Je ne croyais pas aux larmes. Elles ne servaient à rien, sinon à rincer les yeux, et le collyre remplissait très bien cette fonction.
Les mensonges sont ce qu’il y a de plus facile à détecter dans la voix des humains.
Ces larmes mêlées de mascara étaient si indignes d'elle qu'elle pouvait à peine y croire. Arrachant une demi-douzaine de mouchoirs en papier du distributeur, elle essuya rageusement ses joues. Puis elle ouvrit le robinet d'eau froide et s'aspergea copieusement le visage.
Relevant la tête, elle s'immobilisa, les yeux fixés sur son reflet dans le miroir.
- Est-ce que les vampires sont tels que le disent les légendes ? demanda enfin Lucy.
- Tout dépend des sujets.
- Est-ce que vous craignez les croix et l'ail ?
- Ni l'un ni l'autre. Heureusement pour moi, d'ailleurs, car j'aime beaucoup les églises et la cuisine italienne.
Les fantômes n’existaient pas. Pas plus que les liens invisibles à travers des organes, quoi qu’en dise un certain psychiatre de sa connaissance. La peau et les os ne contenaient aucune pulsion maléfique.
Son regard trahissait une souffrance si intense que Brigit ne put réprimer un frisson. Jamais elle n'avait vu Rhiannon si vulnérable, si exposée. A ses yeux, sa tante avait toujours constitué un modèle de force et de volonté dont elle s'était inspirée.
Mais les événements de ces derniers jours les avaient tous ébranlés bien plus qu'ils ne l'auraient cru possible.
- Je sais que vous pouvez m'entendre, mes amis, ma famille..., s'écria Rhiannon.
Sa voix se brisa. Aussitôt, Roland s'avança derrière elle et posa ses mains sur ses épaules, lui offrant un réconfort muet. Laissant glisser ses paumes le long de ses bras, il étendit sur elle la protection de la lourde cape dont il ne se séparait jamais.
Ainsi enlacés, les bras dressées vers le ciel, ils formaient un tableau aussi saisissant que poignant.
Quand vous crachez votre venin sur les autres, vous ne faites que vous empoisonner vous-même.
- Jusqu'à présent, tout ce que je connaissais au sujet des vampires, c'était le livre de Bram Stocker, répondit-elle.
- Il existe vraiment, vous savez.
- Bram Stocker? Bien sûr...
- Je voulais parler de Dracula.
- Qu'est-ce qui pourrait être plus important que la justice? objecta James.
- L'amour, répondit Damien sans hésiter. Sans amour, la juste n'est qu'un mot, un concept vide de sens. J'ai vécu plus longtemps que n'importe qui sur cette planète en dehors d'Utanapishtim. Et, si j'ai appris une chose, c'est que l'amour est la plus belle chose jamais produite par l'homme, qu'il soit humain ou vampire. Tout ce qui s'est fait plus beau l'a été au nom de cette seule vertu.
- Enheduanna? répéta-t-il en haussant un sourcil. Tu n'aurais pas pu prendre un nom simple? Mlle Smith ou Mlle Black par exemple?
La sourire de Lucy s'évanouit encore plus sur ses lèvres. Cette simple vie suffisait à lui réchauffer le coeur.
- Endhedunna était une grande prêtresse sumérienne, expliqua-t-elle. Ce fut aussi la première femme de lettres de l'humanité à signer ses oeuvres. Et je suis sa plus grande fan encore vivante.