher cette intimité dans d'atroces souffrance avait sans doute été l’expérience a la fois physique et émotionnelle la plus douloureuse.
Mais rien de tout cela ne m'avait préparée a me faire renier par mon père.
Le félin tourna lentement la tête et le gratifia d'un de ces regards infiniment méprisants dont seuls les chats sont capables.
...
Ce fut le chat qui me répondit, d'une voix si chargée d'ennui qu'elle m'effraya davantage que l'effarement du jeune mage.
Je levai les yeux au ciel.
-Bien sûr, c'est parfaitement logique. Vos intrigues de vampires sont ridicules, vous savez?
Il éclata de rire et s'appuya contre le dossier du canapé. D'une main, il repoussa de devant ses yeux ses cheveux de jais afin de mieux me voir, posant son autre coude contre le dossier du canapé et son menton sur son poing, une lueur d'amusement dans le regard. Il donnait l'impression de poser pour une session photo. SI je n'avais pas eu une once de bon sens, j'aurais pu croire qu'il tentait de me séduite.
D'ailleurs, je n'avais aucune intention de lui donner de faux espoirs. Même s'il était très beau, il n'en demeurait pas moins un vampire. Vous voyez le genre. Le mec typique : grand, ténébreux et super beau, mais aussi un suceur de sang, une créature maléfique de la nuit. Pas le genre de gars qu'on présente à sa mère.
Pourquoi, donc, demeurais-je aussi terrifiée au contact de Royce, dans ce monde progressiste et tolérant à l'égard de ses pairs? Inutile d'y réfléchir longtemps. Je préférais mes fluides organiques là où ils se trouvaient : à l'intérieur de mon corps.
- Vous n'êtes pas le plus finaud de la bande, hein?
Il me lança un regard mauvais aux reflets rougeoyants.
- La ferme! Max m'a dit que tu étais une fautrice de trouble, pas une garce.
- j'imagine qu'il ne sait pas que je suis new-yorkaise.