Soucieux d'étonner le public plus que de séduire ses juges, il [Anthony Thomas] se plaisait à prononcer les termes d'archéologie qui pouvaient échapper à la foule et le faire passer pour un érudit. Quand on lui présentait les objets volés [...], il les prenait d'un geste sûr, habitué, il les regardait en connaisseur, et les rendait comme les ayant évalués, classés, jugés.
Il avouait tous ses vols, avec complaisance, avec un détachement mêlé de de fierté.
Son cabotinage alla jusqu'à passer la suspension - tandis que le jury délibérait sur son sort - à signer des cartes postales illustrées où figurait, près des châsses qu'il avait volées, son portrait.
Extrait d'un article paru à l'époque dans Le Moniteur du Puy de Dôme, le 4 décembre 1908.
[...]La plaidoirie de Me Planche retient cependant davantage l'intérêt des chroniqueurs, d'une part parce qu'il défend le principal accusé, mais aussi parce qu'il sait faire preuve d'humour. Ainsi fait-il observer que les crimes de son client n'ont nuit à personne :
"A qui a-t-il fait du mal ? A personne.
Qui a-t-il fait pleurer? Personne encore.
Il a volé le bon Dieu, mais le bon Dieu est si riche et si clément qu'il lui pardonnera."
[...]Ils s'intéressent également à une statue de la Vierge abritée dans l'église de Châteauneuf-les-Bains. A l'époque, la polémique fait rage entre le curé, désireux de la vendre, et le maire qui s'y refuse. Dufay, lisant les journaux qui rendent compte de l'affaire, aurait alors déclaré : "Pour les mettre d'accord, il faudrait l'enlever". Anthony Thomas s'y rend donc.
Pour la presse socialiste, l'Humanité en l’occurrence, cette affaire met quoi qu'il en soit en évidence l'existence d'une "bande internationale merveilleusement organisée" de gros antiquaires de Londres et de Paris, dont Antony Thomas n'est qu'un des agents dont "la séparation des Églises et de l’État avait considérablement grossi le chiffre des affaires" ...
A l'ouverture du procès de Limoges, un des quotidiens locaux mentionne la présence de 10 journalistes étrangers.
Nous avons pu identifier un certain nombre de journaux, provenant à minima de trois pays étrangers.
La Stampa, grand quotidien italien de Turin fondé en 1867, consacre pas moins de 16 articles à l'affaire Thomas, échelonnés du 16 octobre au 12 novembre 1907, c'est à dire jusqu'au lendemain de la reconstitution du vol ...
Dilettante, fainéant, touche-à-tout, cambrioleur, mais aussi ayant de l'entregent, homme à femmes, soucieux de sa réussite sociale, Anthony Thomas affiche une prestance certaine dans son habillement et ses manières d'être.
Antony Thomas, de son vrai nom Jean, est le 5 septembre 1878 dans une famille de gagne-petit, en pleine ascension sociale ...
"Limoges , ville noire. Telle s'impose à l'aube du XXème siècle la capitale limousine à la vue du voyageur, semblable à beaucoup de bassins industriels. Les masses imposantes des usines dominent des maisons basses et mal construites à la façade noircies par les particules charbonneuses que crachent jour et nuit les cheminées des fours à porcelaine