Oublie-t-on que l’hypothèse de l’héliocentrisme, le
mouvement de la Terre autour du Soleil, fut émise près
de trois cents ans avant notre ère par Aristarque de
Samos ? Dix-huit siècles avant Copernic ! Et ce serait
avoir une bien piètre opinion des esprits éclairés du
Moyen Âge que de les imaginer à ce point ignorants de
leur environnement. Voyageurs et hommes de science
n’ont pas attendu Magellan pour avoir confirmation de
la rotondité de la Terre !
Revenons un instant à la photographie. Son développement n'a certes pas condamné la peinture mais notre rapport au paysage n'en est pas sorti indemne, surtout depuis l'avènement du numérique. La facilité à capter ce que l'on a sous les yeux pour le stocker et le retrouver parfois plus tard semble avoir rendu facultatif le regard lui-même ; à quoi bon s'attarder en contemplation quand un clic suffit pour s'approprier le panorama ?
Peintres et dessinateurs ne sont pas forcément doués pour évoluer dans la nature, mais ils rofitent au moins d'un atout essentiel dans cet exercice : l'habitude de regarder ce q'ils vont représenter. On peut crandre que l'usage compulsif de 'appareil photo ne donne un résultat inverse.
Je vous invite pour ma part à suivre dans ce livre une voie assez peu rectiligne. Il y sera question d’un savoir apparemment obsolète mais infiniment gratifiant, capable d’offrir des satisfactions inaccessibles par les seules routes numériques. La magie de l’orientation (étymologiquement, l’art de se situer par rapport à l’orient), c’est d’abord qu’elle donne de la saveur aux déplacements les plus anodins et incite à regarder autrement une nature dont on parle aujourd’hui davantage qu’on ne la connaît. Chercher son chemin, c’est avant tout renouer avec le plaisir d’observer, d’écouter, de sentir.
Cet ouvrage n’est pas à proprement parler un manuel d’orientation. Plutôt une porte d’entrée vers un monde oublié mais bien réel dans lequel les voyageurs n’ont pas besoin de prothèse électronique pour atteindre leur but. On y croisera des pèlerins, des scientifiques et des aventuriers,
ayant tous en commun la réalisation d’impressionnants périples avec des moyens dérisoires.
Rien de tel qu'un problème insoluble pour stimuler la créativité des chercheurs.
(p. 96)