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Citations de Radu Bata (155)


La beauté



extrait 5

effacer en douceur
les peines de la mémoire
afin qu’elle trouve la paix
dans un miroir
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et j'envie les gens qui sont seuls
j'envie leur solitude
de toutes les images possibles

(Mircea Cartarescu, p.22)
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Silviu Vergu

désirs secrets

il faudrait toujours porter
des fleurs invisibles
au coin de la bouche

je suis malade de moi
je suis malade de ciel
et pour les étoiles je chancelle
comme pour les fruits mûrs qui ne poussent
que dans les pays irréels

la chair me trahit quelquefois
je l’entends en sortant de moi
comme j’écoute dans les cernes du soir
le temps se décomposer
dans les hautes herbes noires

je bâtirai des églises dans mon corps
pour retrouver la foi dans les couleurs
je m’en irai chercher de nouvelles ombres
dans les moulins et les feuilles sombres
pour retrouver la joie d’ailleurs

je me perdrai dans les sourires complices
dont j’ai encore le souvenir
et je serai toujours malade d’office
– en utopie et en abysse –
de vivre pour mieux partir

(p. 179)
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Le printemps est là

Depuis deux jours, je regarde l’hiver dans les yeux.
Des yeux étroits, ombrés par un front ridé.
L’hiver– un vieil homme, venu de l’Extrême -Orient.
À l’autre bout de la table, une jeune femme blonde, souple,
habillé modestement, avec une blouse animée par deux
seins beaux comme les premiers perce-neige.
Elle frémit de peur ou de honte quand l’hiver lui pose
une question dans une langue énigmatique.
Je bois ma bière et mes pensées.
Qu’est-ce que le printemps se vend facilement à l’hiver !

(p. 69, poème de Mircea Poeană)
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Radu Bata
la genèse entre parenthèses
----------------------------
(adam et ève ont trouvé la fève)

la jeunesse est un faon
perdu parmi les hommes
les hommes sont des serpents
tombés dans les pommes

c'est la fête des enfants
précoces mûrs ou vieux
c'est l'éternel printemps
du soleil pluvieux

on oublie un instant
le règne des fourberies
on file entre les dents
gâteaux et gâteries

mais demain viendra
avec son lot d'orages
et qui vivra verra
du ciel les pâturages
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ni vu ni connu
———————
pour calmer
leur faim
à la tombée du soir
les enfants
des rues
dessinent
des beignets
dans le ciel
de Bucarest
mais
personne ne voit
leurs dessins
car les enfants
des rues
sont devenus
invisibles
à force
de se nourrir
d’illusions
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La beauté



extrait 3

ressusciter les fées
embrasser les chimères
dans les bras de Morphée
faire jouir l’éphémère
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La beauté



extrait 2

courir les oiseaux
dans l’air doux de l’été
non pas pour les chasser
mais pour les chanter
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La beauté



extrait 1

la beauté c’est marcher
sur le fil du soir
comme une lumière
sur une balançoire
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Dracula Blues
———————
Il y a grand conseil à la cour du vif roi
les boyards sont nombreux à donner de la voix
on discute les problèmes – l’analyse du synode,
ce qui ne va pas, ce qui incommode ;
De son trône, l’Empaleur* lui-même conduit la séance.
Un boyard est chargé de compter la présence.

Basile se lève et dit : « Mon Seigneur l’Empaleur,
en blé et viande nous sommes bons producteurs
on a dépassé le plan dans la branche des scories
et les pillages ont cessé en théorie, on me dit ;
quant aux pals, mon Seigneur, nous sommes premiers au monde,
même les américains arrivent en position seconde. »

« Mais des problèmes demeurent dans l’industrie des pals »
réclame en se levant un boyard principal.
« On manque de bois d’érable, la production tarde
et le chêne, Mon Seigneur, pour les boyards on le garde.
C’est pourquoi je propose d’en faire en prunier
Il y aura moins d’alcoolos et le bois est particulier. »

Bonne proposition », dit alors Vlad III dit l’Empaleur,
« Qu’on attaque la production prunier tout à l’heure !
Tout doit rouler nickel, le pal sortir sans deadline
et qu’on ne néglige point le problème du design,
le pal doit être souple, satisfaire le client,
épouser au mieux tout environnement,
que l’on envoie des cadres en spécialisation,
qu’on économise du bois dans l’opération,
un projet raisonnable élimine les sophismes
et fera que nos pals résistent même au séisme ! »

Alexandru Andrieș

nota : * « empaler » en roumain (comme les expressions traduites mot à mot « donner des pals » ou « tirer des pals ») signifie aussi arnaquer.

(p. 36-37)
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Radu Bata
on entend les poulies de l’automne
avant de les voir
comme on voit les éclairs
avant le grondement du tonnerre
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vous avez beau dormir
les rêves sont chez moi

jeune réconciliation avec la beauté

à voix haute, j’entre dans le silence du corps.
les lumières sont éteintes, les portes sont fermées.
les locataires dorment bien couverts de rêves
pour que l’éclairage ne les dérange pas.
c’est un bon bâtiment dans un bon quartier
situé tout près du cœur.
dès que tu ouvres la porte tu tombes
nez à nez avec lui. avec l’amour.
quand il était petit, il sonnait et fuyait.
jusqu’à ce qu’on appelle la police.
chaque fois il trébuchait et tombait dans l’escalier.
je le prenais chez moi et le pansais.
je lui chantais, je le berçais, je l’endormais.
il aimait rester la nuit chez moi,
il se sentait en sécurité.
je lui donnais ma couverture. ça nous suffisait.
il est toujours la principale attraction de la ville.
mais quand il a grandi
mon corps lui est resté petit.
et des parts entières de lui m’ont dépassé
pour aller voir d’autres cités
et habiter d’autres silences.

(George Vasilievici, p. 69)
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perdre le nord
pour se retrouver

sur tes bras
j’aurais dessiné
des pays inconnus
vers lesquels nous aurions volé
en avions à hélice

pieds nus
les pilotes auraient appuyé sur l’accélérateur
pour effacer toutes les frontières
ils se seraient arraché les boutons de la chemise
pour les jeter
et nous faire monter
encore plus haut
ils nous auraient même donné à manger
leur cœur
en plein vol
et dieu nous aurait coupé les doigts
pour nous anonymiser
dans l’absolu

ainsi
nous serions restés
comme deux moitiés
sans identité
embrassés
sur une selle
sans cheval

(Dana Novac, p. 68)
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Dans les clous d’un poème anatomique

J’avais un ami poète, un peu frappé sur le bord,
il venait chez moi, il comptait ses os
et chaque fois il y en avait un de plus.

Puis il s’asseyait sur un côté
et ouvrait ses blessures
comme les touristes les cartes Michelin.

Une rumeur imperceptible parcourait alors la pièce,
les femmes de la ville commençaient à pleurer
et les oiseaux s’assoupissaient
dans l’air du temps.

Mon ami le poète tendait alors les mains vers l’horizon,
ouvrait sa poitrine pour en sortir un abécédaire
et les femmes de toutes les villes commençaient à pleurer
les maires et les policiers fermaient les rues
et les fixaient avec des clous de girofle.

On entendait tout à coup
les pas secs de la nuit
et ma bien-aimée
grignotait en cachette les lettres
tombées par terre.

Matei Ghigiu, p. 24
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La fiction prend le dessus

(l'appel des impossibles printemps)

La vraie vie est peut-être celle qu’on ne mène pas.
Les fragrances des errances sont indélébiles, les joies concrètes se désagrègent avant de s’achever. Comme une bonté de chair qui n’attend pas le climax pour se détacher de ton corps et disparaître.
Je me rappelle mieux l’ailleurs et ses moindres nuances que les jours précédents remplis de coquilles vides.

Je ne suis pas tout à fait là, je ne suis pas tout à fait ici. Entre les deux, il y a une ligne infranchissable sur laquelle je m’assois à cheval, imaginant une destination inconnue.
Et je tourne en rond aux carrefours qui se succèdent, m’arrêtant aux feux virtuels.
Ainsi vont les choses : pendant que certains font semblant de vivre quand ils vivent, d’autres écrivent comme s’ils faisaient semblant d’écrire.
Et je lis des livres qui n’ont pas encore été écrits.

Par-delà les voiles de la nuit, on regarde le ciel dans les yeux. On y voit d’impossibles printemps.
À l’aube, tu auras chuté dans une tout autre histoire. Cette nouvelle histoire, tu l’auras déjà lue.
N’attends pas l’aube pour prendre la tangente.

(p. 190, poème de Radu Bata)
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cours d’anatomie et d'égarement

nos corps sont ainsi faits :
ils ne peuvent être séparés
que par deux gouttes de sueur
une pellicule fine de salive
et deux microns d’air
écrasé entre les cuisses

(Cosmin Perta, p. 58)
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TROP, PLUS, TRÈS

Vous qui êtes
trop fatigués pour pouvoir dormir
trop seuls pour pouvoir aimer
trop licornes pour être caressés sur le front
trop bateau pour vous jeter à l’eau
trop sérieux pour rire avec Mister Been
trop adultes pour vous rappeler le pays de l’enfance
plus fâchés que le ciel de plomb
et plus amers que la Mer de l’Amertume
plus blasés que le coucou de l’horloge
plus indécis que le vol de la libellule
vous, très mécontents de cela. Ou plutôt de tout cela,
très attentifs à la déco de votre tralala
laissez, je vous prie, l’espoir de ne pas entrer
et commencez à conjuguer le verbe aimer

(Iv cel Naiv, p. 89)
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l’espoir

ça va mal
et seulement l’espoir que demain ça ira encore plus mal
nous fait tenir
en vie

mais nous espérons tellement fort
que demain devient aujourd’hui
et ça va
très mal

mais nous espérons encore une fois
et tout à coup
demain devient hier
et ça va très très mal

à perte de vue
tout va de mal en pire :
une mer de plomb
avec des vagues petites et douces

et des îles silencieuses et bleues
qui ondoient sur les vagues
comme des taches d’huile
et de gasoil

maintenant ça va
car tout va tellement mal
que le mal s’est enfin établi
à sa cote suprême

et maintenant
même dans le passé
ça ne peut pas faire
plus mal

Ion Mureșan, pp. 17-18
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Je sais de la solitude
seulement ce que tu m'a dit
que ce n'est pas une maladie
c'est juste un léger éloignement
comme le pied gauche du droit pendant une valse
avec un air dense entre les deux
et parfois un corps longtemps exercé

(p. 36, début du poème Le lapin de Florin Partene)
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faille temporelle

il est encore temps
de freiner avant les clous
de voir ses cheveux blanchir
de poursuivre les études
et d’obtenir un nouveau diplôme
peut-être même un doctorat
il est encore temps
pour la promenade du soir
pour le sommeil de beauté
pour les préparatifs d’hiver
pour écrire au moins deux poèmes
et deux solitudes

il est encore temps
de devenir pauvre comme job
ou d’épargner de l’argent
pour payer les factures acheter des fringues ou des loisirs
compulsivement
d’oublier plusieurs fois le même être
de t’oublier toi
de regarder en toi
de te chercher
de te pardonner
ou de prétendre jusqu’à la fin
que tout va bien oh oui tout va bien

et puis il est temps
il est grand temps de comprendre
que tout ce qui te reste est juste cet instant de maintenant
et la douceur
et la douceur

(Petronela Rotar, p. 102)
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