Laetitia Romano

Je n'ose pas lui dire certaines choses, je ne veux pas qu'elle croit que je suis en état de faiblesse devant elle et mes sentiments. Je ne dirai pas les trois mots qu'elles attendent toutes. Ça ne veut plus rien dire pour moi. On dit « je t'aime » à la première personne qui vous transperce le cœur et elle vous quitte puis ensuite on le redit à la personne qui prend la place de la première... Finalement ça veut dire quoi ? Le « je t'aime » est devenu banal et je ne pense pas que ça me fasse ressentir quoique ce soit de l'entendre dire ou de le dire moi.
Alors je me refuse de le faire et j'essaie de le montrer autrement. Si Myla me connaissait mieux, elle saurait que je fais des efforts et des énormes. La discussion qu'on a eue, elle n'aurait jamais fini comme ça, trois mois auparavant. Mais là, j'ai essayé de trouver les moyens de la rassurer et de l'écouter.

Tous les moments que je passe avec lui sont merveilleux. Il est tellement doux et respectueux que je ne peux pas lui résister. Ce que j'ai vécu avant lui n'avait aucune saveur. Chad m'envoyait des sms pour me demander de me préparer quand il voulait faire l'amour. Je n'avais pas vraiment le choix. Même si je n'avais pas envie, il fallait le faire car il l'avait décidé. Mon plaisir, mon bien-être, lui importaient peu. Il voulait mon corps, il le prenait et ensuite il s'endormait sans rien me dire, sans m'embrasser.

Ce que l'on s'apprête à vivre tous les deux est nouveau aussi pour moi car elle est douce et tellement fragile que j'ai envie de faire très attention au moindre de mes gestes. Elle me rend mon baiser. Je baisse son gilet de chaque côté de ses épaules. Il tombe au sol et laisse place à un débardeur que je m'active à enlever aussi. Son soutien-gorge noir à dentelle apparaît et elle est magnifique. Je détache lentement l'élastique qui maintient ses cheveux en petit chignon pour les voir se libérer sur ses épaules.

Il me fait un signe de tête. C'est ce que j'aime bien chez mon père, il sait rester discret et n'essaie pas de s'incruster dans ma vie. Je sais qu'il n'aimait pas Tanya mais il ne l'a jamais fait ressentir et il l'invitait même à manger certaines fois. J'aime bien notre vie à tous les deux et ça me fait un peu peur de penser qu'un jour il faudra que je me trouve un appart et que je doive le laisser seul.

Mon cœur bat à cent à l'heure. Jackson a une façon de me regarder qui me met sens dessus dessous. Il est intense. C'est le mot. Intense. Il dépose un baiser au coin de mes lèvres et je ne sais plus quoi penser. Les filles m'ont poussée à venir et je n'étais pas très chaude pour le faire mais elles ont su trouver les mots dans la cuisine tout à l’heure.

Il ne mérite pas que je pleure pour lui. Il s'éloigne en accélérant comme un fou. Je reste, un instant, assise au milieu du parking, abasourdie par ce qu'il vient de se passer. Je me reprends en me levant et en marchant jusqu'à l'entrée. Mon cœur me fait mal, on dirait qu'on vient de le faire exploser en mille morceaux.
J'entre dans l'appartement. Les filles ne sont pas là et c'est tant mieux. Je n'ai ni l'envie de parler ni d'écouter. Sous la douche, je me laisse aller à mon désarroi. Assise dans le bac, l'eau chaude me coulant sur la peau, je pleure toutes les larmes de mon corps. Après avoir vécu le calvaire avec Chad, je pensais que Jackson était la bonne personne pour moi. Et je me remémore encore et encore le week-end passé et je n'arrive pas à mettre le doigt sur ce qui a pu déclencher son attitude. Il était tellement souriant et bien chez mes parents que c'est encore plus dur pour moi d'accepter cette rupture.

Je pose ma bouche sur son oreille et lui explique mon fantasme. Je vois ses joues rougir et sa main se poser sur son ventre. C'est exactement cet effet-là que je voulais lui faire. Elle reste silencieuse et me regarde. Sa langue passe sur ses lèvres et bordel, qu'est-ce qu'elle est sexy. Ma bouche ne peut s'empêcher de se poser sur sa bouche. Ma langue invite la sienne. Ma main glisse sur la peau de son bas ventre. Elle se contracte. — Jackson, on est dans un parc, me dit-elle semblant reprendre ses esprits. — Je sais… dis-je en l'embrassant encore. Elle gémit quand elle sent mes doigts s'aventurer sur sa culotte. Elle croise les jambes et me ferme tout accès. — Arrête avant qu'on ne se maîtrise plus. Je hausse un sourcil. — C'est toi qui perds le contrôle, moi je me maitrise. — Ah oui, tu te maitrises ? Elle s'assoit à califourchon sur moi. Je souris de la voir si audacieuse.

Le conte de fées a duré le temps des vacances jusqu’à sa demande en mariage et ensuite, c’est comme si le disque s’était subitement rayé. Alvaro n’est pratiquement jamais disponible et ses sautes d’humeur sont parfois désarmantes.

J’avoue que certaines fois ses colères m’ont effrayée. Il peut être doux et attentionné mais quelque chose de dangereux émane de lui et j’évite de le mettre en colère pour éviter de faire face à cet autre Alvaro.

 

Bien qu’il ait usé de tous ses charmes cette nuit, je n’ai pas fermé l’œil. Une boule au ventre déterminée à me saper le moral s’est fichée dans mon estomac à m’en rendre presque malade. Ma future belle-mère arrive aujourd’hui ainsi que mon futur beau-frère et je me sens comme si j’attendais une sentence pour un crime que je n’ai pas commis.

Tu ne la mérites pas... Non ça c'est certain. Toi tu es bon que pour être avec des filles comme Tanya, qui ne posent pas de questions, qui baisent quand tu en as envie et qui ne te demandent rien sur tes états d'âmes. Qui n'en ont rien à foutre de savoir si tu préfères la glace au chocolat ou à la vanille. Qui ne savent même pas que tu vas deux fois par semaine à la bibliothèque pour combler tes lacunes d'inculte et qui ne connaissent même pas le prénom de ton père.
Ouais tu es fait pour ça Jax, tu ne mérites rien d'autre. Tu dois être insignifiant pour la fille avec qui tu es. Et si tu te retapais Tanya, tiens... Quelle bonne idée ! Elle t'a humilié comme tu as humilié Myla et pourtant elle veut te reprendre ! Vas-y fonce !
Putain foutue conscience, ferme-la !

J'ai toujours aimé les belles filles et ça me donnait un certain pouvoir d'être avec elle. Aujourd'hui, je me rends compte que Myla correspond plus au profil de la femme idéale que je me fais dans ma tête. Elle ne ressemble à personne d'autre.
Elle est elle.
Et j'adore ça...