Enfin, trois élèves en pleurs se levèrent en reniflant et s'approchèrent de l'avant de la pièce. Il s'agissait bien sûr des filles les mieux habillées, maquillées et coordonnée de toute l'école. Un murmure d'excitation se répandit à travers la foule.
Tout le monde les connaissait.
Mais moi, je savais qu'aucune d'entre elles n'avait jamais pros la peine d'adresser la parole à Kristen ou à moi ne serait-ce qu'une seule fois depuis le collège.
La plus grande, la chef de meute, Shana Williams, prit la parole en premier.
- On voulait juste dire qu'on n'arrive pas à croire qu'une chose aussi horrible ait pu se produire. Perdre une camarade aussi jeune, c'est... une... tragédie.
Elle renifla légèrement et recoiffa sa chevelure blonde parfaite en arrière.
Je levai les yeux au ciel. Ces filles se fichaient royalement de Kristen. Tout ce qu'elles voulaient, c'était attirer les regards.
- L'équipe des pom-pom girls a décidé de dédier cette saison de matchs à la mémoire de Kristen Markell, annonça Aubra Stanton, au centre. (C'était la seule brune du trio). Nous feron de notre mieux pour qu'elle continue de vivre à travers nous.
En entendant ces paroles, je ricannai bruyament. Plusieurs professeurs me regardèrent d'un air compatissant. Ils pensaient sûrement que j'avais du mal à faire mon deuil, ou quelque chose dans le genre.
Puis, ce fut au tour de la petite blonde, Erika machin-truc, de parler.
- C'était vraiment quelqu'un de bien. Je n'arrive pas à croire qu'elle soit partie.
Elle éclata en sanglots délicats, faisant bien attention à ne pas étaler son maquillage immaculé. Les deux autres l'étreignirent.
J'avais envie de vomir.
comment pouvaient-elles avoir l'audace d'agir comme si elles avaient été les meilleures amies du monde alors qu'elles n'étaient même pas capables de se rappeler le nom de famille de Kristen ! N'importe quoi ! Elles se moquaient pas mal de Kristen. Elles ne la connaissaient même pas !
Le bruit de mes pas sur le parquet en bois résonna bruyamment à travers la pièce tandis que je me levais et sortais du gymnase. Je laissai les portes claquer derrière moi sans prendre la peine de jeter un coup d'oeil en arrière.
Je sentis mon corps se réchauffer de nouveau. Je plaquais ma main contre mon coeur. Il battait à tout rompre, comme un papillon emprisonné qui agitait ses ailes pour s'échapper.
- Ferme les yeux, chuchota t'il.
Je suivis ses instructions.
C'est alors que je le sentis: le lit s'enfonça très légérement. Si je n'avais pas fait attention, je ne m'en serai même pas rendu compte. Mon bras et ma jambe gauches me picotèrent pendant une seconde, bientôt imités par ma jambe et mon bras droit.
- Tu sens les battements de ton coeur?
Ses paroles dansaient devant mon visage. Je savais que si j'ouvrais les yeux, je le trouverai sur moi.
Ça aurait du me faire peur. Après tout, j'étais allongée sur un lit, coincée sous le corps d'un garçon. Pourtant...ce n'était pas vraiment le cas. Il ne pouvait pas m'immobiliser. Je me sentais bien avec lui. En sécurité. Mais la situation avait aussi un côté dangereux, excitant et ... enivrant.
Je rentrais à la maison.
Une mélodie semblait s’insinuer dans mon esprit pour me réveiller. De légères bribes de chansons flottaient autour de moi, à peine audibles. J’avais l'impression de rêver.
Couchée dans mon lit, j’ouvris grands les yeux. Je ne savais pas pourquoi, mais j’avais l’impression que le l'ait de ne pas ciller m’aiderait à mieux entendre. Dans l’obscurité silencieuse, ça me paraissait tout simplement logique, au même titre que de retenir ma respiration.
Ça recommence.
Il s’agissait d’une musique désuète qui aurait facilement trouvé sa place dans la scène d’amour d’un film en noir et blanc. Des rayons de lumière argentée filtraient sous ma porte. J’attendis avec trépidation. C’était beau et obsédant à la fois.
Cependant, le son me parvenait à peine.
Il se multiplia en quelques secondes. Elle pleurait comme si son cœur était en train de se briser.
Dans ma hâte de m’approcher d’elle, je cognai le bas de la porte du bout des pieds. Je me figeai aussitôt. Peut-être ne voulait-elle pas que je la surprenne ainsi.
Elle releva la tête. Son regard croisa le mien. Je retins mon souffle en attente de sa réaction. Mais elle se laissa tout simplement tomber par terre, les bras serrés contre sa poitrine, comme la vieille femme esseulée qu’elle était et qui essayait de continuer à vivre avec un morceau de cœur en moins. Quelque part, je comprenais ce qu’elle ressentait. Malgré tout ce que j’avais fait pour l’oublier, l’absence de Caspian avait laissé un vide en moi.
En l'espace de quelques mois, ma vie s'était retrouvée sens dessus dessous. (...) Ça me donnait mal à la tête. J'avais l'impression que je n'arriverais jamais à mettre de l'ordre dans mes idées.
Mais j'avais surtout mal au cœur. Une poigne de fer s'était insinuée dans ma poitrine pour y écraser lentement tout ce qui s'y trouvait. Un jour ou l'autre, il ne resterait plus qu'un trou noir à l'intérieur de moi.
Que reste-t-il de nous lorsque nos amitiés les plus sincères disparaissent soudainement ?
« Je suis ta moitié. Une part de ceci, de ces coups frénétiques, est aussi à toi. Ton cœur bat à l'intérieur du mien. »
« Je te promets mon amour éternel. Si une telle chose existe. Je t'offre tout ce que j'ai. Tout mon être. »
« Un jour ou l'autre, il ne resterait plus qu'un trou noir à l'intérieur de moi. »