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Citations de Saad Z. Hossain (63)


— Laissez-moi reformuler ça différemment, dit Hassan Salemi. Vous me prenez sans doute pour une brute maniaque des armes avec la bannière d’Ali accrochée dans le dos. Un assassin, un fanatique, un destructeur.

— Tout à fait.

— Je le suis.

— Il est toujours plaisant de voir ses observations corroborées par des aveux.

— Quand la civilisation vous trahit, la barbarie est le recours qui s’impose.

— Vous trahit ? répéta Avicenne en se penchant, clairement intrigué.

— J’ai passé ma vie entière à faire la révolution. Contre Saddam, contre les Américains, contre les hommes actuellement au pouvoir. Très tôt, j’ai appris une chose. Une unique leçon. Tout ce qui a suivi n’en a été que la confirmation.

— Une révélation religieuse ? Extraterrestre ? Des djinns ?

— Un jour, vieil homme, peut-être que je vous tuerai », fit Hassan Salemi.
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Il était sans doute fou.
Pas tant que les quatre Arabes qui venaient de le dépasser. Un maousse et trois de taille moyenne qui marchaient du pas lourd et mesuré de types engoncés dans leurs gilets pare-balles. Ils portaient des sacs pleins d'armes. Celui à qui il manquait une phalange avait un lance-roquettes sur l'épaule, enveloppé dans du tissu. A peine correct, le déguisement... Ils avançaient comme les quatre cavaliers de l'apocalypse. Ancelloti se rappela son église et le vitrail aux quatre cavaliers, chez lui, à Reno. Il fut pris d'une étrange affection pour le type aux lance-roquettes. Il aimait sa manière désinvolte de le porter : ne faites pas attention à moi, j'ai juste un RPG à l'épaule. Complètement dingue.
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L'association avec le Vieux avait porté ses fruits. L'équipe d'artificiers de l'imam venait de dégommer un groupe de soldats américains sans aucunes représailles. Au cours actuel du Blanc, un Blanc pour 78,3 basanés, ça faisait l'effet d'un tremblement de terre et on parlait de l'imam comme député aux prochaines législatives.
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Il compris pourquoi Hamid les suivait encore et pourquoi lui-même continuait d'avancer. Kinza les poussait avec sa volonté farouche d'arriver à ses fins, la vague promesse qu'il existait une cause à découvrir, une raison à leur existence. Et Dagr se dit alors, le coeur lourd, que ce n'était peut-être qu'un mythe, que Kinza était perdu, lui aussi, sa fureur vide de sens, comme celle des marées qui se jettent sur le sable.
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Les tragédies, mon garçon, les tragédies, fit la Mère Davala d'un ton léger. Des foyers détruits, des familles disparues, des amours perdues, des ambitions contrariées, un avenir détourné dans un bourbier sans boussole et sans nom. Que reste-t-il à dire, mes petits, quand tous les possibles ont disparu et la vie se réduit à quelques moments de conscience épars détachés du passé comme de l'avenir ? Bordés de grands silences, comme chez mes soeurs ici présentes. Nous souffrons ces silences impénétrables, l'absence de ces voix figées à jamais, et quand leur somme dépasse un certain seuil, nulle raison de parler ne s'impose. Ainsi va notre existence de laissées-pour-compte.
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Cela et rien de plus, et il se retrouva dépossédé, le regard dans le vague, doucement envahi par le désarroi, à attendre que la réalité de cette solitude qui lui flagellait l'âme reprenne inexorablement ses droits. Tableau noir, chaise, table, ordinateur, chambranle. Son cerveau tenta comme celui d'un autiste de les associer à quelque chose d'acceptable, en vain, et la grisaille le pénétra. Ils le surprenaient à l'improviste, ces instants-là, aux moments les plus incongrus, ces fragments d'un monde parallèle insaisissable, d'un passé dont il doutait qu'il eût jamais existé. Cette classe avec ses rires et sa poussière de craie devait bien se trouver quelque part.
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Ça a l’air d’une bande d’hérétiques super-occulte. Un peu comme les mormons, à mon avis. Des mormons arabes. Sauf qu’ils ont dans les mille ans d’âge et ne laissent aucun étranger devenir membre de leur petite société. Ils connaissent sans doute un paquet de foutus secrets, comme l’emplacement des armes de destruction massive, par exemple.
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On n’avait pas de blindage anti mines, la merde qui trimballe les journalistes. Juste le matos de base, raconta Ancelloti. On s’est pris un EEI. On s’est retrouvés par terre sur le cul. J’ai été éjecté loin de la caisse. Alors les salauds se sont pointés et nous ont jeté des grenades. Des gamins avec des flingues qui sortaient de partout, même par les fenêtres. Ils nous canardaient, nous balançaient leur saloperie. La grande fête de ce foutu quartier… Il pleuvait des guibolles, Hoff. La botte du capitaine m’est arrivée en plein dans la tronche, m’a mis K.O. une dizaine de secondes. Les autres m’ont tiré deux balles dans le corps avant de se barrer.
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Tant et tant d’hommes qu’il faudrait tuer habitent encore cette terre. Tant d’hommes pour qui la mort serait un trop doux châtiment, dit la Mère Davala. Il y a sept mois, le capitaine Eric Hollow, des forces d’occupation, a cru voir un homme armé d’un AK-47 sur un camion lors d’une patrouille à midi sur un marché bondé. Il a ouvert le feu avec son arme automatique et vidé son chargeur. Il fallait qu’il fût aveugle. Il s’agissait de mon arrière-petit-neveu qui jouait avec un bâton sur la plateforme du camion. Il avait trois ans. Une balle lui a emporté la tête entière.
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— Les tragédies, mon garçon, les tragédies, fit la Mère Davala d’un ton léger. Des foyers détruits, des familles disparues, des amours perdues, des ambitions contrariées, un avenir détourné dans un bourbier sans boussole et sans nom. Que reste-t-il à dire, mes petits, quand tous les possibles ont disparu et la vie se réduit à quelques moments de conscience épars détachés du passé comme de l’avenir ?
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Faute d’ingérences étrangères, le silence était le maître mot de la maisonnée, soigneusement ponctué par une série de rituels.Hélas, Bagdad était une ville en proie à des changements perpétuels et ce silence lui-même ne devait pas durer. La planque, oubliée de presque tous, était gravée dans l’esprit du petit Xervish, qui habitait autrefois la porte à côté et qui, une nuit, avait vu dans la pleine lune trois hommes aux traits cachés sous des foulards à carreaux passer l’un des leurs au fil de l’épée devant les arches du palier, sa tête tranchée rebondir sur les marches comme un ballon de foot.
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Le Lion d’Akkad est druze. On a trouvé sa montre ! C’est celle de Fouad Joumblatt ! Il ne peut pas avoir de frère dans l’Armée du Mahdi. Il n’est pas chiite du tout. Il n’y aura pas de représailles, Amal ! Il ne fait pas partie des JAM. C’est un Druze !
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Cette étoile est celle des Druzes. L’écriture est illisible parce qu’ils ont leur propre langue secrète. Quatre-vingt-dix pour cent de leurs congénères ne connaissent pas leurs propres textes sacrés. Cette montre a été donnée ou portée par Fouad Joumblatt. Un objet qui se transmet de père en fils. Notre homme ne fait pas partie de l’Armée du Mahdi. Il n’est même pas chiite… C’est un Druze.
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La mosquée n’était plus qu’une coquille calcinée en béton, en partie affaissée. Autrefois, c’était une fière bâtisse de deux étages, sans dôme ni minaret, avec très peu de la décoration classique d’une mosquée. Unique concession à la beauté : des carreaux d’émail bleu recouvraient encore récemment sa façade. Les éclats de grenade et les impacts de balles leur avaient réglé leur compte. Deux immeubles d’appartements miteux la flanquaient sur les côtés, tombés lentement en ruine depuis deux ou trois ans : fenêtres bouchées, portes fortifiées. L’Armée du Mahdi s’en servait, ainsi que d’autres, semblables, comme planque temporaire. Les familles qui y vivaient encore avaient adopté une mentalité d’assiégés : pas nos oignons, pas de questions.Ils approchèrent la rue avec précaution, conscients d’être à portée de tir. Une fouille étage par étage du premier immeuble ne donna rien. Quelques vieilles ouvrirent leur porte, en rogne au milieu de la nuit, serrant leurs armes contre elles et répétant qu’elles ne savaient rien des hommes du Mahdi, de l’Akkadien ou de tout autre animal. Plus de la moitié des appartements étaient vides, la porte grande ouverte ou défoncée. Pas grand monde ne voulait vivre dans une planque des JAM.« Va falloir s’attaquer à la mosquée, finit par lancer Kinza. C’est tout ce qui nous reste. »
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Physiquement, ils étaient diminués, bien que leur proie le fût sans doute tout autant. Hamid y avait laissé deux doigts de la main gauche et allait d’un pas lourd, le dos voûté, à peine capable de sortir son arme de son étui. Kinza lui-même accusait le coup avec des bleus sur tout le côté où le Lion d’Akkad l’avait projeté. Ses traits affichaient une violence à peine contenue, une ardeur débridée qui trahissait ses intentions. Dagr l’avait déjà vu ainsi, quanKinza leur avait fait courir les plus grands dangers sans motif apparent. Quelqu’un ne passerait pas la nuit.
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— Il est capable de te tirer dans le dos. Il a cette flamme dans le regard, presque une ferveur religieuse, sauf qu’il est tout sauf dévot. Parfois, je me demande s’il n’est pas complètement cinglé.— Les fous connaissent la peur, eux aussi.
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Son cerveau tenta comme un autiste de les associer à quelque chose d’acceptable, en vain, et la grisaille le pénétra. Ils le surprenaient à l’improviste, ces instants-là, aux moments les plus incongrus, ces fragments d’un monde parallèle insaisissable, d’un passé dont il doutait qu’il eût jamais existé. Cette classe avec ses rires et sa poussière de craie devait bien se trouver quelque part.
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Son parfum discret l’alerte et il se retourne d’un bond et manque tomber. Elle lui prend la craie des mains, corrige ses erreurs, toujours souriante, et finit par monter elle aussi sur le bureau, le repousse sur un côté jusqu’au moment où elle ne peut plus aller plus loin, même sur la pointe des pieds, où Dagr doit agripper son chemisier, où ils tombent presque à la renverse en riant.Cela et rien de plus, et il se retrouva dépossédé, le regard dans le vague, doucement envahi par le désarroi, à attendre que la réalité de cette solitude qui lui flagellait l’âme reprenne inexorablement ses droits.
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« On sait qu’il est à pied, qu’il chasse dans cette zone et uniquement la nuit. On va calculer son itinéraire toutes les nuits, aussi loin qu’on s’en rappelle, à partir des données fournies par ses victimes. Et là, on a sa vitesse moyenne. Même s’il change constamment ses tournées, on le voit frapper un nombre moyen de victimes par nuit. En tenant compte de ses vols en début et en fin de parcours, on doit pouvoir corréler le lieu où il habite. Mais lorsqu’il se charge davantage, on trouvera un écart.
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On avait amélioré le système de détection, augmenté le nombre de guetteurs et estimé les itinéraires probables. Sur le papier, ça marchait. Mais les humains étaient faillibles. Les guetteurs s’assoupissaient ou, terrorisés, ils ne réagissaient pas assez vite. Le terrain était aussi à l’avantage du Lion avec ses myriades de routes possibles la nuit, ses raccourcis improbables qui réduisaient de moitié son itinéraire attendu.
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