Simon Schama

Un " gisement " historique .. Deux siècles d'histoire des mentalités ...

Les Pays Bas sont très connus pour leurs peintures et leurs peintres fameux du siècle d'or Hollandais et forcément les touristes qui parcourent ce pays sont naturellement très curieux de savoir d'où sortent les innombrables legs et témoignages continuels de ces siècles de prospérités ( rarement démentis par l'histoire ni même démentis par le présent et la situation contemporaine ... ) ...

De même ! loin des stéréotypes comment ne pas être interpellé par le caractère indéniablement humain de la géographie des Pays Bas ( géographie humaine ou non ) et ce depuis des temps anciens où les habitants de ce pays ont commencé de faire reculer l'océan sensiblement et dès la plus haute antiquité ( qu'ils soient de culture " Nederland " ou bien Frisonne ) ...

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En France à part le fromage .. la faïence .. Rembrandt .. les courts week ends à Amsterdam , le quartier rouge et les polders , le grand public ignore superbement cette culture industrieuse et libérale , bien que d’une curieuse manière , cette identité complexe qui fut un des plus notable et des plus significatifs , creuset de la modernité européenne ...

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Cet ouvrage propose une analyse pénétrante ( aussi profonde , nuancée et intimiste qu’il est possible ) de l'histoire de ce grand petit peuple volontaire , industrieux et remarquable ( aux 16e et 17e siècle en particulier ) ...

Les Pays Bas ont par exemple vaincu et fait reculer l'océan ( par la patience et la force du vent ) ..

Ils ont tenu en respect l'Espagne et la France alors au sommet de leur puissance de même que le Saint Empire Romain Germanique et l'Angleterre ...

Ils ont créé une monarchie parlementaire ( la première " démocratie européenne " du monde moderne ... une monarchie au apparences singulièrement républicaine ) ... fondé le capitalisme moderne ... commencé d'éradiquer ( les premiers ) l'analphabétisme et l'illettrisme dans des proportions véritablement notables et pour finir :

Ils ont jeté les bases conceptuelles de l'état " providence " ( en passant par la case état de la providence ) ... de la liberté de culte et des formes modernes et pratiques du libéralisme économique ...

Ce n'est pas aux Pays Bas seulement qu'est née l'Europe contemporaine , mais c'est dans ce pays où les fleuves coulent en hauteur que l'Europe moderne est sortie du limon pour s'incarner dans la réalité ( sous le regard éberlués de bien des voyageurs européens qui ne cachaient pas leur surprise ) ..

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Ce texte est pénétrant et c'est tout à l'honneur de l'auteur de réussir brillamment cette remarquable ( première et unique en son genre ) étude de l'archéologie de l'identité nationale et des mentalités néerlandaises aux 16 et 17e siècles ..

Les documents servants l'analyse de ces thématiques sont pléthoriques et il est tout simplement exquis d'écouter tout ce qu'ils ne demandent qu'à nous révéler , souvent spontanément ...

A travers la peinture .. les différents documents écrits ( d'une considérable variété ) et architecturaux ..

L'auteur nous propose sa propre fresque historique de cette république cernée par les absolutismes continentaux .

Les registres abordés sont exhaustifs et difficiles à résumer du fait de leurs subtilités et de leur étendue ..

Disons : structures les familiales .. religieuses .. économiques .. politiques .. structures sociales ... la moralité ... les paysages humains et les contraintes géographiques et naturelles .. les sexualités ... les valeurs ... les élites , les pauvres , les riches , les arts , l’architecture ( civile et domestique ) , les clivages entre provinces .

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Cependant arrêtons-nous sur le titre " L’embarras de richesses « ...

Il y a ici quelque chose de doucement polémique et de novateur ..

Selon l'auteur la prospérité fabuleuse et assez subite de ce pays , est un véritable surgissement de richesses ( assez bien partagées finalement ) qui eut pour écho l'apparition d'une " morale de la modération " ...

Cette morale de la modération nourrie la pensée dominante calviniste des Pays Bas réformés et disons que ce qui vaut pour le 19e siècle , cf. Weber L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme ne constitue pas une grille d'analyse valable pour appréhender le surgissement de l'étonnante et somptueuse singularité du grand siècle Hollandais .

Cette nation pragmatiquement libérale fut ironiquement la banque des monarchies européennes . Elle fut aussi volontairement la banque de la liberté elle hébergea également les imprimeurs de la liberté ..

Cette nation fut une véritable nation qui tout en générant de la marginalité culturelle et religieuse , fut vraiment la somme de ses parties , et de ce qui ailleurs en Europe était exclu et par nature méprisable , faisait officiellement partie du tout à différents égards ...

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Ce texte se pose des limites et indéniablement l'étude est tellement multi perspectives et pluridirectionnelle que quelque part qu'elle ne peut être conclue de façons définitives ..

Mais c'est une fantastique plongée dans le quotidien de gens dont je ne dirais pas qu'ils sont morts mais qu'ils ont vécus ...

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Cette superbe étude historique est accessible à toute personne motivée grâce à des phrases choisies .. pesées et nuancées ... grâce à un style avenant et soigné et enfin grâce à un plan rigoureux et éloquent ...

Cependant des lecteurs limités par le prix ou le manque de confiance en eux pourront avantageusement s'initier au sujet en passant par : La vie quotidienne en Hollande dont il existe encore des exemplaires à un prix abordables .

L’édition anglaise de cette époustouflante monographie est aussi beaucoup moins chère .



Attention si vous pensez que les Pays Bas se résument à la faïence , la dentelle et au Gouda vous risquez d'être surpris ( sourires )..

La peinture de Twombly n'est-elle pas ce message qui s'efface et se réécrit ? Ses tableaux ont cette étonnante capacité à suggérer, de quelques griffures si judicieusement écrites, car il s'agit bien d'écriture, sur le papier ou la toile, un monde riche aux racines si profondes.

N'admire-t-on pas autant les titres que les peintures elles-mêmes ?

Le second volume de cette histoire des Juifs de Simon Schama confirme et développe les qualités du premier. On ne trouvera pas un récit des faits politiques marquants, expliqués selon leurs causes et leurs conséquences, comme dans les autres ouvrages du genre (Poliakov, Neher-Bernheim). Ces faits sont supposés connus, et l'historien décrit leurs retombées au niveau des destins individuels : l'Expulsion d'Espagne, les Lumières, l'affaire Dreyfus, la naissance du sionisme, sont ainsi diffractés dans une série de portraits et de récits de parcours personnels. On n'apprendra rien du détail de l'Inquisition ibérique (Yeroushalmi), mais on verra comment certains y échappent et d'autres pas ; on n'aura pas un précis administratif des mesures papales d'enfermement et d'humiliation méthodiques des Juifs dans les ghettos italiens au XVI°s, mais la vie concrète dans les ghettos, les personnalités qui s'en détachent, et y survivent. L'ouverture de la Hollande du XVII° ou de l'Amérique du Nord du XVIII° aux Juifs seront évoquées à travers des figures connues ou inconnues : Spinoza, ou Menasseh ben Israël en ambassade auprès de Cromwell, ou le premier shériff juif du Far-West, ou encore le premier officier supérieur de marine, ou l'inventeur du blue-jean...

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Ce livre d'histoire est fait d'une multitude de romans passionnants et vrais, d'une foule de personnes et de personnages qui firent l'histoire du peuple juif de 1492 à 1900. Que signifie le choix de ces dates ? 1492 n'est pas seulement l'Expulsion des Juifs d'Espagne, mais aussi et surtout leur émigration massive dans le piège portugais où, trois ans plus tard, ils furent baptisés de force. Cette date marque donc l'introduction brutale d'une foule juive dans la chrétienté. Ces milliers de baptisés durent subir l'évangélisation et le catholicisme policier, mais aussi profitèrent de leur intégration forcée dans la société chrétienne pour abandonner leur statut spécial, accéder à des métiers et à des études qui leur étaient interdits, bref, à entrer dans le monde "moderne" : donc à faire concurrence aux non-Juifs et à susciter leur haine. L'antisémitisme moderne est né du baptême. Voilà pourquoi le volume a pour sous-titre "appartenir" : pour la première fois, très consciemment, les Juifs sont intégrés en droit dans l'Europe chrétienne, tout en étant sans cesse renvoyés de fait à leur origine. Dans la France de 1789, il n'y a pas de baptêmes forcés, mais les autorités exigent, en contrepartie de l'égalité accordée aux Juifs, le sacrifice de leur identité, et en demandent toujours plus. L'Angleterre, l'Allemagne, font de même. Ce statut ambigu et double (citoyen de droit, avec des restrictions, toujours suspect) se retrouve dans l'Affaire Dreyfus : au XIX°s, s'il n'y a plus de conversion forcée en Europe occidentale (ailleurs, si, dans l'Orthodoxie et l'islam), la double allégeance et l'impératif de double fidélité continuent de hanter les consciences, celles des antisémites (le livre donne des exemples de férocité anglaise ou française, qui font honte), comme celles des Juifs eux-mêmes. Le sionisme est la réponse à cette question : l'état juif sera le moyen de réunifier la conscience partagée des Juifs allemands, français ou américains et de mettre fin au dilemme comme à l'assimilation. Aux persécutions aussi, d'ailleurs : pour la première fois, les Juifs comprennent qu'il ne faut pas faire confiance aux non-Juifs pour vivre en paix, ni à leur fumeux état de droit, ils ne le permettront jamais, puisque même la France, "patrie des Droits de l'Homme" etc, a déporté Dreyfus à l'Ile du Diable.

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Une réserve toutefois : Simon Schama hérite d'une tradition historiographique juive très hostile au judaïsme, depuis Azariah de Rossi au XVI°s, ou le père fondateur de l'histoire juive, Heinrich Grätz au XIX°, jusqu'aux modernes plumitifs israéliens, surmédiatisés et "post-sionistes". Cela lui inspire des pages consternantes sur le Talmud et son étude (inutile coupage de cheveux en quatre), sur les communautés de cabalistes de Safed ou sur le Hassidisme, qui fut un mouvement de masse. Ces préjugés anti-religieux (recyclant et intériorisant le mépris chrétien envers la tradition juive) appauvrissent et rétrécissent son livre par ailleurs si humain et généreux.

La fiche Babelio semble indiquer qu'un second volume de cette histoire du peuple juif devrait paraître. Ce livre-ci, qu'il se suffise à lui-même ou en prépare un autre, est un ouvrage profond et agréable, souvent léger comme une conversation, mais toujours savant sans lourdeur. Il nous conduit dans la longue histoire du peuple juif depuis ses plus anciennes traces attestées par l'archéologie (VII°s avant notre ère), jusqu'à l'expulsion d'Espagne en 1492. Comme un tel parcours historique, où se sont illustrés de grands noms, existe déjà, ce livre aurait risqué de faire double emploi avec d'autres essais sur le judaïsme pré-babylonien, perse, hellénistique, romain, médiéval. Mais à chaque étape de sa chronologie, l'auteur adopte un point de vue toujours original, toujours novateur, et jette sur son objet une lumière nouvelle. Ainsi, on apprend que les dernières découvertes de l'archéologie tendent à réfuter les thèses de l'archéologue révisionniste Finkelstein, pieusement traduit et mystérieusement célèbre en Europe, avec Shlomo Sand (l'un niant l'existence d'un passé juif avant l'Exil, l'autre celle du peuple lui-même). La vie quotidienne à Eléphantine à l'époque perse et ses personnages colorés, la figure du premier grand orateur antisémite Jean Chrysostome d'Antioche, les controverses littéraires entre auteurs hébreux en Espagne médiévale, le rôle éminent des femmes d'affaires juives en France, Angleterre et Rhénanie du XI°s (occasion de portraits féminins saisissants), la place importante que l'auteur accorde à l'art juif, à la vie quotidienne juive, à l'économie, donnent à son volume une forte originalité. Chaque page, chaque chapitre, réserve des surprises. Hélas, on retrouvera le récit inévitable des souffrances juives entre le marteau de la charité chrétienne et l'enclume de la "tolérance" islamique. En revanche, on ne trouvera que dans cet ouvrage de Simon Schama des échos de la vie du peuple - petites gens, savants et autres - entre les catastrophes, grâce à une exploitation judicieuse du grand fonds d'archives de la Genizah du Caire. Seule la mauvaise qualité de la version française (sa syntaxe hasardeuse, parfois incompréhensible, surtout vers la fin, et l'emploi du mot à la mode "judéophobie" à la place du terme correct antisémitisme) a tempéré mon enthousiasme.

Mon intérêt pour ce livre vint en premier pas son illustration de couverture :Le « St George et le dragon » d’Altdorfer .Puis par son titre et enfin par sa table des matières .C’est peu de dire que je ne fus pas déçu par la lecture de ce pavé (en bon soixantuittard j’aime les pavés) . C’est un essai sur ce que la nature véhicule comme mémoire humaine , ce que l’art ajoute au paysage naturel , mené comme un vagabondage érudit (ô combien) dans la mémoire de l’auteur et une subjectivité assumée. Les illustrations sont remarquables.Et que de trésors de réflexion et quel plaisir du langage !

Lorsque l’on est étudiant, on apprend déjà pas mal de choses sur l’histoire. Malgré tout, il y a encore tellement de ces choses que nous n’apprenons pas, en même temps, sauf si nous nous spécialisons dans l’histoire, nous n’avons pas non plus des heures de ce cours sur la semaine. Il y a forcément des choix à faire dans les cours que nous donnent les profs.



C’est pour cette raison, que j’aime ce genre de livre, ou encore les documentaires. La plupart du temps, j’y apprend vraiment pas mal de choses en plus de ce que je sais déjà.



Lorsque j’ai vu ce livre sur le site NetGalley, je ne pouvais pas passer à côté, et ce malgré son nombre de pages, et la pile monstrueuse de livres que j’ai à lire.



Quand je vois toutes ces nouvelles choses que j’ai apprises grâce à ce livre, et quand je vois que ce n’est que le premier tome, je me dis qu’au final c’est ce genre de livre que nous devrions avoir dans les écoles et non les manuels où au final il n’y a que le strict minimum.



Vous aimez apprendre de nouvelles choses ? Ce livre est fait pour vous🙂



L’auteur est professeur d’histoire et franchement en lisant son livre, on voit qu’il maîtrise le sujet. Je serait curieuse d’assister à un de ses cours, c’est le genre de prof que j’aurais vraiment aimé avoir lorsque j’étais étudiante. Bon, ok, il est un peu loin (université de Columbia), mais cela me plairait de faire le voyage juste pour son cours🙂