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Citations de Volker Braun (27)


Volker Braun
L'homme secret



Ce n'est pas grand-chose, au fond, que mon existence
J'observe la stricte tenue muse et maniaque
Car si je laissais sortir les mots de mon sac
Tout le monde pourrait voir sur quelles braises je danse
C'est une imposture, je n'ai crainte de le dire.
Est-ce que je ne crée pas le monde chaque matin ?
Son corps nu est vautré sur mes draps de satin.
Mais à travers les steppes j'emporte mon désir
Aussi bien enfermé que ce tableau : Courbet
Clos par le gel, voici le château de Blonay.
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Ce vieux couillon aurait bien pu penser à sa retraite mais son mécanisme était trop bien huilé, on l'avait trop longtemps mis sur le qui-vive pour qu'il puisse se calmer. Il avait passé toute sa vie au travail, ça avait été son besoin vital premier et maintenant qu'on le lui enlevait, ça devenait vraie rage et possession. (p. 23)
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I. JARDINS D'AGRÉMENT, PRUSSE
(1960-1989)


DERNIÈRE RÉSIDENCE SUR TERRE
(pour Pablo Neruda)

À son enclos de feuillage dans l'obscurité
Des pieuvres se cramponnent, dégringolant des tanks
Accroupies sur ses marches, suant de bêtise
Les blattes secrètes de l'ordre public
Aux câbles du téléphone, comme morve qui prolifère
Les oreillards de la milice, sous ses arbres
Les fusils pointés, attendent les cadavres
Immortels dans leur infamie, dans la peur hispanique :
Mais dans sa chambre encerclée le poète
Dit, plus sûrement que jamais, sa vie
En ses feux ultimes, la meurtrière vérité.

p.37
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Volker Braun
Les limes



Il y avait bien là un mur pour 17 millions
Il était solide et presque
Infranchissable. Une sinistre
Affaire qui fonctionnait. Si sévèrement
Gardée, incidents sanglants
On a pu les chiffrer. Renseignez-vous
Sur cette construction qui pointait vers l'avenir
Et nous accable
Par son simplisme. Elle fait encore jaser
Les peuples sédentaires.
Dans leurs cosses, les Écossais ! Les Allemands, les français !
Trop vite abattu
IL fut la bévue
D'un siècle inconscient
D'une confiance sans limite
dans le vivre ensemble. Comme si
Nous faisions face au néant, pareils
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2. Feuille topographique
IV
  
  
  
  
Nous fîmes route avec la canonnière
HYENE et la corvette CAROLA pour punir
Ces rebelles et de nos obus avons mis
Leurs huttes en feu. Et tous ces messieurs s’étant
Réfugiés dans la brousse, nous avons pris pied
Sur la côte et avons fait du petit bois de leurs bateaux,
Rien que grands canots tenant la mer, sculptés
Et peints, ce qui nous étonna. Ils étaient aussi
Nécessaires à leur vie que les plantations de palmiers
Et arbres à pain que nous dévastâmes
De semblable façon de telle sorte que ces
Sauvages n’aient plus rien pour vivre. La moitié
Estait déjà occise et les autres
Furent poussés à la mer. Voilà ce que j’ai vu.


/ traduit de l’allemand par Jean-Paul Barbe
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Me domine un être singulier
Qui me réjouit et me gourmande
Impossible de m'en délivrer
Depuis l'enfance il me commande
Ma liberté, mon étroitesse
Sous le pesant harnais s'agitent
Et j'accomplis donc ma détresse
En subissant ma réussite.
(Démons)
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II. LE MASSACRE DES ILLUSIONS
(1990-2000)


LA POÉSIE

Elle danse sur les tombes, avec grâce
Avec sa mémoire sauvage.
AH ! NOUS NE POUVONS RIEN RETENIR. À mon appel
Se lèvent les crevés, les oubliés
Avec leurs couteaux, leurs exigences. Amour
Éteint, colère froide, temps gâchés. Qu'est-ce
Que penser : nous sommes mortels
En face du GRAND INUTILE. Elle ose le penser
Souterrainement, là où tout vit.
Comment est-ce possible ? Pour faire danser l'état de choses

p.124
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II. LE MASSACRE DES ILLUSIONS
(1990-2000)


EN BOHÈME ET EN MORAVIE

J'y logeais en poèmes et mots ravis
Des blindés m'en chassèrent sans préavis
Me voici au sec, dans le gris de l'offre
Serrant dans mes mains le blindage des coffres.

(1968/1992)

p.102
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I. JARDINS D'AGRÉMENT, PRUSSE
(1960-1989)


TIRÉ DU SOMMEIL DOGMATIQUE

Qu'as-tu fait de ta nuit ? – Je me suis exercé
À l'attente. – De quoi ? – La connais-tu aussi
Cette souffrance, aimer l'inconnue ? –
L'action inconnue ? – Comment ? – De quoi parles-tu ? –
Les veines de ma chair étaient près d'exploser.
Comme je suis las de traverser la place Saint-Marc. –
Tu rêves, n'est-ce pas, tu rêves avec conséquence. –
Et dans les rues souffle la transparence.

p.65
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2. Feuille topographique
III
  
  
  
  
Nous avons vu les bateaux de fer. Le chef
Levinan a posé un bâton, entouré
De feuilles de palmes et de roseaux
En travers du chemin, pour qu’ils l’évitent
Tout comme les arbres qui nous sont
Sacrés. Mais plus rien n’était tabou pour eux.


/ traduit de l’allemand par Jean-Paul Barbe
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1. Introduction
  
  
  
  
Au début Dieu créa le ciel et la terre
Et la terre était sans forme et vide
Et les ténèbres régnaient sur la surface des eaux
(Joseph Haydn, La Création, n° 1)
Mais eux, empruntant le plus naturel
Des chemins, l’eau, venus de loin
Avec leurs longues pirogues, gagnèrent les îles
Et ils virent que cela était bien.


/ traduit de l’allemand par Jean-Paul Barbe
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THÉÂTRE DE VERDURE EN AUTOMNE


L'art est parti. La nature qui prend froid
Boucle la saison. Et tous les décors
Lui appartiennent, élimés de surcroît.
La brume entre en scène. Elle recourt encore
Aux vieux procédés du drame classique.
Vols de corneilles : des divas par douzaines.
Soleil fauve pour l'éclairage scénique.
Non qu'il rechigne aux ultimes travaux :
Le feuillage flamboie de toutes ses veines
Puis le premier givre réclame des bravos.
                            (Rheinsberg)

p.143
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ULTIMATUM À L'ÎLOT PERSIL


Quelques phrases dictées
À cet îlot sans défense... C'est quoi, ces traces ?
Du sel et des pieds indéfinis
Taillis, respiration impénétrable.
Falaises, ne relevant d'aucune puissance.
Et bancs de poissons tournant casaque.
Qu'y a-t-il à l'intérieur ? Déserts ? Mugissements
Traces de vie (les inspecteurs les trouveront).
Ces gestes nus et dissimulés, du pétrole en sommeil
Le désordre. Personne pour diriger la mer :
Saleté et entêtement, le séparatisme des sentiments.
Les patrouilles interceptent les bateaux qui coulent.
Que chuchote-t-on, un secret, YAKUZA, JACUZZI
Cela appelle des représailles.
Ces pensées, si mobiles, qui visent au plus simple
Un rivage à personne... Comment d'ailleurs
Peut-il rester là, étendu dans la mer remontée
Un blanc indépendant. Rends-toi, petite île
Laisse tomber tes réfugiés, tes chèvres chétives
Accepte l'ordre
Arrache ton persil
Et accueille les cavaliers blindés

p.131
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WALTER BENJAMIN DANS LES PYRÉNÉES


Extrait 4

À Port-Bou on ne passe pas. Mais nous les apatrides
Avons la dose mortelle
Voudriez-vous garder la sacoche — sur nous.


Sans doute pensa-t-il ne pas pouvoir faire une nouvelle
ascension. Au matin les douaniers ont trouvé le cadavre dans
mon texte. La construction suppose la destruction. La lourde
sacoche de cuir, échappée à la Gestapo, UNOS PAPELES MAS
DE CONTENIDO DESCONOCIDO, a été perdue. Trop rapide,
le trait final, monsieur, à votre vie. La vie, si je puis dire, porte
l'œuvre sur cette pente abrupte.
Dans chaque œuvre on trouve cet endroit où le vent frais nous
souffle au visage, comme l'aube qui vient.

p.62
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WALTER BENJAMIN DANS LES PYRÉNÉES


Extrait 3

Lutte, le moment critique :
Quand le statu quo risque de durer.
Squelette sous moi au-dessus de moi les vautours.
Plus courtes enjambées, pauses plus longues.
Ma patience me rend indépassable.
Hisser les voiles des concepts. Chère Madame,
Puis-je me servir ? Au sommet
Soudain comme prévu la violence

Du coup d'œil. Bleu profond des mers :
D'un seul coup j'en vois deux. Côtes de cinabre.
Sous les falaises, la liberté

...

p.62
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WALTER BENJAMIN DANS LES PYRÉNÉES


Extrait 2

Des champs où ne pousse que la folie.
Progressant, hache plantée en tête
Je n'ai rien à dire. À montrer seulement.
Dans le plus petit segment précisément découpé.
Sans regarder à gauche ou à droite vers
L'horreur

J'y arriverai en suivant la méthode.
La vigne ruisselle, dévale à la verticale
Pleine de grappes sombres sucrées presque mûres.
Le plus important, c'est la sacoche ! Le corps entre les ceps
Respiration difficile, le cœur


p.61
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WALTER BENJAMIN DANS LES PYRÉNÉES


Extrait 1

S'enfoncer calmement dans le mur de brouillard.
Les bras rament repliés mais régulièrement.
Selon les indications du papier au-dessus du précipice
L'explosif dans la sacoche
Le présent

Pas à pas, comme le hasard
Offre au pied un mince point d'appui
Dans le matériau. Chère Madame, le vrai risque
Serait de ne pas partir.
D'après la montre / une halte au bout de cinq lignes.


p.61
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II. LE MASSACRE DES ILLUSIONS
(1990-2000)


L'UTOPIE

Elle n'a rien de mieux à faire que rien
Occupée à survivre, au jour le jour
Fantôme au chômage surgi du futur
Chantant à Soho ! Couchée sur des roses ! Un rêve diurne
De la marche verticale au cordon ombilical
De la bière en boîte. LE PROGRÈS RÉSIDE
DANS LA CATASTROPHE. Il y a donc de l'espoir
Pour la lèpre. Une danse au matin
Avec l'âme du peuple, les supermarchés incendiés
Elle, la réprouvée, n'a rien d'autre à faire que du mieux.

p.118
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III. L'OPULENCE
(2001-2014)


L'OPULENCE

Été incandescent. Les branches craquent sous le poids des
 pommes
Le ver est en chaque trognon dans lequel on shoote.
Ainsi le pied du monde traverse les prés le matin
Et ton existence est enfouie dans les buissons.
Où est ton but ? Pas de but. Alors dis-moi le fond de l'affaire.
Je m'y enfonce. C'est comme de la boue dans ma bouche.

p.149
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III. L'OPULENCE
(2001-2014)


LES ÉCLAIRS HÉSITENT

Le nuage de l'oubli
Rattrape l'humanité
D'imposantes ténèbres
Sont passées. Le présent
Surgit dans la lumière crue
Les yeux fermés !

p.151
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