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Citations de Philippe Henry (25)


Il faut aussi dire, à la décharge de l’administration municipale, que le problème de la surpopulation parisienne avait pris également une ampleur sans précédent du fait de l’accroissement exponentiel du nombre des personnes âgées. Par le passé, nous avions été habitués à un rythme de rotation des appartements assez satisfaisant, permettant à de jeunes couples de venir succéder à ceux qui avaient fini par nous quitter. Les statisticiens, tout en regrettant bien sûr ce renouvellement mécanique nuisible à ceux qui s’en allaient, admettaient que ce mouvement naturel contribuait au logement dans la capitale de près de 25% des ménages en âge de travailler. Mais les progrès de la science aidant, notamment génétique, beaucoup de nos parents avaient franchi glorieusement le cap du troisième. Puis du quatrième, pour atteindre à présent le seuil du cinquième âge. Ils, bloquaient ainsi tout espoir d’évolution rapide de l’habitat à Paris et mettaient à mal, dans le même élan, les comptes des régimes sociaux. Bien entendu, la population s’était réjouie de ces évolutions. Nous étions tous extrêmement attachés à nos vieux. Ne s’était-on pas acharné d’ailleurs, dès les années 2000, à leur apporter quantité de soins dans l’espoir de voir leur vie se poursuivre bien au-delà de leurs espérances initiales. Le maire prononçait régulièrement d’importants discours sur ce thème. Il saluait comme il convenait cet électorat fidèle et « le remarquable acharnement de nos chers anciens à demeurer près de nous, dans notre cœur et aussi sous nos yeux. Leur acharnement à pouvoir jouir paisiblement de leur retraite, des pensions complémentaires, des contrats de capitalisation, des usufruits, à profiter des nombreuses exonérations dont les politiques les avaient honorés au fil du temps, à se faire soigner gratuitement dans les services de l’Assistance Publique, à pouvoir voyager sans frais sur le réseau parisien, à assister aux spectacles avec des réductions qui progressaient au rythme de leur âge et atteignaient pour les sujets les plus brillants jusqu’à 90%.... » Pour dire vrai, le maire était intarissable sur le sujet. Toutefois, au fil des discours, l’expression ‘nos chers anciens’ connaissait une évolution grammaticale, l’inversion, qui faisait très clairement apparaître la charge économique considérable de ce secteur de la population sur les comptes de la nation et de la municipalité. C’est ainsi que tout doucement, grâce aux efforts pédagogiques du maire, l’ensemble de la population avait fini par prendre conscience de l’importance de ce problème et de la nécessité d’y apporter une solution, plutôt rapidement si possible. C’est bien là la grandeur de nos élus que de savoir nous montrer le chemin, faire apparaître les écueils, et nous résoudre doucement à des choix parfois douloureux.

En même temps, il se trouvait que l’évolution d’un certain nombre de dossiers rendait plus aisée l’adoption de mesures appropriées. Ainsi en allait-il, on l’a vu, de l’élargissement de l’agglomération parisienne à des zones jusqu’alors consacrées aux cultures maraîchères et vivrières. Le transfert là-bas des hôpitaux parisiens avait pour un temps stabilisé les choses mais on s’aperçut vite à la mairie de l’absurdité de la situation qui consistait à avoir trop de vieux dans Paris et personne en grande banlieue, là où se trouvaient justement la majorité des hôpitaux que nos chers anciens fréquentaient assidument en y passant le plus clair de leur journées. Ainsi l’administration municipale adopta-t-elle une réglementation facilitant le transfert progressif des habitants concernés. Dans l’ensemble, la population était prête à ce sacrifice qui, elle le voyait bien, présentait des avantages importants pour nos chers anciens. Ils ne seraient plus ainsi obligés de perdre leur temps dans les transports pour rejoindre les centres de traitement nécessaires à leur bon maintien. On vit certes quelques scènes désolantes et pour être franc douloureuses, de personnes très âgées se refusant à quitter les lieux où elles avaient si longtemps vécu. Elles s’obstinaient à ne pas vouloir abandonner leurs meubles, leurs bibelots, ou seulement la trace aujourd’hui invisible que laissait dans ces lieux le souvenir des êtres chers qu’ils y avaient perdus. Quelques-uns même se cachèrent dans les recoins de leur appartement dans l’espoir d’échapper aux employés municipaux, ce qui laissa malgré tout, du fait de certaines réminiscences, un goût amer sur l’ensemble du processus. Ces comportements, délictueux le fait est, furent dans l’ensemble traités avec douceur mais fermeté par les autorités. En général, les familles avaient préféré s’abstenir de tout interventionnisme lors de ces transferts, informées par la mairie que leur présence sur les lieux risquait de rendre encore plus pénible la réalisation des opérations. Cela rappelait un peu les conseils de la maîtresse suggérant aux parents de s’éloigner très vite après avoir, pour la première fois, déposé leur enfant à la maternelle. Ce rapprochement entre nos chérubins et nos chers anciens avait quelque chose de vraiment touchant. « Comme nous comprenons bien, avait dit le maire, le sentiment des familles amenées pour le bien de leurs chers anciens à accepter de déléguer aux autorités municipales la mise en œuvre d’un déplacement qu’elles approuvent mais à la réalisation duquel elles n’étaient pas préparées. Je salue ici le courage et la grande hauteur de vue dont elles ont su faire la preuve dans ces circonstances douloureuses. Pour en venir à l’affectation des logements libérés…» La suite a moins d’importance.
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Dans nos sociétés qui se transforment, la question culturelle revient surtout au premier plan comme ce qui permet de faire cohérence et signification minimales pour continuer à vivre et travailler, à rêver et aimer.
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Claire
Lyon, été 1961.

Je me le rappelle. C’était il y a 4 ans. Nous partions en week-end dans la vallée de la Loire. En voiture. Les portières ont claqué, les unes après les autres. A la quatrième, je me suis dit : on vient d’enfermer le bonheur. On l’a mis en sécurité dans la voiture, on est tous serrés autour. Je ne sais pas du tout d’où m’est venue cette idée, mais elle a tout à coup pris beaucoup d’importance. Comme si je venais de comprendre une chose essentielle. Soudainement, elle éclairait ma vie, notre vie, d’une lumière nouvelle et douce. Nous étions une famille heureuse. Nous étions si bien, tous ensemble. Mais cette idée portait en elle le reflet d’un péril. Comment penser au bonheur sans craindre son anéantissement ?
De cette époque date pour moi la conviction qu’hors la voiture ce jour-là, et bientôt hors le cocon familial, il existait probablement une menace qui, en se développant, viendrait saper tout cela. Enfant, comme tout le monde, je construisais face à la marée montante des châteaux de sable. J’avais beau surélever constamment leurs murailles, j’avais beau m’acharner à les protéger par de multiples contreforts, la mer finissait toujours par les encercler, par attaquer les constructions à la base, par les creuser, les extruder et obtenir enfin l’écroulement de tout un pan du système défensif. Bientôt les murailles cédaient et je voyais avec rage la mer s’engouffrer dans la première brèche et remplir le centre de l’ouvrage pour poursuivre, là aussi, son travail ravageur. ....
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"Ils ont toujours prononcé mon prénom comme si j'étais espagnol. Ils disaient "Ron". Jon, c'est le diminutif de Jonathan. C'est un prénom juif. Je suis juif. Ma mère était juive. Grand-père était juif. On dit que cette origine marque pour toujours une identité particulière. On porte en soi un poids , une histoire sombre. Cela donne une responsabilité à laquelle il est difficile de se soustraire. Lorsque ses parents ont payé de leur vie leur appartenance à ce peuple, le poids que l'on doit supporter est en grande partie insoutenable" Jon va devoir endurer plus que cela. Son grand-père, à ses derniers souffles, lui a confié une mission. Un devoir de mémoire dans lequel le bonheur qu'il vit va nécessairement être englouti. Faut-il trahir cet héritage légué par son grand-père? Ou plutôt préserver cette famille qui l'a tendrement accueilli? Et qui est-il pour prononcer une sentence. Ne faudrait-il pas laisser la place au doute?
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— Bon, Ecoutez, cela ne va pas. Toute votre défense pour l’instant se résume à : il y a trop de preuves accablantes. C’est forcément un coup monté. J’admets que ce que vous dites concernant la manière dont le vrai coupable aurait pu procéder pour vous confondre tient la route. Ce serait crédible pour vous disculper si on avait le moindre soupçon sur quelqu’un d’autre. Si on avait un mobile.
— Mais ne parlez pas de mobile ! Je n’en ai pas non plus de mobile moi !
— Si. Cette femme qui se refuse à vous dans ce restaurant. Cette dispute.
— Mais voyons, on ne tue pas toute une famille pour ça !
— Sauf ce que j’appellerais « l’enchainement des choses ». Vous ne venez pas pour la tuer. La discussion tourne mal. Vous ne comprenez pas pourquoi elle réagit ainsi. Vous perdez vos nerfs et vous la tuez. Evidemment, vous ne voulez pas tuer les enfants, mais l’un d’eux entend du bruit, se réveille et débarque dans la pièce. Alors c’est à son tour. Pour ne pas qu’il crie. Et le troisième… Je ne sais pas pour le troisième. Il semblerait qu’il dormait… Bon mais enfin, et surtout, vous avez ce couteau avec vous.
— Je l’ai avec moi si c’est moi qui suis monté là-haut. L’assassin avait ce couteau dans les mains. Oui. Moi pas. L’assassin a caché le couteau dans mon appartement. Oui. Moi pas. L’assassin a mis des traces du sang des victimes dans ma salle de bains. Oui. Moi pas. Moi pas !
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— Oui vous avez raison. Je crois que j’étais « normal ». Je veux dire avec un comportement normal. Et même, au sortir de la maison, juste là, juste après…tout ça…, normal aussi dans ma tête. Je crois que je marchais dans la rue sans penser à grand-chose. Presque soulagé.
— Soulagé ? Mais de quoi diable ?
— Soulagé que cet enchaînement se soit arrêté. De redevenir maître de mes actes. Une sorte de parenthèse s’était refermée. La vie, ma vie pouvait reprendre.
— Ce que vous dites là me semble plutôt un message que vous destinez au tribunal. Au fond, vous dites que vous n’y êtes pour rien, que ce n’était pas vous. N’imaginez quand même pas une excuse ! Vous réalisez que ce que vous avez fait parait à tous tellement atroce, tellement insensé que personne au fond n’a envie de repenser à tout cela.
— Moi non plus !
— Oui, mais cela, ce n’est pas possible. S’il y en qu’un qui n’aura pas d’autre choix que toute sa vie revoir cette scène, ce qu’il a fait endurer à ses victimes, c’est vous.
— Vous savez, je ne veux pas vous embêter, mais je ne revois pas grand-chose.
— Je ne suis pas sûr que votre humour soit à propos ! De toutes manières, rassurez-vous, cela va vous revenir. Le repentir n’est pas un sentiment du présent. Il faut d’abord que le temps emporte la chape que vous avez posée sur tout cela. Aujourd’hui, c’est à peine si vous avez conscience de l’horreur.
— Dois-je en avoir honte ?
— Vous voulez dire honte de ce que vous avez fait ?
— Non, honte de ne pas avoir réellement conscience de l’atrocité de mes actes. Ou bien seulement lorsque des gens me posent la question avec tant de force que je réponds surtout à leur attente.
— Finalement, en vous écoutant, je me dis que vous avez de la chance que la justice soit si lente dans notre pays. Si vous deviez vous présenter au tribunal comme vous êtes là, devant moi, votre cas serait vite expédié.
— De toute manière, tous me disent qu’il le sera. Ils ne chercheront même pas à comprendre.
— Que voulez-vous qu’ils comprennent ? Ils ne chercheront qu’une chose, vous effacer. Vous sortir d’un monde où vous les côtoyer. Faire en sorte que ne soyez plus classé.
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Précisément, la cote, je l’avais toujours, mais pas auprès des bonnes personnes.
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J’ai toujours été étonné par cette capacité que l’on a de mettre de côté les pensées sombres pour ne voir que ce qui éclaire un peu.
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— Mais ne parlez pas de mobile ! Je n’en n’ai pas non plus de
mobile moi !
— Si. Cette femme qui se refuse à vous dans ce restaurant.
Cette dispute.
— Mais voyons, on ne tue pas toute une famille pour ça !
— Sauf ce que j’appellerais « l’enchainement des choses ».
Vous ne venez pas pour lui faire du mal. La discussion tourne
mal. Vous ne comprenez pas pourquoi elle réagit ainsi. Vous
perdez vos nerfs et vous la tuez. Évidemment, vous ne voulez
pas tuer les enfants, mais l’un d’eux entend du bruit, se réveille
et débarque dans la pièce. Alors c’est à son tour. Pour ne
pas qu’il crie. Et le troisième… Je ne sais pas pour le troisième.
Il semblerait qu’il dormait… Bon mais enfin, et surtout, vous
avez ce couteau avec vous.
— Je l’ai avec moi si c’est moi qui suis monté là-haut. L’assassin
avait ce couteau dans les mains. Oui. Moi pas. L’assassin a
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caché le couteau dans mon appartement. Oui. Moi pas. L’assassin
a mis des traces du sang des victimes dans ma salle de
bains. Oui. Moi pas. Moi pas !
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« Tu sais ce que c’est une montre à complications ? C’est une montre d’une complexité extraordinaire. Il y a plus de mille pièces parfois. Chaque roue en met plusieurs autres en mouvement, à un rythme différent. Calculé bien sûr. Tout est calculé ! Elle te donne l’heure, les jours, les mois, les quartiers de lune, souvent les marées aussi, les heures de coucher et de lever du soleil … C’est ça une montre à complications. Ce que fait Paul, on peut dire que c’est aussi compliqué et aussi parfait qu’une montre à complications. Quand il s’est occupé de quelque chose, personne n’y voit plus que du feu»
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"La lame du couteau s’est enfoncée dans le cou avec une facilité préoccupante. On se serait plutôt attendu à un bruit. Je m’attendais à cela. Un cri, une protestation… Même quelque chose d’extérieur pourquoi pas ? Un coup de tonnerre, quelque chose qui aurait souligné l’importance de l’évènement, mis en relief l’anomalie de cette lame qui mettait fin à cette pauvre vie, presque déjà partie avant même le coup que je lui portais. Une vie minée depuis tant de mois par la maladie, une vie qui s’effaçait peu à peu sous nos yeux. Cette femme qui avait été si importante pour nous tous et qui déjà ne l’était plus. Parce que le cancer allait la prendre. Parce qu’elle n’était en quelque sorte plus d’actualité. Déjà plus parmi nous. Mais une vie qu’il fallait pourtant que j’arrête sans le moindre retard"
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Son regard m'a fait froid dans le dos. Et pourtant, je sais bien que le loup n'est jamais agressif envers l'homme, sauf celui des contes et des dessins animés qui finit toujours par s'enfuir, la queue entre les jambes.
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- La végétation des sous-bois héberge de nombreux insectes qui, en été, représentent 80% de la faune forestière. Sais-tu qu'ils sont une source de nourriture très importante pour les oiseaux insectivores ?
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J'aime la nature depuis que je suis tout petit. Les arbres et les fleurs qui composent le paysage autour de chez moi me sont familiers. J'aime leurs couleurs, leurs odeurs et je connais le nom de presque toutes les espèces.
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Aujourd'hui, je sais construire un affût solide. Il doit être discret, se confondre si possible avec l'environnement. Tout ce qui le recouvre doit être solidement fixé. Rien ne doit bouger.
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Pour ce pêcheur [le héron cendré], les zones humides sont des milieux indispensables qui doivent être protégés. Il doit pouvoir y trouver sa nourriture en toute sécurité.
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- Les oiseaux ont des becs de formes différentes en fonction de leur alimentation.
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il y a le plaisir égoïste, qu'aucune photo ne pourra traduire, le plaisir de partager quelques instants de la vie animale, de ressentir des émotions, des joies, des peines...
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La photographie naturaliste est une passion pour beaucoup d'entre nous. Elle nous ouvre les yeux sur un monde merveilleux, fragile et menacé et nous permet de pouvoir témoigner.
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Il est important de bien connaître le comportement et la biologie des animaux que l'on veut photographier.
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