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"Le son c'est la vie" -
Robert ARNAUT, le "griot blanc" de France Inter raconte ses 50 ans de passion pour la radio et pour l'AFRIQUE et pour toute bonne histoire à raconter.
Un beau film produit en 1996 par Jean Yves CASGHA, journaliste à France Inter,( lui aussi formé par Robert ARNAUT ). Devenu journaliste scientifique, il anime une émission sur le sujet à RFI et il a créé la chaine d'informations sur l'environnement terre.tv et
De la ville de Lourdes à la frontière d'Espagne s'enclave dans la chaîne pyrénéenne une région connue par les toponymistes sous le nom de Lavedan et, par les autochtones, " pays des sept vallées ".
" L'air que nous respirons est fait des mille choses qui se taisent. mais cet air est plus ou moins bon selon la qualité du silence. L'air des villes, par exemple, n'est pas très pur, parce qu'il n'y a pas beaucoup de silence dans les rues.
Tu sais, il suffit d'un cri pour déchirer le morceau d'air frais que le silence vient de tisser ; et c'est alors tout le travail d'une nuit qui est à refaire. C'est ici, en montagne, que les silences se fabriquent le plus facilement. Ils sont plus blancs, plus épais. Le silence qui suit le cri de la chouette, c'est un beau silence ! Le crapaud aussi, entre deux croassement, donne un silence de bonne qualité. La neige qui tombe, l'oeuf qui roule sur la mousse, la truite qui baîlle dans le lac, tout ça fait des silences très purs. La branche qui craque dans la nuit crée un double silence : avant et après le craquement. Un des silences les plus rares c'est sans doute celui qui suit le chant du coq, à l'aube rouge. Ce silence produit une sorte d'écho de silence. C'est la fin du tissage de la nuit. Tu comprends?....
" Mais le silence le plus difficile, le plus beau, poursuit l'ancien, c'est celui qu'on fabrique soit même quand on se tait ; Les mots qu'on dit sont parfois jolis, mais ce qu'il y a entre les mots est encore plus important.
Il esquisse un pas vers la porte, se retourne avant de sortir : " A propos, est-ce-qu'on vous appelle toujours la mère Judas ? "
L'ovation grise plus que le vin, et la morsure de la vanité est si cuisante qu'on arrache sa croûte de modestie même si l'on doit en souffrir.
De ses mains tremblantes, il a placé la cartouche, a tendu le chien, puis est sorti en tirant bien la porte. On a entendu, encore une fois, le merle d'eau, et puis un coup de feu sec qui a déchiré la nuit. Un instant plus tard, le vieux est rentré. Il a raccroché le fusil, a repris sa place dans la cheminée et a dit doucement :
" Qu'ey tuât l'aousét ! "
Dans sa chambre blanche, au milieu des cadeaux, s'est endormie pour toujours la mariée des noces tristes.