Les nappes de brouillard enserraient les immeubles de leurs bras blanchâtres. La lumière du soleil ne parvenait jamais jusqu’aux fondations de ces tours de béton qui masquaient la couleur du ciel. C’était ainsi depuis plusieurs générations. Les habitants étaient enfermés dans Mornia, une ville immense entourée d’un large mur infranchissable, haut de six cents mètres. Il était formellement interdit de le franchir, sous peine de mort. Pour dissuader les téméraires, on convainquait les habitants, dès la petite enfance, que mille dangers couvaient au-dehors. De nombreuses légendes contaient l’existence de monstres sanguinaires et terrifiants.
Yan savait tout cela mais il ne s’en préoccupait guère. Jeune collégien de 15 ans, il rêvait plutôt à la vie des habitants d’en haut. Car les choses s’organisaient ainsi : les pauvres vivaient dans le smog des bas-fonds, un brouillard permanent, et les plus riches résidaient dans le confort luxueux des lointaines hauteurs, sous un ciel ensoleillé.
Il ruminait de sombres idées : le bonheur a emporté la reine. Ils étaient trop heureux.
Elio ne quitte plus son père, apprenant de lui comment influencer la population grâce à la publicité et à la télévision.
Arthur lâcha son sac et s’affala dans les fourrés, mais aussitôt poussa un cri. Il était tombé sur une touffe d’orties.
— Eh ! Mais ça pique, ces trucs-là ! Faut se méfier, c’est plein de dangers, ici.
— Qu’est-ce que t’es froussard ! s’exclama Sonia.
— Ouais ben, tu ne viens pas de te faire piquer par une végétation suspecte. Regarde ! Je suis couvert de cloques, et ça gratte ! J’espère que ce n’est pas mortel !
— Bah ! Si c’était le cas, tu serais certainement déjà mort ! Et on t’entend trop pour un mourant.