Maxime Mirabel

"Si la physique m'a bien enseigné quelque chose, c'est que nous pouvons sans problème avancer dans le temps, jamais reculer."

"_Ce n'était pas ma question... Je reformule : puis-je vous appeler par un nom auquel vous répondriez ? Cela faciliterait nos échanges et les rendrait moins...impersonnels.
_Si cela vous convient. Quel nom souhaitez-vous m'attribuer ?
Je ne pensais pas devoir choisir moi-même. L'infinité des possibilités me laissa muet. Pour la première fois, le choix de nommer quelque chose s'offrait à moi. La responsabilité de ce baptême m'incombait pleinement, le moment se voulait solennel."

"Le reste du texte ne m'apprit rien. Je relus l'Assignation. Chaque mot me fit l'effet d'une menace voilée, prête à me poignarder si j'osais la quitter des yeux. Je savais que derrière ces termes administratifs, neutres, se cachait tout un monde de bafouement des droits les plus élémentaires de l'être humain."

"_Je vais devoir rompre cette promesse. Je ne vivrai plus sous la coupe de personne.
Elle s'avança encore, toujours plus belle, une vision de paradis.
_Je t'aime, Quatrain. Garde-moi auprès de toi. Tu ne veux pas mourir seul.
Je la regardai une ultime fois.
_Si, je mourrai seul. Mais libre.
J'appuyai.
_Adieu Adacea."

"Le mythe du prisonnier se sculptant un corps de rêve durant sa détention ne représentait rien d'autre que ceci : un mythe."

"_Vous l'aimez donc toujours ?
_Bien sûr.
_Bien qu'elle ait été détruite.
_Reconditionnée.
Perséphone corrigea.
_Reconditionnée, soit. Et vous continuez de l'aimer, malgré le fait que vos deux corps se trouvent désormais à plusieurs millions de kilomètres l'un de l'autre.
_Oui, nous avons désormais sous les yeux la preuve que l'amour transcende le temps et l'espace !"

"Au fil des décennies après sa découverte, elle avait tantôt pris le statut de planète, puis de planète mineure, d'objet transneptunien, puis de planète naine. La désignation importait peu. Pour moi, elle restait l'objet de notre système solaire qui, d'aussi loin que remontaient mes connaissances scolaires liées aux cours de sciences, transitait le plus éloigné de nous.
L'analogie avec le dieu antique n'était pas dénuée d'ironie. Car on m'envoyait bien aux Enfers, et, en qualité de prisonnier, le jugement de Pluton pencherait à n'en pas douter du côté des supplices du Tartare et non de celui des verdoyants Champs Elyséens."

Bien sûr, Pluton avait déjà été explorée. Des sondes avaient frôlé ses hémisphères et pris de nombreux clichés - photographies qui m'avaient été repassées en boucle durant ma préparation, au point que j'éprouvais une peur irrationnelle à la vue de cette sphère morte, glabre, suspendue dans la noirceur du néant. Mais personne n'y avait encore jamais mis les pieds ni pu en prélever le moindre fragment.

"_Je ne comprends pas. Admettons. Admettons que tout ce que tu me racontes soit vrai, que la vie passée soit telle que tu l'as décrite, que je sois coupable d'un double meurtre. Pourquoi alors tout ceci? Pourquoi un faux voyage vers Pluton ?
Adacea sourit, pleine d'une mélancolie inaccessible.
_Oui. On en revient toujours au pourquoi. C'est cela qui importe."

- À compter de ce jour, votre mission vous autorise encore près de onze années d'existence. Passés les six mois de formation, le trajet qui vous emmènera pour Pluton durera dix ans. Une fois posé sur l'astre, vous bénéficierez à nouveau de six mois de survie grâce aux ressources embarquées ; ceci pour mener à bien vos prélèvements et les observations requises.
[...]
- Qu'est-ce qui m'empêcherait de désobéir ? osai-je.
La déesse incarnée qui me faisait face se pencha imperceptiblement vers moi, murmurant à voix basse :
- Je sais que vous obéirez, car vous m'en ferez la promesse.