Avis sur Menel Ara à 00:14
De rage, elle envoya un coup de poing dans le mur. Le mur gagna, comme souvent.
S'il avait été humainement possible d'enflammer ses yeux, Pritchard l'aurait fait. Il aurait même volontiers ajouté de l'essence dessus, tant son regard transperça celui de Sam.
Mais ce qui était vraiment terrifiant chez lui, au-delà du pouvoir dont il jouissait et de la violence dont il était coutumier, c'était ses yeux. Des yeux noirs, profonds, comme maquillés. Des yeux capables d'arrêter un cœur. Des yeux qui auraient pu être les méchants d'une série de films d'horreur. Des yeux à faire miauler un ours polaire. Des yeux qui auraient intimidé celui de Sauron.
Tu veux réellement me faire croire à moi que si tous les riches sont en haut et tous les pauvres en bas, c'est une espèce de loi naturelle ? Je vais te dire une chose : soit tu crois vraiment en ce principe, et dans ce cas tu es un crétin fini, soit tu tentes de me berner en bonne et due forme et là tu es une ordure.
— Et je suis supposée boire ça comment ? s'agaça-t-elle.
— Avec votre bouche, Madame.
Oui, peut-être disait-il vrai. Peut-être aussi que les policiers qui avaient rigolé sur son passage s'étaient subitement mis à penser à une vieille blague qu'ils venaient de comprendre. Peut-être aussi que les impôts seraient baissés dès le prochain mandat et peut-être aussi que ses ex voulaient vraiment rester amis. En vérité, elle n'en savait rien et ce n'était pas le plus important.
Aujourd'hui, Menel Ara était une ville coupée en deux, géographiquement et socialement. Un sentiment qui revenait à la vue de ces huit piliers et de cette extraordinaire galette. Chef-d'œuvre architectural. Monstruosité humaine.
Meyer présentait une expression similaire à celle qu'elle arborait en public. Sam ne put s'empêcher de se réjouir qu'une femme puissante comme elle puisse rester elle-même en toutes circonstances. Posée, calme, lisse...
- Oh, Mary, tu me fais chier, bordel ! A un moment, tes conseils à la con, tu peux te les foutre au cul !
Un courant d'air passa dans l'esprit de Sam. Le genre de gel de cerveau qui arrive quand on entend ses parents parler de sexe pour la première fois. Ou quand on voit un prêtre dans un strip-club. Ou quand on entend ses parents et un prêtre parler de sexe dans un strip club.
- Ah, cool ça.
Trois mots. Presque aussi bien que sa copine. Sam le rangea immédiatement dans la catégorie « Beau comme un dieu, mais con comme un croyant. »
Quelques Isidiens s'étaient mis en tête de développer du vin martien, d'abord pour des raisons pratiques qui éviteraient de devoir systématiquement payer une fortune pour l'importer de Terre, et ensuite parce que, du vin martien, c'est quand même très rigolo. D'autant plus rigolo que les fortunes dépensées pour créer un microclimat artificiel propre à la culture de la vigne dépassèrent rapidement et largement celles investies dans le transport de caisses de vin terrien.