Les Nuits avec mon ennemi (VF)
Personne, jamais, ne pouvait revenir sur ce qu'il avait fait, comme dans un film projeté à l'envers. On ne pouvait jamais jaillir de l'océan les pieds devant, revenir en arrière dans un bateau jusqu'à l'appontement ni remonter à reculons un escalier,marche après marche, pour se retrouver là où l'on était.
Les mariages étaient affaires de femmes. Les femmes adoraient ce genre de cérémonie. Des boutiques leur étaient consacrées, des magazines entiers.
Cramponnée à ma boite de chocolats, je lui décochai un regard signifiant qu'un miracle arrive plus facilement à une jeune fille de dix-sept ans qu'à une femme de bientôt quarante qui a toujours une couche de bébé humide à la main.
Il passa les mains sous les cheveux fraichement lavés, lui posa un baiser sur la nuque. Elle frissonna. Il se mit à rire, recommença. Elle se retourna pour l'embrasser comme il aimait. Son haleine sentait le porto. A peine le baiser s'achevait-il qu'il la gifla violemment. Elle se retrouva projetée contre la table.
Mary a connu les insultes, comme la plupart des enfants. Mais les pires étaient "fille de pute" et "bâtarde". Je l'ai vue souffrir à cause de ça. Elle avait compris ce que ces mots signifiaient avant même de savoir les épeler. Elle s'était juré de ne jamais être l'une, ni de porter l'autre.
Je ne pouvais le croire. Je ne voulais pas le croire. Mais il fallait bien me rendre à l’évidence. Les faits sont têtus. Je décidai de me rendre compte par moi-même. Et je vous ai trouvée, "madame Gunther Meyer", avec le bébé de Gunther ! Oh, comme j'aurais voulu vous tuer toutes les deux !
Quand une fille sortait avec un garçon, la première question qu’on lui posait était : « Il t’a embrassée ? » De sexe, pas question ! « Faire l’amour » signifiait devenir une marchandise avariée et perdre tout espoir de trouver un mari ; l’expression elle-même était prohibée.
Le mariage était la seule issue, sauf si l’on souhaitait devenir secrétaire, enseignante ou infirmière. Pas une de ces étudiantes n’aurait envisagé un troisième cycle universitaire ! Cela se passait dans les années quarante…
Bonner ne s’intéresse qu’à ses affaires et à ses conquêtes, grommela le jardinier. Les hommes comme lui ne méritent pas d’avoir des filles à élever ! Ils devraient se contenter d’araignées ou de crapauds !
Il m'avait toujours écoutée, et pas une seule fois - même dans son sommeil - il n'avait dit la vérité crue : "Tu n'es pas ma femme. Tu n'es rien d'autre que ma pute, cachée et naïve."