Thrity N. Umrigar

Au milieu des cris, des appels et des bavardages incessants des gens qui l'entourent, elle croit entendre la voix grave et profonde du Pachtoune qui la réconforte, l'encourage et la presse de ne pas renoncer.
Sa voix lui parvient par-delà les montagnes et les années.

Elles marchent dans un silence total. Mais c'est un silence qui crie, qui hurle, qui est rempli de bruit - les battements précipités du coeur de Bhima, la terreur déchirante et griffue qui étouffe Maya, le raclement des pieds de Bhima qui fouaillent hargneusement le sable. À l'intérieur de ce silence, elles avancent côte à côte, redoutant de frôler ses contours, car rompre le barrage de ce silence reviendrait à laisser s'engouffrer les eaux de la colère, de la rage et de la fureur, permettant à la marée du passé récent - ce passé qu'elles ont ignoré, interrompu, assassiné - de remonter en grondant et de détruire leur fragile présent.
Mais le silence, de même que l'amour, ne dure pas éternellement.

" Betti, le passé reste toujours présent. On n'a donc pas à le faire revivre. Le passé est comme la peau de ta main - il était là hier et il est là aujourd'hui. Il ne va nulle part. Quand tu seras plus vieille, peut-être que tu comprendras mieux.
- Mais, mama, il y a un dicton anglais qui dit : il ne faut pas réveiller le chat qui dort. Ca ne rime à rien de réveiller un chat qui dort."

Le sage Afghan vendeur de ballons
Un homme qui ne toucherait ni n'embrasserait plus jamais le doux visage de ses propres enfants mettait des sourires sur le visages des enfants des autres. Comme un magicien, le Pathan avait appris comment transformer sa solitude en un chant. Comme un magicien, il avait appris comment utiliser de l'air ordinaire pour donner une forme à des morceaux de baudruche et en faire des objets de bonheur. Avec ses mains vides, il avait construit un monde.

Et une mère sans enfant n'est plus une mère, et si je ne suis pas une mère, je ne suis rien. Rien. Je suis pareille à du sucre dissous dans un verre d'eau. Ou plutôt, à du sel qui se fond dans les plats. Je suis ce sel. Sans mes enfants, je n'existe plus.

Elle se rappellerait que plaisir insouciant de Viraf avait fait dérailler la vie de Maya, avait bloqué le chemin qui pouvait faire sortir la jeune fille du bidonville.
Ce que Serabai et elle-même avait construit ensemble, Viraf l'avait détruit. Les femmes créent, pense Bhima, les hommes détruisent. C'est l'ordre du monde.

Tu as vu comment je me sers d'un marteau pour planter un clou? Eh bien, eux m'utilisent comme un marteau pour obtenir ce qu'ils désirent. Je ne suis rien d'autre pour eux: un marteau. Et que se passe-t-il quand le manche d'un marteau se casse? On le jette et on en prend un autre. Ils se sont tout simplement servis de toi pour pouvoir se payer un marteau neuf, voilà tout.

Serabai , murmura-t-elle.Vous êtes bien plus savante que moi, vous avez de l'instruction et moi je suis illettrée. Mais écoutez-moi, bai : il ne faut plus accepter qu'il vous traite ainsi. (...) Vous essayez de cacher votre humiliation, bai, je le sais, pourtant ce n'est pas vous qui devez avoir honte, c'est lui.

Ne crois pas que l'alcool m'ait empêché de remarquer combien je t'ai rendue malheureuse - l'alcool est à la fois le baiser des anges et la malédiction du démon ; il peut cacher comme il peut faire voir.

pourtant le soulagement d'avoir la maison rien qu'à elle, son cœur bondissait dès que le téléphone sonnait. elle attendait que feroz, prenne acte de sa souffrance, qu il s'informe de l'état de son corps douloureux. cette fois, il n'y aurait pas de regrets. cette fois, le processus habituel, celui où au déchaînement de la violence succédaient des torrents de larmes, de paroles, de regrets, de mots tendres, de baisers et de promesses, de ne plus jamais recommencer, ne suivrait pas son cours.