Le jeune Abel vit seul avec un père sévère et impulsif. Un jour, c'est la confrontation de trop et les mots plein de rage et de colère transforment son père en un monstre qui le blesse et laisse une marque sur sa poitrine. Abel s'enfuit avec son ami/conscience le renard pour échapper à la violence de son père et tombe sur un drôle de magicien qui ressemble plus à un vieux fermier loufoque qu'un magicien d'ailleurs.
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C'est un beau roman graphique que nous offre là @urbanlinkeditions. C'est une lecture que j'avais envie de découvrir depuis l'an dernier et devant ce vocabulaire choisi largement réaliste et actuel de l'adolescence, j'ai proposé à Gnomeo 8 ans de le lire également. Banco chez lui aussi ! Il me réclame du coup la suite que formidablement la bibliothèque n'a pas (l'intérêt de prendre uniquement le premier tome d'une saga en trois volumes ? Je cherche encore) et qui semble impossible à trouver d'occasion. Mes ennuis dans le triangle avec la libraire et le banquier ne sont pas prêts de se finir je vous le dis. Mais il faut comprendre Gnomeo, on est vraiment sur un livre qui parle aux adolescents (pré adolescent, ça compte) avec des dialogues écrits vraiment comme on parle au quotidien familièrement et un personnage principal dans lequel l'ado peut s'identifier facilement. Aborder les ravages de la violence intrafamiliale et de la colère sous la forme d'une courte saga dans un univers fantastique est un excellent choix. Imager les traces indélébiles que laissent ce genre de violences dans la vie d'un enfant est intelligent. Le côté très réaliste malgré un univers fantastique est aussi une bonne manière de toucher le lectorat, l'imaginaire se mêle très bien à l'image du Middlewest américain.
En revanche, peut-on parler de cette fin ? A-t-on le droit de finir un premier tome sur un cliffhanger pareil ? Je ne crois pas non !
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Midlewest relate l’histoire d'un petit garçon nommé Abel qui vit seul avec son père, depuis que sa mère est partie. Lors d'une dispute, son père se transforme en tornade et tape une fois de plus Abel mais beaucoup plus fortement. Abel décide donc de partir accompagné d’un renard.
Ce livre ne m'a pas particulièrement plu. Il était assez surprenant et étrange par moment, mais il y avait peu d'actions. J'ai trouvé qu'il était facile à comprendre, et que les personnages étaient plutôt atypiques.
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Abel est un jeune garçon vivant avec un père colérique et violent. Un jour, c'est la confrontation de trop et le garçon décide de partir avec son compagnon de route, un renard qui parle.
"Middlewest" est une nouvelle série qui promet une aventure passionnante. Tout captive dans ce premier tome : les dessins, les couleurs, le mélange entre des réalités quotidiennes et du fantastique, les personnages énigmatiques aux remarques piquantes et pertinentes, l'étrange maladie du père et du fils, etc.
Jorge Corona & Skottie Young ont fait du bon travail et m'ont donné envie de les suivre dans les prochains tomes.
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Un comics qui a du caractère. Une enfance gâché par un père violent qui se transforme au fil du livre en un personnage "meurtri" par la disparition de son fils.
De son côté Abel pars pour un long périple reconstruire ce qu'il a perdu. Jorge corona n'a pas hésiter à ajouter de la fantaisie au fil des pages ce qui rend cette ouvrage unique.
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Abel est un jeune garçon d’une quinzaine d’années. Il habite avec son père à Farmington dans le Middlewest. Pour se faire un peu d’argent il distribue les journaux, et avec sa bande de pote il passe des heures à jouer à la console vidéo.
Rien d’exceptionnel vous me direz. Ah mais j’ai oublié de vous dire ceci...
Sa maman est partie il y a plusieurs années sans donner de nouvelles, son animal de compagnie est un renard qui parle, et son père se transforme en tornade destructrice quand il se met en colère, … et il est toujours en colère !
La vie d’Abel n’a finalement rien de banale, et pour échapper ou comprendre le mal qui ronge son père, il va devoir trouver des réponses dans un monde qu'il ne connait pas et rencontrer des personnages qui ne lui veulent pas toujours du bien.
Un périple dans un paysage à mi-chemin entre le réel et le fantastique. Un comics, primé au Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême de 2021, qui s'adresse aux jeunes adolescents mais qui s'apprécie aussi à un âge plus avancé.
Le dessin très tranché, les couleurs très prononcées apportent une ambiance particulièrement forte. Il y a beaucoup de scènes sombres, parce que la vie d'Abel est sombre aussi. Il y a quand même des ponctuations lumineuses lorsqu'Abel retrouve un peu d'espoir.
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Dans une Amérique fantastique où il est normal de croiser un troll sur un pont, Abel est un garçon qui vit seul avec son père depuis le départ de sa mère. L'adolescent, se laissant entraîner par ses amis, commettra un vol dans magasin de la ville et provoquera la colère de son père intransigeant et violent… ce dernier se transformant en une véritable tornade ravageant tout sur son passage !
Abel décidera alors de fuguer, en compagnie d'un renard parlant et au sale caractère, se lançant dans un road trip (ou plutôt une quête initiatique) pour échapper à la colère qui le ronge également. Il rencontrera sur sa route des magiciens et des créatures fantastiques… un voyage surprenant et surtout prenant !
Ce comics en 3 tomes, visant un public adolescent, est une belle réussite. Il nous entraine dans l'univers du Midwest américain teinté de magie tout en construisant son récit sur des thématiques fortes comme la relation père/fils, les violences familiales ou encore la colère.
Primé à Angoulême, Middlewest mêle brillamment aventure et émotion.
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De jolis dessins, et une histoire qui se met en place mais qui ne m'a pas convaincue plus que ça. Pour le moment c'est moyennement percutant, l'histoire reste assez basique et manichéenne. C'est un voyage initiatique qui n'innove pas vraiment le genre. Des personnages assez plats, une intrigue pas des plus passionnantes pour le moment. C'est pas mauvais, mais pas excellent non plus.
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Après une confrontation violente avec son père, Abel se retrouve avec une marque étrange et indélébile sur son torse… Accompagné de son ami renard, il s’enfuit au-delà de Middlewest à la recherche d’une solution pour guérir son mal. Son chemin croise celui d’un groupe de forains dirigé par la mystérieuse Magdalena, pourra-t-elle l’aider ?
Une série en 3 tomes (sortie en juillet pour le tome 3) qui nous plonge dans un univers magique singulier. Une belle identité graphique !
À lire dès 10 ans
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Jusqu'où peut nous emmener la colère ? Cette BD jeunesse, aux très belles illustrations, nous embarque dans un monde imaginaire où un jeune garçon fuit son père. Et on le suit, comme ce renard qui parle, dans sa quête vers la paix intérieure. Une série en 3 tomes pour les plus de 12 ans.
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Dans un futur proche, Nash Huang est une jeune femme moderne et hyper-connectée. Mais tout s'effondre lorsqu'elle est victime de la divulgation d'une sex tape filmée à son insu. Pour elle, la descente aux enfers commence. Ce sont les insultes sur les réseaux sociaux, sa vie privée qui s'effondre, sa vie professionnelle détruite, la sex tape la mettant en scène avec son boss. Puis l'impression qu'on la surveille. La paranoïa... les hallucinations...
Sur la papier, N°1 with a bullet possède de très bons arguments. Ce thriller technologique s'inscrit dans une logique à la "Black Mirror, l'excellent série anthologique de Charlie Brooker. Il traite de manière assez juste le problème du harcèlement et du slut-shamming dont fait l'objet Nash. Mais sa narration est bien trop hachée, ce qui rend la lecture parfois pénible. La volonté de courir trop lièvres à la fois finit par laisser certaines questions sans réponses et se conclure d'une manière trop abrupte.
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Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Il regroupe les 6 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2017/2018, écrits par Jacob Semahn, dessinés et encrés par Jorge Corona, et mis en couleurs par Jen Hickman. Le tome se termine avec 5 articles relatifs au harcèlement en ligne, rédigés par Tini Howard, Sara Charles, Jayinee Basu, Alexis Liistro, Leah Smith.
L'actrice Vanessa Green rentre chez elle, après une mauvaise journée où des reporters lui ont posé des questions insistantes sur ses déclarations en ligne sur les réseaux sociaux. Elle est dans sa splendide demeure, en train de téléphoner à son avocat. Elle raccroche, voit qu'on parle d'elle en mal à la télé, entend du bruit. Elle pense que c'est peut-être son fils qui est de retour, mais non parce qu'il a laissé un message sur son téléphone et qu'il est chez des copains pour y passer la nuit. Il y a un intrus chez elle. Elle appelle la police. L'intrus se présente comme étant Bryan, son fan numéro Un. Il porte un pistolet à sa tempe et se fait sauter la cervelle sous ses yeux. Dans une émission de téléréalité, il y a du sang sur les murs. Il s'agit d'une enquête menée par une animatrice, avec un point de vue subjectif donné par ses lentilles de contact qui font également office de caméra. Elle met les pieds dans une mare de sang. Elle trouve le cadavre de Jad Davies (son employeur dans la vraie vie, le producteur de l'émission). Le direct se termine et elle peut enlever ses lentilles caméra. Davies est en train de jouer au baseball avec un employé dans la cour. Voyant passer Nash Huang, il lui demande de déposer le livre d'histoire de son fils chez Cynthia Davies, son ex-femme. Nash ne le remercie pas du cadeau car Cynthia la terrifie. Effectivement l'accueil est glacial, mais de courte durée.
Une fois acquittée de sa tâche, Nash Huang rentre chez elle, où l'attend sa compagne Violet Reynolds. Nash va se servir dans le frigo pour un plat froid, puis elles s'installent sur le canapé pour regarder Les dents de la mer. En fait, Nash est surtout sur son téléphone pour entretenir sa visibilité sur les réseaux sociaux, et s'assurer qu'elle jouit toujours d'une popularité satisfaisante. Une fois la nuit tombée, elles passent au lit et font l'amour. Le lendemain, Nash Huang reprend sa vie d'assistante stagiaire pour Jad Davies : acheter un paquet de donuts pour le bureau, aller chercher une perruque chez le perruquier qui n'a pas commandé la bonne teinte, passer au pressing pour récupérer les costumes. Le soir elle peut enfin se détendre en allant prendre un verre avec deux amis Sarah et Rigo, dans une terrasse de bar sur un toit. La conversation finit par dévier sur ce qui est arrivé à Vanessa Green, à son tweet raciste qui n'est en fait qu'une blague pas terrible mais qui s'est retrouvée sur les réseaux sociaux. Alors que la conversation s'échauffe, un homme approche et déclare à Nash qu'il est désolé, qu'il lui demande pardon. Il recule en bafouillant des propos inaudibles et finit par basculer par-dessus le muret et tomber dans le vide.
Le thème principal est vite annoncé par les auteurs : le harcèlement sur les réseaux sociaux, avec des répercussions dans la vie réelle. Cela commence avec le fan qui s'introduit chez une actrice, ça continue avec celui qui tombe à la renverse sous les yeux de Nash Huang. Ça culmine avec la mise en ligne d'une vidéo où Nash est filmée en plan subjectif par son partenaire lors d'un rapport sexuel. S'il éprouve encore un doute, arrivé à la fin, le lecteur se plonge dans le témoignage de 5 jeunes femmes sur des formes de harcèlements ordinaires, bien réels, et réellement éprouvant. Pour autant, le récit ne prend pas la forme d'une ode aux réseaux sociaux, la principale protagoniste ne montrant pas de signe d'addiction. Elle est plutôt en bute aux réactions négatives, aux commentaires dépourvus de compassion ou d'empathie, aux remarques crues et sans filtre favorisées par l'anonymat des réseaux sociaux et leur impunité. Le lecteur peut donc aborder ce récit avec ce regard et relever l'omniprésence du téléphone portable permettant d'être connecté partout, les tweets, les selfies, les textos. Pour autant, la narration ne se complaît pas dans la description d'une appli ou d'une autre (ce qui lui évitera d'être obsolète dans cinq ans) et ne montre pas des gens qui ne font que ça de leur journée. C'est juste une réalité de la vie quotidienne qui est montrée de temps à autre, sans caractère obsessionnel ou compulsif.
L'artiste réalise des pages dans un registre descriptif et réaliste, avec une exagération des expressions de visage, et des morphologies un peu appuyées, pas caricaturales, mais pas naturalistes. De ce fait, le lecteur identifie chaque personnage du premier coup d'œil même s'il ne l'a vu qu'une fois auparavant, même s'il n'a pas retenu son nom ou son prénom. Nash Huang est éminemment sympathique : de petite taille, avec une bouille un peu ronde, un postérieur charnu, des émotions franches et visibles, et de l'énergie à revendre. Sa compagne est tout de suite reconnaissable à sa coiffure et à ses grosses lunettes rondes, d'une plus grande taille et plus élancée. Dans la séquence introductive, le lecteur note immédiatement que Vanessa Green sait se mettre en valeur avec une tenue simple et chic et un port altier. Le fan d'Huang fait peine à voir, caché derrière ses lunettes rondes, avec une casquette lui masquant une bonne partie du visage, et un vêtement de sport informe et bon marché. Jad Davies possède une classe innée qui peut faire penser à Stephen Colbert version quadragénaire. L'inspecteur Grover n'évolue à l'évidence pas dans le même monde que les gens du showbiz, avec une tenue vestimentaire pragmatique et une posture efficace plutôt qu'esthétique et recherchée. L'expressivité des personnages (visage et posture) les rend très porche du lecteur qui ressent leur état d'esprit à chaque case.
Jorge Corona s'investit fortement dans la représentation des différents environnements. Cela commence par la somptueuse villa de l'actrice, avec des détails sur l'aménagement intérieur et sur la décoration. Ça continue avec le sympathique pas de porte de la villa de Cynthia Davies, son carrelage et sa porte en bois massif. Par la suite, le lecteur observe le bazar dans le salon de Nash & Violet, les sofas confortables du bar en toiture, l'aménagement impersonnel des bureaux de la société de production de Jad Davies, le patio d'un bar, un musée dédié aux représentations de la mort et à sa mise en scène, etc. Le dessinateur sait aussi donner un élan dynamique régulièrement dans des scènes comme Nash en train de tituber après avoir découvert un cadavre, Nash s'écroulant dans un sofa, ou s'en prenant à des journalistes de la presse à scandale, le massacre d'une installation dans le musée, une voiture effectuant une sortie de route sur une corniche, etc. La mise en couleurs est de type naturaliste, soulignant discrètement le contraste entre des éléments visuels contigus, installant tout aussi discrètement une ambiance dans certaines scènes, avec une teinte dominante déclinée en nuances. La narration visuelle s'avère donc aussi vivante qu'agréable.
Finalement, Jacob Semahn raconte avant tout une histoire plutôt que de se contenter d'un pamphlet sur les méfaits des réseaux sociaux. Il sait insuffler de la vie à ses personnages : le lecteur es tout de suite séduit par le caractère de Nash Huang, son énergie, son entrain. Il est navré pour elle que son entourage réagisse aussi mal à la mise en ligne non consentie de ses ébats (qui eux étaient consentis). Le scénariste a l'élégance de ne pas trop insister sur le fait qu'elle craque sous la pression des critiques, alors qu'elle la relativisait tant que ça ne lui était pas arrivé à elle. Le niveau d'anticipation reste très faible : uniquement ces caméras-lentilles. L'auteur sait mettre en œuvre les conventions du polar et jouer avec : les deux fans très inquiétants qui se suicident, les inscriptions laissés à la peinture sur les murs des appartements (des citations de la Bible), les amis et les employeurs qui font tout pour couper les ponts avec Nash de peur d'être entraînés à leur tour dans sa disgrâce, l'enquête qui piétine faute de piste et du fait d'entretiens oraux peu révélateurs, les personnages qui continuent d'essayer de vivre normalement tout en recherchant eux-mêmes des indices. Sans oublier le tueur mystérieux qui semble capable d'apparaître et de disparaître au moment opportun, dans l'intimité de l'appartement de sa victime.
Les auteurs racontent une vraie enquête pour retrouver un harceleur fort inquiétant qui a mis en ligne une vidéo d'ébat sexuel et qui semble également prêt à faire souffrir celle à qui il voue un culte. La narration visuelle est consistante, détaillée, et met en scène des personnages riches et vraisemblables, à commencer par Nash Huang irrésistible dans son malheur comme dans ses moments plus glorieux. Alors qu'il s'attend un peu à un réquisitoire sur les dangers du harcèlement en ligne, le lecteur plonge plutôt dans un polar bien équilibré : une enquête qui permet de découvrir l'environnement social dans lequel évolue l'héroïne, ainsi que les conséquences qui découlent du fait d'avoir une image publique soumise à toutes les attaques les plus mesquines et minables possibles, et parfois dangereuses dans la vraie vie. Finalement les auteurs auraient pu se montrer plus analytiques dans la mise en œuvre des mécanismes de harcèlement.
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Les premières pages de ce comics m'ont laissées un peu perplexe et dubitative : je me sentais complètement perdue, j'avais l'impression de ne rien comprendre à l'histoire. Mais cette sensation s'est dissipée très vite et je me suis laissez absorbée par cet univers à la Black mirror. Abordant des sujets de société, comme le harcèlement en ligne, le revenge porn ou le slut shaming, ce comics donne également des pistes pour se sortir de ses situations. La fin de la BD est constituée d'interviews de femmes qui ont vécu des situations de harcèlement à cause de leur présence en ligne. Cela fait prendre conscience que ces horreurs ne relèvent pas seulement du domaine de la fiction. Les auteurs donnent aussi une 'méthodologie' pour se prévenir du harcèlement en ligne, et se sortir de ces situations compliquées. À la fois divertissante, et prévenante, cette bd est à découvrir !
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Perte de confiance
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Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre, qui n'appelle pas de suite. Il regroupe les cinq épisodes de la minisérie, initialement parus en 2021, écrits par Skottie Young, dessinés et encrés par Jorge Corona, avec une mise en couleurs de Jean-François Beaulieu.
Dans une petite ville de campagne aux États-Unis, Rowena Meadows se tient devant une demeure de caractère, avec un étage et des combles. Elle indique à l'agente immobilière derrière elle que ça correspond exactement à ce qu'elle recherche. Étrangement l'autre essaye de l'en dissuader en lui indiquant que de nombreux propriétaires se sont succédé à un rythme rapide et que la maison a la réputation d'être hantée. Ro s'y installe et se sert un verre de vin rouge pour fêter ça. En plaisantant, elle dit à haute voix que le fantôme, s'il est réel, pourrait l'aider à déballer ses affaires. Elle se rend au salon, où elle sort un vinyle de la collection et le pose sur la platine. Elle écoute la musique, tout en sirotant son verre de vin, et en regardant la toile vierge sur son chevalet, posée devant une grande fenêtre par laquelle entre la chaude lumière du soleil. Elle va pour commencer à dessiner, mais sans parvenir à poser la pointe de son crayon sur la toile. Elle le repose, se ressert un verre de vin, et contemple fixement le blanc de la toile, sans plus prêter d'attention à la musique. La nuit tombe, et la toile reste immaculée. Le lendemain, elle continue à parler à haute voix comme un jeu, en disant qu'il pourrait au moins lancer le disque, et lui servir un verre de vin. En tout état de cause, il devrait au minimum lui servir de source d'inspiration.
Ro Meadows reproduit ce rituel chaque jour, et au bout de quelques semaines, elle n'est parvenue à rien : pas un seul trait sur la toile. Le fantôme n'a donné aucun signe de vie. Elle va se coucher après encore une journée infructueuse. Le lendemain matin, elle descend, et le disque est train de jouer alors qu'elle se sert un verre dans la cuisine. Elle se rend dans le salon, et l'aiguille de la platine parcourt effectivement le sillon. Elle a du mal à croire qu'elle ait assez bu la veille pour ne pas se souvenir d'avoir laissé le disque tourner. La sonnerie de son portable la fait sursauter : il s'agit de son agent Attison. Il lui dit bonjour et lui demande s'il la dérange à un moment inopportun où elle serait en train de s'occuper d'elle. Après un bref échange de politesses, il lui demande où elle en est. Elle répond que ça avance bien. Il ne la croit pas un instant et il lui rappelle qu'il faut qu'elle fournisse de nouvelles œuvres pour sa prochaine exposition, car les fonds commencent à manquer. Une fois qu'ils ont raccroché, Ro se dit qu'il est temps qu'elle s'y mette pour de vrai, qu'elle l'a déjà fait des millions de fois : dessiner, bouger sa main… Elle prend un crayon et se lance. Au bout de quelques temps, elle s'arrête et prend du recul : c'est nul et elle balance son verre de vin sur la toile. Puis elle balance le chevalet et son tabouret. Elle se dit qu'il faudrait peut-être qu'elle se retrouve à devoir travailler comme serveuse pour à nouveau être motivée. Elle formule sa réflexion à haute voix : doit-elle redevenir une barista ? Une voix désincarnée lui répond que non, elle ne devrait pas.
Ces deux créateurs avaient précédemment collaboré ensemble pour la série Middlewest (2018-2020), en 18 épisodes, plutôt à destination de jeunes lecteurs. La couverture annonce une maison hantée et quelque chose tapie dans les ténèbres. Le dessin ne permet pas de se faire une idée du public visé. Une fois la lecture entamée, les choix visuels situent le récit à la croisée d'une sensibilité adolescente, d'un regard un peu plus adulte. La silhouette de Ro Meadows présente des caractéristiques un peu exagérées : finesse des bras, finesse du cou, grosses lunettes qui lui donnent des yeux un peu plus gros que la normale, pieds très petits et effilés, salopette très large. Le lecteur peut déceler comme une influence manga, bien digérée, et entièrement assimilée, à un degré devenu totalement naturel et organique. L'histoire met en scène très peu de personnages : l'agente immobilière le temps de deux pages, Attison dans moins d'une dizaine de pages, le fantôme mais d'une manière particulière, et quelques figurants le temps d'une page ou deux. Il observe également le langage corporel et les expressions de visage : il ressent l'état d'esprit de Ro dans chaque scène, ses variations d'humeur, y compris dans les nuances. Sa frustration à ne pas réussir à apposer un simple trait sur la toile, sa déprime à l'idée de ne pas réussir à créer, sa colère contre elle-même quand elle casse tout, son angoisse quand elle comprend que le fantôme se déplace à sa guise dans toutes les pièces de la demeure et à tout moment ne lui laissant potentiellement aucune intimité, le retour de son sourire quand elle parvient enfin à avancer dans une toile, etc.
La narration visuelle crée ainsi un bon niveau d'empathie avec la peintre, sans effet de voyeurisme. Le lecteur considère alors une autre composante visuelle : l'environnement dans lequel elle évolue. Il découvre une vue générale de la façade extérieure principale de la demeure dans une dessin en double page, et dans les pages bonus se trouvent les plans par étage, ainsi qu'une modélisation 3D. Les auteurs ne font pas étalage de cette conception détaillée du bâtiment, mais elle se trouve en filigrane du récit, apportant une réelle consistance grâce à la cohérence des plans de prise de vue, en référence à ces plans, par opposition à des vues au petit bonheur la chance. Une fois Ro à l'intérieur, les cases montrent l'aménagement assez générique des pièces, les meubles sans beaucoup de personnalité, et la grande baie vitrée en arrondi, dans la pièce où elle peint.
La majeure partie du récit se déroule à l'intérieur de la maison. De temps à autre, les auteurs insèrent un plan à l'extérieur ce qui fournit une respiration avec des décors également bien décrits : dehors sous la pluie sur le trottoir avec la demeure en arrière-plan, la galerie où les œuvres de Ro sont exposées, un petit coin de Central Park d'où Attison téléphone à Ro. Les plans de prise de vue sont conçus spécifiquement pour chaque scène, avec des variations de cadrage, certains s'arrêtant sur un détail comme les pinceaux de Ro dans leur pot, ou intégrant un élément conceptuel comme les volutes pour figurer la musique qui circule dans la pièce. Les détails enrichissent la narration, le lecteur se rendant compte qu'il prend le temps de les observer, ce qui donne un rythme de lecture plus posé. Il apprécie l'élégance des volutes pour la musique et comment elles s'intègrent au fantôme. Il se demande pour quelle raison Ro ne porte plus ses lunettes à partir de la deuxième moitié de l'épisode 4. Le coloriste réalise un travail très agréable à l'œil, complètement intégré aux traits encrés, augmentant la distinction entre les différents éléments dessinés, développant l'ambiance lumineuse, avec des nuances sophistiquées et discrètes, participant significativement à la narration visuelle, bien au-delà d'une colorisation des cases.
En entamant cette histoire, le lecteur sait que le scénariste ne dispose pas de beaucoup d'options : soit ce fantôme existe comme esprit surnaturel, soit c'est une fiction dans l'esprit du personnage principal, ou un peu de des deux. Il s'agit d'un récit de genre, avec des conventions assez contraignantes, et un nombre restreint de degrés de liberté. Les auteurs parviennent à faire exister Ro dès les premières pages, et le lecteur ressent une réelle empathie pour elle et sa situation. Il constate qu'ils ne tardent pas à établir un contact entre elle et le fantôme, ce dernier étant capable d'interagir avec le monde physique de manière limitée. L'histoire acquiert alors une dimension ludique : le lecteur essaye d'anticiper dans quelle direction va se développer la relation entre Ro Meadows et son fantôme. Il relève également les indices qui lui permettraient d'en savoir plus sur la nature de ce fantôme. L'histoire ne se transforme pas en un récit d'action et le syndrome de la page blanche reste au cœur du récit. Il est à la fois possible de le lire au premier degré avec un vrai fantôme et une relation d'amour abusif. Il est également possible de le lire au second degré et de voir en cet esprit surnaturel, une métaphore claire de ce que traverse Ro.
Pas facile de réaliser une histoire de fantôme et assez prenante. Skottie Young, Jorge Corona et Jean-François Beaulieu installent une peintre qui a l'air assez jeune, peut-être pas encore la trentaine dans une maison prétendument hantée, un point de départ aussi classique que convenu. Le lecteur relève tout de suite la qualité de la narration visuelle qui lui permet de se projeter dans chaque pièce de la maison, et il constate dans les pages de fin que cette demeure a été conçue avec soin. Il se sent tout de suite proche du personnage principal, voyant ses états d'esprit, partageant son découragement à l'idée de ne plus pouvoir réaliser une toile qui ait du sens pour elle, ne plus avoir des hoses en elle qui méritent d'être exprimées. Il n'est pas très surpris par la tournure que prend l'intrigue, tout en constatant qu'elle ne devient pas générique pour autant grâce à l'épaisseur acquise par le personnage de Ro. Il se retrouve surpris à deux ou trois reprises par un événement ou un acte qu'il n'avait pas prévu, sortant des rails de ce type de récit de genre, et totalement cohérents avec le reste du récit. Une bonne histoire d'horreur, à la fois avec un monstre, à la fois psychologique.
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